mercredi 20 juillet 2011

HIP HIP HOP HOURRA! avec "Hip hop aura" de Farid Berki au "Avignon off"


« Hip hop aura » de Farid Berki : une conférence dansée au sommet !
Farid Berki de « Melting Spot », pionnier du métissage de la danse hip-hop avec d’autres styles, d’autres musiques ( on se souvient du « Pétrouchka » pour le ballet du Rhin) réitère ses exploits avec une truculente pièce, sorte de conférence improbable sur la danse et la sociologie des pratiques artistiques en milieu urbain !
C’est drôle et très bien illustré par trois danseurs-comédiens chacun virtuose en sa matière.
Le conférencier, blagueur et trop sérieux et docte à la fois, se fourvoie dans des propos de brèves de comptoirs au sujet d’une pratique qu’il semble loin d’habiter. Face à lui et à ses côtés deux Hurluberlus fantaisistes et plein de talents et de technique lui donnent la répartie sans faillir. Du bel ouvrage, comme un glossaire, un dictionnaire des genres et formes du hip-hop qui vaut bien un mausolée ou une cathédrale en hommage au risque de formol dont cette danse si riche est menacée !!!On salue les talents de Olivier Lefrançois, Johnny Martinage et Patrick Sourdeval pour cette périlleuse prestation !
GENEVIEVE CHARRAS

Daniel Dobbels oscille avec "A la gauche de l'espace" dans le "Avignon off"

« A la gauche de l’espace » de Daniel Dobbels
Danseur, penseur et philosophe, chorégraphe de la pensée, Daniel Dobbels nous livre un duo au-delà du temps, de la pesanteur, symbiose de lumière et de corps pensants : une mélodie au petit matin, au creux d’un jardin suspendu au cœur d’Avignon, à « La Parenthèse », un site privé, un passage intime au sein de la ville.
C’est à l’invitation de « La belle scène saint-denis » que se réunissent des artistes aux talents multiples dans un désir d’échanges, de partage.
Daniel Dobbels fait partie de ceux qui engagent les interprètes dans son processus de réflexion, de flexion des corps qui oscillent de la tête aux pieds pour servir au plus profond, au plus près les préoccupations de cet homme à la chevelure grise, au port de tête très stylé.
Sur la très belle partition de Pascal Dusapin (Etude N°1) pour piano,  Marine Chesnais et Carole Quettier évoluent avec lenteur et délectation, sobres et entières, vouées au rythme d’une « lente révolte », « volte lente » se dégageant d’un poids immense « et dérivant inexorablement vers la gauche, comme si cette danse devait rompre avec toute droite ».La gémellité des corps, leur fausse symétrie, leur long étirement dans l’espace commun qu’elles définissent sans cesse, procurent un plaisir intense, une délectation savoureuse, onctueuse.
Les deux femmes s’emmêlent, se défont, se fondent pour se liquéfier subtilement, de façon continue, sans heurt. C’est une écriture de la dépose, du couché qui touche et pénètre notre imaginaire de façon persuasive, intuitive, inventive. Des instants suspendus à la lisière de l’inconscient comme rivés à l’extrême écoute du monde sensible, à la perméabilité des sens et la porosité de la présence de la danse, dans la lumière, la brise, la magie d’un matin égaré.
GENEVIEVE CHARRAS

"Chambres d'Hotels" de Valérie Rivière: entre "passe" et palace"....en "off" à Avignon


« Chambres d’hôtels ». Compagnie « Paul les Oiseaux »
A « La Manufacture » dans le « off » en Avignon, on aime « transporter » le spectateur, le convoyer sur des sites inédits : du marché de gros à la patinoire, il n’y avait qu’un pas (de danse)que le public franchit toujours avec enthousiasme !!!
Pour cette œuvre de Valérie Rivière sur des textes de Timothée de Fombelle,  le ravissement opère. Prenez une danseuse esseulée dans une chambre d’hôtel miteux mais ô combien source de plaisir et de fantasmes, plongez la dans une atmosphère de polar bien juteux et partez loin, très loin, deux heures durant dans une histoire abracadabrantesque…Suspens, sensualité, légèreté au menu pour ce spectacle en trois volets et trois décors où la danse est suspendue et liée à une interprétation très virtuose, fluide et charnelle. Amour et solitude, inquiétude et délectation, hors du temps comme en partance quand on quitte sa routine pour tout oser, être « fou » et s’accorder les moindres caprices : seule, Katia Noir interprète une « Madame rêve » sensuelle et nostalgique à souhait !
Plus tard, c’est un couple en perdition qui hante une chambre au design entre « passe » et « palace » pour des scènes d’amour fulgurantes, passionnées, les corps en prise, en passe-passe très érotiques, très habitées de sensations contagieuses. La troisième séquence met en scène une jeune fille (Stéphanie Pignon) qui s’habille et se déshabille à l’envi, séductrice, séduisante et qui n’a de cesse d’hypnotiser, de ravir celui qui la regarde : le décor change, entre polar et road movie, le climat se modifie, le calme succède à la tempête, le temps fuit sans retour.
Une fois de plus saluons l’interprétation des danseurs dont le très beau couple Chloé Camus-Hernandez et Orin Camus, des découvertes qui ne s’inventent pas !!!
GENEVIEVE CHARRAS