mardi 11 décembre 2018

"Split" de Lucy Guerin : la danse, théâtre de la cruauté , crudité, crue-nudité. Cou-coupée !


Deux femmes dans l’étau du temps et de l’espace. Deux facettes de l’humain tour à tour dans l’affrontement et dans l’harmonie. Une richesse de gestes et de rythmes saisissante.
Le principe de Split est aussi simple qu’efficace. Deux femmes occupent un espace délimité par des lignes blanches. Celui-ci ne cesse de rétrécir, les obligeant à redéfinir leur relation, à des intervalles qui se réduisent de manière toute aussi menaçante. Il n’y a ni issue ni solution, juste des gestes de plus en plus contraints, névrotiques ou soudainement apaisés. De l’unisson aux affrontements intimes, Melanie Lane et Lilian Steiner dévoilent une richesse chorégraphique foudroyante, ouvrant d’innombrables pistes pour l’interprétation de cette métaphore de la dualité, dansée, l’une dans son plus simple appareil et l’autre, vêtue de façon puritaine. Split parle aussi bien de l’intime que de l’apparence, les deux facettes de l’humain. L’immense talent de Lucy Guerin s’affirme et se précise, de pièce en pièce.

Elles sont deux sur le plateau, l'une est nue, l'autre vêtue d'une robe mi longue de satin bleu.
Deux corps jumeaux qui vont exécuter une même danse en parallèle sur un tapis de danse  aux contours tracés de blanc, carré magnétique qui se rétrécira au fur et à mesure , déterminant un champs d'action de plus en plus resserré! Deux danseuse à cappella sur une musique sourde et envoûtante aux décibels
de plus en plus présents, accentuant cette danse perpétuelle aux résonances répétitives, angulaires, précises et hypnotisantes.
Une danse tranchée, cinglante, en brèche, taillée en faille, coupée à vif Une lente marche d'approche entre deux femmes qui ne se touchent pas, parallèles, jumelles, siamoises cou-coupées qui cherchent cependant à se rejoindre au fur et à mesure du rétrécissement de l'aire de jeu. Elles s'attrapent en prise comme des animaux en proie au désir, à la lutte et au combat vital pour gagner leur espace d'évolution, de vie.
Le geste se rétrécit, les déplacements plus compactes engendrent une danse étouffée, compactée .le duo se sépare pour des reptations magnétiques,  des postures au sol très sculpturales à la Maillol, sans les formes! Suspendus dans l'espace horizontal des corps flottants.La danse revêt un aspect ethnique, fresques archaïques ou orientales se déroulant dans la sphère de jeu..
En un combat singulier, de prises, de portés, de "combines", de capture, elles se confrontent dans un duel  charnel, érotique et sensuel à l’exiguïté de leur espace délimité de façon draconienne jusqu'à ne faire qu'un tout petit carré!Proie à vif entre les mains de son amante religieuse, prédatrice impitoyable, l'une dévore l'autre jusqu'à la proximité  initiale d'une lutte à mort, à vie, Eros et Tanatos à l'oeuvre: elles s'attrapent, s'attirent, se cherchent, très animales, fortes, au travail, corps à corps; la marche d'approche et de séduction attise le désir et l'envie jusqu'à la destruction, la dévoration, crue et nue d'une chaire transfigurée par la danse!

Au Théâtre des Abbesses jusqu'au 8 Décembre
g

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