dimanche 19 octobre 2014

"Un illustre inconnu": Kassovitz quitte ou double!

Il faut aller voir cet "illustre inconnu" pour Kassovitz, un acteur au service des ses scénariste et metteur en scène, efficace, "consentant" et très obéissant! Un exemple de jeu et de modestie pour ce "jeune" homme bourré de talent qui incarne ici un personnage qui désire se fondre dans d'autres.
Il est agent immobilier, à un nom double sébastien nicolas et s'enferme chez lui pour se confondre en d'autres: se grime, se maquille dans son cabinet de transformiste, un cabinet de maquilleur, de prothésiste alchimiste de la métamorphose
Et il endosse et croit à ses personnages jusqu'à se faire prendre à son propre piège: devenir lui-même, aimer, donner et recevoir mais in fine à son corps défendant!
C'est hallucinant de finesse, de véracité, même si ce psychopathe réalise des choses incroyables et improbables.
Le corps de Kassovitz se fond dans ses interprétations diverses, se morcelle, transmute...
Génial acteur, physique, organique à souhait et qui bouge différemment à chaque prise de rôle!
Un maquillage, changement littéral de "peau" lui permet de rentrer dedans et de s'y coller obligatoirement.
La peau du monde lui scied à merveille!
Sébastien Nicolas a toujours rêvé d’être quelqu’un d’autre. Mais il n’a jamais eu d’imagination. Alors il copie. Il observe, suit puis imite les gens qu’il rencontre. Il traverse leurs vies. Mais certains voyages sont sans retour.
Le film parle d'un original, un agent immobilier qui, en visitant l'intimité de ses clients, saute parfois le pas et décide de prendre leur place. Comment ? En observant leurs habitudes et en apprenant par coeur leur visage, il se construit un masque - à la fois physique, tout de résine et de maquillage, et psychique, en adoptant leur mode de vie. Il vit dans leur appartement, croise leurs amis...

Le scénario est fascinant et crée un suspense permanent, jusqu'au retournement final inattendu. Mathieu Kassovitz est d'une froideur glaciale et le rôle lui va à merveille (il avait d'ailleurs déjà eu un rôle du même type dans Un héros très discret, où il jouait un personnage qui endosse la personnalité d'un autre).
Face à un tel personnage, on frissonne, on ne comprend pas. Toute forme d'empathie est empêchée, et on ne sait jamais trop si l'on aime ou si l'on déteste Sébastien Nicolas, cet homme si banal, et pourtant d'une si grande fantaisie. Ce qui est étrange, c'est qu'en se mettant dans la peau de ses clients, il en donne un meilleur visage, plus gentil, plus compréhensif, plus humain. Lorsqu'il prend la place d'un homme qui a rejeté son enfant, il devient paternel, tendre, et offre à l'enfant ce qu'il n'a jamais eu.
Un personnage nuancé, pour un film tout en tensions. Vraiment pas mal !



Réalisé par Matthieu Delaporte
Avec Mathieu Kassovitz, Marie-Josée Croze, Eric Caravaca  





Matthieu Delaporte et Alexandre de la Patellière ont un parcours pour le moins éclectique. Scénaristes du film d'animation de science-fiction Renaissance, sorti en 2006, ils ont imaginé quatre ans plus tard l'intrigue du Prénom, qui a fait un carton sur scène puis au cinéma. Entre les deux, ils ont cosigné la comédie La Jungle et adapté le roman très sombre de Bernard Lenteric, La Nuit des Enfants Rois, sorti sous le titre The Prodigies. Mathieu Kassovitz doublait le héros de ce film d'animation et on le retrouve à présent dans Un Illustre Inconnu, dans la peau de plusieurs personnages.

samedi 18 octobre 2014

Jane Super Social de Nicolas Lauffenburger: Ca tricote des gambettes

A voir sans faute et sans modération, ça sent le poisson qui danse énormément :



JANE - Super Social Jeez from nicolas lauffenburger on Vimeo.


Julie Nioche comme une enfant! Danse en construction!

Opening Night, c’est quoi ? D’abord, c’est une initiative de Versant Est, qui regroupe les structures d’art contemporain alsaciennes dans un réseau aux actions multiples : organisation d’évènements, outils de communication mutualisés, ressources pour les professionnels, formations… Le but premier, c’est de favoriser l’accès à l’art contemporain pour tous. Opening Night joue en ce sens un rôle primordial, comme l’explique Nathalie Le Berre, coordinatrice de Versant Est:

Comme un air de jeu....
Dans le cadre de l’exposition de Daniel Buren, la danseuse Julie Nioche et le musicien Alexandre Meyer présenteront Central Park (19h>19h30). Cette performance s’adapte à chaque lieu où elle est présentée, et le jeu de construction géant de Buren lui offre un cadre exceptionnel. Elle joue sur la spatialisation du son, grâce à plusieurs guitares électriques dispersées. Au gré d’un son de guitare à peine effleurée ou d’une danse esquissée, resurgissent les souvenirs de quelques grands personnages du rock. Attention, la capacité est limitée à 60 spectateurs, alors la danseuse se joue de leur présence pour se frayer un chemin, comme une balade folle à travers le dispositif de petites maisons colorées. Un jeu d'enfant pour elle que de se glisser entre les interstices, les failles ou béances ouvertes entre les sculptures. Glissages, courses folles, la voici libérée, affranchie de toutes référence ou citation, pour se jeter à corps perdu dans ce grand jeu, escapade ludique où tout est permis à l'enfant sous le regard bienveillant des parents... Des spectateurs qui se glissent eux-aussi dans l'espace de jeu.

Ga-mine de rien dans l'ère de jeu, du "je"!
D'emblée, devant cinq guitares électriques de couleurs branchées sur de petits haut-parleurs, Julie Nioche apparait alors que le musicien s'installe sur une enceinte dont il ne décollera pas.Elle fait corps plastique avec les guitares disposées au sol: Man Ray veille au grain: elle est de dos et se forme comme le corps de l'instrument, en torse à oreillettes...Violon ou guitare?

Elle est en "rouge de travail" comme Buren lorsqu'il opère: un uniforme ou costume de labeur, mais pas bleu ni blanc, rouge comme ses lèvres dessinées au crayon de fard.Référence au travail du plasticien, empathie avec son ombre qui plane avec bienveillance sur l'exposition-installation.Dans l'univers blanc, rouge sur blanc rien ne bouge, blanc sur rouge tout foule le camp!
Elle parait frêle à l'intérieur de ce dispositif tout blanc qui donne le vertige tant on y perd pied et repères spatiaux: équilibres, déséquilibres, torsions, torsades, petits mouvements tétaniques, vrilles..
Elle s'empare aussi des fils reliant les guitares à la source énergétique et sonore qu'est l'électricité, moteur du son et des vibrations musicales.Elle berce plus tard les petits hauts-parleurs sur son corps allongé: c'est touchant et poétique.
Elle frémit, oscille, tremble: la danse de Saint Guy au corps, comme un scoubidou, tordu, malléable, souple et gracile.La danseuse se meut, s'émeut et bascule dans le champ et l'espace sonore et architectural!
L'exposition prend alors tout son sens: espace ludique à découvrir à chaque recoin, carrefour: pas de feu vert ni rouge dans la rue du jeu des enfants, mais pas de gendarme non plus dans cette zone piétonnière idéale pour retrouver innocence et inventivité, plaisir et folie du mouvement, enivrement de la vitesse, des glissades. Daniel Buren inspire et laisse ainsi à d'autres artistes le champ de l'action, de l'interprétation libre de son œuvre en accès si direct et interactif. Elle saute à l'envi, bondit, s'élance dans l'espace nous invite à l'investir aussi: on la suit avec désir et envie, empathie!Quel punch d'enfant qui ne s'arrête jamais de bouger et d'explorer!
Central Park de jeu!
Quel spectateur n'a en effet pris parti dans ce labyrinthe ludique, cette cité colorée, ses ruelles, venelles et autres recoins à vivre, comme un jeu d'enfant!Qui ne s'y est pas surpris à jouer, à s'amuser, à convoquer quelques lutins malins à s'ébattre dans la place, le square ou l'avenue: ne pas en faire l'impasse!
Alors la danse ne pouvait que prolonger cet esprit là: expérimentation, découverte et confrontation "in situ" à l'espace, à la vie qui nous est donnée pour ne jamais perdre notre âme d'enfant!
Merci  au MAMCS de nous offrir ces instants uniques de performance: ici la danse à la parole et à droit de cité grâce à Joelle Pijaudier Cabot et son équipe!
 
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