Toxic Box
Daniel Zea, L’Imaginaire
vendredi 2 octobre 2020 — 18h30
Salle de la Bourse
Pour sa première à Musica, l’ensemble L’Imaginaire franchit les frontières musicales en compagnie de Daniel Zea Gómez. Ses pièces forment un diptyque où les visages des musiciens, projetés à l’écran, deviennent les instruments d’une partition de mouvements : d’un face-à-face sur le thème du dialogue amoureux (Love Letters) à son miroir virtuel et déshumanisé (Toxic Box), le compositeur suisso-colombien explore les traces laissées par les émotions à l’ère numérique.
Deux personnages, face à face vont dialoguer avec leurs visages et nous restituer par le truchement de la caméra, en frontal sur écran, les petites chorégraphies de leurs traits qui s'animent peu à peu. Duo, duel humoristique où les facies surdimentionnés donnent le "la" alors que se déverse des résonances électroacoustiques. Pas d'instrument ici pour ces deux interprètes virtuoses de la flûte ou du saxo..Deux corps de profil, raidis, penchés, modèles d'images divisées selon la moitié de l'écran: visages en noir et blanc qui vont subir une colorisation imperceptible, un dédoublement des contours qui les rendent surréalistes, méconnaissables, enchanteresses.Comme une enveloppe, une seconde peau, ces "masques" nous révèlent formes et métaphores du faces qui se dissimule mais se trahit lentement par les intentions musicales qui les secondent en direct. Exercice virtuose audio-visuel, danses des muqueuses, icônes malmenées, devenues monstres ou Quasimodo: bonne pate à modeler comme le son qui se métamorphose et suit cette mutation des genres: mouvements des yeux, des paupières qui décidément n'ont pas d'oreille ! Tics de bouche déformée à l'appui, faces masquées à la japonaise, théâtre de No revisité ! Des sous-titres pour rendre intelligible les formes ou les intentions de la composition aléatoire.Un peu redondant et lassant cependant, le système opérant jusqu'à épuisement du concept.Monter son bon profil, faire face aussi peut mettre en danger.
Nicolas Collins
Pea soup
(1974/2014)
Sur fond d'écran rougeoyant, le silence s'installe puis la lente apparition fantomatique, quasi virtuelle du saxophoniste incarne le son; vrombissements et petites secousses, souffle et tremblement pour une sismographie du son, des appels en vain pour sauver la face et le silence redevient rouge dans un grand suspens....
Deux avatars à l'écran, lisses, confondant de réalisme outrancier, made in pixel et autres truchements de l'image en 3 D...Pas vraiment "esthétiques" ces faciès de poupée Bela, reconnaissables, ceux des interprètes, modélisés par la technique sophistiquée de nos machines iconiques.En tenue miroitante de circassien, les interprètes prennent la scène et délivrent en live de la musique acoustique! Laqué, or et argent, pailleté, le show se glisse sous les images, transformistes: femme et homme pudiquement torse-nu, créatures troncs, tronquées au profit de jeu de bouche étirée qui dévoilent des dentitions monstrueuses. Avatar bâtard, vernaculaire icône des corps dénudés, insipide image nette et aseptisée d'une musique pourtant riche et florissante. A quoi bon tant de chichis pour épauler de façon lisse, ces corps ternis par la fadeur des contours immaculés. Trio à l'image qui peu à peu va prendre sens dans de belles juxtapositions de tons et d'images de masques, d'objets hétéroclites..A toute vitesse défilent ces tableaux, dignes d'un musée ethnographique, quai Branly de l'électroacoustique: bricolage et science au poing! Le rythme mécanique s'emballe, s'accélère, les images se catapultent dans cette modélisation désuète et démodée-volontairement ou pas- kitsch à mourir!Quand son et image ne se rencontrent pas, l'absence fait irruption dans ce jeu de massacre aux bouches déformées par les impacts percutants de l'électronique. La beauté canonique des "modèles" agace, ces masques de tonneau de vin s'affolent dans la pixilation du montage : hommes et femme tronçonnés par l'acoustique, déplacés, défigurés.Gueules cassées sur champ de bataille des années passées...
L' Imaginaire sur la voie mutante des musiques nouvelles, ne convainc pas vraiment.
On songe avec nostalgie au travail de N+N Corsino avec le compositeur Jacques Diennet pour des vidéo-danse modelées par le 3D avec poésie et "e-motion capture" , pixels de haute voltige ! (Seule avec Loup)......
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