mercredi 6 mars 2019

"Twice" : quitte ou double !



Emmanuel Eggermont & Robyn Orlin / L'Anthracite
TWICE
Projet particulier à destination du jeune public, TWICE présente dans un même programme les pièces courtes de deux chorégraphes aux esthétiques très différentes, elles sont interprétées par un même duo de danseuses. 

Emmanuel Eggermont - La méthode des phosphènes

 Les sentiers de l'âne
Eveiller l’œil et le corps à la couleur, ses vibrations, son imaginaire conduit le spectacle d’Emmanuel Eggermont. Son duo se déploie dans un paysage qui se dessine au fil des pas comme un jeu ou une balade, avec ses gammes de sons, de gestes et de couleurs.
C'est sur fond blanc-tapis de danse et fond de scène-que se "déroule" la pièce, deux rouleaux blancs au sol.Ronflements de machinerie pour border le tout.Un personnage en habit blanc,salopette, comme une protection d'abri anti-atomique, chaussures isolantes aux pieds apparaît. De dos, il se présente. Un lai de tapisserie papier peint descend des cintres, rose. Une seconde créature de fiction entre, en rose, protégée, encapuchonnée, en robe Leurs deux visages sont masqués: sorte de tube protubérant et voile d'apiculteur 
Comme dans la nature? opère un mimétisme: rose sur rose pour mieux disparaître à nos yeux, dans des mouvements lents et désarticulés, l'un et l'autre s'affairent à occuper cet espace vierge.Promeneur tout vert pâle, sans expression, la créature intrigue et questionne. Qui sont-ils?
Un rectangle bleu avance, figure géométrique, telle les mouvements aigus et angulaires dessinés dans l'espace .Un puzzle geste-matière peu commun.
Cet univers d'abri anti atomique tamisé par les couleurs pastels des uniformes-rose-vert-bleu pâle-se fabrique et perdure.Feutré, calfeutré, doux et imperceptible matière qui parle aux sens visuels et tactiles. Des gestes profilés, tectoniques, mécaniques sont esquissés, anguleux, stricts et droits. Les saveurs pastels cadrent des gestes, formes abstraites, géométriques. Des positions assises, allongées en suspension, sorte de yoga tantrique se distinguent. Pauses, attitudes ou postures arrêtées, médusantes. Oiseau échoué, méditation suspensive et aérienne; tout confère à l'évasion, à la distanciation. Des glissades, des arrêts sur image, robotiques, des hésitations, coudes en revers Le tableau bleu se fend en deux découpes, dentées, comme deux pièces de puzzle, formes triangulaires, iceberg émergé qui navigue, manipulé par le personnage non identifié. Anonymat, absence de sexualité, neutralisation des corps. Les gestes fluides et précis tracent lignes, plans et figures. Le lai rose devient chemin, tapis magique, traces et repère dans les évolutions, de l'un d'entre eux.C'est le pied qui pousse et déroule l'objet et ouvre l'espace devant lui. En saccades, brisures, angles droit, l'autre danse. Hybrides inquiétants, ces animaux mécaniques tout droit sortis d'un bestiaire de musée du jouet d'antan, se découvrent le visage: deux femmes dans des gestes à présent plus tendres et élastiques.



Manipulation d'une nouvelle forme bleue apparue du dessous du tapis blanc, extraction géomorphologique, trouée, percée d'un rond Alors que sur le mur du fond, une forme ronde, lunaire, s'éclaire et resplendit, détournant l'attention. Animés par les corps dansants, les panneaux prennent vie et comme des marionnettes sans fil, objets plats et rigides, masquent les parties de corps des danseurs.Les costumes changent dévoilant les personnes: jupette bleue, chemise rose, baskets bleus et de belles reptations se dessinent au sol La musique déchire, bruits et sons variés accompagnant la gestuelle en osmose et connivence. La lune blanche veille, l'autre en habit bleu et blanc, lunettes trois D sur le front, cravate blanche et baskets jaune, fait son pendant. Deux êtres de BD, de science fiction qui se déplacent à loisir dans cet univers pastel. La forme bleu marine devient berlingot dégonflé, essoufflé, pyramide ou sac à dos.
 Décadrage et décalage des gestes segmentés, engrenage et mécanique d'usine à broyer le temps et l'espace. Le formatage n'est pas loin pourtant sur ces chemins tout tracés de lais, directions obligées au sol. Pas de "sentier de l'âne" où bifurquer à sa guise dans cet univers fabriqué !
Personnages découpés à la "Dada", Arp, Taeuber ou Ball, les deux évoluent sans interaction, ni contact. La plasticité des volumes, l'espace sonore et lumineux évoquent cosmos ou univers lunaire Démantibulation d'un monde haché où au final, l'accord des formes réconcilient le monde artificiel.
Une pièce très visuelle et plasticienne, douce et apaisante mais oh, combien insolite et intrigante.

Changement de décor à vue, le temps pour les techniciens d'arracher les scotchs du tapis blanc, temps pour les enfants de répondre à un questionnaire sur la technique et le décor, la lumière ou la danse!

On rembobine pour laisser le tapis noir, un trapèze et des fils reliant des micros....
Occupés intelligemment pour éviter "les vagues" de l'indiscipline, les enfants se concentrent. !


Robyn Orlin : In order to be them we must be us... 
Un tissu de couleurs chatoyantes!
Artiste iconoclaste, Robyn Orlin, chorégraphe sud-africaine à l’humour tapageur, s’adresse pour la première au jeune public. Gageons que dans cette nouvelle création, objets, musiques, corps et images sont l’occasion de nombreuses facéties, le temps de partager avec les plus jeunes, cette jubilation particulière qui a fait sa réputation.


Et c'est à un vrai carnaval de couleurs et de sons qu'invite la seconde pièce du programme, signée Robyn Orlin Deux micros, deux femmes dans le public annonent "Allo" de toutes les façons possibles, histoire de se "connecter".. Une caméra sur pieds filme en direct la salle, plan fixe. L'occasion pour les enfants de s'y voir et reconnaître dans une belle turbulence ! Sur l'écran c'est comme une chorégraphie de foule de match sportif qui s’agite. Deux femmes parmi les fauteuils des spectateurs dans des vêtements très colorés, amoncellement de tissus dépenaillés s'amusent et vocifèrent. Très présentes et indisciplinées, elles séduisent et enchantent la jeunesse fébrile présente. Un "Allo", décliné à l'envi fait mouche, sorte de litanie ou mélopée étrangère, vocabulaire musical, chanté, psalmodié, inventif et reproductible dans sa simplicité et accessibilité.: interrogations, exclamations, insistance abrupte, élans verbaux amusants. C'est de la musique et du rythme en live. Urgence et fébrilité de l'action, micro en main, immergée dans la Foule.Vocalises incongrues où l'on retrouve les inclinations de Robyn Orlin pour la voix, l'opéra le souffle et le chant détourné.Intonations désespérées, elles se démettent à loisir de ces oripeaux, patchwork de couleurs vives et voyantes, chaleureuses et tout de laine et de douceur tactile.Tout sur la parole, le geste désordonné, en rupture, indisciplinaire et révolté! "A l'aide" repris par les enfants, comme un slogan de manifestation politique. Danse à l'africaine, saccadée, gaie et joyeuse, contagieuse et simple. Frusques et bouts de ficelles, second hand pour cet "united colors off Robyn". Pleins feux dans la salle pour cette prestation emballante, souffle et jeu de percussion avec les micros frappeurs, comme des armes de guerrières Puis c'est l'accalmie et le repos, sur scène: on les regarde, artisanes au travail: elles nouent leurs tissus sur le cintre, en font un écheveau de couleurs, tissage manuel d'une tapisserie joyeuse, haute en couleurs à la Sheila Hicks. Elles chantent en anglais, et leurs images inversées -scène-public- dévoilent l'envers du décor. Comme une suspension de linge, rituel domestique sur un métier à tisser traditionnel. Nœuds de tapisserie de laine colorée. Tout devient balançoire, déballage, garde robe et garde corps, garde fou d'une danse hallucinée. Baluchon, bataille de tissus de deux mégères apprivoisées. Des chutes, du comique de répétition à la Chaplin, plein de clins d’œil à d'autres mythes et culture: la richesse de toutes ces suggestions percute.
Les images virtuelles copient le réel qui s'agite
Sculpture des corps en habits de patchwork comme des Wildermann de carnaval des pays chauds! Comme dans un vide grenier, vide-mémoire salvateur qui libère et se détache du quotidien pour le transcender.
De belles voix claires, rêveuses venues d'un ailleurs ravissant terminent cette cérémonie turbulentes et enivrante pour ce jeune public, ravi et rapté , capturé par tant de proximité allusive et vécue, si proche de l'univers fantasmé des enfants, coloré et sans frontières apparentes.


A Pole Sud jusqu'au 5 MARS



Sheila Hicks

lundi 4 mars 2019

L'Accroche Note : L'Evolution du Vol: oeuvres de James Dillon : kilt ou double !




L’ensemble Accroche Note propose un concert d’œuvres de James Dillon, compositeur écossais avec la participation des étudiants de l’Académie supérieure de musique de Strasbourg-HEAR et du Conservatoire de Strasbourg.

James Dillon

Todesengel pour clarinette et vibraphone (1995)
Armand Angster d'une impulsion des genoux, vrillant de tout son corps, s'empare de la scène, aux côtés du vibraphone, habité par Emmanuel Séjourné.Un duo enjoué, brillant, aux sons métalliques, aux harmonies communes.Des belles envolées, ponctuées par la percussion piquée, la longueur des sonorités de la clarinette enrobant l'espace et soutenant la musique.Quelques beaux contrastes à pas feutrés, des relevés dynamiques, vifs, clairs et limpides, en petites touches impressionnistes comme un tableau vivant, vibrant de couleurs pastel.La brièveté des sons, enfilés comme pour un collier de perles fines très aériennes, brèves. Les sons comme des cloches, accompagnés par la clarinette, en suspension, douceur et suspens final.

Te-re-ke-te-da pour batterie (1979)
Un solo impressionnant en frappés martiaux, glissés sur les cymbales frémissantes. Une petite cuisine savante de sons, des nuances de doigtés et de frappes du pied On passe d'une musique légère et caressée à une cavalcade régulière, puis furieuse, allant de l'avant sans cesse.Jamais installées, ni figées, les caisses claires résonnent baguettes et timbales oscillantes, comme un inventaire des possibilités de cette boutique fantasque de la percussion, batterie au train d'enfer, salves de sons, grand galop sautillant mené de mains de maitre par Pierre Loic Le Biguet.

Roaring flame pour voix et contrebasse (1982)
En complaintes lascives, engourdies et entravées, Françoise Kubler entame l'oeuvre dans une langue étrange, l'écossais gaélique, sorte de miaulement commun avec la contrebasse en contrepoint.La voix est nasale, la contrebasse en râles l'accompagne, grave; les deux roulent comme des galets, en saccades, hachées, expulsée dans les sons graves.Parfois secouée de grelots, la mélodie, narration des amours érotiques consommées. Lamentations, invocations, dans un beau relâché, laissez- aller avec quelques petits acoups pour se redresser! Des envolées plus lyriques, des sons jazz, une voix qui s'écoule et distille le temps et l'espace: des mélopées en sourdent, poussent et repoussent les sons comme des balancements. Fondu des deux instruments à cordes (vocales) qui s'enveloppent en vibrations communes.

From Three angles pour clarinette basse – création(2015)
Un solo virtuose comme une sirène de port, volatile, en soubresauts. Alerte, élévation sur le qui-vive, contrastes dans le rythme et l'interprétation.
Des tonalités fugaces et successives évoquent une solitude égarée, versatile. Vent et souffle anime la pièce, gaie, vive, à pas lent parfois Un exercice de haute voltige pour Armand Angster, comme un insecte butinant les notes subtiles de ce festin musical.

L’évolution du vol pour soprano, piano (harmonium), clarinette, contrebasse, deux percussions (1989/ 1995)
Après une mise en espace scénique des instruments dans la semi obscurité, spectrale et burlesque à la fois, voici le morceau de choix du concert.
Voix et accordéon font corps, suivis par le piano qui s'immisce dans les tonalités de la voix bien timbrée. Elle, Françoise Kubler, raconte dans une tension accrue, en voix parlée parfois des bribes d'histoire.Quatre vibraphones s'en mêlent aussi, en envolées légères et percutantes. Ils se disputent l'espace sonore, tinté, coloré, en tâches multiples et ascensions lumineuses.
Comme des eaux scintillantes, miroitantes, oscillantes, fébriles. Comme des jouets, un jeu de cloches,très fines. Une vielle accompagne le chant et la clarinette en touches et allusions citations folkloriques. Complainte mécanique qui revient comme une litanie insistante.Comme les dires d'une marchande, colporteuse de nouvelles! Et de sons singuliers. Ritournelle répétitive aux accents orientaux.La clarinette borde les timbales jusqu'à l'entrée en force de la contrebasse pour un prodigieux solo de Nicolas Crosse.
Puis tous ensemble entament un parfait accord jusqu'à la rupture finale très discrète de petite boites à musique égrenant leur mélodie.

Un concert applaudi par un public de connaisseurs friands de redécouvertes de l'oeuvre moins connue de Dillon . Un vol fertile en surprise dérobées, en envolées très imaginatives vers des univers contrastés et toujours en pleine "évolution".
Evolution du Vol comme métaphore du rapt, de la dérobade, du vol à la tire d'ailes : quand l'Accroche Note se fait brigand, monte en l'air et passeur de recèle, la musique ne se fait pas sous les barreaux ! La libération des conventions tient le haut du pavé et l'imagination au pouvoir enfreint les lois avec bonheur !
Ensemble Accroche Note
Etudiants de la HEAR et du Conservatoire


04 Mars 2019
 Concert et masterclasse autour de la musique de James Dillon
Cité de la Musique, Strasbourg (67)
En partenariat avec la HEAR-Strasbourg et Diaphonique (Bureau Export)

dimanche 3 mars 2019

"Latextur" dans le Matra Noir" PERFORMANCE le 8 Mars 18H 30 galerie Christophe Tailleur


Performance dansée, chantée par Geneviève Charras, charivarieuse, ballet-yeuse, cancaneuse !

Dans une structure Latex, le corps s'engouffre, se love, se meut et émeut!
E-motion à la Alwin Nikolais, le mouvement est élastique, souple, enfle ou se dégonfle mais ne fléchit pas!
Il évoque par la forme hybride des créatures fantastiques de rêve où le fantasme entame son parcours païen et ludique! Le souffle anime le mouvement, l'inspire, l'expire et forme des volutes inconscientes, hypnotiques!
De quoi rêver et fantasmer !

Prolongation du travail plastique-photographique avec le photographe Olivier Lelong, cette performance rend réel la matière et sa malaxation lumineuse, organe où tous les possibles semblent opérer pour une alchimie de la danse et du son !

Dans le cadre de l'exposition "Rêves ou Fantasmes" Galerie Christophe Tailleur,
Dans le cadre de Strasbourg Art Photographie 2019, la Galerie présente une exposition collective de photographie avec Olivier Lelong, Diane Ottawa, Thomas Cytrynowicz et Valérie Graftieaux


Du 8 au 31 Mars 2019

Une unité de mesure : le Matra.
Le contrôle du souffle s'effectue selon un compte mental, qui permet de régler chaque temps du souffle soit :
l'inspiration, la tenue à poumons pleins, l'expiration et la tenue à poumons vides. L'unité de mesure de ce compte est donné par la tradition comme étant le temps nécessaire à faire le tour du genou avec l'index et de claquer ensuite des doigts. Cela correspond environ selon chacun, à un laps de temps compris entre 1 seconde 25 '' et 1 seconde 50 ''.

Dans tous les cas le compte doit toujours être lent, en aucun cas il ne doit être calqué sur les secondes de notre temps universel. Cette relative lenteur et ce rallongement de l'unité de mesure permet ainsi de s'affranchir de la précipitation donnée par le rythme du temps ordinaire. Le fait même de rallonger le rythme du compte procure un déconditionnement de l'attraction universelle des astres.
Le compte est à ce point important que le Pranayama peut être également décrit comme une maîtrise des rythmes du temps, ou encore comme une science de la mesure. Le Yoga a ainsi représenté le temps par ses propres mesures, par exemple le temps est aussi mesuré en Gathika équivalent à 25 mn environ.