samedi 10 décembre 2011

vendredi 9 décembre 2011

L'art très "kinétique" de Silvi Simon à La Chambre à Strasbourg: c'est "Filmatruc en construction"

La fort dynamique association strasbourgeoise pour la promotion de l'art photographique affiche jusqu'au 22 Janvier 2012, une exposition-installation de l'artiste Silvi Simon.Strasbourgeoise depuis les multiples acquisitions de diplômes d'arts visuels et de cinéma d'animation. Elle affectionne tout particulièrement les anciennes techniques cinématographiques (film super 8 et 16 mm entre autre).Elle pratique aussi l'image vidéo et les images numériques mais se plait à réinvestir "la préhistoire du cinéma" et les techniques du cinéma expérimental et d'animation, la pratique du cinéma sans caméra, les illusions d'optique, questionnant l'image, le mouvement, les sensations.
"Filmatruc" c'est d'ailleurs le terme générique qu'elle emploie pour déployer dans les espaces les différents dispositifs créés pour la projection cinématographique.La pellicule est son matériau, instrument de base qu'elle impressionne par la lumière puis révèle et fixe par la chimie.Puis la caméra capte et recrée le mouvement.In finé c'est le projecteur mécanique qui restitue lumière, vitesse et optique! Une vraie alchimie de l'image, mise judicieusement en espace dans deux lieux différents de la galerie.Retranscription du mouvement avant tout, ici tout se meut et bouge, certes de façon mécanique" mais très "kinétique" selon les lois du mouvement de la danse (voir Rudolf von Laban).Et le dispositif mis à nu, les projecteurs cinéma avec leur joli bruit de déroulement qui rappelle les bonnes vieilles projections publiques d'antan, est mis en valeur, exposé au même titre que les images lumineuses, noir et blanc qu'ils distillent.Magie donc de voir ces oiseaux qui volent, ces cristaux de lumière suspendus comme sur une voute céleste...Des univers cosmiques étranges s'en détachent à l'envi et l'on circule à travers les faisceaux lumineux comme dans un parcours ludique, charmant, féérique.
Le spectateur déambule, écran restituant aussi images et lumières.Archéologie de l'image, toute cette mise en scène traduit le désir de Silvi Simon de démanteler les mécanismes, les rendre visibles et palpables pour reconstruire un monde de légendes et de lumières.Ombres, vitesse, mouvements, tout concourt à rassembler les ingrédients d'une danse des images, d'un flux et reflux continu de mouvances très artisanales. Les petites mécaniques du cinéma mettent à nu une poésie de la matière, une explosion jaillissante de fragments de temps, éparpillé, échevelé.Les composants bruts, les moteurs, les axes, hélices, pignons, courroies, plastique, verre et miroir font resurgir à la mémoire les fondamentaux de la mécanique, de la dynamique du cinéma. En évoquant sa naissance par la monstration de son appareillage d'antan, Silvi Simon crée un univers de légende, de traces, palimpseste de l'image.
Merveilleux voyage au pays de Mélies, au pays de la fraction du temps démantelé pour une perspective de construction autre.Une fabrique du rêve bien agencée!

"A louer" des Peeping Tom: de la cave au grenier, la maisonnée s'agitte

Avec "A louer", c'est tout l'univers onirique et sarcastique de "Peeping Tom" qui s'ouvre à nous.
Après leurs fameuses pièces "Le Jardin", "Le Salon", " Le Sous-sol", les voilà en quête d'une folle vérité qui se révèle à eux tous: tout serait à "louer", tout est dans l'indifférence, le provisoire, rien ne nous appartient, sinon "nous-même" et heureusement. Car si toute la troupe dénonce le flouté de la vie, le vague à l'âme, c'est avec une telle subtilité, une telle force que seule leur identité collective ressort de cette performance hors norme, grandie et assurée. Un décor conséquent: un intérieur colossal, avec salon, montée d'escalier, balustrade, balcon et mezzanine sera le théâtre des pérégrinations multiples de ce petit monde agité. Autour de "Madame", une grande asperge distinguées, gravite un virtuose de la torsade, de la torsion et de la vélocité. Ce danseur qui d'emblée ouvre le bal et fascine par sa gestuelle incongrue, inouïe, acrobatique et contorsionniste à l'envi. Cela effraie et emballe comme tout le reste de cette pièce. On se retrouve chez Kafka, tant l'absurdité jaillit de tous les recoins. Ces petits personnages qui filent à quatre pattes et se nichent, invisibles derrière les sofas pour mieux resurgir à l"improviste. Cette bande de "touristes" aussi, conviés à la fête qui errent dans cette univers burlesque autant que désespérant.Tous contribuent par leur talent de chanteur, danseur, comédien, pianiste à séduire et convaincre le spectateur de la justesse de leur propos. Avec un tel langage affuté, maitrisé, un tel espace qui se construit au fur et à mesure, que l'on maintient une attention physique à leurs déboires, assez "sportive".
Entrées et sorties, apparitions multiples ponctuent et rythment dans un tempo d'enfer, un spectacle original, accessible et jubilatoire en diable.
Bienvenue dans cet espace incongru "à louer", le temps de s'accoutumer à cette folle cavalcade burlesque et effarante de justesse.