mercredi 28 juin 2023

Nazareth Panadero and Co, Danièle Desnoyers et Taoufiq Izeddiou au 43 ème festival Montpellier Danse : des catapultes chorégraphiques inédites.

 Les créations sont toujours surprises, fruit de démarches, recherche, alors ces deux dernières donnent le "la" sans bémol ni dièse et les bécards ne s'y trompent pas qui passent aux oubliettes.


Un bassin de réception inédit

"Montréal-Marrakech" de Danièle Desnoyers et Taoufiq Izeddiou fait partie de ces paris qui entrelacent question sociétales, esthétiques et géopolitiques. Deux continents se rapprochent grâce à l'art chorégraphique qui fait se rencontrer quatre interprètes venus du Québec, du Maroc: choix de danseurs préoccupés par ces questions de métissages, de différences ou d'osmose de culture qui s'entrechoquent ou s'allient. La question du "bassin" en est au centre, cet endroit du corps qui oscille, bascule, s'arrondit, se love à l'envi selon les cultures, les traditions. Bassin méditerranéen des corps du Sud? Pas de caricature ni de clichés, mais une réflexion de la part de tous, chorégraphes et danseurs. Au "sud" le bassin dansant, au nord, le bassin comme habitacle des énergies comme lieu de réceptivité des méridiens, de la kinésiologie. Danses lascives liées à la séduction, ou danse traditionnelle liée à la mobilité culturelle et acquise à une éducation...


Reste que le thème est sous-jacent et la lecture de la pièce dansée sur ce tapis blanc, demeure quartier libre.Mouvements de marche arrière récurrents, très ondoyants, duos, retrouvailles, diagonales dans l'espace investi. Couleurs ou rigueur des costumes, sauts exténuants au final du danseur marocain, un prodige d'énergie partagée entre les quatre interprètes. Quatre rencontres d'espaces sensibles, de "techniques" vivantes et habitées qui s'échangent, se métissent, s'entrelacent ou divergent. Jamais figées, poreuses, perméables à l'écoute de l'autre. Lenteur et fluidité font contraste avec la vivacité d'une danse déroutante, oscillante, en équilibre-déséquilibre naturel.Le tandem- binôme, duo de chorégraphe opère et libère les corps de toute empreinte culturelle superflue pour rentrer dans le vif du sujet: la confrontation des corps-continents pour un nouveau territoire de la danse: un bassin de réception géologique qui recueille la transformation et l'érosion du temps. Là où les eaux se rassemblent pour irriguer de concert en confluence le paysage naturel ou cultivé !

Au Studio Bagouet les LES 23 24 25 JUIN 


"Vive y deja vivir" : une soirée imaginée par Adolphe Binder, Nazareth Panadero, Michael Strecker et Meritxell Aumedes

Deux pièces, "Two Die For" et "Manana Temprano" font se rejoindre sur le plateau deux artistes uniques, portés par leur long compagnonnage auprès de Pina Bausch. Ils émergent en tant qu'interprètes comme deux personnalités fortes, imprégnées de leurs expériences respectives et partagées. 


La première laisse filtrer toutes les empreintes de leur vécu de danseur et façonne une sorte de récit débridé absurde. Collages, cadavres exquis chorégraphiques, évocation plasticiennes d'un Joseph Beuys : une chaise où s'empilent couvertures de feutre pour protéger une héroïne fragile, femme fatale ou jeune fille perdue...Sauvée par la bienveillance d'un homme protecteur. Les interprétations de cette pièce sont multiples et l'on retiendra cette danse de couple ou d'individu: une raison de danser au delà des mots, de la mémoire en proposant des tableaux, saynètes courtes et opérantes. En entremets un court métrage désopilant où Nazareth Panadero balaye et chasse la poussière en contre plongée dans un espace d'escalator alors que son partenaire Michael Strecker semble évacué de la scène! Que cherchent-ils à effacer ces deux là de leur passé commun de corps dansant à Wuppertal?...


La seconde pièce "Manana temprano" s'inscrit dans une véritable révélation d'une signature chorégraphique qui s'éloigne des poses et autre registre à la Pina. Un couple, des portes qui s'ouvrent et se ferment en vidéo et dans leur espace sentimental. Duel ou duo, danse touchante, fluide où les corps s'accueillent ou se repoussent avec tendresse et dévotion. La femme est forte et rude, le visage marqué par des traits volontaires et mûrs. Lui est partenaire de danse auprès de cette bien-aimée avec laquelle il semble fuir le passé, ouvrir d'autres portes vers d'autres accès de partage. C'est beau et remuant, touchant, rude et passionné.Vivre à tout prix ! Et laisser vivre....

Au Théâtre du Hangar les 24 et 25 JUIN


 

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