jeudi 7 septembre 2023

"Le Ring sans paroles" ou sans voix : trahison envers Wagner ou hommage à Liszt ?

 


Pour inaugurer la saison, Aziz Shokhakimov réunit deux compositeurs très liés l’un à l’autre : en effet, Wagner épousa Cosima, la fille de Liszt. Quant à leurs œuvres, elles partagent une certaine saveur harmonique, un attachement aux couleurs instrumentales et le goût de la grande forme continue. C’est ainsi que le Concerto pour piano n°2 de Liszt est conçu d’un seul tenant, tel un vaste poème symphonique, cependant que Le Ring sans paroles, comme son nom l’indique, propose un habile assemblage des principaux thèmes et moments symphoniques des quatre opéras formant L’Anneau du Nibelung (L’Or du Rhin, La Walkyrie, Siegfried et Le Crépuscule des dieux), brillant résumé conçu par le chef Lorin Maazel en 1987.

Franz Liszt
Concerto pour piano n°2 en la majeur


Richard Wagner
Le Ring sans paroles, version de Lorin Maazel

Salle comble pour la rentrée de l'Orchestre philharmonique de Strasbourg.....

Distribution Aziz SHOKHAKIMOV direction, Kirill GERSTEIN piano 
Au PMC le 7 Septembre 
 

vendredi 21 juillet 2023

"Les Hivernales" dans le Festival Off d'Avignon 2023: On (y) danse aussi l'été : un bon cru, un voyage inédit au coeur de la création contemporaine, hybride en diable !

 


Aux Hivernales - CDCN d'Avignon
10 ─ 20 juillet (relâche le 15)


10 h : "Clashes Licking" de Catol Teixeira (à partir du 11)

Habité par les fantômes de sa mémoire, du Brésil ou d’une histoire de la danse, autant que par la figure du Faune de Nijinski, Catol Teixeira propose une danse chargée comme une caisse de résonance de souvenirs aussi doux que traumatiques. Avec toute son étrangeté, Catol Teixeira cherche un chemin vers le terrain mystérieux qu’est la mémoire portée par le corps, objet et sujet, tout en se confrontant aux corps des autres, prêt à accueillir leur regard et à le dépasser. Catol envoie valser les normes de beauté, d’identité et de contrôle pour laisser place à la Danse.

Voltige comme dans la chanson de Bashung "Madame rêve" pour une apparition discrète et sobre de Catol qui vibre instantanément à chaque geste et fait sourdre utopie, érotisme et charge émotionnelle d'emblée. Cette courte performance est onirique, appartient au monde de l'air et de l'éther. Nous plongeant dans des abimes de sensualité, l'oeil complice, le regard tendre tel celui de de Edi Dubien sur la jeunesse androgyne des êtres humains.Une proposition qui ravit, rapte,captive et emporte, capturant les sens dessous-dessus avec grâce et volupté.


"y



11 h 40 : Infinité d'Yvann Alexandre

Yvann Alexandre fête trente années de création par-delà les scènes nationales et internationales. Le duo Infinité nous invite à un voyage en abstraction. Un duo certes, mais 4 interprètes (6 combinaisons possibles et chaque jour différentes) qui jouent avec une multitude d’espaces, les envahissent, débordent du cadre et donnent à vivre une infinité de mondes nouveaux. Des mondes poétiques qui s’ouvrent à chaque pas, et qui dessinent des lignes et des paysages d’êtres et de corps. L’écriture forte et incisive d’Yvann Alexandre révèle une danse élégante et très précise qui s’organise comme une calligraphie de l’intime.

Duo aux multiples entrées et sorties de lectures, charnelles, jouissives et tendres La danse fluide transparait, se fait infinie démonstration de gestes longilignes, imperceptibles sensations de peau, de glissement, de sobriété. Quatre danseurs se fondent et se confondent en miroir, en écho pour une traversée sans faille dans un monde poétique. Une infinité de propositions se succèdent dans un rythme où le souffle et la respiration invitent à la concentration, la méditation.Intime, extime lieu et endroit d'une atmosphère recueillie et sensible. 



13 h 15 : ‘Asmanti [Midi-Minuit] de Marina Gomes | Hylel

À la frontière de la danse hip-hop et du théâtre, cette jeune compagnie nous entraîne dans une immersion aux accents de vécu. 'Asmanti, qui signifie « mon ciment » en arabe, interroge le rapport aux quartiers populaires. Originaire du Grand Mirail à Toulouse et implantée dans les quartiers nord de Marseille, Marina Gomes partage, dans ce premier projet, sa vision de la cité, toute en ambivalence, entre attachement et empêchement. Dans une fresque esthétique, pensée à la manière d’un plan séquence de midi à minuit, la chorégraphe porte un regard singulier sur la banlieue, à la fois prison de bitume, terrain de jeu et d’expérimentation, moment de joie et foyer social.

Ils sont animés d'un punch, d'une verve effrontée et salvatrice qui va droit au coeur et bouleverse les apriori sur la danse hip-hop. Alors on leur rend grâce et ce courage, ce culot joyeusement affiché donne la niaque et l'espoir de s'en sortir de cette morosité ambiante, de cette vision pessimiste du monde englouti. Ils surgissent, jaillissent à l'envi, dansent sans s'épargner ni économiser le moindre geste communicant. Bel exemple de soulèvement, de résistance et d'éclaboussure de danse plein les semelles des souliers, plein les poches et plein l'esprit de citadin ancré dans son macadam. Danse cité, densité et revendication d'identité au poing.

 

 



15 h 10 : Royaume de Hamid Ben Mahi | Compagnie Hors Série

Dans cette pièce hip-hop, croisant danses et témoignages, six femmes prennent la parole pour dénoncer notre système patriarcal et dansent la sororité. Une chorégraphie dans laquelle les éclats de voix intimes et sincères des danseuses, d'âges et de parcours variés, disent l’universel pendant que leurs gestes invitent à la poésie. Elles font état d'un vécu tout en montrant la part de force et de vulnérabilité qui les constitue et qui les fait avancer. Plus de 20 ans de création pour Hamid Ben Mahi qui, dans ce nouvel opus, propose que ce Royaume soit une démocratie où la parole est reine.

Les femmes au ban de la société, les femmes plus belles les unes que les autres dansent leurs charges mentales, leurs douleurs, leurs questionnements et se racontent une par une ou toutes ensemble, au coeur d'un gynécée drôle ou cercle de tragédie. Dans cette Agora, la répro-cité est ce royaume où les femmes sont reine et les tiennes ces rênes , celle de la paroles, du lien, de la création. Harnachement de combattantes, amazones tendres et victorieuses.Fières, déterminées, timides ou révoltées, les voici comme un paysage bigarré où vibrent toutes sortes humanités, de destins. Belle pièce fouillée et interprétée par les unes, les autres avec véracité et conviction.


17 h 20 : Nice Trip de Mathieu Desseigne-Ravel et Michel Schweizer | Naïf Production et La Coma  de

Dans le précédent épisode, Bâtards, il était question des frontières à travers l’histoire du fil barbelé. Dans Nice trip, à travers le regard d’un adolescent, il est question des limites des territoires plus aptes à contrarier les mobilités des personnes que celles des capitaux. Entre le mot et le geste, entre suggestion et dérision, cette nouvelle création interroge les 40 000 km de murs-frontières, en se demandant avec humour et une pointe de cynisme si nous ne serions pas en train d’en devenir nous-mêmes les gardien·ne·s dévoué·e·s.

Une conférence dansée de plus? Non, un manifeste éclairé aux entrées multiples ou les deux complices protagonistes fouillent le sens des barrières, la matière première du fil barbelé avec intelligence et opportunité. Franchir un enclos ou sublimer la frontière, s'évader, abolir les murs et la bêtise ambiante qui sidère le monde géo-politique. Tout un chapitre à creuser au sortir de ce spectacle où la danse est enfermement du corps ligoté, astreint, soumis, enfermé. La danse de Mathieu étayant les propos de Michel, maitre de cérémonie, menant le jeu, le débat avec préciosité et respect du aux propos fort édifiants. On en redemande.....


 19H 15: SIMPLE de Ayelen Parolin (jusqu'au 19)

À partir d’un vocabulaire chorégraphique volontairement restreint, économe, Ayelen Parolin lance trois interprètes dans un étonnant jeu de rythme et de construction, à la fois répétitif et toujours mouvant, sans cesse redistribué, restructuré, ré-envisagé.Un jeu dont l’inachevé et le recommencement seraient les règles de base. Un jeu-labyrinthe.Un jeu musical… sans musique.Car dans SIMPLE, la chorégraphe s’est privée d’un de ses principaux partenaires de jeu. Et comme la musique n’est pas au rendez-vous, c’est aux corps qu’elle embarque sur scène de l’inventer, de l’imaginer, de la jouer. À la recherche d’une pulsation vitale. À trois, en complicité, en connivence. Avec la puissance et la sincérité profondément humaine de l’idiot, du naïf, de l’enfant – là où tout est (encore) possible, de l’insensé à l’onirique.

Comme un règlement de compte à Merce Cunningham, le trio affiche une danse très technique, pleine d'humour, de mimiques drolatiques, pleine de distanciation. Les couleurs du fond de scène, des justaucorps pourraient être de Rauschenberg, peu importe d'ailleurs, l'humour joue et gagne, les apparitions-disparitions se succèdent haut la main, le rythme est tenu alors que peu de matière est en jeu. C'est la magie des interprètes, excellents danseurs-comédiens dirigés par Ayelen Parolin qui fait le reste. Et c'est un travail d'orfèvre qui se déroule à l'envi sans tambour ni trompette mais dans un ravissement-divertissement plein de musicalité, de percussions corporelles des pieds, entêtantes et redondantes, obsédantes. De quoi bénéficier de tonalités, vibrations et mesures rythmiques, cadence et métronomie infernale.

 



21 h 15 : HEAR EYES MOVE - Dances with Ligeti de Elisabeth Schilling 

Dans cette pièce pour 5 interprètes, la chorégraphe luxembourgeoise Elisabeth Schilling explore la relation de la danse à la musique en s'appuyant sur les Études pour piano du compositeur hongrois György Ligeti. Corps et musique s’entremêlent, s’entrelacent, se rapprochent, s’éloignent, collaborent, se repoussent tout en jouant leurs propres partitions.

Ligeti aux anges comme une musique "à ne pas danser" qui se révèle dans sa complexité à être un trésor de composition chorégraphique originale. Le pari est osé pour celle qui déceler entre les notes et les martellements furieux du piano, les lignes de fuite, les fugues, les échappées possibles et salutaire de ce piano percussif à souhait. On regrette simplement l'absente d'un artiste au piano qui aurait su accompagner les danseurs au plus profond d'une interprétation insitu, "sur mesure" à la démesure de la danse.

Programmation "hors les murs"

> à l'Atelier - La Manutention
10 ─ 20 juillet (relâche le 15)



11 h 05 : DOS de Delgado Fuchs 

DOS, qui aurait pu s'appeler LOVEBIRDS ou LOS DOS FANTASTICOS, explore la nécessité du lien et fait du corps le territoire de la relation. La scène devient un ring d’observation où les deux artistes jouent avec leurs corps dissonants dans un assemblage de combinaisons décalées : il arrive qu’ils se touchent, se caressent dans une candeur fraternelle. Ils ne parlent pas mais fredonnent une langue inarticulée. Les Delgado Fuchs reviennent à Avignon après les succès de Manteau long… (2009, à L’Atelier) et de Nirvana (2019, à La Collection Lambert) dans le cadre de la SCH – Sélection suisse en Avignon et déplacent leur binôme habituel pour un nouveau tandem entre Marco Delgado, danseur, et Valentin Pythoud, porteur acrobate.

Encore un duo d'hommes décapant, singulier et hors norme où les corps sportifs, athlétiques forment des édifices  singuliers, prennent des postures, attitudes en ronde bosse que l'on souhaiterait contempler plus longuement. C'est drôle, grinçant, ludique: les bestioles à deux dos, les êtres hybrides se métamorphosent et se jouent des apparences avec brio.Avec sérénité ces deux pince sans rire s'adonnent à des acrobaties qui frisent le risque, la pudeur et se jouent du qu'en dira-t-on avec bonheur, audace et conviction.



14 h 30 : Polémique (recherche d'une pédagogie du conflit) deNaif Production

C’est une discussion agitée entre deux corps. Visiblement, ils semblent insatisfaits de leur état d’isolement. À les voir se jeter l’un sur l’autre avec une étrange violence raisonnée, on se doute que quelque chose a été perdu. La nostalgie de l’accord peut-être ? L’extrême précision avec laquelle s’expriment leurs désaccords, dont l’absurde raffinement frôle souvent la virtuosité, cache mal une certaine fébrilité. À quoi peut bien mener cette patience infinie, cette lente pédagogie qu’ils déploient dans leur tentative de ne jamais laisser se résoudre le conflit ?

Duo, cette forme si prolixe durant ce festival, est reprise pour une lente ascension dans l'intimité dévoilée de deux êtres qui se découvrent.Le conflit se dessine, se développe au fur et à mesure trahissant une volonté d'affrontement des corps, de violence, de détermination, d'exercice du pouvoir... Les corps entremêlent, créant des architectures tectoniques étranges, des paysages fugaces au service d'une géologie des corps stratèges de leur protocole. Poétique autant que polémique, protéiforme et jouant sur le fil de l’ambiguïté toujours.l

Belle pêche, bonne pioche dans le Festival Off d'Avignon 2023 : la danse toujours et en corps.

 A la Manufacture, trois spectacles au programme entre autres pour un petit panorama de la danse hip-hop et un opus décapant signé Hillel Kogan


"Thisispain" de Hillel Kogan

Après le succès international de We Love Arabs, Hillel Kogan revient à Avignon et se présente avec son nouveau spectacle THISISPAIN, en touriste issu de la danse contemporaine israélienne qui visite l’univers du flamenco. Dans un duo provocateur et humoristique avec Mijal Natan – danseuse de flamenco, ils confrontent leur monde respectif et abordent la danse non seulement comme un langage artistique mais aussi comme un lieu de débat riche en construction de sens sur la société. Un dialogue subtil entre genre, culture et identité qui nous renvoie à cette phrase de la théoricienne de la pensée queer Judith Butler « l’identité n’est pas une essence mais une performance. »

On en sort plus "intelligent", plus à même d'apprécier une fois de plus la verve, le verbe et les propos de Hillel Kogan sur le monde, notre rapport à l'identité, la différence, l'autre dans son altérité. Ils sont deux sur le plateau dans cette "souffrance" ce "pain" gravé en fond de scène qui bientôt deviendra l'Espagne rêvée ou douloureuse, porteuse de légende et de souffrance.Du flamenco bien sur au menu, belle prestation précise de Mijal Natan qui accompagne le chorégraphe-conférencier de ses frappements et autres démesures rythmiques légendaires. Du discours, il y en a : bref, humoristique, décalé et juste. Comme à son habitude Kogan se fait dérisoire caricature et miroir de lui-même et de ses pairs. Sa confession juive, son pays, les frontières à saute mouton et la poésie sonore de l'accent ou de la langue espagnole. Tout est dit dans ce manifeste dansé-parlé avec rudesse sans complaisance, décalé et toujours d'actualité. Performance où les accessoires ont un rôle précis et signifiants: les robes à froufrou et multiples plis et replis se font parures et parodie de costumes folkloriques. Un taureau à la Picasso, des références au maitre du cubisme, tout est joyeux et grave à la fois: Carmen est convoquée bien sur: un opéra espagnol par un français bon tain, Bizet fait office de machine à remonter le temps et le rythme. Du bel ouvrage pour "inter-ligerer" les genres, les époques et tenir un discours corporel édifiant, lucide et plein d'audace.


"Fibram" de la compagnie Chriki'z

fiBraM convoque au plateau 2 danseurs, 1 soprano et 1 joueur de Oud pour un quatuor virtuose, sensible et poignant. Des ampoules suspendues guident leur chemin dans un voyage où les langages se mêlent. Les chants classiques latins viennent rencontrer la langue arabe. Un quatuor qui convoque ceux qui ensemble, pourrait-on penser, dissonent. La complicité des corps, des sonorités arabo-andalouses et d’un chant lyrique qui fusionnent pour un voyage au-delà du tangible.

Du chant, de la danse pour un quatuor virtuose qui tisse des passerelles entre musique vivante et danse vibrante. Les rencontres de corps opèrent , le hip-hop fait sa mutation, chrysalide en gestation qui éclot au fur et à mesure et se libère des codes. Amine Boussa et Jeanne Azoulay en maitre de cérémonie parviennent à construire un monde solide et transversal où chacun se répond, s'observe et émet son et gestes au plus près de l'émotion. Joueur de oud, chanteuse et danseurs dans un quatuor, trèfle à quatre feuilles soudé, libérant un souffle novateur sur le métissage des genres.


"Motion" de Brahim Bouchelaghem

Dans cette pièce chorégraphique hip hop pour 9 bboys et bgirl créée à l’origine pour des danseurs ukrainiens à Kiev au Théâtre d’Opérette, Brahim Bouchelaghem associe l’énergie stupéfiante du breaking (danse hip hop, nouvelle discipline des Jeux Olympiques Paris 2024) et la poésie qui lui est propre. Les nouveaux interprètes franco-belges, tous issus du monde des battles nationaux et internationaux investissent un terrain de jeu restreint, un carré blanc de 7 mètres sur 7 mètres parcouru de projections vidéo réalisées par Monsieur Nuage créant des espaces graphiques en perpétuelle évolution évoquant les écrans numériques contemporains.Ainsi, Brahim Bouchelaghem fait défiler les mouvements, le temps du jeu, sur une musique de R.ROO aka Andrey Rugaroo, compositeur ukrainien. L’espace de plus d’une heure les danseurs vont écrire leur film en mouvements et transmettre leur énergie dans cette aire de jeu.Une métaphore habile et envoûtante de la danse actuelle.

Quelle énergie déployée une heure durant pour ce collectif, meute, horde savamment agencée pour produire le meilleur de l'écriture dynamique de Brahim Bouchelaghem. Des unissons précises, des marches en danse très rythmées, de la dépense, de la perte à foison pour ce groupe soudé où quelques échappées belles donnent à chacun un espace d'expression et de gestuelle propre. Ça tourne à plein gaz, à fond et on en perd pied à perdre haleine tant tout passe en rémanence sous notre regard hypnotisé. L'écriture hip-hop revisitée, précise et pertinente nous entraine dans un univers urbain implacable Les bandes de lumière défilant au sol comme autant de plages, d'endroits glissants, éphémères pour ne jamais se figer au sol. Graphisme ludique, lumineux, passages à niveau, passasges cloutés à traverser sans modération ni limitation de vitesse. Cross road move....movie !



"Phénix" de Mourad Merzouki compagnie Kafig à la Factory théâtre de l'Oulle

" Cette pièce bouscule une nouvelle fois les codes entre musiciens et danseurs.
Phénix est né d’une rencontre inattendue et singulière entre la viole de gambe et la danse, où quatre danseurs dialoguent avec cet instrument à cordes très en vogue au XVIIe siècle. Au plateau, les artistes évoluent également sur des musiques électro additionnelles d’Arandel pour renforcer la puissance de cette association inattendue.Poursuivant ma démarche d’ouverture et de confrontation entre
les esthétiques, j’ai voulu réunir des disciplines que tout oppose, pour créer une forme légère et singulière. Dans une ambiance intimiste, les artistes croisent leurs univers pour présenter une pièce inédite, sublimée par leur alchimie ! " Mourad Merzouki 

Un bel exemple de réussite de métissage culturel, ethnique et chorégraphique que cet opus débridé où le hip hop dérange et côtoie le violoncelle avec autorité, respect et inventivité.Il faut les voir arpenter la scène sans gêner cette petite estrade mobile où se niche la musicienne quelque peu "statique" parmi cette population mouvante. Chaise à porteur ou trône majestueux qui rend la scénographie lisible et performante Le plateau se peuple au fur et à mesure des évolutions des danseurs autour de Garance Boizot.au violoncelle.Association inattendue qui fait mouche et catapulte la chorégraphie dans un cosmos sonore très opérant.


"Ustium" de Hubert Petit Phar à la Chapelle du Verbe Incarné

Ustium est une pièce traitant de la lutte des consciences. Une recherche liée à des questionnements sur la masculinité dans les Antilles, sur la représentation du corps noir, ses stigmatisations et préjugés.Une pièce impulsée par une recherche sur les danses LGBT, dans un clair-obscur, pour nous plonger dans des lieux clandestins, des huis clos étouffants et libérateurs.Fatalisme, déterminisme, humanisme, c’est ce rapport aux autres qu’interroge le chorégraphe.
Cette création d’Hubert Petit-Phar ouvre un nouveau cycle sur sa recherche nourrie par des thèmes forts : la mort, le sens de la vie et la liberté.

Un trio pétri de sensibilité, de vérité et d'intensité pour incarner la force de la vie, les caractères, les différences entre chacun d'entre nous. La danse est limpide, le message clairvoyant.Trois personnages bien vivants, dansant et pertinents de musicalité. L'ambiance n'est pas toujours sereine pour eux aux destins croisés de fortune. Les rencontres sont hasardeuses mais aussi prometteuses d'acceptation de l'autre. Tous semblables, tous différents, alors les regarder c'est aussi apprendre à les connaitre, les reconnaitre et les considérer!


"Le bestiaire de Madame Arthur" au Théâtre du Roi René

Madame Arthur, cabaret mythique parisien, aspire à convertir le monde à son culte travesti. Créé en 1946, des artistes tels que Bambi, Coccinelle ou Serge Gainsbourg ont fait les belles heures de ce cabaret où a toujours existé un vent de liberté artistique. Ce lieu a continué de séduire nombre d’artistes de tous horizons et est devenu aujourd’hui une référence artistique qui crée le trouble entre les genres et libère la création autour de la musique en français. Cinq artistes du cabaret - Androkill, Charly Voodoo, Diamanda Callas, Lola Dragoness Von Flame et Tony Blanquette feront d’Avignon leur terrain de jeu, sous la direction artistique de Clara Brajtman. Préparez vous à un spectacle, créé pour l'occasion, dans lequel ils oscilleront du profane au sacré, du caricatural au sérieux, du commun à l'extraordinaire. 

Des bêtes de scène pour un bestiaire coquin, malin, mené de main de maitre par un dompteur de cérémonie digne de Cabaret de Bob Fosse ! C'est un festival de costumes, de strass et de paillettes très rythmé qui laisse s'épancher les corps, délie les langues et laisse place à des interprétations de chansons mythiques impressionnantes.Magie d'une mise en scène cocasse o^les saynètes et sketchs s'enchainent à foison. Un opus qui décape les conventions et idées reçues tout en gardant une esthétique traditionnelle du cabaret travesti de Madame Arthur de la rue des Martyrs à Montmartre. Car si "martyr" signifie "travail" voici du bel ouvrage de Dames qui se dévore sans modération.Les interprètes, proches du public en délire au top de la grâce et de l'émotion. Du grand art artifice et feu d'artefact pour une salle enthousiaste invité à danser à l'issue de la prestation de charme nostalgique.


"Flow" de Liu I-Ling et LIN TingSyu à la Condition des Soies

FLOW interroge la façon dont, à l’ère de l’accélération de l’information et du melting-pot culturel, aspirés par le tourbillon de l’époque, nous parvenons ou non à formuler des choix conscients. Plongés dans un environnement saturé d’images racoleuses et d’informations sensationnalistes, à la bande-son poussée à plein volume, peut-on encore en tant qu’individus, uniques par définition, préserver nos croyances spirituelles, nos convictions et points de vue personnels, nos propres valeurs ? Le spectacle est formé de deux grands volets : …and, or… et The Subsiding World. Le premier étend à la danse des réflexions sur l’articulation entre le système dans lequel nous vivons et nos choix personnels. Le second se focalise sur le sens de l’existence individuelle dans la société contemporaine : la société étant ce qu’elle est, vaut-il mieux se laisser porter inconsciemment par le courant ou au contraire aiguiser sa conscience pour mieux en suivre le fil. 

Bel exemple de lyrisme chorégraphique que ces deux opus extrêmement bien dansés sur le fil de l'imagination des deux  chorégraphes très inspirés par les interprètes. Portés, sauts, duos de charme, mouvement de groupe sidérants d'exactitude et de technicité. Des jeunes virtuoses au service d' une écriture sobre et passionnée . Les corps épris de musicalité se plient sans céder, épousent les contours musicaux rarissimes mais convaincants. Un panel original de l'écriture chorégraphique à Taiwan