mardi 30 septembre 2014

"Le Paradis" d'Alain Cavalier: pas perdus!

Un film atypique, hybride, inclassable: la vie, la vraie en somme!
Plus de modèle, ni de standard pour Cavalier: finis les films avec narration, acteurs, costumes et situations recrées de A à Z.
Avec "Le Paradis" on nage dans un bonheur de filmer où tout est possible: de la naissance du petit paon qui titube sous la queue tronquée de sa mère, à l'esquisse d'un chat qui se dérobe en direct sur l'écran....
Alain Cavalier qui s'est progressivement dépouillé, depuis quarante ans, d'à peu près tous les artifices
somptuaires qui corsètent le cinéma pour finir par proposer, caméra HD en main et bille en tête, une formule postindustrielle – on pourrait aussi dire lustrale, renée, miraculeuse – de l'art cinématographique.
On y côtoie la matière à l'état brut, les objets inanimés qui ont une âme, dociles certes comme la marionnette de Kleist...Des danseurs idéals pour un chorégraphe de l'image où rien ne bouge en apparence, mais où tout est teinté de vie!
Les sculptures, objets filmés qui nous parlent (voix off du réalisateur), deviennent amulettes, parures de tombes improvisée pour petit paon mortellement abandonné.Osties, rollmops sont autant d'objets de cérémonie, petit rituel entre amis de l'image "sale" abrupte, jamais retouchée, comme le son direct d'ailleurs!
Comme du land'art, le caillou encerclé de trois clous, (ceux de la crucifixion du christ?) rappelle les plus beaux circuits de découvertes d'installation de plasticiens.Ici, c'est la vie, la mort que l'on côtoie au quotidien: ce quotidien que filme Cavalier, du soir au matin, dans ses yeux, sa perception de l'espace, où le temps de sortir sa petite caméra!
C'est comme une "paluche" qui révolutionna en son temps la façon de filmer la danse: Eric Pauwels et Jean Rouch veillent au grain, caméra au poing, immergés dans le présent des corps et des objets.Jamais les "sculptures" ne furent filmées ainsi, comme autant de personnages vivants sculptés par la lumière.
Magnifiés!
C'est de la mise en espace d'objets qui se réveillent et secouent en nous le monde dissimulé des images de l'enfance Tout parle ici à notre inconscient si on veut bien se prêter au jeu de cache-cache.
Tendresse au poing, sans nostalgie, dans l'instant ce "paradis" sans Eve ni Adam est un havre de paix: mais qui s'y frotte, s'y pique aussi pour un cinéma d'expérience, jamais "expérimental" pour initié!
Un conte de faits pour grands enfant en recherche de vérité!

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