mardi 27 juillet 2021

"Je suis lent" de et par Loïc Touzé : une lec-dem pour rendre le geste dansé "s'abordable" !

 


"JE SUIS LENT
" création de  2015 conférence performée


 

"c'est là quand je m'y attends le moins que  parfois la danse surgit" 

"Le parcours d’un danseur est une longue quête, le cheminement d’un corps traversé de figures, d’images et de gestes. Dans cette conférence dansée, Loïc Touzé raconte l’histoire de la danse contemporaine à l’aune d’un récit intime, de sa formation à l’Opéra de Paris à la création de son propre langage chorégraphique, en passant par la nouvelle danse qu’il rejoint au milieu des années quatre-vingt. Délaissant la virtuosité du ballet, en chemin il apprend la paresse et le goût de l’égarement, l’humour et la délicatesse."Victor Roussel

Dans le cadre de "la traversée de l'été" le TNS invitait Loic Touzé, enseignant entre autre à l'école du TNS pour nous laisser voir et entrevoir sa conférence performance  "je suis lent". Une initiative pertinente pour découvrir ce danseur chorégraphe, seul sur le plateau qui nous expose tout l'art de se défaire d'une formation corporelle formatée aux mesures de l'excellence de la danse classique.Alors il taille dans le vif du sujet et se présente dans une tenue sobre et simple: autobiographie promise à bien des rebondissements.A le voir on ne l'imagine pas dévorer l'espace dans un ballet classique en collant moulant!Félin, malin, le verbe prolixe, la paroles et le verbe posé, ancré, il conte ses déboires, ses aventures qui l'amènent par étapes successives à se questionner sur les capacités de son corps à peu à peu se "détacher" de ses marques et traces d'apprentissages et de fixation des codes classiques dans sa chair, ses muscles profonds, sa pensée.Ça touche, ça fait mouche tant la modestie et la sobriété de ses propos sont clairs, efficaces, abordables, compréhensible par tout un chacun Et pourtant sa formation de haute voltige pourrait impressionner et décontenancer, exclure ou écarter. Nenni, sa convivialité, la sympathie que la chaleur de sa voix induit, font passerelle et le lien étroit s'établit entre lui et le public Sa danse est lisible, abordable, comique ou lyrique, "maitrisée" dans la décontraction, le lâché prise qu'il convoite et parvient à "atteindre" au fil des expériences de groupe, des chorégraphies, des situations insolites qu'il crée pour éprouver un parcours du combattant. A l'envers, à l'endroit pour se défaire du tissus de sa chair imprimé de figures imposées. A l'opposé, à l'envers du décor, à l'endroit où il faut être pour y être bien, juste à point nommé: ici et maintenant, centré, présent à sa danse. Devant nous c'est chose faite et le "discours" est limpide tant le corps exprime en gestes, mimiques, poses ou sourires ce qui sourd de ses lèvres, ce qui s'ouvre à nous à travers son regard, sa longue silhouette à la Jacques Tati : un joli "petit trafic" d'armes naturelles pour gagner les faveurs de la danse et de son éternel déplacement des conventions. Comme message, mets-sage , entremets d'un banquet platonicien. "Je suis lent" et je le sais semble-t-il nous faire passer comme idéal !Un ours géant en peluche comme mascotte idéale de lâché prise!

Au TNS LE 22 JUIN 20H

41 Festival Montpellier Danse 2021: fertiles rencontres de genres...chorégraphiques!

 Montpellier danse interroge, bouscule, conforte la vision contemporaine de la Danse et de toutes ses ramifications


"Pour" et "Laborious song" de Daina Ashbee: danse maïeutique, catharsique !

Une pièce taillée sur mesure qui se transmet à une autre interprète: un exercice qui questionne l'écriture chorégraphique et fait de ce solo "Pour""autobiographique" une page universelle sur le corps de la femme. Une dédicace à la condition féminine intime, violente, sans concession.La nudité y est reine et fondement des propos de la chorégraphe.Elle "accouche" littéralement de tout son utérus, de tout ce que Marta Graham nommait "tension relaxation": la masse corporelle qui se fond au sol, le dilue puis agace la pesanteur corporelle.Le corps en force, appui, rebond, tremblements et vibrations d'un spasme utérin.Un solo féminin, un corps sculpté par la lumière et la sueur corporelle pour aiguiser une sorte d'indécence, de voyeurisme discret au regard de la dépense qui se joue devant nous La danseuse frappe, rebondit au sol, se tape et ausculte sa chair, sa densité pour mieux faire résonner et raisonner sa pensée de muscles vivants, percutants.Le magma charnel qui se forge ainsi, éclabousse de rythmes, de percussions de chair .

Au studio Cunningham Agora


Quant à "Laborious song" c'est le volet masculin qui s'expose: processus de carnation à vue, de masse toujours d'espace plus large pour le danseur qui arpente son territoire Le danger s'y fait ressentir, signe "masculin": bonds, ruades, bascules et sueur, chair à vif. On rejoint le solo féminin en observant la sculpture du corps, on entre en empathie avec la beauté incarnée du râle, de la jouissance qui suinte de cette évolution si proche de nous.Au final, c'est un flot de musique qui se déchaine et envahit le plateau Tout se déchaine, enveloppant corps et lumières pour célébrer le labeur, la danse au travail et tout ce qui travaille et traverse le corps.

Au Hangar-théâtre 


"Ineffable" de Jann Gallois : multifaces !

Elle est dans ce solo, danseuse, musicienne et dévoile des talents encore méconnus. Les percussions, simples et dociles lui proposent un décor fait d'instruments occupant son temple zen: une belle maitrise du gong, qui trône tel un instrument plastiquement probant.Chamane, officiante d'un rituel transmissible, elle danse , solo fluide, déployé, intime.Morceau de bravoure: des mimiques, poses, attitudes à la Chaplin lui donnent l'occasion de révéler des talents de comédienne, de corps "muet" si éloquent!Dans une cage de fer, sorte de pupitre,tribune de palais de justice, la voilà quittant les codes pour se métamorphoser en corps muet si éloquent !Soliloque gestuelle, plaidoirie comique d'avocat ou rhétorique pleine de charme et de précision de jeu: une piste à creuser pour cette interprète prolixe! Une bascule circassienne pour accessoire pour une envolée lyrique très pesée, maitrisée et c'est le retour au rituel, à la prière votive, au recueillement. Un exercice personnel assez convaincant où tout vouloir dire n'est pas toujours exciter l'attention.

Au studio Bagouet Agora


"Nuit" de Sylvain Huc : ordre du jour!

Un trio s'empare du plateau, fulgurante entrée en scène dans un décor de pendrillons noirs laissant une issue en perspective, sortie ou bassin de réception tectonique...La nuit sera pré-texte à une danse fluide, limpide, translucide, évidente.Vertige d'un espace qui fuit vers l'arrière comme aspirant les corps vers le gouffre nocturne.La danse est véloce, entuilée entre les trois partenaires, unis, désunis à l'envi.Le résultat est hypnotique, envoutant et fébrile, sur le fil d'une narration des corps qui fuient, glissent, se dérobent Un paysage géologique fait de failles, de brèches ouvertes où s'immiscent le "suc" de la danse comme un élixir distillé par la porosité des matières corporelles en fusion Métamorphiques en diable pour un relief d'ondes, de courbes de niveaux à suivre intensément du regard.Musique et silence après le grondement de l'avalanche.Sylvain Huc en géologue du corps, stratifiant les couches , palimpseste ouvert du mouvement des plaques.

Au théâtre de la Vignette


"Counting stars with you (musiques femmes) de Maud Le Pladec: manque de souffle....

La musique traverse les préoccupations chorégraphiques de l'artiste depuis longtemps: il est ici question d'aller plus loin en faisant émettre, chanter, psalmodier les danseurs eux-mêmes Souffles, voix, émissions a cappella, les vecteurs du son corporel sont multiples, le chorus est berceau de la tragédie.Six danseurs s'inspirent du chant médiéval polyphonique, en solo, en choeur, ancrés au sol ou lors de divagations dansées.Le chant semble plus ou moins maitrisé alors que la pièce va bon train sans encombre. Au final, c'est un show parodique, micro en main, qui met du piment dans cette démonstration inégale de l'impact de la voix dans l'art chorégraphique.Ça sonne hélas souvent faux et les notes s'emballent au profit d'un méli-mélo prétentieux et vraisemblablement trop ambitieux Questionner la musique, c'est d'abord en faire et ne pas simuler des compétences à demi assumées.

Au Théâtre de l'Agora


"Chapter 3 : The Brutal Journey of the Heart" de Sharon Eyal et Gai Behar: tectonique du coeur !

Neuf danseurs détonants sont lancés sur le plateau comme des salves ou catapultes et la tornade démarre! En justaucorps seyants comme une seconde peau tatouée à la Wim Delvoye, les voici, entrainant dans une spirale musicale et spatiale à vous couper le souffle! Une performance que la chorégraphe visionnaire pose et impose aux danseurs, galvanisés par cette danse "gaga" mêlée de rebondissements surprenants.A tout corps, à tout coeur pour cette as, cette dame de coeur illustrés sur les costumes par Maria Grazia Chiuri: on songe aux coeurs de Jime Dine -exposés d'ailleurs à l'Hotel Richer de Belleval- Chorus ou individus déjantés, la danse prend ses quartiers une heure durant, flux sans cesse ré initié par une énergie, un tonus incroyable...Unissons décalées, déstructurées,où chacun se meut, bassin déplacé, doigts écarquillés, sur la pointe des pieds toujours, faisant figures de faunes aux sabots surélevés! C'est satanique en diable, hypnotique à fond tant l'engagement est de tous les instants. Pas de relâche ni d’entracte pour cette performance hallucinante, envoutante!Joie, jubilation cathartique au menu.Sur des musiques dingues on ressent une empathie totale avec les danseurs Quelques "poses"arrêts sur image salvateurs pour calmer la tectonique furieuse, rageuse d'architectures corporelles sidérantes

A l'Opéra Comédie


"Transverse orientation" de Dimitris Papaioannou: tableaux vivants

Son art est pictural, protéiforme: démiurge de la mise en scène chorégraphique, le chorégraphe excelle dans les extrêmes et offre des icônes saisissantes, en mouvement, déplacements toujours surprenants, inventifs.Des tableaux se font et se défont à l'infini, à l'envi. Du taureau du Minotaure dans un labyrinthe de propositions picturales à l'oeuvre il fait un personnage aux côtés des huit danseurs sur l'immense plateau du Corum. La danse résonne en hybrides, en monstres de chair nue et passive; une vierge accouche, un printemps de Botticelli se dessine, Vivaldi exulte...Ce chaos est resplendissant, bizarre, énigmatique, impressionnant les sens en éveil.Tectonique des plaques, la mise en scène est digne d'un Fellini...grec! Une nymphe se baigne et se dilue dans un lac idyllique bain de jouvence,paysage romantique à souhait.Peu ou quasi pas de danse, absence délibérée de Terpsichore pour cette muséographie de la lumière changeante.Des êtres manipulés sur une échelle, illustration en silhouettes noires comme autant de petits démons, pantins à tête d'épingle surdimensionnées aux allures de pions, de marionnettes Des images et encore des images foudroyantes de construction, de beauté, s'enchainent.Humour stylé animé des meilleures intentions picturales!Nudité aussi dépouillée pour montrer le corps qui s'expose, se montre dans sa plastique sculpturale.Réanimant le défilé d'une histoire de l'Art possible. En format renaissance, 16 ème très cinématographique, cette oeuvre dans sa largeur, amplitude et envergure est un chef d'oeuvre de meilleur ouvrier de danse. Esthétique du beau et de la métamorphose des corps qui s'imbriquent, siamois hydre à deux têtes ou chimères fantastiques.Mystique et spiritualité de concert.Une sirène debout sur sa queue qui oscille pour figure de proue de ce navire chavirant, ivre de spendeur décousue.

Au Corum


"en son lieu" de Christian Rizzo: à l'endroit, vous êtes ici !

Le solo est une "petite forme" qui va si bien à Christian Rizzo! Renouant avec ce style court et sobre, la pièce est portée par Nicolas Fayol, danseur hip-hop, pétri de délicatesse, de fluidité, de rebonds subtils.Apuis au sol, reptations, vélocité pour exprimer une solitude volontaire, ancrée, vécue au plus profond des muscles. Marcheur, arpenteur, plié, glissé il va et vient dans une forêt de micro sur pieds sur fond de cloches suisses dans des paysages alpestres ainsi convoqués: par le son, le frisson des fréquences, des tintillements sonores.Des fumées envahissent ce désert comme dans une oeuvre du plasticien Laurent Grasso et ses brouillards menaçants qui avancent de front sur vous!Des lumières rougeoyantes de soleil couchant façonnent une atmosphère unique d'au delà, d'errance, de beauté.La grâce et la rédemption se font jour dans une nudité silencieuse, ralentie, apaisée.En son temps et lieu, ici et maintenant dans une altérité confondante de sobriété.

Au studio Bagouet


"Deleuze/Hendrix" de Angelin Preljocaj: l'éthique du corps spinozien

Angelin excelle dans les rencontres, de pensées, d'espaces, de disciplines: le voici en compagnie d'un philosophe qui questionne le corps et d'un musicien habité par la performance. Une gageure à la hauteur de l'ambition de pouvoir et savoir restituer une pensée en mouvement, un savoir évoluer au fil du temps.Les prises de Paroles de Deleuze lors de ses collèges sauvages de ses interventions révolutionnaires sur des sites éphémères sont à écouter alors qu'évoluent face à nous sa danse tonique, duelle, en portés et portées musicales adéquates.L'immortalité comme sujet de débat spinozien entre autre Au tableau de ces facultés universitaires, des graffitis "moi" "chien" que les danseurs griffonnent comme des icônes corporelles, empreintes de corps plaqués à la Keth Haring. Composition constante et changeante des huit danseurs sur une musique galvanisante: justaucorps pour faire apparaitre tous les signes, phares de la danse de Preljocaj: virtuosité, enthousiasme de ces transports jubilatoires...Courbes, traces et signes dans l'espace.Les unissons sont drastiques, tirées au cordeau; la rigueur performante est au diapason du discours deleuzien: de "crétin" à "idiot" que peut raconter le corps sinon en rire. La sensualité toujours présente dans cette ambiance réfléchie qui avance et chemine sur la peau du monde.Cela ne fait pas "un pli" !

Au Théâtre de l'Agora

Une fois de plus le Festival Montpellier Danse donne l'occasion de rencontrer les chemins de la création chorégraphique au carrefour du monde.

lundi 26 juillet 2021

La Danse au Festial IN d'Avignon 2021: être "ensemble" ! Et cheffes de file !

 


"Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones" de Jan Martens: résiste !

Le nombre de danseurs est important: 17 sur un grand plateau pour travailler sur l'individu!Plusieurs générations de corps, tous différents, petits ou grand gabarit, sexualité dégenrée, âges variés....Pas de "canon de beauté" à l'horizon de ce travail colossal sur la masse, le groupe qui avance  se déplace, se décale comme des vagues passées au peigne fin de croisements savants hypnotiques; sur une musique de Goreki "concerto pour clavecin et orchestre"   Mouvement choral de résistance, de soulèvement qui gronde.Et surgit en contrepartie, une immobilité sereine qui laisse s'échapper respiration et temps de pose-pause.Sous tension comme un sit-in en opposition à la marche-démarche populaire.Pièce de groupe hallucinante, concentrée, d'une rare efficacité visuelle,qui laisse fuir aussi les différences de corpulence de chacun. Tout se tricote, se tisse et semble se fondre dans la foule. C'est impressionnant et dérangeant.Fascinant à coup sûr!Cette vision de l'humanité en proie au mouvement est faite aussi de diversité et non d'anonymat dans les costumes à la fois haillons autant que fantaisie en rouge pour chacun sans pareil.De quoi méditer sur le nombre, son impact, sa force en se laissant aller dans cette beauté fluide et émouvante.Les circulations savantes augurant d'un ordre consenti pour arriver à ses fins: la force du groupe est unique et sujet à une composition chorégraphique émerveillante

A la cour du lycée Saint Joseph.


"Lamenta" de Rosalba Torres Guerrero et Koen Augustijnen: perte et retrouvailles

Une fois de plus l'être ensemble dans une communauté fait office de pré-texte, de pré-mouvement issu de la culture populaire grecque. A partir de l'étude approfondie du "miroloi" de l'Epire, danse ancestrale qui évoquent le départ, la perte et l'absence.La terre, les racines, la nostalgie y sont convoquées sur une musique lancinante, chants de lamentation. Une danse incarnée, faite de rituels pour se reconstruire dans le groupe!Résonances qui se retrouvent sur le plateau, ici et maintenant pour une transposition contemporaine de toute beauté, les costumes y ajoutant des touches de couleurs virevoltantes.Un marathon de danse fusionnelle entre les corps sur le plateau nu, danse "étrangère" à la culture des deux chorégraphes, auscultée avec respect, pertinence.S'emparer d'un matériau existant pour le modeler, le transmettre et interroger la notion d'héritage, voilà le propos très convaincant de cette démarche artistique . La danse y est fulgurante, hypnotique, performante, fougueuse Folie, sorcellerie à l'appui pour se perdre dans l'épuisement, le don de soi, la perte.Être ensemble pour se tenir debout, faire la ronde ou dévoiler sa virtuosité en solo, tout concourt ici à la vision d'une certaine utopie de la communauté retrouvée Du moins, celle des danseurs arpentant le plateau à l'envi.

A la cour minérale Avignon université

 

"Sonoma" de Marcos Morau: la faculté de l'imaginaire

Dans la cour du Palais des Papes, le choix d'une "signature" chorégraphique est fondamental.Sur le plateau immense sont lancées comme des catapultes des personnages tourbillonnants, glissant sur le sol comme des poupées jouets téléguidées Effet de choc sur fond sonores d'exclamations tonitruantes.Un déferlement d'énergie féminine en vision d'images cinématographiques inspirées du cinéma de Bunuel que le chorégraphe chérit et admire.Séquences oniriques, rituels très construits, les péripéties de ce petit monde vont bon train.Tambours battant, tout s'agite, se meut parfois de façon mécanique, intrigante. Toutes ces femmes fébriles oscillent, se débattent obéissent à une loi de la vitesse extrême, de la virtuosité. C'est une perspective envahissante, à la démesure du plateau judicieusement investi. Le rythme sauvage et tenace tient en alerte instinctive face à l'absurde, à la désorganisation apparente des séquences.Du Christ à Dionysos sont convoqués des tableaux surréalistes, des scènes décousues s'enchainent pour planer dans le rêve et l'irréel.Religion paysanne et brute comme credo spectaculaire, naïf, bon enfant comme ces déplacements robotiques, costumes délirants de rondeur, de crinoline blanche vaporeuse et tournantes si fascinantes.Sonoma comme figure de proue d'une expression contemporaine des coutumes métamorphosées.Révolution de palais au coeur de la cité papale!

A la Cour d'Honneur

LES CHEFFES DE FILE DU FESTIVAL IN


"Liebestod" de Angelica Liddell : Belmonte de toréer et de travers !

On la retrouve avec curiosité, ce trublion, électron libre du théâtre dansé, de la satire, de la diatribe Politiquement et poétiquement incorrecte Angélica se frotte ici au toréro, figure masculine par excellence, figure du condamné à mort volontaire, macho, puissant ou désuet devant la bête.  Taureau de pacotille pour partenaire sur fond de barrières d'arène frontale, de rambardes protectrices révélant d'autres icônes cachées Car elle y va bon train nous traquant, public, spectateurs, gens du spectacles pour mieux insulter, vilipender le petit microcosme environnant!Sa parole est de taille, sa voix tonitruante qui ne lâche pas le morceaux plus de deux heures durant.Un homme entouré de chat pose en figure sculpturale et passe en traversant la scène...Les visions et images sont incongrues, décalées, surréalistes.Angelica conte et raconte en même temps qu'elle trempe son pain dans le sang de ses menstrues.Imperturbable, indévissable, elle éructe, piaffe, hurle son désaccord, sa désaffection pour ce monde.Abrupte parodie, brute de coffrage, sans concession.Un taureau pour partenaire, une Carmen à vif, mordante, incisive, calomnieuse, injurieuse, féroce!En robe blanche à frou-frou, elle conte sans relâche, danse, se cabre et sans respect frappe et touche son entourage.Un cul de jatte l'accompagne et la transforme en vision de pieta, madre ou matrone, sainte ni touche sans gêne et sans vergogne.Sexe et beauté, rudesse douleur et rage font son fond de commerce, sa boutique fantasque, portes ouvertes.Angelica Liddell en toréador, costumée de paillettes, féminin ou masculin en figure de proue: la bête est féroce, l'ange est divin ou féroce.... Un rituel déflagrateur en hommage à l'art de toréer, de frôler la mort grâce à l'Art de vivre l'impossible dans l'acte de créer.Instant sublime de la transfiguration spirituelle, de l'offrande, du sacrifice.Angelica désire être possédée, fécondée par le taureau, l'homme.Ou son public avec qui elle entretient une relation phallique, érotique, pénétrante.Sur l'autel du plateau, elle se livre, se fait dévorer autant qu'elle dévore.

A l'Opéra Confluences


"La trilogie des contes immoraux" (pour Europe) de Phia Ménard: érection à gogo !

Phia de Saint Phallus!

D'un trublion à l'autre, il n'y a qu'un pas et Phia Ménard succède à Angelica Liddell avec une résonance particulière. Seule sur le plateau elle se met à tenter de maintenir, de construire une immense maison de carton prédécoupée, préfabriquée C'est "La ruée vers l'or" où Chaplin tient à bout de bras sa maison qui bascule. Travaux d'Hercule, rocher de Sisyphe, l'édifice chancelle puis se dresse enfin. Tronçonneuse au poing Phia Ménard, super woman, découpe son cocon en autant de pétales. C'est irrésistible de comique, de burlesque et de détachement La pluie tombe hélas sur sa niche utopique qui s'effondre en bouillie devant elle...Vision encore chapelinesque et performance technique gigantesque pour cette pluie battante qui transforme la scène en lac reflétant son image ! La séquence suivante s'enchaine, Phia disparait nous quitte pour une cantatrice conteuse japonaise qui va se faire bâtir par quatre esclaves en noir anonymes, des châteaux de cartes, des tours de Babel monumentaux A la démesure de l'évocation de la tour, de "la bite" en érection qui hante les fantasmes des architectes et de l'humanité!La construction à vue, sans filet de ses édifices inutiles est danger et risque permanent qui tient en haleine. Notre guerrière punk toujours sur le front de la lutte et de la désobéissance La maison mère qui s'écroule, autant que ce Parthénon qui s'érige font figure de mythe contemporain. Pour "un parlement des corps" une agora du politique, Phia Ménard est à l'endroit sur la place publique du théâtre pour signifier en XXL la petitesse ou la grandeur de nos actes. Un spectacle inoubliable, conte fantastique, science friction salutaire et vision dantesques à l'appui Du grand Art !

A l ' Opéra Confluences

Festival Avignon dans le IN les inclassables comme terrain de jeu.....

 


"Y aller voir de plus près" de Maguy Marin: radioscopie du politique.

Elle franchit les frontières, dépasse les bornes et nous tend des pièges salutaires.A sa manière, toujours, en mixant les disciplines, les faisant se rencontrer, se bousculer gaiement au coeur de l'histoire, de la mythologie Étonnante  prise de plateau pour cette "conférence" révérencieuse sur un pan de l'histoire ancienne: celle des Grecs qui occupe et préoccupe son propos à travers différents médias.Du lecteur-conter, au musicien, des images enregistrées aux panneaux indicateurs Pour se frayer son chemin dans ce chaos visuel.La guerre du Péloponnèse est au cœur du sujet.Vue par Thucydide et corrigée par Maguy Marin qui transpose allègrement Sparte à Sarajevo ou Madrid Les guerres sont véhicules de réflexion sur l'être ensemble, les prises de pouvoir, la question de l'effacement, de l'oubli, du déni Pour y faire face et prendre "position" au bon "endroit", la voilà qui ausculte les textes et nous les livre en intégralité, le temps d'une écoute attentive de la part du public.Réconcilier, réparer aussi pour bâtir et avancer.De ce souffle épique, nait une forme réduite, efficace, opérationnelle.Le souffle des vaincus, l'allégresse du ton de la pièce combative, rehausse l’intérêt d'un spectacle inédit, militant pour de bon dans les sphères du politique, ce qui se passe dans les mailles des filets des conquerants autant qu'entre les mains des opposants.De l'ouvrage qui se regarde aussi sous de multiples poits de vue aiguisés par une mise en espace respectant chacun dans son altérité.

Au Théâtre Benoit XII


"Archée" de Mylène Benoit :un gynécée débordant de vie 

Anthropologue, fouilleuse, chercheuse, Mylène Benoit offre à l'occasion  de cette pièce des visions picturales et plastiques, fortes, sensuelles qui touchent et impressionnent le regard Tel un gynécée d'êtres vivants qui se mêlent à vivre leur sexualité joyeuse et partageuse.Se servant allègrement de la plasticité des corps des danseurs, elle parvient à rendre des ambiances et univers singuliers, marqués par sa griffe aiguisée au mouvement.Et la voix d'y trouver son chemin naturel pour attirer, séduire, émettre cris et mélodies de toute beauté et authenticité.Sur un dispositif au coeur du cloitre des Célestins, les corps se glissent, évoluent langoureusement en autant de petites cérémonies ou rituels bien dosés.Libérer les corps dans des expériences nouvelles et faire don de cela.Les femmes au coeur du sujet, archaïques phénomènes indomptables au delà des pouvoirs exercés sur elles.Mettre au monde, un privilège inaliénable et riche de tant d'émotions et d'impression.Ensemencer, semer, cultiver dans une archéologie de l'avenir pour créer des fondements nobles et vrais.Ces paysages comme des touches mouvantes s'impriment et se distillent à l'envi comme des toiles où la peinture serait projetée par la force et l'énergie des danseuses Une fratrie se dessine où les échanges sont ceux d'une joyeuse intimité dévoilée le temps d'ouvrir les possibles.

Au cloitre des Célestins


"La Cerisaie" de Tchekov mise en scène par Tiago Rodrigues  : la charge du patrimoine

La cour d'Honneur pour écrin, pour recevoir une version parmi tant d'autres de références...Challenge, inconscience ou tout simplement courage et volonté de rendre contemporaine et crédible une histoire de famille, complexe, tribale, triviale, veule pleine de cupidité, de malversation, mais aussi d'amour filial Des chaises pour asseoir cet "état de siège" de jeu de chaises musicales où chacun défend sa place, perd ou gagne, s'exclue ou prend le pouvoir...Un agent immobilier qui conseille à une mère de famille de rentabiliser son bien: pourquoi pas, si tout se noue pour réussir ou échouer, pour se lier ou se haïr.Isabelle Huppert comme égérie, femme débordante et sautillante, pleine de rigidité autant que de rebonds. Frêle silhouette pour habiter tant de fatalité, d’obéissance.Autour d'elle gravitent d'excellents comédiens, arpentant le plateau, féroces partenaires ou tendres filles et fils héritiers de cette demeure et propriété "la cerisaie". Lioubov, héroïne tragi-comique se fraye un chemin dans la jungle familiale et tire son épingle du jeu, son épine du pied avec ténacité. Ses silences sont éloquents, ses attitudes corporelles à fleur de peau.Un rôle à facettes multiples pour une comédienne hors pair.Chœur à corps, accordé pour créer une partition chorégraphique fine échafaudée par des déplacements en diagonale, des perspectives frontales où tout s'ouvre sur des possibles.

A la cour d'honneur


"Outremonde de Théo Mercier: sablier du temps suspendu.

Il investit cette année les sous-sols de la fondation Lambert pour des installations in situ dans quatre "chambres" dédiées à l'élément "sable". Tel ce marchand de sables mouvants, il fait vivre le temps d'une performance, les personnages de ces univers de dunes, de constructions éphémères évoquant l'archéologie, le mythe, le souvenir Une plage de sables fins qui engloutit, ensevelit l'espace: sables conquérants, envahissants C'est un enfant qui danse, cheveux blonds bouclés comme ceux d'un ange qui sera le guide de ce paradis secret. Il dialogue avec les femmes, imitant leurs gestes ou s'imprégnant de leur sagesse et immobilité.Dans la salle du "pendu", c'est d"un sablier qu'il égrène le temps, clepsydre minérale par excellence Le public est invité à une promenade sensitive dans cet univers factice aux confins de l'irréel.Les architectures de sable comme immergées d'une cité engloutie, perdue, foulée par les pas d'un intrus venu d'autres temps L'enfant comme une bonne étoile, un petit prince du désert C'est un voyage dans le temps, la matière, enfouissement d'où jaillit un être humain, ressuscité des périodes révolues. Une performance rare où le feu de la dernière salle brûle encore en scories, en matière frémissante de lumière.

A la Fondation Lambert

Vive le Sujet 2021 Série 2 /3 et 4 : recharger ses batteries pour affronter le monde!


Retrouver "Vive le Sujet" c'est l'instant du décalage, de l'incongru au coeur du Festival IN d'Avignon sous l'égide de la SACD dans le mythique Jardin de la Vierge , cour du lycée ST Joseph !

VIVE LE SUJET SERIE 2

"Làoùtesyeuxseposent" de Johanny Bert: éloge de la tectonique.

« Suivez-nous dans cette expérience éphémère ! Peut-être de loin cela vous semble trouble. C’est votre regard et votre sensibilité qui vont permettre que certains détails émergent. Tout commence dans le jardin de la Vierge comme un espace marionnettique. Une écriture visuelle et sonore constituée de juxtapositions de signes au plateau. Des glissements d’images entre la présence et l’absence, et d’une transgression à une mélopée. » 

C'est ainsi que se définit le travail scénique que propose un excellent saxophoniste aux accents inédits pour accompagner une structure tectonique en place: vont s'y révéler des métamorphoses métamorphiques pour marionnettes, objets hétéroclites et autres accessoires dans une atmosphère ludique et loufoque! Un ouvrage très visuel qui se fait et se défait au gré des manipulations dissimulées des protagonistes de toutes ces mutations.Jusqu'à la résurrection de Gnafron, d'un arbre déraciné, d'une vierge qui éclate en mille morceaux...Des petits rats immergent, des lombrics qui se tortillent, des poupées gonflables rose bonbon à croquer de lascivité: poésie de la catastrophe inéluctable mais délectable en diable de l'humaine condition!

"Petit trafic" de Loic Touzé : ça tourne !

Un maitre de cérémonie, Monsieur Loyal, discret mais très déterminé, se joue de la place et du positionnement de deux personnages. Leur offrant des chaises à l'envi pour mieux y exprimer hésitation, rejet, distance ou complicité.Dans et par sa présence distinguée, en blanc et rose très stylé, le chorégraphe manipule et distribue les tâches de ces pantins soumis à la loi du décideur, discret mais efficace joueur.Les deux danseurs , l'un au regard évaporé et distant, l'autre en alerte constante, forment un duo décalé ravageur, un état de siège, de chaises musicales en hommage aux anti héros du cinéma burlesque: Tati veille au grain, longue silhouette incarnée par Loic Touze, agent de ce petit monde jovial et naïf !


 


 VIVE LE SUJET SERIE 3 ET 4


"Pourvu que la mastication ne soit pas longue" de Hakim Bah :que justice soit rendue!

Une évocation forte et sans concession d'une bavure policière, cercle infernal d'humiliation, de dénis inspiré de la mort de Amadou Diallo, un jeune guinéen abattu de 41 balles dans le Bronx en 1999.Entre un jeune conteur-danseur et un circassien épris de roue cyr, se tissent des liens fusionnels: la roue tourne et la tension ne cesse de grimper, du verbe émis par le bateleur, à la menace constante de ce qui renverse, écrase la justice.Un conte à l'envers qui n'a rien d'un conte de fées: le récit des faits rythmé, PLASTIC PLATONmartellé avec sincérité et conviction.


"Etudes 4, fandango et autres cadences" de Aina Alegre: à la source des bonds et rebonds à la basquaise !

A partir d'une récollection de gestes, de chanson issues du pays basque, voici une évocation très illustrées de postures, attitudes et autres structures d'une danse "savante" issue d'un patrimoine ici revisité.Homme et femme questionnant ce répertoire autant de manière sociologique qu'artistique.Alors, on y danse, on y expose le processus en cadence, tempi et le fandango reprend sa place légitime. Contemporaine et vivante.Carnaval en guirlande, redoute ou cavalcade à deux, cette reconstitution animée se fait sans nostalgie et avec la joie des mouvements folkloriques que l'on sait à l'origine de notre bonne danse classique!


"Plastic Platon" par Juglair: siamois en émois!

La première vision est dantesque: deux corps nus scellés par du plastique alimentaire comme deux siamois! Deux corps enchainés, dégenrés, complices de cet solidarité forcée et contrainte, entrave à la liberté.Tout se transforme, se métamorphose à l'envi jusqu'à la libération du mouvement. Un manège enchanté, des licornes fabuleuses peuplent le plateau, cirque rocambolesque des facéties des deux escogriffes.Humour et fantaisie à l'appel. Un mas chinois se fait support de pole dance, on y joue à 1/2/3 soleil avec malice et le ludique l'emporte à l'emporte-pièce!Un rare moment de décalage pour un duo magnifiquement servi par des interprètes aguéris au burlesque dégenré qui n'a peur de rien. Platon en ferait un banquet à perdre pieds!


" 7 Vies" de Nach et Ruth Rosenthal: une claque faite aux convenances.

Deux femmes en lutte, l'une krumpteuse à l'envi, l'autre gracile être sur la touche de la sensibilité extrême. Cela contraste et les deux personnalités se complètent, sauvage et abrupte de coffrage, réservée et docile.Pour des propos rudes et justes, un texte volontaire et incisif, des positions physiques  toniques ,des attitudes poétiques et politiques de bon aloi. La lutte gronde, le soulèvement sismique en tremblements n'est pas loin....Toutes deux en sont actrices et témoins et nous passent le relais, flambeau partagé , course conte la montre pour défendre sa place légitime dans ce monde

VIVE LE SUJET: on en reprendrait bien encore une petite dose pour recharger ses batteries!


 


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On (y) danse aussi l'été! Les Hivernales: au CDCN: un succès public de taille!

 Comme chaque été aux Hivernales c'est six spectacles qui s'enchainent de 11H à 22H: petit marathon salutaire !l


"IDA don't cry me love" de Lara Barsacq :femmes icônes

Déjà évoquée dans "Lost in Ballets russes" voici le personnage légendaire de Ida Rubinstein, exhumé pour façonner un récit très personnel . D'une icône de la révolution féminine naissance au XX ème siècle, la chorégraphe puise dans ses souvenirs: une affiche signée Bakst où l'égérie du féminisme naissant apparait en Shéhérazade incontournable, luxuriante, marginale.A partir d'objets, d'accessoires, de vidéo, se dessine une figure accompagnée de sa panthère mythique en fond de rideau de scène, renouant avec la tradition des ballets russes. Un trio intime de femmes se constitue, charmeur et provocant au charisme naturel et sobre. Tout en finesse et suggestions, cet hommage est une pièce rare et intelligente, mêlant respect et inspiration débordante pour nous entrainer dans une période faste en ruptures et révolution de palais.La scène est terrain de jeu où Salomé et toutes les autres resurgissent pour manifester l'importance de la place revendiquée en ces temps: femmes fatales, convoitées mais décisionnaires; les muses s'amusent et les trois interprètent se donnent libre jeu pour se mêler d'un destin atypique: performeuse, frondeuse ressuscitée de façon très légitime par le talent de mise en scène de Lara Barsacq.Une pièce attachante qui rejoint d'autres évocations de femmes chorégraphes iconoclastes(Valeska Gert etc....)


"Inventaire" compagnie Grenade Josette Baiz: le pré-vert de la jeune danse !

C'est un plaisir non dissimulé que ce duo façonné de main de maitre: exercice périlleux sur la narration de soi et de son expérience chorégraphique par deux interprètes nés sous la bonne étoile: celle d'avoir partagé sa vie de danseur auprès de Josette Baiz: une grande famille de la danse où chacun est reconnu et estimé dans "le vivre ensemble" et la responsabilité d'interprète Ces deux là vont nous démontrer que souvenirs et rêves font partie de soi, de sa construction humaine autant qu'artistique. Comme deux biographies qui se mêlent pour nous faire pénétrer dans les univers qu'ils ont fréquentés: Gallotta, Mc Grégor, Bel. Nicolas Chaigneau et Claire Laureau, galvanisés par ce palimpseste remis à jour pour revivre, réinventer rôles et reprises avec talent, joie et jubilation.Une leçon d'histoire comme seule la Danse peut la concevoir:corporelle, vivante, émouvante et pertinente!Et pour clore ce feu d'artifice en bouquet, un film vidéo surprise sur tous les danseurs passés par la jeune compagnie: que du bonheur engendré par "Josette"!


"Dancewalk Retrospective" de Foofwa d'Imobilité Neopost Foofwa:marathon man !

Si vous n'avez pas pu suivre au moins un épisode du marathon chorégraphique du trublion de la danse (suisse) voici l'occasion de regarder toute "la série"en une heure: condensé en images filmées sur le vif de la traversée du monde d'un collectif mené par Foofwa: c'est riche d'élucubrations multiples, de rencontres avec le public sur fond de paysages changeants. Et drôle, virulent, relevé comme une sauce piquante, une mayonnaise qui prend d'emblée Raconter un périple semé de danse, de courses, de pas, d'épuisement, c'est sportif et athlétique en diable.On en sort ému et retourné car un acte poétique devient politique. Une des danseuses sur scène accompagne les images, fidèle marathonienne, sans jamais épuiser les ressource de l'endurance, de la pugnacité: de l'audace, du culot et beaucoup d'empathie pour cette folle virée au pays délirant d'un fou furieux d'échanges et de défis!


"Facéties" de Christian et François Ben Aim: la camarde leur va si bien !

Ils se présentent comme à l'habitude, le verbe prolixe pour exposer leur propos puis s'en détacher au profit du geste, de l'intrusion des corps dans la narration. Cette pièce pour six danseurs est à leur image, rebondissante, virtuose, pleine de vie et de surprises, d'humour, de décalages dont les interprètes se font vecteur, passeurs La danse macabre de Saint Saens comme leitmotiv récurent et le tour est joué: tout se déglingue, se rompt sans faillir à des touches de dérision, d'ironie, de distanciation.L'humour décalé des diverses interprétations de cette mélodie mythique est une trouvaille de choc! On s'y amuse gaiement tandis que cette danse de squelettes si comique sied à la vie comme pas permis.Hymne à la joie, au détournement, à la facétie!Mécanique des corps diffractée, déconfiture et rencontres de diversité et d'exception à la règle!


"Tumultes" de Bruno Pradet compagnie Vilcanota

Une mêlée jouissive de chanteurs, danseurs, musiciens où même la cantatrice se plie aux mouvements, galvanisée par cette tribu menée par le talent de metteur de scène de Bruno Pradet. Mêler le chant baroque, le rock et autres signes de pluri-disciplinarité n'a rien d'évident: ici cela opère dans un rythme soutenu, rebondissant où chacun défend son être, sa place. Guitare, violon au poing pour un savant voyage dans des univers musicaux choisis, de Pergolèse à Vivaldi: rien ne semble interdit pour la visite de la danse taillée dans le vif pour neuf artistes oscillant du geste à la voix pour mieux vivre ensemble une utopie tumultueuse aux flux et reflux permanents.Une pièce originale et une performance à développer pour s'y lâcher encore et en corps.


"The Passion of Andrea 2" par Simone Mousset Projets

S'il fallait décerner une palme à la pièce comique dans ce festival off, ce serait sans aucun doute à celle ci: un condensé léger, efficace, sensible de retenue, de drôlerie, de frôlement des genres avec des touches impressionnistes savoureuses de couleurs locales Trois anti-héros s'emparent discrètement du plateau, le temps de convoquer des Andréas multiples façonnées par l’ingéniosité de la dramaturgie.Exemplaire jeu et présence des interprètes, escogriffes bienveillants dans un monde absurde, décalé.En "anglais" souvent pour une touche distinguée en plus, tout bascule pour ces trois lustigs désopilants, face à leur destin bouleversé Leur identité c'est Andréa, convoquée comme Arlésienne, spectre hantant la scène, icône inconnue au bataillon mais toujours convoquée pour l'action!Nos trois Andrea rivalisent de malice, se traquent, se tuent, disparaissent et meurent pour l'une avec une grâce irremplaçable.Un trio décapant, insolite, surprenant avec des ballons de baudruche suspendus au dessus de leurs têtes comma autant d'épées de Damoclès pas si menaçantes que cela.

La Danse aux Hivernales estivales, c'est la plus audacieuse boite à coulisses que l'on puisse convoiter!

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dimanche 25 juillet 2021

On (y) danse aussi l'été! Les Hivernales Hors les Murs à l'Atelier: chemins de traverses chez les voisins!

 


"La chair a ses raisons" de et par Mathieu Desseigne-Ravel: trapèzes sans filet !

Il sera de dos, à peine éclairé, comme un trophée d'animal, écorché. De la chair vive revisitée comme de la pâte à modeler, polie comme une sculpture de Camille Claudel ou Rodin, dans la semi obscurité: un panorama mouvant de sa structure musculaire, vivante, lisse, huilée, sensuelle.Pétri de micro mouvements à peine perceptibles.Vision hypnotique d'un phénomène plastique, très réussie qui tient en haleine et se déploie à l'envi dans un espace-temps lumineux très réduit. Cela opère au delà de l'imagination: de la danse à vif, tendue, infime sensations curieuses de petite géographie corporelle se métamorphosant au gré des impulsions nerveuses. Non sans rappeler le travail de Laurent Goldring pour Donata d'Urso ou Xavier Le Roy ou celui d' Olivier Lelong sur le corps plastique.

http://genevieve-charras.blogspot.com/2016/09/lutherie-instrument-prepare-pour-grand.html


A l'Atelier


"Nulle part est un endroit" de et par Nach:  Terpsichore en baskets !

Solide, valide, tonique, son caractère se révèle d'emblée: Nach est un phénomène plus qu'attachant. Féline, maline, au regard et mimiques saisissante, elle tient le plateau pour une "conférence dansée", solo incarné de sa personnalité abrupte. C'est à travers son récit que se découvrent toutes les variations du krump, par le filtre de son corps que l'on "apprend" à repérer les postures, attitudes de ce street art singulier.Pied, talons en force, traces de danse baroque, influences diverses. Dans sa stature massive, par le truchement de sa voix pleine et joviale on pénètre avec empathie dans son univers: voix off et vidéos à l'appui pour sceller sa parole en direct.Une présence rare, engagée, séduisante et dérangeante tant elle bouscule les idées reçues, fait basculer poids et appuis pour une lec-dem unique en son genre. Bienvenue dans sa sphère idéale et partageuse.

A l'atelier

AUTOUR ...


"La mécanique des ombres" de et par Naif Production dans le cadre des Garden Party du Théâtre des Doms : anonymat à visage couvert.

En "petite forme-version extérieure" sur le plateau du jardin trois étranges personnages apparaissent cagoulés, visages masqués, couverts. Que dissimulent-ils sinon leur identité, leur faciès, leur regard. Seuls dialoguent les corps qui s'attrapent, se soulèvent, s'affrontent, se racontent.Énergie acrobatique, autant que geste dansé fluide, innervé de flux et reflux. Statuaire à la Daniel Firman parfois, tout bouge, oscille, périlleux exercice de style froid et distancé.Les interprètes sont au diapason pour une chorégraphie signée Mathieu Desseigne-Ravel, Sylvain Boullet et Lucien Reyes.


"Lost in Ballets russes" de et par Lara Barsacq: mémoire vive

Elle est en filiation avec Léon Bakst, décorateur et costumier des ballets russes et raconte son histoire, ce qu'elle fantasme de cette époque, thème que l'on retrouvera dans sa pièce en hommage à Ida Rubinstein. Simple et accueillante proposition de la suivre dans son périple, à la recherche du temps, de ce qui l'a marqué dans les strates de son corps dansant. Elle nous guide et nous emmènent joyeusement sans nostalgie sur la piste d'une époque, d'une esthétique qui lui ressemble et qui nous rassemble. Pas d'égo, ni d'exclusion dans cette résurrection d'impressions, de sensations liées à son passé-présent très convaincant. Ne rien oublier de ce qui nous construit!Que ce petit rituel public soit perçu comme une boutique fantasque aux portes ouvertes sur la connaissance collective! 

A L'Atelier

La Belle Scène Saint Denis en Avignon le Off 2021: programme 2 : un panel éclairant sur la "dansité du geste !

 C'est toujours un immense plaisir que de retrouver ce plateau de plein air à la Parenthèse, une cour privée, ouverte à l'accueil de la Danse à potron-minet!


"Les Baigneurs": Art Doudou !

Cette édition là démarre à l'extérieur des murs avec, parmi le public, les deux silhouettes burlesques en diable de Clédat et Petitpierre: telles deux figures quasi grotesques mais très attendrissantes, ces baigneurs, ours de peluche bariolés de rayures balnéaires , entrainent dans un univers tendre et diuillet. En dépliant nonchalamment leur tapis de bain, parmi nous, ils interrogent leur place dans cet espace ouvert à tous. Gestes ralentis pour mieux s'installer, prendre des pauses édifiantes de paresse, de relâchement, d'innocence. Pris en flagrant délit de délicatesse, de respect l'un de l'autre, ils nous convoquent "gentiment" sur l'autre scène pour y déguster cette matinée de sensations douces.


"Le fil" de et par Sylvain Prunenec: "j'ai la mémoire qui flanche....."

Travailler sur "la mémoire de la matière", sur les sensations qui jaillissent et convoquent la mémoire corporelle, ainsi va le propos du chorégraphe qui plonge dans les strates du vécu, de son histoire pour "penser" le corps et panser les résurgences du ressenti inscrit sous la peau, dans les muscles profonds Et si les "souvenirs" s'entremêlaient de façon à leurrer celui qui cherche à les raviver? Telle serait l'objet de cette belle et subtile prise de corps et de parole du danseur, irradiant de malice, de considération pour la danse, pour sa danse: d'un "incident" de parcours en scène, il fait et construit un cheminement kinésiologique qui aboutit à sa propre vérité; Qu'il sait si bien partager, laisser voir, entendre et filtrer.Se raconter aussi au travers des gestes précieux de Bagouet, Trisha Brown ou Odile Duboc Traces et dépôts, le corps s'imbibe, s'imprègne et resurgit la danse de Sylvain Prunenec, fluide, habitée, féline!Détachement et distanciation par le récit de la parole aussi: cela fait un bien fou et l'on chemine avec sa pensée brillante par delà les époques!


"Abdomen":de et par Clémentine Maubon et Bastien Lefèvre: ceci n'est pas du sport!

Un duo qui démarre sur les chapeaux de roues, très sportif, emporté par les tenues vestimentaires adéquates et le tempo : deux gymnastes rodés qui se cantonnent à leur savoir courir sur place et autres défis physiques. Danse duo à l'unisson des efforts pour mieux basculer dans un autre langage, fluide et complice dans l'énergie partagée. De quoi faire surgir le sentiment, l'union, l'amour; le heurt des corps une fois encore confrontés à leur gestuelle inscrite: force, tonicité, rudesse ; l'abandon se fait timide et discret: encore un beau chemin à parcourir avant d'accéder à une respiration poreuse et salutaire....


"Mal compris" de Mael Minkala : message bien reçu!

Il est interprète de son propre solo, taillé sur mesure et dans le vif de son sujet: lui-même face à sa destinée, complexe enchevêtrement de circonstances, de cultures et d'appartenance Frêle silhouette exilée de son sol, de sa terre, à travers son corps, torse nu, il clame avec énergie la fragilité de la vie. Musclé, statuaire ambrée qui dévoile sa chaine musculaire comme autant de réseau de circulation, il dévoile son identité de danseur, d'auteur avec audace et authenticité. Visa pour franchir les frontières du contact, sa danse muselle aussi son corps, le confine dans la douleur C'est émouvant et juste sans fioriture, à fleur de peau.

Et l'on se quitte pour l’angélus, ravi d'avoir assister à l'éclosion d'autres mondes....

La Danse au Festival Avignon Le Off 2021 à la Manufacture :les narrations des corps...


"No Man's land" de la compagnie Daruma, Milène Duhameau : du large !

Cest au Chateau de ST Chamand à potron-minet sur un plateau extérieur: trois danseurs, tenue banalisée citadine, urbaine: ils vont tenter la rencontre par de multiples passages, frôlements, inter-actions. Volubiles, dans l'espace vaste et ouvert, ils tissent une histoire simple et convaincante: une relation d'apprivoisement, de rejet, de doute ou in fine d'adhésion entre eux. De beaux arrêts sur image pour lester la tension, affermir l'attention et rendre crédible l'évolution des relations Les gestes issus du hip-hop sont vifs et les évolutions possibles dans ce vaste terrain de jeu, aspirent à tracer un chemin, des circonvolutions tracées très graphiques.La proximité avec les interprètes rend possible un jeu interactif et le silence qui se fait ce jour là, incident technique, pose et repose le regard sur le mouvement, simplement habité.


Palmyra" de Bert and Nasi :corps dominé, dominant.

Autant danseurs, comédiens, que clowns, deux compères vont esquisser les relations de soumission, de domination: politique du corps qui se tait pour celui qui serait le "réfugié", qui verbalise, pour celui qui défend sa cause de dominateur Nasi est tapi dans son coin, muet, ficelé par son ignorance. Détruire, disent-ils: d'une assiette brisée vient le malheur, le doute et la suspicion. Les premières démarches pourtant entre ces deux larrons furent une très belle scène introductive: sur un skateboard, chacun évolue, glisse, traverse l'espace le temps d'une romance baroque ch'io pianga" de Haendel.Temps fort qui augure d'une belle exploration de l'espace.Les assiettes retombent, l'incompréhension persiste, la domination est bien ce mutisme que le corps recroquevillé de Nasi, exprime.


"Bataille" de la compagnie Dernière Minute Pierre Rigal: jeter son corps dans la bataille!

Un duo performant où deux individualités confrontent leur langage, leurs codes, leurs façons d'exprimer colère, haine, désir, tendresse...Violence des gestes, percussions corporelles pour mieux battre le rappel de la lutte à mains nues, corps en jeu. Les esquives, certes, mais aussi les claques et rentre -dedans pour simuler qu'il faut "jeter son corps dans la bataille" !Duo de choc où le jeu se fait masochisme, répétitions et parfois absurdités des comportements belliqueux!On s'y manipule à l'envi,on s'y confronte dans la chair, à coups de poings, à coup de gueule.


"Iskanderiah Leh ?" par la compagnie Ex Nihilo: l'atelier bien établi!

Anne Le Batard et Jean Antoine Bigot s'adonnent à la joie d'étaler les établis du travail en cour pour toutes les investigations visibles du "labeur" du processus de création.Tout est circulation d'un point à un autre dans ce laboratoire de recherches, à vue, dévoilé.Alexandrie pourquoi? en sera le leitmotiv: recherche et déboires en interrogeant les corps qui parlent, qui se souviennent de Marseille, de l'Egypte, autant de zones d'exil, de départ ou d'arrivées périlleuses. Cinq manipulateurs d'objets, d'images qui jonchent le sol et qu'il ne faut pas oublier, négliger pour vivre ensemble.Une écriture singulière pour ce plateau ouvert au public: la langue gestuelle n'a pas de frontière!


"Plubel" de Clémentine Vanlerberghe: les femmes silhouettes..

Quatre esquisses de corps à peine éclairées dans une mouvance douce, sensuelle, fluide. C'est beau et intime, à fleur de traces fugaces, de rémanence dans l'espace qui s'invente, se dessine. La clarté se fait peut à peu sur ce quatuor changeant, figurant moultes situations physiques d'investigations du corps dans l'espace.En legging noir, torse nu, poitrine dévoilée en figure de proue, elles défilent aussi, talons hauts en bottines comme des pieds de chèvre surhaussés. C'est quel peu satanique et diabolique, fortb et suggestif.Groupe ou individualité, la danse révèle chacune par une présence intense qui touche et remue.Ligne, autorité, beauté de la scénographie font de cette pièce un réceptacle de "plus belle tu meurs" incontestablement indisciplinaire! 


"Le sale discours" de David Wahl et Pierre Guillois: ce que "le sot l'y laisse"....

Un "bijou" pour raconter l'histoire du "sale", c'est du propre! David Wahl, d'emblée entraine par les mots, les gestes dans son univers décalé, féroce, documenté, fouillé, qu'il faut croire ou fantasmer. Causeries plus que conférences ou allocution, ses élucubrations historiques viennent tordre le cou à la raison, au dogmatisme. Récit, petite géographie linguistique et corporelle, sa pièce avance, distinguée, précise, séduisante. Le déchet, le tri de tout rebut, ce que "le sot l'y laisse" à recycler, font office de matière première à moudre. A pétrir et à méditer à l'envi. C'est un alchimiste, prédicateur, prophète de pacotille qui tricote des récits passionnants et la matière plastique dans laquelle son corps-conteur évolue se fait entrave, pollution, charge ou bain de jouvence. En tout cas des images performatives et plasticiennes s'y rejoignent pour jubiler plus que ternir la vision d'un monde fataliste. Du très bel ouvrage qui tient en haleine et interroge l'auditoire, ébranlé, déplacé, comme un danseur qui chemine dans la pensée en mouvement.


samedi 24 juillet 2021

Pour les enfants à Avignon le off 2021: regarder le monde au carré !



 "La puce, le chameau et les autres"par la compagnie Comme sur des roulettes d'Annette Banneville et la compagnie LEA: on s'y plie sans s'aider !

Des animaux de papier pour partenaires, des chameaux à deux bosses pour cette arche de Noe bien singulière....Un duo de femmes, conteuse et musicienne, danseuse et clown, c'est au petit matin bien revigorant, ravigotant ! De tout petits animaux partout qui en disent long sur la vie de l'homme en leur compagnie.A la pêche à la baleine qui se cache à l'eau, à la recherche de l'éléphant ou du plus petit animal, mouche ou autre, les deux actrices s'inspirent de textes courts de référence sur les bestioles et l'on navigue dans ce beau vaisseau plein de musiques et de malice, avec joie et délectation.On y chante, y danse sobrement mais justement, en comptine, en saynètes brèves et opérantes et la fraicheur, la diversité des propositions enchante le public à foison!Une mappemonde comme terrain de jeu et d'amusement, pleine de vie et de couleur pour faire "son cirque" et découvrir la palette des diversités qui nous entourent.

A la Présence Pasteur 


"Les petites géométries" par la compagnie Juscomama:tout s'efface, même les traces !

Deux silhouettes, personnages à la tête bien construite au carré, comme un cube pensant vont devant nous, assises procéder à une romance joyeuse, amoureuse et ludique: se barbouiller le faciès carré de craie, de couleurs, de toute matière possibles.Jeu masqué, théâtre d'objets animés, ça roule d’emblée sans cesse rythmé par les corps vivant cette métamorphose constante. On y rêve, on plonge dans l'esthétique de l'Art, de l'outre-noir au pointillisme, de Arp à Picasso, des arts premiers au surréalisme....Quelle belle et touchante traversée dans l'univers de l'enfance de l'Art !Justine Macadoux et Coralie Maniez pour piloter à l'aveugle cet exercice de style périlleux !

A la Manufacture

"Dadaaa duo" au Totem Maison du Théâtre pour enfants à Avignon le off 2021

 

La grande Sophie à hue et à "Dadaaa" !


Amélie Poirier, Les nouveaux ballets du Nord-Pas-de-Calais.

"Pied de nez à la rigueur des conventions et aux batailles idéologiques du début du XXe siècle, le Dadaïsme marqua, par sa liberté créatrice et son irrévérence, l’imaginaire de nombreux artistes. Pour les plus jeunes spectateurs, Amélie Poirier se plait ici à reproduire à échelle variée des marionnettes cubistes et minimalistes de Sophie Taeuber-Arp et des photomontages d’Hannah Höch.Le tout dans une performance électroacoustique inspirée par les poèmes d’Hugo Ball et Tristan Tzara où la parole devient davantage matière que sens. Trois danseurs-marionnettistes et un contre-ténor performeur nous plongent dans un monde imaginaire, un univers plastique qui fait se rejoindre espace sensoriel et questionnements politiques portés par l’esprit Dada. Car Dada n’a ni queue ni tête. Dada colle, agrège, mélange, travestit… Dada se moque. Qui mieux que les enfants sont Dada ?"
Et l'on en sort "gaga", enchanté par ce bel hommage à la grande Sophie et à son écurie fantaisiste de marionnette, à doigt, à fil..."Le Roi Cerf" se taille la part belle et sur scène, des reproductions de ces figurines dadaistes occupent l'espace Les quatre comédiens ouvrent le ciné-bal à l'aube -Aubette- de ce parcours fantastique dans l'univers de cette femme artiste hors du commun: danseuse et créatrice de tissus, mini-textiles merveilleux!
De la poésie sonore sourd des lèvres d'un violoniste-chanteur ténor alors que la figure de la peintre s'occupe à grimer ces créatures rêvées. Tous s'amusent, rigolent, joyeux quatuor qui se questionne dans une langue inconnue.

Deux danseurs épousent la forme d'une grande marionnette anguleuse, tout de doré vêtue.Comme elle, ils se désarticulent, mimétisent en même temps: corps perchoir pour une autre petite figurine qui s'envole...La musique vocale bat son plein, de beaux portés soulèvent les autres pantins, sculptures à deux dos: transport de corps: les "écrabouillé, araignée et autre accident" de parcours labial pour un peu d'absurde, de surréaliste dans cette histoire abracadabrantesque.Des coiffes dorées, des costumes chamarrés pour ces marionnettes à main, comme des gants de couleur qui chatouillent les comédiens-danseurs.Un petit cerf se fait manipuler, à petit pas, grimpe sur les corps alors que son alter égo, avatar, le Roi Cerf, magique et tribal s'émeut et partage le plateau.


Dans un langage codé, mystérieux oracle. Trophée de cornes brandi pour la chasse. Les trois comédiens, en noir et blanc, la danseuse toute jaune font un tableau vivant, mouvant faisant évoluer masses graphiques et couleurs.Le vibrato de la voix, ses fréquences, son timbre, intriguent, bizarre. Une  marionnette rouge et blanche à entonnoir de fou, joue du violon puis s'envole, cigogne de pacotille.Puis se cogne aux vitraux de couleurs. Un chapeau dada, de Carême, toque de chef dada foutrac fait mouche.Une autre marionnette bleu scintillant, robot manipulé par pile comme un play-mobil télécommandé, des chapeaux à colonne comme dans un défilé de mode....L'univers évoqué est riche et varié, la langue étrangère inventée, musicale en onomatopées, et ce joyeux brouhaha, enchantent petits et grands. Danse de bâtons au final, en tourniquet, portrait de groupe avec la peintre et ses modèles: tout rentre dans l'ordre, la vie s'arrête: "réveilles toi" le conte est fini!