A Musica, à la salle des fêtes de Schiltigheim
Il était bien là hier soir, bien vivant, le maestro de la musique concrète, électroacoustique, pour un concert exceptionnel, quatre heures durant, ponctué par la projection d'un film unique sur sa carrière.
Grand bidouilleur de sons, tripoteur, agitateur, fébrile inventeur sempiternel de nouvelles sonorités, il titille l'électronique comme une maïeutique, accouchant des bruits les plus incongrus mais curieusement toujours "à leur place"!
Il triture la matière organique de ce qui sourd des machines et invente en alchimiste un son philosophal empli de sens, de matière et volume.
Le concert: devant un amoncellement de hauts-parleurs, empilés tels les robots de Nam June Paik, le spectateur est rivé du regard par cette architecture sonore, émue par des éclairages sophistiqués.
On est comme devant le "Coucou Bazar" de Dubuffet: devant une animation d'êtres inanimés, objets ayant une "âme"
Frontale, la musique parvient pour la première œuvre "Une tour de Babel" de 1998, "revisitée" pour l'occasion, une partition débridée, inattendue, parfois très "zen" où l'on s'imagine à la déguster "couché" tous sens en éveil.Vrombissements, voix, chants, bruitages, tout s’emmêle pour mieux nous hypnotiser, nous plonger dans une ambiance d'ailleurs, profonde, grave.
Un spectacle sonore piloté en direct par le compositeur, accompagné de ses fidèles "compagnons" de route: sa femme, son assistant, ses proches....Un travail collectif, en direct, sur la corde raide!
Après un entracte enjoué où chacun évoque ses souvenirs personnels de l'époque, où découverte de "l'ancêtre" du DJ, un film de Frank Mallet et Eric Darmon est projeté, histoire de mieux saisir, d'approcher le personnage: un bel hommage sensible et intelligent, truffé de moments dérobés à la vie quotidienne de l'artiste, à son univers domestique envahi de bandes magnétiques, consciencieusement rangées sur des centaines d'étagères....On le voit capter des sons, des bruits du monde extérieur, toujours caccompagné de sa femme, de son "producteur" complice de tous ses "désirs" et non caprices de créateur.
Il est malin, le maitre, va jusqu'au bout de ses idées, fouille la littérature, bidouille des tableaux sonores faits de matériaux divers empruntés à la musique, qu'il expose dans sa "maison des sons" à Paris!
Images d'archives aussi pour sa période "Béjart" où l'on retrouve avec bonheur les danseurs de l'originel Ballet du XXème Siècle" dans "Messe pour le temps présent" agitant des gambettes hystériques gainées de jeans!
C'est au tour de faire revivre en images Carolyn Carlson avec son ballet " Kyldex" sur les sculptures cinétiques de Nicolas Schoeffer! Un régal d'entendre, de voir cette symbiose de mouvements musicaux, chorégraphiques, sculptés dans l'espace lumineux!
Un documentaire de création où "l'art des sons" est évoqué plastiquement dans un voyage dans le temps.
Deuxième concert "live": "Fantaisie Messe pour le temps présent": Pierre Henry revisite son oeuvre emblématique, avec malice, détachement: des couches de sons s'empilent, masquant les leitmotivs, les résonnances s'amplifient, la masse sonore est dense et puissante.
Toujours très "présente" et de "notre temps", cette messe est rituelle et païenne, athée,évoque tant de chemin parcouru par le compositeur que l'on ne peut que saluer cet homme, ovationné pour l'occasion et remercier le Festival de nous avoir offert ces instants d'exception qui feront "date" dans nos corps sonores, résonnants des élucubrations très synthétiques de ce démiurge du son.
vendredi 27 septembre 2013
mercredi 25 septembre 2013
Opéra au cinéma: un mariage d'amour et de raison: "Written on Skin" pour en témoigner à Musica
Musica tisse depuis longtemps les affinités entre musique et cinéma, nous rappelant qu'il existe autant d'excellentes musiques de films, que de films sur l'opéra, de surcroit, genre lyrique contemporain fort riche en surprises!
Cette année, en complicité avec ARTE et l'UGC Cité Ciné de Strasbourg, deux oeuvres sont proposées:
la première "Written on skin", un opéra de George Benjamin de 2012, a été filmé par Corentin Leconte à l'occasion du festival d'Aix en Provence.
Katie Mitchell pour la mise en scène (voir The House Taken Over), et Martin Crimp pour le livret nous délivrent ici une narration cruelle, forte et inspirée pour des interprètes hors pair, filmés au plus près des corps, des sons, des respirations des chanteurs
Le rôle du "garçon" dans cette histoire qui oscille entre médiéval et contemporain est tenu par deux fantastiques contre-ténor et soprano, Bejun Mehta et Allan Clayton, Agnès, la "femme" est campée par Barbara Hannigan, sublime actrice, chanteuse aux talents virtuoses, face à une partition à hauts risques.
Deux heures durant, on vit en apnée devant ce drame, sa violence physique, son décor à deux niveaux où évoluent les protagonistes.
Les jeux de lumière, de profondeur y sont judicieusement révélés.
Les gestes très chorégraphiques, physiques, engageants de tous font mouche pour créer une présence charnelle étonnante pour le médium cinématographique!
George Benjamin à la direction, sensible, attentif y tient sa part de succès.
Un film qui fera date dans la "capture" de la voix, des corps et de l'espace de l'opéra transposé au cinéma.
La proximité, les gros plans rapprochés, le montage épousent le rythme de la composition musicale avec bonheur!
Cette année, en complicité avec ARTE et l'UGC Cité Ciné de Strasbourg, deux oeuvres sont proposées:
la première "Written on skin", un opéra de George Benjamin de 2012, a été filmé par Corentin Leconte à l'occasion du festival d'Aix en Provence.
Katie Mitchell pour la mise en scène (voir The House Taken Over), et Martin Crimp pour le livret nous délivrent ici une narration cruelle, forte et inspirée pour des interprètes hors pair, filmés au plus près des corps, des sons, des respirations des chanteurs
Le rôle du "garçon" dans cette histoire qui oscille entre médiéval et contemporain est tenu par deux fantastiques contre-ténor et soprano, Bejun Mehta et Allan Clayton, Agnès, la "femme" est campée par Barbara Hannigan, sublime actrice, chanteuse aux talents virtuoses, face à une partition à hauts risques.
Deux heures durant, on vit en apnée devant ce drame, sa violence physique, son décor à deux niveaux où évoluent les protagonistes.
Les jeux de lumière, de profondeur y sont judicieusement révélés.
Les gestes très chorégraphiques, physiques, engageants de tous font mouche pour créer une présence charnelle étonnante pour le médium cinématographique!
George Benjamin à la direction, sensible, attentif y tient sa part de succès.
Un film qui fera date dans la "capture" de la voix, des corps et de l'espace de l'opéra transposé au cinéma.
La proximité, les gros plans rapprochés, le montage épousent le rythme de la composition musicale avec bonheur!
Quand le Philharmonique de Strasbourg prend les rênes de la musique finlandaise
Fin de parcours pour la tournée régionale de l'Orchestre Philharmonique de Strasbourg, sous l'égide du Conseil Général du Bas-Rhin. Dans le cadre du festival Musica, c'est dans l'Aula du Palais Universitaire que cette dernière soirée consacrée à la "musique finlandaise" s'est déroulée, en majesté
Musique du nord, musique du froid? Loin de nous cette sensation à travers le parcours pluriel, entre répertoire moderne et contemporain que proposait l'orchestre sous la direction de Baldur Brönnimann.
En "entrée", "Deux mélodies élégiaques opus 34 " de 1881 d'Edvard Grieg
Le lyrisme des cordes, en vibrations crescendo confère à "Coeur bléssé" ainsi qu' à "Dernier printemps" des saveurs de voyage au pays du soleil deminuit.
Intimité, délicatesse des tonalités en fond une entrée en matière délicieuse, calme, sereine. Ambiance feutrée et spatialisation créent une atmosphère recueillie, confidentielle qui s'étire au son des violons.
LES AILES DU DESIR
Coup de foudre quant à la pièce suivante, "L'aile du songe" de Kaija Saariaho, actuelle artiste en résidence à l'orchestre.Évocation de l'éther et de la terre, cette oeuvre en deux volets est une ode aux oiseaux, à l'espace, aux rives de la création musicale.
Le jeu et le souffle du flutiste de renom Mario Caroli en font un instant rare, unique. Un jeu volubile, rebondissant, corps et âme lié à son instrument, l'interprèrte prend de la hauteur, s'envole, comme sur des ressorts, par rebonds.De petites percussions stridentes, répétitives, scintillantes l'accompagnent dans son envol élégiaque.Il parle, murmure, respire halète, inspire, expire, alors que les cordes très toniques et tendues forment un contraste en crescendo.Avec brio, ce virtuose saute littéralement, jaillit tel un danseur sous les pulsions musicales qui le portent, l'emportent, le dérobent au sol. Un rapt musical étonnant devant nos yeux: "regardez la musique, écoutez la danse" nous suggérait Georges Balanchine!Puis c'est le retour au calme après cette mouvance tectonique: un solo dans le silence...
Et les percussions très terriennes de surenchérir après cet atterrissage en douceur. On décolle et embarque de nouveaux vers des terres lointaines, inconnues.La clarté d'un ciel pur se dégage, des frissons, de la finesse, du raffinement dans les éclats de musique C'est comme un étirement du temps, un élargissement de l'espace, pour mieux respirer, se poser Des bribes de sons émiettés en mémoire, scandent comme une marche lente, solennelle, timbrée, résonnante.Pas à pas la mélodie avance inéluctablement. Mais une fin en fuite vibrante créez un horizon ouvert, comme un ciel qui se dégage.
Dernière étincelle, dernier souffle de l'interprète, aux ailes d'ange qui se pose, tel un oiseaux , un satellite en fin de course.
De Jean Sibelius, voici à présent "Rakastava opus 14" daté de 1911
Hommage aux cordes, fluidité, flux et reflux de la musique, en vagues successives pour créer une douceur spacieuse, des glissements envolés, du suspens....en suspension!
Des grondements, des roulements de percussions changent le ton en une vaste amplitude sonore
Decrescendo, coloration dansante de la musique pour conférer à cette oeuvre un caractère joyeux, inspiré de folflore etnique, bucolique et pastoral
La contrebasse ponctue le tout, l'atmosphère est "populaire", radieuse, enjouée, entrainante.Un solo de violon, des vrombissements de percussions et le tour est joué: une montée en puissance s'étire, grave, pondérée, mélancolique aussi parfois.....Belle œuvre à écouter dans le recueillement de la félicité.
Sur ces "chemins de l'amant", l'amour, les adieux sont doux et tendres à l'oreille.
"Arena" de Magnus Lindberg est une suite tout en contraste!
Voici une version remaniée de l'originale pour grand orchestre, forme réduite, plus compacte, plus dense à l'écoute.
Pour 16 Bmusiciens, des solos, duos, concertos.
C'est une bouffée de vents, de percussions, très vive, envahissante qui déferle.Comme autant de compressions musicales, d'empilement, d'accumulations de sons par couche acoustique, par strate pour former un chaos tectonique, bigarré, chatoyant, stratifié.
De puissantes échappées belles musicales de sonorités polychromes, protéiformes nous submergent
Tel un désordre, un tumulte grandissant!Telle une course aux sons, qui se doublent, se fuient, s'évitent ou se dépassent dans des trajectoires fébriles.Les ponctuations sonores des vents et percussions, la langueur et longueur des cordes permettent une fusion des sons, des balancements et bercements salvateurs.Les sons y sont projetés comme des fusées dans l'espace.Brisures, ruptures aussi pour déstabiliser l'écoute sont de mise.L'atmosphère est virulente, strdente, tel un déferlement de matières sonores à adopter dans l'instant: un choc où malgré tout la plénitude spatiale des masses et volumes sonores reprendra le dessus sur les impacts des salves tirées dans les résonnances de l'ouie!
Un concert exceptionnel à l'image de tous ses protagoniste, un parfum "du nord" du pays des fiords et des rennes, de l'espace à conquérir, infini, radieux, prometteur!
Musique du nord, musique du froid? Loin de nous cette sensation à travers le parcours pluriel, entre répertoire moderne et contemporain que proposait l'orchestre sous la direction de Baldur Brönnimann.
En "entrée", "Deux mélodies élégiaques opus 34 " de 1881 d'Edvard Grieg
Le lyrisme des cordes, en vibrations crescendo confère à "Coeur bléssé" ainsi qu' à "Dernier printemps" des saveurs de voyage au pays du soleil deminuit.
Intimité, délicatesse des tonalités en fond une entrée en matière délicieuse, calme, sereine. Ambiance feutrée et spatialisation créent une atmosphère recueillie, confidentielle qui s'étire au son des violons.
LES AILES DU DESIR
Coup de foudre quant à la pièce suivante, "L'aile du songe" de Kaija Saariaho, actuelle artiste en résidence à l'orchestre.Évocation de l'éther et de la terre, cette oeuvre en deux volets est une ode aux oiseaux, à l'espace, aux rives de la création musicale.
Le jeu et le souffle du flutiste de renom Mario Caroli en font un instant rare, unique. Un jeu volubile, rebondissant, corps et âme lié à son instrument, l'interprèrte prend de la hauteur, s'envole, comme sur des ressorts, par rebonds.De petites percussions stridentes, répétitives, scintillantes l'accompagnent dans son envol élégiaque.Il parle, murmure, respire halète, inspire, expire, alors que les cordes très toniques et tendues forment un contraste en crescendo.Avec brio, ce virtuose saute littéralement, jaillit tel un danseur sous les pulsions musicales qui le portent, l'emportent, le dérobent au sol. Un rapt musical étonnant devant nos yeux: "regardez la musique, écoutez la danse" nous suggérait Georges Balanchine!Puis c'est le retour au calme après cette mouvance tectonique: un solo dans le silence...
Et les percussions très terriennes de surenchérir après cet atterrissage en douceur. On décolle et embarque de nouveaux vers des terres lointaines, inconnues.La clarté d'un ciel pur se dégage, des frissons, de la finesse, du raffinement dans les éclats de musique C'est comme un étirement du temps, un élargissement de l'espace, pour mieux respirer, se poser Des bribes de sons émiettés en mémoire, scandent comme une marche lente, solennelle, timbrée, résonnante.Pas à pas la mélodie avance inéluctablement. Mais une fin en fuite vibrante créez un horizon ouvert, comme un ciel qui se dégage.
Dernière étincelle, dernier souffle de l'interprète, aux ailes d'ange qui se pose, tel un oiseaux , un satellite en fin de course.
De Jean Sibelius, voici à présent "Rakastava opus 14" daté de 1911
Hommage aux cordes, fluidité, flux et reflux de la musique, en vagues successives pour créer une douceur spacieuse, des glissements envolés, du suspens....en suspension!
Des grondements, des roulements de percussions changent le ton en une vaste amplitude sonore
Decrescendo, coloration dansante de la musique pour conférer à cette oeuvre un caractère joyeux, inspiré de folflore etnique, bucolique et pastoral
La contrebasse ponctue le tout, l'atmosphère est "populaire", radieuse, enjouée, entrainante.Un solo de violon, des vrombissements de percussions et le tour est joué: une montée en puissance s'étire, grave, pondérée, mélancolique aussi parfois.....Belle œuvre à écouter dans le recueillement de la félicité.
Sur ces "chemins de l'amant", l'amour, les adieux sont doux et tendres à l'oreille.
"Arena" de Magnus Lindberg est une suite tout en contraste!
Voici une version remaniée de l'originale pour grand orchestre, forme réduite, plus compacte, plus dense à l'écoute.
Pour 16 Bmusiciens, des solos, duos, concertos.
C'est une bouffée de vents, de percussions, très vive, envahissante qui déferle.Comme autant de compressions musicales, d'empilement, d'accumulations de sons par couche acoustique, par strate pour former un chaos tectonique, bigarré, chatoyant, stratifié.
De puissantes échappées belles musicales de sonorités polychromes, protéiformes nous submergent
Tel un désordre, un tumulte grandissant!Telle une course aux sons, qui se doublent, se fuient, s'évitent ou se dépassent dans des trajectoires fébriles.Les ponctuations sonores des vents et percussions, la langueur et longueur des cordes permettent une fusion des sons, des balancements et bercements salvateurs.Les sons y sont projetés comme des fusées dans l'espace.Brisures, ruptures aussi pour déstabiliser l'écoute sont de mise.L'atmosphère est virulente, strdente, tel un déferlement de matières sonores à adopter dans l'instant: un choc où malgré tout la plénitude spatiale des masses et volumes sonores reprendra le dessus sur les impacts des salves tirées dans les résonnances de l'ouie!
Un concert exceptionnel à l'image de tous ses protagoniste, un parfum "du nord" du pays des fiords et des rennes, de l'espace à conquérir, infini, radieux, prometteur!
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