dimanche 9 février 2014

"iCi" bas: poètes, vos papiers! Fatou Ba son plein au TAPS Gare.


C'est "ici" ou là Bas? C'est bien à Strasbourg que cette petite communauté bloquée dans un tram sous la tempête de neige va révéler toutes ses pensées sur le monde,l'étranger,la différence,l'errance.Des peuples, des cultures se mélangent comme chaque jour dans chaque rame du tram.
Qu'est-ce qui s'y trame?: on y rame dans les clichés bien sûr:le racisme, les images que l'on se fait de l'inconnu tant qu'on n'a pas découvert qu'il était comme nous.Idées reçues,poncifs, amalgames, on se regarde comme dans un miroir quand les comédiens prennent la parole et nous renvoient en pleine face, notre bétise, nos sarcasmes, notre idiotie.
Des petites histoires se tissent dans ce tram qui peu à peu s'enlise sous les congères!Surréaliste, cette situation incongrue qui devient au fil du temps, comme une unité de temps et de lieu, huit-clos de la narration.
On y chante aussi, on y danserait parfois plus si la mise en scène le permettait.
La pièce ouvre des brèches qu'elle ne referme pas certes mais qui laisse sur la faim.Esquisses de visions fugitives inachevées quand la comédienne se fond dans le décor de boas blancs suspendus comme un rideaux de neige ou de spectres.Les ailes du désir passent comme un ange gardien qui s'efface trop vite!
Ce rideau magique, virginal dissimule toute une batterie de personnages manipulables comme des marionnettes, petites bêtes animées comme autant d'animaux de bébête-show.
C'est touchant et naïf à la fois, crédule comme le ton de la pièce parfois un peu léger.
On y côtoie le social, le politique avec quelques fameuses citations communes d'une banalité foudroyante mais hélas réelle!
L'actualité,le quotidien en prennent un bon coup bas!
Et puis des images magiques se distillent sur un écran, qu'il soit une carte géographique, la peau d'un tambour ou l'écran de nos rêves. Les écrans de projections feraient-ils écran à la réalité ou sont-ils supports révélateurs de nos pensées? Ecran total de nos crèmes à bronzer et à dissimuler la vérité?
Des images de visages qui se révèlent comme une photographie dans son bac de révélateur.


Des mains, des doigts qui balayent la buée de nos illusions, et font de la réalité une image nette,vivante.
Dans la ouate du confort, on se laisse trop souvent aller dans le flou, le fondu enchainé de la duperie, du mensonge ou de l'indiférence! On tisse ici nombre de métaphores visuelles très pertinentes grâce à ces icônes vidéographiques signées Gille Porte qui font la mise au pont sur la netteté!
Babette Masson, Claire Schirk pour la mise en scène et la scénographie font bon usage de l'espace et le rideau de boas blancs, plumes au vent s'avère une boite de Pandore judicieuse qui accouche de bien des personnages étranges, étrangers.
Fatou Ba et Michel Prica nous content cette histoire avec respect, distenciation, retenue.
On leur enlèverait bien leur micro.... pour plus de présence encore!
Le final sur fond de percussions de Yoko Oshima, battante batteuse, dévoile le rideau de boas qui dansent une sorte de samba endiablée, tonique presque menaçante: le "danger" plane et menace notre existence si l'on n'ouvre pas sa porte à la différence, non à l 'identité mais à l'appartenance à ces couches, ces strates de culture métissées qui composent le monde:"et pourtant, elle tourne" la terre!

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