vendredi 24 avril 2015

Bistromania




jeudi 23 avril 2015

"Histoire d'Ernesto": manipulations indisciplinaires!


C'est gai, c'est frais, bien relevé, bien rythmé, fidèle à un esprit durasien, rebelle quelque peu et irrévérencieux!
Cette adaptation scénique de "Ah Ernesto", conte pour enfants accompagné d'illustrations de Bernard Bonhomme publié en 1971 est sincèrement une réussite, simple et sobre, pleine d'invention avec trois fois rien et si peu de chose!
Deux minuscules corps taillés en sorpe de poupées vont tenir tête à de vrais visages "grandeur nature" de deux comédiens, manipulateurs.C'est charmant et l'effet fait mouche: attendrissant et comique pour représenter et incarner les parents de Ernesto, cet enfant rebelle et réfractaire au savoir "de ce ue l'on ne sait pas"
Un visage surdimentionné , yeux fermés qui fait la mou, et voilà l'instituteur, flegmatique  pour brosser un portrait de ce personnage grotesque.


Portrait de famille pour ces sept Ernesto qui se succèdent se substituent les uns aux autres pour mieux brouiller les pistes.
 Un décor tout simple, construction amovible qui accueille et recueille les corps des comédiens qui s'y perchent à loisir comme dans une aire de jeu de square.
Ernesto, une fois de plus revisité comme le faisait Duras, dans son film "Les enfants" en 1984, puis dans le roman "La pluie d'été" publié en 1990 où Ernesto devient l’aîné des "brothers" et "sisters" d'une famille d'émigrés. La trame narrative se déroulant à Vitry sur Seine, le lieu "le moins littéraire que l'on puisse imaginer"

Lire aussi "Ah, Duras" et "Ah Ernesto" aux éditions Thierry Magnier sur les aventures de ce beau conte, sans fées ni morale, indisciplinaire à souhait avec les tendres illustrations de Katy Couprie.

Et l'on se souvient de l'exposition au CEAAC "Ernesto", libre interprétation de plusieurs plasticiens, mise en espace dans tout le lieu en Novembre 2014 à Strasbourg.
Un sujet inépuisable!

 Histoire d’Ernesto est une variation pour marionnettes et comédiens de La pluie d’été, adaptation scénique du roman dialogué de Marguerite Duras. Cette petite forme ludique réunit sept jeunes marionnettistes issus de l’École Nationale Supérieure des Arts de la Marionnette, à travers différentes techniques de manipulation (kokoschkas, marionnettes portées...) Histoire d’Ernesto se concentre sur les scènes principales de l’œuvre originale pour en faire ressortir l’humour, la naïveté et l’aspect clownesque.

Sylvain Maurice fonde en 1992 la compagnie L’Ultime & Co, puis dirige le Nouveau Théâtre - CDN de Besançon et de Franche-Comté de 2003 à 2011. Depuis 2013 il est directeur du CDN de Sartrouville. Sa pratique s’oriente actuellement sur les relations entre les disciplines artistiques : marionnette, arts visuels, musique. Il adapte et met en scène pour le théâtre musical La Chute de la maison Usher (2010) d’après Edgar Poe. Il crée également Métamorphoses (2013) d’après Kafka.



Au TJP Petite scène encore le 24 Avril à 14H 30
www.tjp-strasbourg.com

"Matter": éclaboussures, transes en danse.


Un "manifeste", une ode à la femme ou tout simplement des icônes où les femmes sont mise à nu, dépouillées de leurs atours pour mieux entrer en transcendance, dans leurs vraies rôles et fonction?
C'est à cela que nous invite à méditer Julie Nioche dans sa dernière version de son chapitre "Matter".
Un plateau bordé d'une lisière noire en relief, semble retenir quelques secrets de fabrication scénographique: tapis de sol blanc, d'où émergent de singulières voltes comme des cordes ou des tuyaux...... Reliefs contenant quelque chose........


Une femme apparaît et se laisse vêtir de papier crépon, de soie par une "costumière", à vue, qui lui fait les dernières retouches comme sur un patron, l’agrafant, l'épinglant comme un styliste de mode, un designer de défilé branché. Une sculpture blanche, mobile, légère et sonore en surgit et elle bouge, danse dans le frisson du papier: légère et solide à la fois: son corps est d'une belle stature charpentée, les jambes bien campées au sol. Comme vêtue d'une armure de paoier, fragile.


Une pluie s'abat des cintres sur la femme et la transforme, lui ôtant petit à petit sa robe blanche de papier mouillée dont elle va s'échapper, se débarrasser comme d'une chrysalide.
Des comparses la rejoignent dans des robes de papier plus solide, moins fragiles.Elles entonnent des solos où la matière les contraint à des mouvements entravés, où le corps a du mal à surgir, à vivre, à respirer.Femmes dont les visages sont masqués par ses étranges plaques de papier qui masquent leur identité, leur altérité.L'eau de pluie a envahi le plateau: elles s'adonnent à de joyeuses glissades, libres, lâchées dans l'espace; Très animales, sensuelles, la chevelure mouillée, giclant au gré de leurs mouvements libératoires, libertaires.Femmes baignant dans l'élément amniotique, dans le liquide essentiel de la vie

Porteuse de joie, d'inquiétude aussi .Comme un iceberg, l'une fond, se robe s'imbibe de l'eau, se plisse, se modèle autrement, se transforme.Leur peau, leur enveloppe cède, craque, se dissout, se répand, disparaît: mue, transformation, hybridation singulière? Tout est possible. Sculptures énigmatiques, modèles d'un improbable défilé de mode "designée", les voici alignées, prêtes à un singulier combat, immobiles avant la tempête.
.Quatre effigies se placent en devant de scène comme quatre guerrières japonaises, plantées, rivées au sol humide, liquide.La musique s'amplifie, elles se roulent dans l'eau, quittent leurs chrysalides pour en faire des dépouilles qui jonchent le sol, baignant dans cette eau noire, souillée.
Danse folle, échevelée, transe en danse pour un final exubérant et très prenant.
Libération, respiration; plus d'atours ni de papier pour les retenir dans leurs divagations, leur fantaisie, leur énergie .
Quel tonus pour ces corps râblés, solides, massifs qui engendrent la vie, la communauté, la solidarité
Un manifeste? Pourquoi pas comme celui de "la femme futuriste"  de Valentine de Saint Point, comme bien d'autres gestes politiques posés, revendiqués par des femmes, danseuses, des femmes qui dansent et personne d'autre.
"Matter" à Pole Sud comme conclusion du festival "Extradanse", c'est aussi un acte politique! Poétique!