samedi 25 mai 2019

De Beren Gieren et Lynn Cassiers Imaginary Band : Animalité et Voix partagées!


DE BEREN GIEREN + LYNN CASSIERS IMAGINARY BAND
Belgique
"Une soirée pour découvrir la nouvelle scène créative belge avec le trio De Beren Gieren, qui fait partie de cette génération de jeunes groupes flamands qui bouscule les conventions en faisant se côtoyer hip-hop, classique rock et jazz. Née à Anvers en 1984, la chanteuse Lynn Cassiers a composé un répertoire entièrement nouveau pour son “Imaginary Band“. Ses compositions sont dynamiques et ouvertes, mais aussi vulnérables et poétiques. Avec sa voix rêveuse et ses manipulations électroniques, elle nous emporte dans son univers très singulier. “Imaginary Band” transcende ainsi la forme d’un ensemble de jazz classique et s’avère extrêmement rafraîchissant et stimulant."

De Beren Gieren : Fulco Ottervanger, piano / Lieven Van Pée, contrebasse / Simon Segers, batterie

Que voici un ensemble atypique, un trio bien vivant et plein d'humour "un ours" qui hurle ou crie, des animaux, des vautours pour fétiches et amulette, pour "grigri" et autre marotte !
De l'humour en perspective, de la verve et des surprises tonales pour cette prestation très "contemporaine" aux accents détonants.Piano, contrebasse, batterie en verve et en ébullition, un cube lumineux pour renfort d'images, de couleurs, de mouvements et de sensations.Bruits de scie, de piano préparé, ambiance cosmique garantie lors des trois pièces jouées: beaucoup d'espaces libres dans un train d'enfer soutenu et varié!
Un pianiste aux gestes amples et suspendus devant son clavier, agile, volubile, très inspiré!
 La vie de l'ombre, une valse incongrue, de "promesse triste", en trois temps alertes à peine perceptible.Alors que des images de flux défilent sur les faces du cube allumé de mouvements picturaux étranges: ambiances urbaines ou naturelles.
Un splendide solo de contrebasse, une tonicité, inventivité au rendez-vous pour cette prestation inventive, enthousiasmante.
Quasi mélodique et onirique parfois, renvoyant à des univers éclatés, des espaces suggérés par les images sur les facettes multipliées de ce "white cube" versatile. Un univers imaginaire, villes oubliées, cités interdites pour des effets parallèles de rythmes qui se heurtent, se doublent, se dépassent. Et pour "Jours provisoires" , de marche en marche, dans une démarche avec appuis et rebonds, le rythme s'homogénéise: défilement de paysages naturel au point: les effets répétitifs hypnotisent, très aériens.



Imaginary Band : Lynn Cassiers, voix, électronique, compositions / Sylvain Debaisieux, saxophones / Ananta Roosens, violon, trompette / Sam Comerford, saxophone / Erik Vermeulen, piano/ Manolo Cabras, contrebasse / Marek Patrman, batterie.

Une formation "made in Belgium" de grande qualité, inédite pour ce concert qui a la fritte!
La voix de sa fondatrice et auteure des morceaux est étrange, travaillée sur le mode rocaille et sensibilité à des émissions singulières, proches de la musique "nouvelle" ou "contemporaine". Voix trafiquée pour le meilleur de la diversité de tons, de timbres, corne de brume mugissante, tous se transfigurent lors des quatre pièces interprétées par cette formation très à l'aise, de communion et ce concert, habitée. Voix et violon se rencontrent, se doublent, se bordent ou filent entre les interstices musicaux
De la verve contagieuse dans ce programme "maison" riche de créativité, de dérapages, de tournants à 180 °  pour mieux étonner, sensibiliser à une écriture qui se déverse, singulière et très recherchée.La compositrice, chanteuse, décoiffante, présente et accueillante, ravie de nous offrir ce soir là le meilleur de cette "grande formation" belge aux accents singuliers

JAZZDOR au Fossé des Treize ce 24 Mai

Love Music "Time flies" : l'éphémère bien "noté" !


Flûte - Emiliano Gavito / Clarinette - Adam Starkie / Hautbois - Niamh Dell  
Certaines pièces de ce programme sont inspirées par des oeuvres d’art plastique qui sont figés dans le temps, un cliché instantané d’un moment spécifique, c’est-à-dire im-mobiles mais qui devient autre - vivant - pendant le moment de la performance musi-cale. 
D’autres pièces “accompagnent” musicalement, pendant un temps spécifique, une oeuvre plastique déjà mobile. Ainsi certaines oeuvres musicales donnent vie et mou-vement aux images figées tandis que d’autres devient un cliché éphémère qui ne dure qu’un instant pendant la “vie” des ouvres plastiques. 
Il existe donc un jeu de mots dans le titre de ce programme. Time flies, l’expression an-glaise veut dire le temps passe vite mais au sens figuré cela veut dire aussi que “le temps s’envole”, évoquant l’idée du mouvement.

Non, vous n'êtes pas en retard. Les musiciens sont déjà sur scène, tenue relax, pieds, nus et semblent s’entraîner en attendant le placement définitif du public.
Le silence se fait peu à peu pour céder la place à une véritable écoute, sans le joyeux brouhaha des spectateurs. La pièce était déjà bel et bien et largement entamée:"Hotel Deutsches Haus 2" de Peter Ablinger, pour flûte basse,cor anglais , clarinette en la et bande de 2001 !
En bribes courtes, ponctuée de silences, comme des hésitations ou des pauses, des points ou des virgules en syntaxe musicale.De courtes pièces intrusives pour mettre en appétit, dompter l'écoute, faire un "training" du spectateur-auditeur pour une bonne concentration! Une image vidéo, très urbaine pour npus plonger dans une ambiance citadine: le fronton de la BNU, filmé en temps réel pour nous reliés et nous géolocalisé, nous apprivoiser sur le chemin de la rencontre musicale

Place à la stridence de "Fliegen, fliegen" de Annette Schlunz, pour fendre l'air comme ces paniers à ikebana qui laisse filtrer les souffles au travers du travail de la vannerie. Les trois "vents", flûte, hautbois et clarinette, se fondent ou se séparent, le trio, proche ou distribué dans l'espace. Faisant corps et décor au regard des images d'asticots frétillants en couleurs, comme toile de fond ou rideau de scène arrière!
Ils font masse compacte, alors que la musique pose ses marques, fracturées, fragmentées dans l'espace sonore. Joli jeu de têtes, de directions corporelles dans le volume imparti du plateau et des images qui font écho à ces bizarreries sonores! Stridences invocations dérangeantes.

"Le malheur adoucit les pierres" de Samuel Andreyer, inspiré d'un tableau surréaliste de Yves Tanguy, fait suite sans interruption, ni applaudissement, pour un trio de flûte basse, cor anglais et clarinette basse. Sur fond d'images vidéo de pierres, de matériau lapidaire, de roches de gré qui se transforment sous le regard de l'oeil caméra.Granité, gravité de l'opus, enchevêtrement ruilés de silences et de sonorités inédites qui s'égrainent au fil de l'interprétation, sur le fil de la douceur, de la connivence de ce trio singulier.Les cristaux de roc, comme étoile, guide et protection céleste, toit du monde environnemental et mental.Belle pièce cosmique, invasive et pourtant si subtile à l'écoute.

Pour "trois visages" de Nicolas Marty, pour flûte et flûte basse, clarinette et clarinette basse, c'est à petits pas feutrés que l'on ose à peine déranger le duo de musiciens, pour pénétrer dans une ambiance à suspens, suspension des sons, introduits légèrement, comme de la brise, un souffle matinal de zéphyrs Peuplée de silences affirmés comme des ponctuations picturales qui laissent reposer l'oeil et l'oreille sur de l'éphémère dont la rémanence serait encore de l'existence matérielle!
Un dialogue complice, discret, ténu, infime osmose entre les deux interprètes qui se profilent devant l'alternance des sonorités, des timbres émis pour la plus grande surprise à chaque reprise après silences qui en disent long!

"Triplum" de Franco Donatoni, pour flûte, hautbois et clarinette de 1995
Un trio vif, alerte, coloré, gai, relevé en ascension sonore et amplitude des volumes, en re6descentes joviales: une musique incisive, fragmentée, découpée comme des ombres noires, silhouettes animées par une lanterne magique!
La virulence des sons, éveille, ébranle, secoue brèbves incursions dans un univers résonant de souffles coupés.
Au final de ce concert, très "dans le vent" et les souffles des dieux éoliens, "Muro d'horizzonte" signé Salvatore Sciarrino pour flûte alto, cor anglais, et clarinette basse
Un trio très délicat, à la syntaxe brève, ponctuée de salves tirées des instruments comme des pichenettes ou , de petites touches de sons malins et porteurs de charme et de tendresse;
Subtiles sonorités qui s'attrapent, se cherchent, se traquent, en suspens ou courses filles. De longues tenues musicales les recouvrent pour inonder l'espace, recouvrir la masse sonore en toile tendue, vibrante: des dissonances fusionnelles très appréciées par nos oreilles aguerries aux sons inédits de ce répertoire recherché et détonant.

C'est tout le caractère de "Love music" qui s'y retrouve, en surprenant toujours au hasard des détours et croisements: quelle direction prendre dans cette atmosphère de danger, de surprise !

A l'Auditorium de la BNU le vendredi 24 Mai 19H

Musique de Nicolas Marty (création), Samuel Andreyev (création), Annette Schlünz, Peter Ablinger, Franco Donatoni, Salvatore Sciarrino. 

jeudi 23 mai 2019

Doris Chataignier: rémanence des corps et graphiés ! Kinesthésique à foison!

De la rémanence d'un corps, de plusieurs corps dansants qui s'enchevêtrent, s’emmêlent, se rejoignent ou se quittent...
Dans des floutés magnétiques où la danseuse, modèle tourbillonnant, glissant ou immortalisée en pause longue pour mieux capter la calligraphie de sa danse solo.
Griffe de la photographe, peintre et œil vigilant sur les évolutions fugitives et fugaces d'un corps, vêtu de blanc, gracile, agile, gracieux Comme une colonne vertébrale, pilier renversé à l'ossature disjointe.

Une révérence, une pause, prise unique ou des photos en triptyque qui s'entrelacent.
Le travail de capture et d'observation de Doris Chataignier, sur les mouvements de la danseuse Périnne Gérussi est précis, pertinent et fort poétique
Un souffle, une énergie l'animent, naturelle émanation de la danse qui se joue devant elle dans un espace qui s'étire, s'allonge et prolonge les traces, signes et empreintes de sa fulgurance.
Belle vision, solide et convaincante pour s'approprier une dynamique et une connivence avec l'art de l'éphémère,de la poursuite, du geste fertile en images!Kinesthésique à l'envi !

à voir au CIARUS  "Féerie cinétique"