Un Programme à la dimension des nouvelles ambitions du groupe légendaire, remodelé, "recomposé" depuis peu sur des bases confortant la création musicale d'aujourd'hui, avec l'appui des technologies nouvelles, et la constitution d'un patrimoine multiple: moderne et contemporain:
Risonanze erranti de Luigi Nono (1987) et
S(c)enario de Flo Menezes (2016) : création mondiale, en présence du compositeur, composaient cette soirée inédite, introduite par son président Jean Yves Bainier, engagé dans la poursuite de cet objectif, avec conviction et efficacité
En présence du chef Detlef Heusinger, voici l'oeuvre de Nono, en première partie, toute de sonorités subtiles, de frottements, grincements percussifs avec en prime la présence houleuse et orageuse de la voix de Suzanne Otto, se déjouant de la difficulté vocale inscrite dans la partition.Grave et profonde, elle remue et émeut, solide et ancrée comme terrestre et enracinée dans le sol mouvant
Atmosphère étrange de solitude, instants de grâce de silences, sons hyper aigus, stridents de la flûte ou grondant du tuba de Florian Coutet.
Après une courte pause liée à l'installation du prochain dispositif-une véritable "installation" plastique"-, place à la parole , celle du directeur artistique des "percu" Jean Geoffroy exposant la genèse du projet qui confie l'ensemble à l'imaginaire du créateur compositeur Flo Menez: faire se catapulter six modules, six blocs de percussions, chiffre et nombre d'or, celui aussi de l'effectif du groupe des "percu". "S(c)enario sera cette narration, scénario sonore dédié aux espaces des percussions, à la variété et démultiplications des possibilités du récit imaginaire de la musique!
C'est la pluie qui ouvre e bal, chaque musicien entrant en scène, parapluie au poing et imperméable sur soi: la bande son délivre tonnerre, éclairs et orage tectonique naturels!
Aux "percu" de faire le reste: animer cette kyrielle d'instruments groupés autour de leur "animateur", pour en faire un paysage sonore ludique, endiablé, ténu parfois où se jouent des enjeux chromatiques et sonores de toute beauté. Une esthétique du son, rare et chatoyante, inouïe qui transporte dans des contrées oniriques salutaires et efficaces: le voyage nous embarque et nous ramène là où l'on ne s'y attendait pas: le noir absolu du silence retrouvé après une tempête divine orchestrée par des interprètes, joyeux et heureux de partager, comme le "cum panis" ces instants musicaux inédits en partage
Au théâtre de Hautepierre ce mercredi 22 Novembre
Les Percussions de Strasbourg, Florian Coutet (tuba), Ayako Okubo (flute), Susanne Otto (alto).
Live-electronic realization: SWR Experimentalstudio, Freiburg
Michael Acker, Reinhold Braig, Sven Kestel, sound direction
"Errances sonores…
Errances des Résonances destinées à qui veut bien les entendre, et si chère à Luigi Nono,
Errances incarnées par les musiciens sur scène, avec S(c)enario de Flo Menezes, chacun allant son chemin, chemins qui pourraient bien être les nôtres…
Se laisser emporter par le son qui nous entoure, nous surprend, nous interpelle dans le secret de nos pensées. Ce n’est pas tant le son en lui même, que la façon qu’il a de nous envelopper, de nous entraîner dans des espaces sans cesse à redécouvrir.
Quelle que soit sa forme, le son est un voyage."
jeudi 24 novembre 2016
mercredi 23 novembre 2016
"Donne moi quelque chose qui ne meurt pas": à couteaux tirés ! Larmes de fond
"Capter partout la vie, voyager à travers les sensations, sont des constantes dans la démarche de Christophe Béranger et Jonathan Pranlas-Descours. Dans cette nouvelle création, en bascule entre gravité et légèreté, s’exprime un certain désir de renouveau, dans la jubilation du corps dansant.
Le titre de cette création, repris d’un ouvrage mariant les mots et les images, rencontre entre l’écrivain Christian Bobin et le photographe Edouard Boubat, inspire le récit lumineux des corps dansants. Le doux bruit du monde, l’évanescence du printemps mais aussi la chute de l’ange, ou encore un ciel d’épées de Damoclès, sont autant d’images qui rejoignent l’arche de sensations déployées dans Donne-moi quelque chose qui ne meurt pas. Dans cette création réalisée par le tandem chorégraphique Christophe Béranger et Jonathan Pranlas-Descours, défilent les différents visages d’un monde désenchanté, de ses violences tout comme s’esquissent des orbes de tendresse, de jeu, de joie.
Sol miroir, éclats lumineux et sonores, lumières nocturnes sous un ciel de longs couteaux. Il y a de l’urgence à dire à travers les corps. Solos et quintets, musiques et tableaux séquencés questionnent nos façons d’être ensemble. Entre pression et tension, les cinq interprètes cherchent à s’extraire des forces obscures qui les environnent. Dans cet espace en suspens surgissent des danses mystérieusement familières, aux accents populaires d’hier et d’aujourd’hui. Un chemin vers la clarté."
Ils sont à même le sol, à demi nus dans l'obscurité naissante. Les corps s'animent pour mieux faire corpus, rampant sur le dos, en ligne, chœur dansant , reptile étrange mais à l'unisson d'un territoire terrestre , terrien,à souhait. Traçant dans l'espace à l'aide d'un savant jeu d'entrelacs de bras, comme une chaîne, des maillons d'une mécanique humaine.Engrenage en mouvement. Le moteur, l'énergie de cette danse chorale ne cessera, une heure durant, de nous pétrifier, séduire, en empathie totale avec musique et gestuelle inventive.La verticalité, l'érection des corps va subir l'autorité d'un ciel de couteaux suspendus à des cintres, couteaux, lames de fond de scène, comme un rideau à franchir sans cesse sans le heurter. Pluie de hallebardes ou de salves à la verticale?Pour sa seule et immense présence d'obstacle, de handicap, mais aussi pour la plasticité offerte de ses tranchantes et lumineuses gouttes de métal réfléchissant sous les projecteurs.
Deux musiciens en bord de scène devancent, épousent, déclenchent les mouvements de ce petit groupe, tribu ancestrale ou joyeuse bande de copains: deux femmes, trois hommes qui butinent la vie, dansent chacun leur solo, improvisés: des moments de grâce offerts tantôt en spirale tournoyante par Virginie Garcia, tantôt en courtes tétanies maniaques ou fluidité enchanteuse par Francesca Viviani. Les danseurs ont droit eux aussi à ce temps de récréation salvatrice dans ce monde très agencé: batterie, brigade dansante où le groupe fait face, franchit l'espace On songe à "May B" de Maguy Marin quand les danseurs arpentent et frappent le sol de leurs pieds endiablés, comme possédés par la fulgurance, l'urgence d'avancer, en rang, serrés!
Des bonds à la verticale, sauts ininterrompus brossent une scène épatante où l'empathie est à son zénith: ils travaillent, à perdre haleine devant nous: la dépense physique est spectaculaire et pourtant discrète, comme leurs courses folles jubilatoires, galvanisées par les percussions, hautes en couleurs et répercutions sonores!
Quelques bribes de comptines pour éclairer nos mémoires collectives, les strates du souvenir de l'enfance en éveil, et les voilà plonger dans un humour féroce et drôle, décapant: mimiques, chenilles, gestuelles ancestrales et rituelle
Quels univers traversons nous pour accéder au paradis, à couteaux tirés, aiguisant notre regard qui frôle les lames comme en alerte, alarmés par ses armes de toute beauté: miroir réfléchissant les faisceaux de lumière blanche sur une tribu étrange, sortie d'une jubilation contagieuse
On repart réjoui, regonflé après un échange convivial en "bord de plateau" avec les danseurs et chorégraphes, épuisés mais pas trahis par cette performance, cette perte retrouvée du tonus, de la vie: "nous sommes vivants" devant toute menace ou épée de Damoclès suspendue: si les corps se ploient devant ces obstacles c'est pour mieux se redresser dans l'allégresse et le partage.
"Donnes moi...." est bien l'éloge ou le manifeste du mouvement, celui qui avance et draine l'énergie et la force, envahit corps et pensée dans le respect de l'autre: autant le spectateur "actif" que l'interprète se révélant ainsi à lui même et à ses propres convictions
A Pôle Sud, le 22 Novembre, l' "endroit" où se fabrique la danse actuelle à Strasbourg, où se bâtissent utopies et réalités quotidiennes d'un monde de travail chorégraphique. La vie, la vraie au tout nouveau CDC!
mardi 22 novembre 2016
"Perdu le jour où nous n'avons pas dansé" de Caroline Deyns: Isadorable!
Coup de coeur de ce mardi "Perdu , le jour où nous n'avons pas dansé" Caroline Deyns Caroline Deyns vit et travaille en Franche-Comté. Après Tour de plume (Philippe Rey, 2011), elle publie ici son deuxième roman.Elle révolutionna la danse, connut un succès mondial, électrisa les audiences, inspira les plus célèbres artistes qui tentèrent de capter son éclat singulier.Mais comment imaginer une telle gloire attendait Isadora Duncan, née en 1877 à San Francisco dans une famille de quatre enfants, abandonnée par le père ruiné, élevée par un mère bohème et pianiste ?. Après des années de faim et de misère à travers les Etats-Unis, Isadora, 22 ans, persuade les siens de la suivre en Europe : à Londres puis à Paris où, en deux années, elle obtient la renommée à laquelle elle se savait destinée. Avec grâce et détermination, elle bouleverse tous les codes de son art, s’affranchit de la danse de ballet, redonne sa place à l’harmonie du geste et à la beauté du corps. Un corps qu’elle offre à tous les regards, quasi nu sous les tuniques et voiles légers.
Elle révolutionna la danse, connut un succès mondial, électrisa les audiences, inspira les plus célèbres artistes qui tentèrent de capter son éclat singulier.
Mais comment imaginer une telle gloire attendait Isadora Duncan, née en 1877 à San Francisco dans une famille de quatre enfants, abandonnée par le père ruiné, élevée par un mère bohème et pianiste ?. Après des années de faim et de misère à travers les Etats-Unis, Isadora, 22 ans, persuade les siens de la suivre en Europe : à Londres puis à Paris où, en deux années, elle obtient la renommée à laquelle elle se savait destinée. Avec grâce et détermination, elle bouleverse tous les codes de son art, s’affranchit de la danse de ballet, redonne sa place à l’harmonie du geste et à la beauté du corps. Un corps qu’elle offre à tous les regards, quasi nu sous les tuniques et voiles légers.
D’une écriture fiévreuse, le roman de Caroline Deyns raconte le destin hors norme d’Isadora : sa force de caractère, ses amours – nombreuses et mouvementées –, ses enfants, ses triomphes, les écoles qu’elle fonda, son engagement aux côtés de la révolution bolchévique, ses années d’errance, sa mort tragique à Nice qui stupéfia le monde entier…
L’histoire d’une énergie, d’une femme fascinante pour qui la vie n’était qu’une danse. Qu’elle exécuta magistralement, libre et entière.
« Si les hommes la désirent, c’est par curiosité. Car que peut donner sous les baisers une telle femme, si jeune, saine et vive, une femme qui récite de tête des poèmes entiers de Walt Whitman et refuse de porter le corset, qui débarque d’Amérique et ne tarit pas sur la Grèce Antique, qui danse en tunique transparente, pieds nus et couronnée de fleurs, parcourue d’ondulations frissonnantes comme une vague prête à mourir à leurs pieds ? »
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