vendredi 25 septembre 2015
Wilhem Latchoumia et le piano : félin pour l'autre : un maître-queux au piano !
Wilhem Latchoumia fait corps avec son instrument, on dirait qu'il ont "poussés" ensemble, grandis comme deux végétaux en osmose, greffe réussie pour créer un hybride la musique: l'homme piano, celui sur lequel "on ne tirera pas", celui dont "la groupie du pianiste" respecte la personnalité, la liberté.
Un concert de plus pour cet interprète à l'allure altière et décontractée, tout de noir vêtu, stricte et ondulant en même temps laissant sourdre une musicalité toute physique, à la ville comme à la scène.
De Jonathan Harvey et son "Tombeau de Messian" 1994, il fait un hommage discret au maître du "protospectralisme", lumières sonores à l'appui, en résonance avec des sons électroacoustiques.
Gérard Pesson lui sied à merveille dans son "En haut du mat" de 2009?, comme une chanson de marin, en partance, référence à Wagner qui tisse les échos de ce récital, entre moderne et contemporain
Richard Wagner comme compagnon, inspirateur de la musique d'aujourd'hui avec comme choix "Isoldens Liebestod" et "Elegie en la bémol majeur", pièces courtes, romantiques, dont l'écoute dans le contexte du festival Musica prend un sens particulier: tisser ponts et passerelles, franchir les obstacles de l'incompréhension, des barrages concernant la "musique savante" et celle dont nos oreilles sont plus habituées à la confrontation
Latchoumia, félin, habile et magistral interprète va de l'un à l'autre se jouant de difficultés invisibles, inouï dans la passion et la symbiose qui s'oère entre ce piano magique et son merlin l'enchanteur.
On retrouve le pianiste auprès de l'Ensemble Linéa pour la création mondiale de Raphael Cendo, "Corps". En miroir d'une pièce emblématique de Helmut Lachenmann, "Mouvement" de 1982
Une oeuvre tétanisante, qui évoque la rigidité, la pétrification des corps à l'agonie, cette raideur après le dernier soupir qui hante les corps.Gestes et sons magnifiés par le spectacle de l'Ensemble devant la pléthore d'instruments percussifs sur le plateau, comme un immense "piano" préparé pour un festin par un grand chef aux fourneaux!
Et pour "Corps" Latchoumia, mitaines aux poignets, ganté de noir lui aussi au "piano" en maitre-queux, divin instigateur de l'oeuvre , magique facteur de sons, de fureur, de silence ou d'envolées fébriles qui se perdent dans un vacarme étonnant, envahissant
Récital, mené de main , de baguette de maitre par Jean-Philippe Wurtz, aux aguets, à l’affût de toutes ces embûches, sobre passeur, vecteur de la musique qui s'invente pour les interprètes d'aujourd'hui, virtuoses de tous leurs"corps en mouvement" indispensable outil, instrument premier de la médiation des sons !
jeudi 24 septembre 2015
Music'ARTE hommage à Arvo Pärt : faire tintinnabuler la lumière !¨
"Tintinnabuler", tout sauf l'acceptation dérisoire et simpliste de frapper brièvement sur une cloche aux yeux de Arvo Part!
C'est pour ce maestro de la lenteur et du temps qui s'étire, une façon de faire écho, de faire se répercuter la musique en autant de diffraction, de résonance, de prolongation du son jusqu'à sa perte, sa disparition inaudible, imperceptible........Réverbération, rémanence de ce qui n'est pas une "note" mais un son qui prend vit et sens au sein d'un rythme
C'est dans un édifiant "documentaire de création" sur ce compositeur, le plus joué sur la planète que l'on peut apprendre, dénicher, s'informer des usages, pratiques et mode de fabrication de la musique planante d'un homme dont la langue, l'estonien, flotte et plane, juste et lumineuse, à déguster comme scruter son visage de vieil homme recueilli, modeste figure de l'histoire de la grande musique de notre temps
Signé par Gunter Attel "Arvo Part, Robert Wilson-Le Paradis perdu" dévoile la "genèse" de la rencontre entre deux géants, deux démiurges de l'art vivant : le metteur en scène Bob Wilson et le compositeur.
Rencontre fertile qui se cherche un alibi, à travers un respect, une complicité qui va en s'apprivoisant lentement, surement
Car les deux maîtres, animés d'un profond respect font faire jaillir un spectacle, celui de la lumière, celle qui anime l'oeuvre de Part, comme une sculpture des sons, comme la peintures de paysages oniriques, spirituels, emprunts de cérémonie
Adam est le "héros" de cet opéra singulier dont on découvre quelques secrets de fabrication: marcher lentement, avancer linéaire, se déplacer comme dans une chorégraphie, ode à la lenteur, hommage au "ralenti" de la vie , très "zen" attitude qui conduit à l'élévation, à la lévitation qu'engendre souvent la musique spatiale de Part
Le tournage de l'oeuvre en question "Adam's Passion" par Andy Sommer restitue la mise en scène très particulière de Bob Wilson: plateau quasi nu, une branche posée au bord d'un proscenium qui s'évade dans le public, long podium où les personnage, en somnambules, de blanc vêtus vont dessiner leur destinée : la perte ou la rémission du péché originel, dont seul Dieu semble être l'auteur
Tout y est pesant et alourdi, marqué, souligné comme si "festina lente", hâtes toi lentement ne pouvait donner lieu qu'à l'immobilité, et infime "petit bougé" d'Alwin Nikolais.....
Comment réussir à momifier, enlaidir une Lucinda Childs, en fantôme vieillissant, les traits tirés, livide spectre alors qu'un temps la collaboration Wilson/ Childs donnait naissance à "Einstein on the beach" ? Lourdeur des costumes, personnages en bibendum ne sachant tournoyer, lumières fracassantes pour trancher dans la morne ambiance vaporeuse de fumigènes en brouillard constant.......Briques anecdotiques, kalachnikovs en carton pâte,, shorts et bretelles des enfants sortis droits de "Jeux Interdits"...Sans parler des sous-titres jaunes flaschis qui tranchent dans l'image sombre, noire, parfois scintillante.Adam avance, magnifié par des contrastes lumineux entre bleu profond et noir scintillant, dessine les contours d'un théâtre d'ombres nettes, tranchées.
Est-ce cela la musique de Part qui d'ailleurs sur la brèche toujours,pourrait basculer d'un instant à l'autre dans le "Jean Michel Jarre" de la musique savante?
Quant au film, tout se lit et se voit: raccords, effets de Luma, certes pour ne pas modifier le rythme et l'atmosphère mystique de l'oeuvre, mais alors à quoi bon revendiquer autre chose qu'un plan fixe, comme le suggère Arvo Part !!!!
Alors que le Tallin Chamber Orchestra d'Estonie et les choeurs de l'Estonian Philarmonic Chamber Choir renden magistrale, une oeuvre lumineuse, profonde dans ce décor symbolique de Hangar à sous-marins soviétiques, antre d'un passé soviétique pas encore effacé.
Soirée en partenariat avec ARTE à l'UGC Cité Ciné
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