vendredi 14 février 2014

"Clairière rouge":sang pour sang dense! Tableaux de chassés-croisés!


Par la Cie Dégadézo avec Alice Godfroy, Jules Beckman, Antje Schur et Régine Westenhoeffer, conception, chorégraphie, scénographie Antje Schur et Régine Westenhoeffer.
Clairière rouge © Compagnie Dégadézo Clairière rouge

 La compagnie Dégadézo emmène le spectateur vers une clairière qui n'est pas aussi calme qu'on pourrait croire. Comme le titre l'indique, elle est rouge : rouge comme la passion mais surtout rouge comme le sang. Les interprètes d'horizons différents (danseurs, acteurs, musiciens, plasticiens ou vidéastes) font de cette clairière le lieu d'une chasse à courre. Un tableau de chasse qui se termine en véritable voyage initiatique.
La compagnie Dégadézo présente ce spectacle en Alsace à Strasbourg jusqu'au 15 Février au TJP en coproduction avec Pôle Sud.
Tout démarre par le son du cor dans une atmosphère glaciale hivernale, suggérée par un long drap blanc, froissé au sol: plaine de neige?
D'étranges bestioles vont apparaitre et disparaitre, comme autant de futures victimes d'une chasse à courre qui démarre dans le lointain. Comique, burlesque des poses, arrêts sur image se succèdent dans un vrombissement sonore et musical très adapté à cette situation de danger, de tension, d'apnée.
Que va-t-il bien se passer pour ces quatre animaux à la gestuelle ralentie, mimétisme un peu appuyé d'une démarche animalière.On cadre le tout comme des tableaux de chasse, ces "cadres" suspendus dans tout bon foyer et salle à manger du dimanche!
Les saynètes se succèdent sur fond d'une très belle tenture sorte de kelsch alsacien kitsch, comme une broderie rouge traçant des pistes de  pas sur la neige.
Un cadavre, carcasse d'animal sacrifié est suspendu comme un tableau de Soutine évoquant la boucherie de la chasse et sa cupidité, sa vanité.Une table, telle  un autel de sacrifice sert de support à un futur festin de chasse.
Une biche en plastique rappelle l'imagerie d'Epinal, très populaire, liée aux biches et chevreuils dans les sous-bois.

Un géant de carnaval, façon photographie des Wilderman de Charles Fréger, se dresse,menaçant avec son pic, ses falbalas d'étoffes bigarrées.
Sommes nous alors au carnaval,plutôt qu'à la chasse?
"Gibier de passage" ou "scènes de chasse en Bavière"?
Les univers se perturbent, se confondent dans une jubilation chaleureuse, mais pas toujours cohérente.
On perd "le fil rouge" d'Ariane dans ce dédale de propositions séduisantes, pas toujours convaincantes.
Des costumes drôles agrémentent la scène finale;guignols, caricatures, faciès carnavalesques....Poupées affublées de seins, de sexe grotesques: c'est vivant, décapant, décalé!
Du très beau travail de costumes signés Antje Schur, doublé par l'univers sonore très riche de Xavier Fassion.
Belle séquence où deux comédiennes chantent un air populaire en déliant les viscères d'un animal mortellement blessé.
Tas de tripes rouges, qui se déroule comme un long fleuve de sang, se détricote pour refaire sans doute un oripeau de peau, de chair à dévorer.
Sang pour sang, made in "sous-bois",blanc sur rouge, rien ne bouge, rouge sur blanc, tout fout le camp!
"Clairière rouge" a le mérite de nous faire voyager dans l'animalité de nos comportements, le ridicule et le grotesque de l'univers du chasseur à l'affût de tout ce qui "bouge", donc qui danserait...
Feu de tout bois de cerf, pied de biche aux abois, cette pièce demeure séduisante et mériterait un rythme plus soutenu:on lui souhaite un déploiement, une vie tonitruante, comme un tableau de R.E. Waydelich: "Help", il y a danger dans l'air champêtre!Que résonne le son des corps dans les forêts de nos fantasmes!
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jeudi 13 février 2014

"La belle et la bête":"gans sey-doux"!




Un riche marchand vit paisiblement auprès des siens, jouissant de sa fortune. Mais ses navires sombrent au cours d'une tempête, entraînant ses biens au fond de l'océan. Ruiné, il se réfugie à la campagne avec ses six enfants, parmi lesquels Belle, sa fille préférée. Au cours d'un éprouvant voyage, il se retrouve dans un royaume magique, sur lequel règne une mystérieuse Bête. Cueillant une rose pour Belle, il s'attire les foudres du maître des lieux : afin de lever la malédiction et d'épargner sa famille, Belle est forcée d'aller vivre auprès de la Bête. Tous les soirs, Belle et la Bête se retrouvent à l'heure du dîner. Peu à peu, ils apprennent à se connaître et s'apprivoisent mutuellement..
.Une fois de plus,c'est la danse, le nœud de l'intrigue:pour sauver sa famille,la belle négocie une danse auprès du monstre!Jolie scène de bal, bien filmée où les visages défilent, alors que le décor reste statique et l'inverse un peu après!
Jolie danse baroque également dans cet univers de palais richisime!
Dusollier et Seydoux s'en sortent très bien sous la houlette de Christophe Gans!

"Abus de faiblesse" de Breillat: Isabelle Huppert démentelée!




Le dernier Breillat est sidérant::deux heures avec un sujet extra light servi par une comédienne métamorphosée: Huppert en hemiplégique, le corps soudé par la paralysie,les membres tétanisés:quelle simulation extrêmement juste, jamais forcée!
A coup sur, elle ne peut pas "danser"!
Un travail sur le corps remarquable, qui fait contrepoint au corps canonique de son partenaire, Kool Shen!
Victime d’une hémorragie cérébrale, Maud, cinéaste, se réveille un matin dans un corps à moitié mort qui la laisse hémiplégique, face à une solitude inéluctable.
Alitée mais déterminée à poursuivre son projet de film, elle découvre Vilko, arnaqueur de célébrités, en regardant un talk-show télévisé.
Son arrogance crève l’écran avec superbe : Maud le veut pour son prochain film.
Ils se rencontrent. Il ne la quitte plus. Elle aussi, il l’escroque et lui emprunte des sommes astronomiques. Il lui prend tout mais lui donne une gaieté et une sorte de chaleur familiale.
Ce film raconte l’abus de faiblesse dont Maud est victime.