samedi 18 janvier 2020

"Orologio di Fuoco": la mécanique de l'horloge.


CONCERT | APÉRO | OROLOGIO DI FUOCO

"Time stands still with gazing on her face // Le temps suspends son vol, pour contempler son visage"
La création qui tourne son regard vers le passé...

La notion de temps est importante dans la création musicale - c'est aujourd'hui, c'est maintenant et avec une tendance à regarder vers l'avenir. Dans Orologio di fuoco lovemusic propose de s'arrêter un moment et de se tourner vers le passé. Les pièces de ce programme s'inspirent de textes ou de musiques d'hier, d’objets rétros, de moments éphémères et même d’une partition qui lit le temps .

Le programme est encadré par une installation de The Poetic Mechanic qui, dans une série de transformations de plus en plus nombreuses, accomplit une cérémonie primitive de rotation, hantée par les relations entre l'humain et le non-humain, le mécanique et le poétique.


Démarrage avec la musique de  Maurizio Pisati (création), "FireClock" pour donner le ton et le rythme de  flux continu du concert. Une nouvelle pièce de Maurizio Pisati écrite pour lovemusic - FireClock. L’inspiration de la pièce vient d’une sculpture construite par Pisati lui-même pendant plusieurs années jusqu'à ce qu'il la brûle pour la faire disparaître. Ne subsiste de cette statue que la musique qu'elle a inspirée et le témoignage filmé de sa disparition.,
Des images donnent le ton: celles d'un bouquet d'allumettes incandescente, jeu de mikado géant qui s'enflamme sur la bande son , de bruits hétéroclite fortifiée. Rythme régulier de machine pour le quatuor, voix, flute , guitare et électronique. Des saccades, des éclats de son fusent alors qu'en arrière plan, ça brule, les musiciens immergés dans un brasier vif, coloré, chaleureux; leurs corps-écrans sculptent la lumière et le son. Le spectacle est total, troublant et le leurre fonctionne: les musiciens s'enflamment, se consument: vont-ils resurgir tels des phœnix, ressuscité de leurs cendres? Les allumette, cramoisies s'effondrent, le son cesse, la guitare sèche se tait: le danger, le suspens en suspension se retire, se retranche.

On franchit le mur du son avec Michele Abondano (création), et son "Just an attempt to dissipate" pour voix, flûte, alto, clarinette basse et guitare.
Quatre sonorités distinctes se mêlent: une voix rauque, des ondes de radio, un univers spatial se dessinent. Atmosphère sidérale, subtile, planante; les fréquences et frottements se "mirent" dans les images vidéo des moniteurs tv, mires mythiques des outils de communication "modernes".

"The last ebb" fait suite,  de Jérôme Combler, création, pour voix, flûte et clarinette.
Sons de vent, de souffle qui portent la voix, l'enrobent: elle s'élance en respiration commune : la performance de la chanteuse, Léa Trommenschlager,voix ténue, tenue est remarquable et atteste d'un talent en plein essort. La difficulté du son retenu, léger, fluide, sans apparat est remarquable.
Jeu de opizicati, relevé, dansant en introduction: le côté courtois de l'oeuvre se profile: langue et timbre chatoyants. Dans une pluie de touches de sons en gouttes, la voix chuchote, intime et sensuelle. Chant solo plaintif, a cappella, très beau.L'oeuvre est digne, sensible: texte, histoire , conte bien prononcés dans une diction anglaise parfaite très seyante.

Suit "Time Stand Still" pour voix et guitare de Philippe Venables
Le temps y suspend son vol, la voix, très courtoise emprunte au répertoire courtois, puis la guitare furieusement "grattée" explose. La tenue des sons chantés furtivement se transforme en cascades, la mentations virulentes. La guitare sèche se fond dans l'atmosphère de retenue, doucement, tendrement.

Puis c'est à  la musique de  Maurizio Pisati (création), "FireClock" de succéder dans le flux du concert.Le programme se continue avec cette nouvelle pièce de Maurizio Pisati écrite pour lovemusic - FireClock. L’inspiration de la pièce vient d’une sculpture construite par Pisati lui-même pendant plusieurs années jusqu'à ce qu'il la brûle pour la faire disparaître. Ne subsiste de cette statue que la musique qu'elle a inspirée et le témoignage filmé de sa disparition.

On franchit le mur du son avec Michele Abondano (création), et son "Just an attempt to dissipate" pour voix, flûte, alto, clarinette basse et guitare.
Quatre sonorités distinctes se mêlent: une voix rauque, des ondes de radio, un univers spatial se dessinent. Atmosphère sidérale, subtile, planante; les fréquences et frottements se "mirent" dans les images vidéo des moniteurs tv, mires mythiques des outils de communication "modernes".

"The last ebb" fait suite,  de Jérôme Combler, création, pour voix, flûte et clarinette.
Sons de vent, de souffle qui portent la voix, l'enrobent: elle s'élance en respiration commune : la performance de la chanteuse, Léa Trommenschlager,voix ténue, tenue est remarquable et atteste d'un talent en plein essort. La difficulté du son retenu, léger, fluide, sans apparat est remarquable.
Jeu de opizicati, relevé, dansant en introduction: le côté courtois de l'oeuvre se profile: langue et timbre chatoyants. Dans une pluie de touches de sons en gouttes, la voix chuchote, intime et sensuelle. Chant solo plaintif, a cappella, très beau.L'oeuvre est digne, sensible: texte, histoire , conte bien prononcés dans une diction anglaise parfaite très seyante.

Suit "Numbers 91. 95 de Philip Venables (créátion française),  pour orateur, et deux magnétophones, flûte, guitare et wood-block
Claquements de la guitare, vocalises et bande son bordent des images maritimes qui se transforment en vitrage inondé de pluie: au loin des arbres bruissent et tanguent sur l'écran: vertige et soulèvement au programme. Diuce mélopée, univers tendu, feutré des avalanches qui grondent en éruption volcanique. En contraste des touches sensibles et discrètes des instrument.Des grondements souterrains s'esquissent.
La dernière  oeuvre du concert questionne le texte, la voix: Adam Starkie se colle au texte, voix sensuelle, tenace alors que les écrits défilent sur l'écran.Des signaux tout de vert s'affolent, en bande mouvante, les magnétophones en écho, répètent et revisitent les paroles .La voix s'emballe, crie, hurle, s'énerve, les instruments se taisent
Un "yes" final explose, à l'unisson.

Oui, ils le peuvent, toujours surprendre et décaler, déplacer l'auditeur au fil du temps, conjuguant passé et présent à l'envi.Ce seront leurs quatre images sur les trois moniteurs qui viendront saluer le public, ovationnant ce quatuor de chambre contemporain si inventif !


Flûte - Emiliano Gavito
Clarinette - Adam Starkie
Guitare - Christian Lozano
Voix - Léa Trommenschlager

A la BNU le vendredi 17 JANVIER

"Fred Frith, Nicolas Humbert, Marc Parisotto: Cut up the border" : un millefeuille triadique.

Film et Musique à l'honneur pour démarrer 2020 avec Jazzdor !
On vous donne rendez-vous les 16 et 17 janvier pour 2 projets exceptionnels à Strasbourg
[ CUT UP THE BORDER ]
Trente ans après sa réalisation, les bandes sons originales du mythique film “Step Across the Border” sont redécouvertes !
Des producteurs de radio en Allemagne proposent alors à Nicolas Humbert d’imaginer une oeuvre radiophonique à partir des sons retrouvés. En collaboration avec l’artiste sonore Marc Parisotto, ils composent “Cut Up the Border”. Fred Frith, protagoniste principal du film improvisera “live” sur le mix en direct de ces bandes resurgies du passé !

Evénement bien suivi, salle comble ce soir là pour un moment inédit de partage de musique d'aujourd'hui: en temps réel, devant nous, seul sur le plateau, Fred Frith, assis, guitare en main: c'est parti pour une performance inédite: sur la bande son déjà multi-couches, il saute sans filet sur les enregistrements passés, avec brio, surprise, étonnement: de son petit attirail proche de lui, instruments de la passion, prémédités, il va opérer, scanner le son, ausculter les timbres, inciser la masse sonore, sculpter de la matière sonore: avec des toupies, une brosse, un pinceau bien poilu, une chaine frottant un récipient de ferraille...Tout est bon dans le son! Et les strates de vibrer en tectonique géologique comme autant de feuilletage d'un palimpseste ressuscité. MillefeuIlle musical, visuel, l'opus incongru, singulier, unique fabrique de sonorités inouïes, fonctionne à plein, une bonne heure durant. Du calme à la tempête, du silence au fracas, du recueillement à la confession paienne d'un maitre de musique improvisée sur le champ. Filliou, Duchamp, Beuys se réveillent et jubilent dans cet esthétique sonore du danger, du risque du ratage, de l'à-côté.Il frappe, tape, caresse le dos de la guitare, la fait résonner en écho de la musique qui borde l'espace préparé. Ses deux compères aux consoles, le guident, le suivent, l'accompagnent, l'étonnent ou le déroutent dans cette aventure spatio-temporelle inédite, historique déjà! Sa voix, chant iroquois, mélopée de gourou, se fond avec l'environnement sonore, personnage à part entière.
Débordement de bruits hétéroclite, inconfortable position de l'auditeur qui vibre à l'unisson avec les trois protagonistes de cet oeuvre singulière: objet concertant non identifié, résurection de bribes de mémoire, d'instants de l'histoire du jazz, incarnée par des bien vivants compositeurs de l'akéatoire: un grand art de l'instant, sur la corde raide de la guitare qui se transforme en roche métamorphique pour charger l'atmosphère de plis, d'énergie, de chaleur et le temps passe.
Seul le son d'une mouche, fait effet de conclusion: Frith l'abat d'un son de couvercle jeté à sa face virtuelle: le hors-champ est délicieux, l'imaginaire travaille et les mains jointes, l'artiste, performeur d'un soir, se retire modestement.Et ça travaille encore chez l'auditeur-spectateur, témoin, passeur de ces instants qui touchent et distillent le temps avec ravissement. Un concert unique, gravé dans les mémoires de l'éphémère.

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Musique et paroles originales de Fred Frith, Tom Cora, Haco, Iva Bittová, Pavel Fajt, Ted Milton, John Zorn, Donald Frith, Robert Frank, Jonas Mekas.
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Vendredi 17 janvier
20H30
Jazz Club au CSC Fossé des Treize

vendredi 17 janvier 2020

"Step Across the Border, A Ninety Celluloid improvisation" : un film de Fada, sur un "Fada" !

Celluloïd Improvisation


Werner Penzel & Nicolas Humbert

"Dans le cadre du concert “Cut of the Border”, Vendredi 17 janvier à 20H30, Fossé des Treize, Strasbourg
Documentaire sur le musicien nomade Fred Frith toujours à la recherche de nouvelles rencontres, de nouveaux sons et de nouvelles musiques qui transgressent les frontières et les classifications. Le film est à l’image du personnage de Frith : pas de structure pré-établie ni de narration claire et précise, mais un montage fondé sur des liens sonores insolites. Cette “improvisation sur celluloïde” nous montre qu’il existe un cinéma libre et improvisé comme le free jazz peut l’être : sauvage, étincelant et surprenant. Le film a gagné le Prix Arte du documentaire européen de l’année, en 1990.
Rencontre avec Nicolas Humbert aura lieu à l’issue de la projection."

Allemagne + Suisse – Film de Nicolas Humbert & Werner Penzel, 1990, 35mm, VostFr, 90’



En avant pour un choc, une tectonique cinéma-musique, autour du personnage de Fred Frith, objet cinématographique non identifié  entre documentaire de création et portrait, terminologie insatisfaisante pour qualifier un film rare, issu de rencontres, d'amitiés et de relations de confiance entre réalisateur et artiste.En présence d'un journaliste de chez ARTE, un débat très riche vient éclairer le processus de création de ce document rare de trente ans, réalisé en 1990
Tout démarre sur l'écran par un générique très dadaiste, fait de lettres qui se métamorphosent joyeusement, en graphisme noir et blanc comme tout le film le sera. Surprises multiples pour cette oeuvre truffées d'images enregistrées sur le vif, lors de concerts, de soirées, de rencontres. La ville, l'architecture et l'histoire s'y cotoient pour brosser le paysage d'une époque encore très "contemporaine" A Tokyo, on s'endort dans les trains, corps abandonnés par le travail et les distances, les trajets.
La musique va bon train, improvisée, fabriquée devant nos yeux, dans l'instant, alors qu'un savant montage très construit transporte rythmes et sons dans un quotidien transformé Tel un John Cage, Frith se révèle à l'écoute de la vie, de l'instant, des bruits du quotidien et les restitue, transformés par la créativité débordante, bouillonnante. Des amis, des artistes l'entourent qu'il convoque généreusement à ses côtés. Sa relation au public l'entraine loin des concerts de consommation. Riche de partage, d'écoute, cet artiste mythique apparait, communiquant et sympathique, alerte, inventif Le film suit cette vocation d'aléatoire, de surprises en surprises, de prises de vue, en prises très physiques. Une scène finale, un couple divaguant sur un quai de gare, chorégraphie improvisée en diable, honore la simplicité des propos ici impliqués: la danse aléatoire de ces deux personnages capturés, captés sur le vif comme des images de Cartier-Bresson fait mouche. 
Ce document, film expérimental à l'image du "Ballet mécanique" de Fernand Léger ou de "Entr'acte " de René Clair est un petit chef d'oeuvre niché dans le cabinet de curiosité du cinématographe
Musique d'aujourd'hui, toujours vivante dans le rythme d'un opus hybride, non conventionnel, âgé de trente ans, toujours jeune et d'actualité.
A déguster sans modération... 

Matière sonore!
Le celluloïd est aussi le nom donné à une matière composée essentiellement de nitrate de cellulose et de camphre. Elle est considérée comme la toute première matière plastique et son origine remonte à 1856. Sa composition a été petit à petit améliorée pour la rendre finalement facile à modeler et à produire. De là à créer du son-image plastique, le lien est fait !