samedi 30 septembre 2017

Minguet Quartett et Hans Peter Maintz à Musica


Un concert de musique de chambre d'une rare virtuosité.
Empruntant son nom au philosophe espagnol Pablo Minguet y Yrol, auteur au xviiie siècle de nombreux traités de magie, de cuisine, de danse ou de musique, le Quatuor Minguet est invité pour la première fois à Musica. Il fait entendre trois quatuors de Wolfgang Rihm, de Toshio Hosokawa (qui fut comme Rihm élève de Klaus Huber) et de Jörg Widmann (élève de Rihm).
"Geste zu Vedova" de Rihm nous précipite dans une verve musicale, allègre, furieuse, dans une virulence ascensionnelle décoiffante. Vibrations, frottements des cordes, tension extrême sourdent, en alerte, sur le qui-vive, en haleine,toujours.Du suspens aussi, des hachures brèves, dissonantes sur un ton sec en répétition dans des scansions asphyxiantes: c'est de la haute voltige technique : des juxtapositions et additions de sections musicales s'empilent en couches et strates et l'on dévoile ce palimpseste avec admiration. Un long silence final, comme retour au calme....
"Blossoming" de Toshio Hosokawa, se révèle ensuite comme une pause, lent mouvement ,tenues en ricochets comme des ondes qui se répandent, vagues légères d'une marée montante.Les archets glissent, bruissent dans d'infimes touches musicales: une agitation fébrile s'empare d'eux, volatile, volutes et contrastes futiles, envolées légères et diaphanes, bordées des graves du violoncelle: au final, le son meurt et sommeille, réparateur et salvateur.
"Jagdquartett" de Jörg Widmann vient perturber l'ambiance sereine du concert:Cris alertes des musiciens et tonalités folkloriques de références pour démarrer en trombe une chevauchée fantastique pleine d'humour et de recul.Rythmes sous-jacents de cavalerie endiablée, dansante, tournoyante, très tonique en sarabande échevelée.Sautillants, alertes relevés, cette redoute, effrénée, chevauchée très spatiale et visuelle, enchante, entraînante et vive évocation de galops.
Cocher furieux aux commandes, emballé par le rythme, extrêmement virtuose, tel une performance: le pincé des cordes, monte en ascension, jusqu'à l'épuisement!Les percussions des archets sur le bois, corps des instruments que l'on cravache, rappent, ça crisse, gronde et grince: un cri de tuerie au final après ces salves met fin, hallali de cette curée sans merci!
" Interprète des "Trois Strophes sur le nom de Sacher" de Dutilleux, le violoncelliste Jens Peter Maintz  rejoint le quatuor à cordes pour l’exécution d’un quintette de Rihm. Un solo brillant, bref avec un jeu d'archet pincé, frotté, glissé très subtil.Des graves voluptueux, lyriques comme sortis d'une harpe, s'envolent, en infime envolées et tenues périlleuses: sombre univers qui se conclut en piqués légers, suspendus.
"Epilog" de Rihm pour épilogue du récital, pour clore cette prestation virtuose.
Un mouvement lent, langoureux, savoureux, des étirements de sons très doux, feutrés: la richesses de retenues des sons qui s'étirent, et s'éveille, fait son effet singulier de détente, de recueillement.
Pas à pas, cette lente montée, crescendo dionysiaque, monte au zénith, en catharsis, solide et surprenante oeuvre architecturée.la fulgurance des cordes en contrepoint, lancinantes sirènes, alarmes, dans une fouge déchaînée, se retient puis déferle. Libérée.l'ambiance, l'univers, l'atmosphère narrative, jouée par les instruments en font autant de personnages bien vivants: corps résonnants de toute leur caisse de bois, cage thoracique, poumons charnels édifiants.
A la Salle de la Bourse, écrin des petites formes, l'émotion bat son plein devant tant de virtuosité d'interprétation et d'engagement physique de la part de ce quatuor à cinq feuilles: que du bonheur!

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vendredi 29 septembre 2017

S'envoyer en l'air !




"Exil": rencontres fertiles et généreuse moissons entre jeunes générations et artistes confirmés!


Que deviennent ces milliers de destins chaotiques, souvent anonymes – ou du moins privés d’identité, d’humanité ?
Ce spectacle où la scène se révèle, jonchée de loques de papier ou tissus blancs comme d'immense iceberg à la dérive, débâcle du monde cruel de l'exil...Un groupe d'adolescent à la recherche de la vérité sur les atrocités du monde des adultes, c'est ainsi que l'on imagine ce voyage, errance au long cour d'une ode à l'humanité; Belle et généreuse prestation de ces jeunes artistes en herbe, soudés par une sincère et vive implication dans ce monde absurde.Mise en scène de Sarah Koné du groupe "Sans père"et interprétation majestueuse des deux artistes, au piano, Laurent Cabasso et bien sur au violoncelle la prodige Sonia Wieder Atherton, engagée aux côtés des causes et des publics singuliers
Une façon de partager son art à nulle autre artiste égalée! 
Les musiques de ce nouveau spectacle de Sonia Wieder-Atherton (Bach, Ustvolskaya, Bartók, Purcell) dialoguent avec les témoignages des exilés du monde recueillis par Wei Zhung, Jean Hatzfeld, Atiq Rahimi, Chahla Chafiq...A la Cité de la Musique et de la Danse ce soir là, Musica conviait à une réflexion profonde et sonore ur les déplacements, l'exil, les migrants....et nous!


« De tous temps, en tous lieux, des peuples oppressés ont fui.
Poussés par la guerre, par la famine, par l’extrémisme, par la folie meurtrière des hommes.
Qu’ils soient chassés, déplacés, emmenés, arrachés à leurs vies.
Qu’ils viennent d’Asie, d’Afrique, d’Europe ou des Amériques.

Un spectacle où, la scène jonchée de scories blanches, papiers mâchés par le temps, débacle
Qu’ils semblent rescapés de l’Histoire ou écorché vifs par notre actualité.
Ils sont revenus, ils ont dit, ils ont écrit. »