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NOUS ENTRERONS DANS LA CARRIERE
- du Vendredi 1 Octobre 2021 au Samedi 9 Octobre 2021
- Durée 04:00
- SALLE GIGNOUX au TNS STRASBOURG
Avec Saïd Ghanem, Pauline Haudepin, ,Neil-Adam Mohammedi, Mélody Pini,
Souleymane Sylla, Claire Toubin.....- La
nouvelle création de Blandine Savetier interroge le désir de révolution
dans un monde en crise. Comment vivons-nous des transitions historiques
qui nous dépassent, la tension entre le temps de l’histoire et celui de
l’individu? En s’appuyant sur de jeunes acteurs et actrices de
toutes origines, le roman Le Siècle des Lumières d’Alejo Carpentier, et
la vie de Jean-Baptiste Belley, premier député noir à la Convention,
elle confronte les aspirations à la liberté et l’égalité héritées de la
Révolution française, avec les désillusions sur le monde d’aujourd’hui.
Pour elle,
le théâtre est le lieu où une communauté institue sa confrontation avec l’Histoire. Face au risque d’effondrement, que faisons-nous de notre désir d’un monde différent ? - La scène est architecture de cartons cubiques empilés savamment, étagères, praticables et autres structures amovibles comme un terrain de jeu architectonique en devenir.C'est un cortège chantant qui fait irruption, descendant des gradins, hallebardes et trophées révolutionnaires au poing: une tête décapitée, une cocarde tricolore: on est déjà dans "le bain de sang" de ce qui sera révolution, terreur."Je décrète" la mort du père, la soumission et autres entraves à la liberté d'expression sera un joli leitmotiv pour introduire ce cahier de doléances aux flux et reflux incessants de revendications, de certitudes, d'engagement. Époque troublée et troublante restituée ici avec jovialité, entrain, allant, sans cesse réactivés par l'enthousiasme et la verve des neuf comédiens, galvanisés par leur jeunesse, leur sincérité.Les trois coups inauguraux pour fonder aussi l’existence du théâtre, l'endroit déjà désigné pour attester des situations sociales et économiques.La Convention et tous les régimes éphémères qui se relayeront font office de cible et "la constitution", fer de lance de la politique menée de bras de fer par un-une émule de Robespierre, Victor, le futur commissaire de la République!"Aux armes citoyens" sera le lieu de chants métissés rap, slam ou canon et unisson remixés pour l'occasion en chants toniques, encourageants ce petit cénacle pour vaincre et combattre l'esclavage! Bleu, blanc, rouge et noir pour cette fresque signée Blandine Savetier dont les contours avancent à grands pas dans un soulèvement, un "élevez-vous" à la Didi Huberman..Très convaincant: danse du vin fraternelle et enjouée, costumes chamarrés ou à l'occasion campant des personnages typés, historiques pour habiller et vêtir discours et prises de paroles.Danton, St Just, Robespierre, les Pieds Nickelés de l'Histoire sérieuse, frondeuse, peuplée de scélérats, de tricheurs, conspirateurs zélés.Saint Domingue comme plaque tournante du récit, des rebondissements, de l'action qui ne cesse d'avancer dans des décors qui se déstructurent à l'envi: tribune, bateau et figures de proues emballées dans le tissus des drapeaux français, de la nation, du slogan "liberté, égalité, fraternité qui prend ici tout son sens. L'enthousiasme et la jeunesse des comédiens pour engagement suprême, innocent, naïf parfois, hormis ce Victor -excellente Claire Toubin- autoritaire et ambitieux...Des duos filmés aussi pour prendre un peu de recul dans cette actualité brulante de révolution des astres qui fait trois petits tours et puis revient, éternel retour!Des pics épiques comme salves ou hallebardes, un rythme soutenu quatre heurs durant pour aligner des performances d'acteurs déjà bien rodés au plateau.Fraternelle icône de la camaraderie ou de la trahison; le duo entre Esteban le cubain et son complice "espagnol" franc maçon est touchant, les monologues très convaincants de tyrans, de patriotes....Belle rhétorique, pour ce "united colors of révolution" qui donne à réfléchir sans infléchir ni fléchir, tête haute, coupée certes par l'invention de la guillotine!Un chant de l'abolition de l'esclavage comme apogée, au zénith de cette confession sans concession sur la révolution "française" hors les murs....Scandée, balancée, swinguant comme une mélodie de gospel song! Le décor signé du scénographe Simon Restino gronde sous les salves des batailles alors qu'une sirène ampoulée de vert luisant s'agite et séduit la mer des Caraïbes...La danse de réjouissance ponctue judicieusement le spectacle, chorégraphies sautillantes, rebondissantes où chacun va de son inspiration. Les comédiens, tous arborant enthousiasme, spontanéité et profondeur, touchant à une thématique trop souvent occultée: la révolte, le soulèvement dans la dureté implacable du politique, incorruptible bible des mouvements sociaux: un bel hommage à des "inconnus" JB Balley et autres acteurs virulents et philosophes de cette époque troublée...Albert Soboul ne renierait pas cette fresque , ni Mathiez !
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