mercredi 27 novembre 2024

"Pour un temps sois peu": Laurene Marx: un temps pour soi....Sois belle et soie toi! Ainsi soie- t-elle.



Dans Pour un temps sois peu, « stand-up triste » coup de poing, Laurène Marx raconte le parcours d’une femme trans et le lot de violences qui l’accompagne :
celles des assignations et injonctions en tout genre, des démarches médicales, des agressions permanentes, des processus d’invisibilisation à l’œuvre, des discours et des règles d’une société profondément hétéronormée. À travers une langue née de la rage et de l’urgence de se réapproprier le réel, Laurène Marx expose son vécu, son intimité et son histoire avec force rires et colère. Une histoire qui compte.


La lisibilité sur l'identité dite "trans" est ici un cadeau de la vie, de l'expérience, du vécu. Et si vous ne connaisser ni ne fréquenter de trans dans votre vie, voici un rendez-vous avec une femme, un être loin d'être une créature ou une bête de jardin zoologique. On se souvient de temps pas si
lointain où toute différence liée au sexe, à la couleur de peau était sujet et objet de haine, de refus, de déni. Alors Laurène Marx n'y va pas avec le dos de la cuillère et s'expose, s'exprime deux heures durant sur son identité transformée, métamorphosée et le naturel vient au galop dans ce portrait bien vivant, cette autobiographie devant nous, spectateurs attentifs et curieux. Son corps est souple, délié, charmeur et sa chevelure dessinée savamment en une esthétique fabuleuse. Couleurs et aussi banalité de ses vêtements sportifs où elle est fort à l'aise. Pour ses mouvements, déplacements, divagations et errance sur le plateau. Un micro la scotche dans son mètre carré d'évolution: c'est dire s'il faut une puissance, une présence pour incarner sa personne et non un personnage, comédienne de théâtre, interprète professionnelle. Et pourtant toutes les qualités du métier sont requises et assumées: vélocité de la diction espiègle, maline et parfois diabolique, adresse directe au public avec audace et assurance. Clins d'oeil charmeurs, déhanchés sensuels et séduisants. Femme en colère au passé chaotique et violent, Laurène nous conduit sur les sentiers de la réconciliation, de la résilience, sans heurt, sans forcing, en toute bienveillance vis à vis d'elle.Un stand-up pas triste où les rires des spectateurs sont francs et nombreux face à cette logorrhée tonique et salvatrice. Mieux que psy et autre thérapies, la scène lui va comme un gant et son partage réjouit, façonne non un point de vue sur les trans mais une rencontre.Et sa danse au final qui la libère de son espace microscopique lui fait dire mille et une émotions et nous fait ressentir la folle empathie qu'elle génère. Une amie, juste le temps de la fréquenter sur les planches qu'elle brûle allègrement. Une île avec des ailes au bout des pieds qui la transportent en état de danse fluide et sautillante, agrémentée de musique de circonstance. La légèreté est source de gravité, de sérieux, voir de tragique. Mais la vie de chacun est bien cette arène où l'on sexe-pose sans cesse. Les regards des autres changeant lentement au profit d'une intelligence partagée sur toute singularité et identité. Une performance édifiante et savoureuse dont on ne ressort pas indemne.


Au TNS jusqu'au 30 Novembre


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