mardi 1 novembre 2022

"Mythologies": Preljocaj en bonne "compagnie"!

 


Avec Mythologies, le chorégraphe Angelin Preljocaj et le musicien Thomas Bangalter (fondateur du groupe Daft Punk) explorent nos rituels contemporains et les mythes fondateurs qui forment notre imaginaire collectif. À la manière des impressionnistes, ils souhaitent évoquer ce qui se love dans les replis de nos existences, à travers nos idéaux et nos croyances, venant ainsi faire dialoguer les mythologies antiques avec celles de notre temps.

"Deux compagnies de ballet, différentes et pourtant unies, nouent une collaboration fructueuse pour un projet inédit. Ce qui se joue, dans la réunion de dix danseurs du Ballet Preljocaj et dix du Ballet de l’Opéra de Bordeaux c’est une création de grande envergure sous la direction d’Angelin Preljocaj, avec les 54 musiciens de l’Orchestre de Chambre de Paris. Le chorégraphe interroge ce qui nous lie, dans les recoins de nos âmes, aux grands récits fondateurs et leur héros. Mais notre époque crée aussi ses propres mythes, qui font écho à ceux de la Grèce et d’ailleurs."  

 

 

« La danse, art de lʼindicible par excellence, nʼest-elle pas la plus à même de mettre à nu nos peurs, nos angoisses, et nos espoirs ? Elle stigmatise nos rituels, révèle lʼincongruité de nos postures quʼelles soient dʼordre social, religieux ou païen. » Angelin Preljocaj

"Hissez le Pavillon Noir"....Et toute la mythologie de l'oeuvre chorégraphique de Angelin Preljocaj ressurgit telle un mythe récurent, un leitmotiv de "Cette Danse de combat", d'amour et de haine, de force et de sensualité inhérente à son répertoire...Avec"A nos Héros" ou avec "Jeanne d'Arc", les êtres qui peuplent sa vision chorégraphique de l'espace et du monde reviennent sur le plateau, grandis par des années fructueuses d'expériences avec les autres arts: BD, arts plastiques, littérature et philosophie passent entre les mains de ce démiurge prolixe avec grâce, pertinence, intelligence et félicité...."Inter-ligere"...Relier en bonne "com- panis", compagnie, en partage,les arts et les disciplines.Ses sources d'inspiration tissent ici un opus dense et riche, illustré par les personnages suggérés de la mythologie envahissante, peuplant le plateau sans cesse réactivé par la musique obsessionnelle, très fluide et classique du transfuge de Daft Punk...Les lignes architectures des constructions amovibles de la danse structurent dédales et labyrinthes, les déplacements, les formes qui se font et se défont à l'envi. Les corps des danseurs, en duo, solo ou petits groupes dessinent des reliefs compacts qui se diluent puis reprennent vie en osmose. Costumes toujours changeants, très riches de matières vaporeuses ou collantes, adhérentes aux corps dansants.La grâce de cette densité toujours opérant pour une narration très visuelle et iconographiée. Les personnages dotés d'objets-arcs et flèches-et autres accessoires délivrant l'identité des héros, se succèdent en nombreux tableaux, riches d'évocation, d'histoire à conter. Renouer avec une dramaturgie, un langage classique très bien servi par le Ballet de Bordeaux, berceau historique du genre Petipa transfrontalier...Et le tour est joué vers une danse plus académique, repère d'un vocabulaire transgressé discrètement au profit d'un langage à la Preljocaj. En joué, fluide, sensuel et érotique : prise de corps, combat et d'Amazones, de catch...Mayas, Aphrodite, Zeus, Icare, les Gordones, Danae sont convoquées pour rendre à la Danse son côté immortel, légendaire, passe frontières et passe murailles...Gravitation d'électrons libres sur le plateau animé par cette présence forte et incontournable d'une vision du monde, large spectre des possibles cadres et perspectives.La danse ondule, se dérobe, échappe à toute loi sauf à celle de la gravité et même Icare ne s'y trompe pas qui chute des cintres avec allégresse dans une sorte d'annonciation spirituelle. L'inspiration de Preljocaj accompagné ici par le design des costumes de Adeline André, la scénographie d'Adrien Chalgard...Et les vidéos, portraits de chaque danseurs, regards et faciès inspirés par cette plongée dans le temps: celui d'un clin d'oeil à la musique qui n'aurait pas de paupière comme les oreilles pour fermer les yeux sur les horreurs de la guerre , corps couchés au sol sous des couvertures de feutre à la Beuys...Pour mieux se relever, rebondir et peupler nos espoirs de ferveur et d'amour, de partage et de beauté. Car Preljocaj ne fera jamais abstraction de lyrisme, de douceur, de beauté malgré la gravité du sujet et les dorures ici désuètes du Théâtre du Chatelet.

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Au Théâtre du Chatelet jusqu'au 5 Novembre  

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