lundi 10 février 2014

"Clairière rouge" de Dégadézo:à l'affût"!!!

 CLAIRIÈRE ROUGE: les sons du cor!
Côté "courre", côté jardin, le gibier n'est pas à court de danse!

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« Lors d’une chasse à courre, une bête traquée par une meute d’une quarantaine de chiens, pénètre à l’heure du déjeuner dans une maison familiale en traversant la baie vitrée. Elle est abattue violemment sur le tapis du salon. »


"Clairière Rouge est le lieu de convergence des mythes, là où l’homme et la bête se côtoient et se confondent, là où l’animal cesse d’être un autre. Là se produira l’improbable rencontre – et sous la forme d’un rite de passage, le voyage initiatique peut commencer :
De l’approche imperceptible au mimétisme,
De la transformation à la parade amoureuse,
De la mise à mort au dépeçage,
De l’éviscération à la contemplation
De la communion à la disparition…
Dans ces différents mouvements de corps, de gestes, d’émotions, progressivement nos quatre chasseurs perdent pied et se retrouvent au plus profond de cette Clairière Rouge, à l’intérieur de la peau de la bête dépecée et plus intimement à l’intérieur d’eux-mêmes. Telle une carte topographique, cette peau retournée déploiera une multitude de voies possibles, tel un réseau de circuits veineux qu’il sera possible de sillonner pour affiner cette quête de soi et traquer cette identité du sauvage tapit dans les maillages. Un territoire vierge et indompté s’offre à nous avec toute la force et le désir de l’inconnu."

"Dégadézo":le nom de la compagnie en dit déjà long sur l'incongru, le décalé mais aussi le commun, le quotidien.
Elle courre, elle courre la danse!
La chasse à courre est bien l'illustration de la sauvagerie de l'homme, ce chasseur dans l'âme qui n'aura plus de tendresse pour le gibier!
Partie de chasse donc où l’hallali sera le destin de ces trois femmes, de cet homme en quête de leur nature sauvage, en habit de chasse, couleur rouge sang, couleur du sacrifice, de la mort.
Antje Schur, Régine Westenhoeffer, Alice Godfroy et Jules Beckman s'en donnent à corps joie dans cette évocation picaresque de l'illustration des instincts, des traques, des pièges, des appâts pour la bête aussi qui sommeille en chacun de nous!
Et les costumes de Antje Schur de rappeler les photographies des hommes sauvages de Charles Fréger!


Indomptable compagnie de quatre membres épris de liberté aussi: celle de ne pas se faire prendre dans les filets des clichés ou des sentiers battus, des battues de chasse! 
Tableau de chasse et trophée à l'honneur! 
A l'orée du bois y-aura-t-il quelques pas "chassés"?
La curée n'est pas loin et les cors de chasse sonneront cette hallali, jusqu' à la lie de sang!

Au TJP en coproduction avec Pôle Sud du 13 au 15 Février 


dimanche 9 février 2014

"iCi" bas: poètes, vos papiers! Fatou Ba son plein au TAPS Gare.


C'est "ici" ou là Bas? C'est bien à Strasbourg que cette petite communauté bloquée dans un tram sous la tempête de neige va révéler toutes ses pensées sur le monde,l'étranger,la différence,l'errance.Des peuples, des cultures se mélangent comme chaque jour dans chaque rame du tram.
Qu'est-ce qui s'y trame?: on y rame dans les clichés bien sûr:le racisme, les images que l'on se fait de l'inconnu tant qu'on n'a pas découvert qu'il était comme nous.Idées reçues,poncifs, amalgames, on se regarde comme dans un miroir quand les comédiens prennent la parole et nous renvoient en pleine face, notre bétise, nos sarcasmes, notre idiotie.
Des petites histoires se tissent dans ce tram qui peu à peu s'enlise sous les congères!Surréaliste, cette situation incongrue qui devient au fil du temps, comme une unité de temps et de lieu, huit-clos de la narration.
On y chante aussi, on y danserait parfois plus si la mise en scène le permettait.
La pièce ouvre des brèches qu'elle ne referme pas certes mais qui laisse sur la faim.Esquisses de visions fugitives inachevées quand la comédienne se fond dans le décor de boas blancs suspendus comme un rideaux de neige ou de spectres.Les ailes du désir passent comme un ange gardien qui s'efface trop vite!
Ce rideau magique, virginal dissimule toute une batterie de personnages manipulables comme des marionnettes, petites bêtes animées comme autant d'animaux de bébête-show.
C'est touchant et naïf à la fois, crédule comme le ton de la pièce parfois un peu léger.
On y côtoie le social, le politique avec quelques fameuses citations communes d'une banalité foudroyante mais hélas réelle!
L'actualité,le quotidien en prennent un bon coup bas!
Et puis des images magiques se distillent sur un écran, qu'il soit une carte géographique, la peau d'un tambour ou l'écran de nos rêves. Les écrans de projections feraient-ils écran à la réalité ou sont-ils supports révélateurs de nos pensées? Ecran total de nos crèmes à bronzer et à dissimuler la vérité?
Des images de visages qui se révèlent comme une photographie dans son bac de révélateur.


Des mains, des doigts qui balayent la buée de nos illusions, et font de la réalité une image nette,vivante.
Dans la ouate du confort, on se laisse trop souvent aller dans le flou, le fondu enchainé de la duperie, du mensonge ou de l'indiférence! On tisse ici nombre de métaphores visuelles très pertinentes grâce à ces icônes vidéographiques signées Gille Porte qui font la mise au pont sur la netteté!
Babette Masson, Claire Schirk pour la mise en scène et la scénographie font bon usage de l'espace et le rideau de boas blancs, plumes au vent s'avère une boite de Pandore judicieuse qui accouche de bien des personnages étranges, étrangers.
Fatou Ba et Michel Prica nous content cette histoire avec respect, distenciation, retenue.
On leur enlèverait bien leur micro.... pour plus de présence encore!
Le final sur fond de percussions de Yoko Oshima, battante batteuse, dévoile le rideau de boas qui dansent une sorte de samba endiablée, tonique presque menaçante: le "danger" plane et menace notre existence si l'on n'ouvre pas sa porte à la différence, non à l 'identité mais à l'appartenance à ces couches, ces strates de culture métissées qui composent le monde:"et pourtant, elle tourne" la terre!

samedi 8 février 2014

"Goltzius":Peter Greenaway ramène ses fraises et fait danser Salomé!



Son dernier film est un petit prodige de baroque et tous ces personnages arborent des "fraises" magnifiques, tout comme le sont tous les costumes de ce nouvel ouvrage démesuré à la mesure de ce démiurge du cinéma britannique!
 Pays-Bas. XVIe siècle. Hendrik Goltzius est un célèbre peintre et graveur d’œuvres érotiques. Il aimerait ouvrir une imprimerie pour éditer des livres illustrés. Il sollicite alors le Margrave (Marquis) d’Alsace et lui promet un livre extraordinaire avec des images et des histoires de l’Ancien Testament regroupant les contes érotiques de Loth et ses filles, David et Bethsabée, Samson et Dalila, Saint Jean-Baptiste et Salomé. Pour le séduire davantage, il lui offre de mettre en scène ces histoires érotiques pour sa cour.
C'est extravagant et la scène de la danse de Salomé, un régal de pornographie,à la limite de la vulgarité.Mais cela vaut toute l'intrigue tant la scène est superbement filmée et la danseuse, contorsionniste de foire à souhait!