lundi 6 octobre 2014

"Lulu-A Murder Ballad":canailles!

On s'encanaille à Musica!
Comme une farce grotesque très inspirée!
Avec Martyn Jacques (voix, piano, accordéon), Adrian Stout (contrebasse, thérémine, scie musicale, chœur), Mike Pickering (percussion) et Laura Caldow (danseuse) dans une mise en scène de Mark Holthusen.
Dans un univers entre l'expressionnisme des années 30 et le music hall anglais, les Tiger Lillies racontent l'histoire ambiguë de Lulu - A Murder Ballad : à la fois victime expiatoire et complice involontaire de sa plongée en enfer.
Voici un spectacle ébouriffant avec des effets de décors bluffants: des toiles tendues réfléchissent les images vidéo projetées sur trois niveaux de lecture optique.
Décors d’intérieurs kitsch, frises autour du cadre de scène, cadres qui s'enchevêtrent selon les scènes...C'est magique et trompe l’œil à souhait comme chez Pierick Sorin! Ou les architectures tectoniques à la Frank O Gerhry!
La danseuse incarnant Lulu s'y glisse, s'y confond, apparait, disparait à l'envie dans toutes sortes de perspectives proches ou lointaines
Images de cartes postales glamour surannées, de souvenirs sortis de boites de Pandore, cabinet de curiosité étrange!
Les gestes y sont langoureux, sensuels en osmose avec le personnage de Lulu évoqués en 18 saynètes chantées ravageusement par Martyn Jacques à l'accordéon, au piano: belle ambiance des années folles, charleston à l'appui, atmosphère inquiétante et obscure comme sur le boulevard du crime!
La ville est évoquée en images, ruelles et coupe-gorge....Clownesque aussi , l'atmosphère caricaturale d'une époque où l'expressionnisme force les traits, découpe les cadres, noircit les angles comme une lithographie
The Tiger Lillies
Et voici que Lulu danse à la Louise Brooks contemporaine, pétrie d'une autre tectique mais tout aussi convaincante: belle prestation sensuelle et érotique de Laura Caldow, vêtue d'artours séduisants, dévoilant un dos presque parfait!
Depuis maintenant vingt-cinq ans, les Tiger Lillies explorent – à mi-chemin entre l’expressionnisme des années 30 et le music hall anglais – leurs thèmes de prédilection : bas-fonds, misère, addiction et prostitution magnifique… sur un mode volontiers provocateur et blasphématoire. Avec son instrumentation faussement dérisoire (scie musicale, thérémine, accordéon, percussion, contrebasse…) et la voix de haute-contre incomparable de Martyn Jacques, le groupe londonien parcourt le monde et multiplie les collaborations excentriques.
Que les Tiger Lillies reprennent à leur compte le tragique parcours de Lulu revêt donc une sorte d’évidence. Mis en scène par le photographe et plasticien américain Mark Holthusen – dont la technique unique combine ingéniosité numérique et imagination débordante – ce tour de chant théâtral puise aux vers écrits par Frank Wedekind. Laura Caldow, danseuse formée à la Central School of Ballet et au Merce Cunningham Studio, incarne l’ambiguïté de cette Lulu à la fois victime expiatoire et complice involontaire de sa plongée en enfer.
Commande de l’Opera North Projects, le spectacle a reçu un accueil unanime à sa création en janvier dernier. Selon la critique du Guardian, « il vous place dans une situation aussi inconfortable que l’enfer, mais jamais vous n’en détournez votre regard fasciné. »

Saint-Laurent de Bonello: quelques beaux gestes....

A part le jeu corporel très raffiné de Gaspard Ulliel, et le poids des tissus et la souplesse des robes qui évoqueraient la danse, RAS dans ce film ampoulé...

Epiphanies dominicales à Musica! Neuburger et Brooks résuscitée!

On croit rêver ce dimanche matin, 11H heure dominicale de la messe!
Apparition, vision, hallucination? Tout est possible à Musica  il suffit de le croire!
C'est le démiurge pianiste Jean Frédéric Neuburger qui officie ce matin.
Au programme comme prêche: du contemporain avec Michael Jarell et ses "Etudes pour piano" de 2011, Yves Chauris avec "Sonate pour piano", Christian Lauba avec son "Alberti": pour ces "bien vivants là", une occasion unique d'écouter leur musique interprétée avec fougue, passion, doigté et musicalité hors du commun
Pour la "première apparition" de pianiste au festival, quel régal, quelle découverte!
Son programme se complète par trois œuvres de Litz, des danses bien sûr!
"Méphisto polka", "Bagatelle sans tonalité" et en bis "une danse macabre espagnole"!!!!
Rythme, appuis, caresses sur les touches font un effet impressionnant de présence de pondération; de l'aplomb, du génie dans les doigts qui parcourent fébrilement les touches.
Une énergie hors pair sans "pianissimo" avec ce "qui va piano va sano", parfaite discipline, rigueur, exigence féroce pour cet être magicien, prestidigitateur de l'instrument.
De l'émotion aussi, pas que de la performance et virtuosité!
On est en totale empathie et à la fin du concert presque autant épuisé que lui par la concentration qu'exige l'écoute de son concert!

Louise Brooks, danseuse, charmeuse, musicienne du geste!

Autre "apparition" virtuelle celle ci: Louise Brooks ressuscitée par la pellicule lors du ciné concert à l'UGC: "Loulou" de Pabst, orchestré en direct par l'ensemble Kontraste sur la musique de Peer Raben de 1997
Une version intégrale du chef d’œuvre de Pabst qui consacra Louise Brook comme la comédienne la plus novatrice de son époque: celle du cinéma muet, transcendé par son jeu corporel: celui d'une ex danseuse de chez Ruth Saint Denis!
Les corps expriment ici toute la gamme de la psychologie des personnages: on quitte l’expressionnisme cinématographique  allemand pour gagner en danse d'expression à la Wigman!
Shcon y meurt comme le cygne noir, s'écroulant à terre comme le cygne de Saint Sens .
Des leitmotivs connus surgissent de la musique et le l'écran
La danse y est omniprésente tant les corps dans ce film "muet" sont évocateurs!
La musique épouse, précède, anticipe les gestes, fabrique des univers et atmosphères inouïs à ce film et l'ambiance plus de deux heures durant est renversante.Suspens haletant, sensualité débridée, action, verve et fugacité des images- mouvements- sons...Frissons!
Scintillement et brillance du noir et blanc pour mieux magnifier la beauté et la singularité des regards, des attitudes d'abandon, à la renverse de la danseuse éternelle que sera Louise Brooks...
Un documentaire édifiant "Looking for Lulu" de Hugh Munro Neely de 1998 exposait à la suite de la projection, la vie et l’œuvre de cette femme rebelle à souhait, à son corps défendant!
La voir danser chez la Denishaw est un régal et son interview, femme alerte, vieillissante est sans égal.
On comprend pourquoi personne n'a résisté à son charme, sa volonté sa pugnacité à faire de son métier un art sans concession: comédienne danseuse par passion et obligation de se révéler au monde!

Un dimanche peu ordinaire avec un homme et une femme d'exception!On aurait souhaité qu"ils se rencontrent!!!!