jeudi 23 avril 2015

"Matter": éclaboussures, transes en danse.


Un "manifeste", une ode à la femme ou tout simplement des icônes où les femmes sont mise à nu, dépouillées de leurs atours pour mieux entrer en transcendance, dans leurs vraies rôles et fonction?
C'est à cela que nous invite à méditer Julie Nioche dans sa dernière version de son chapitre "Matter".
Un plateau bordé d'une lisière noire en relief, semble retenir quelques secrets de fabrication scénographique: tapis de sol blanc, d'où émergent de singulières voltes comme des cordes ou des tuyaux...... Reliefs contenant quelque chose........


Une femme apparaît et se laisse vêtir de papier crépon, de soie par une "costumière", à vue, qui lui fait les dernières retouches comme sur un patron, l’agrafant, l'épinglant comme un styliste de mode, un designer de défilé branché. Une sculpture blanche, mobile, légère et sonore en surgit et elle bouge, danse dans le frisson du papier: légère et solide à la fois: son corps est d'une belle stature charpentée, les jambes bien campées au sol. Comme vêtue d'une armure de paoier, fragile.


Une pluie s'abat des cintres sur la femme et la transforme, lui ôtant petit à petit sa robe blanche de papier mouillée dont elle va s'échapper, se débarrasser comme d'une chrysalide.
Des comparses la rejoignent dans des robes de papier plus solide, moins fragiles.Elles entonnent des solos où la matière les contraint à des mouvements entravés, où le corps a du mal à surgir, à vivre, à respirer.Femmes dont les visages sont masqués par ses étranges plaques de papier qui masquent leur identité, leur altérité.L'eau de pluie a envahi le plateau: elles s'adonnent à de joyeuses glissades, libres, lâchées dans l'espace; Très animales, sensuelles, la chevelure mouillée, giclant au gré de leurs mouvements libératoires, libertaires.Femmes baignant dans l'élément amniotique, dans le liquide essentiel de la vie

Porteuse de joie, d'inquiétude aussi .Comme un iceberg, l'une fond, se robe s'imbibe de l'eau, se plisse, se modèle autrement, se transforme.Leur peau, leur enveloppe cède, craque, se dissout, se répand, disparaît: mue, transformation, hybridation singulière? Tout est possible. Sculptures énigmatiques, modèles d'un improbable défilé de mode "designée", les voici alignées, prêtes à un singulier combat, immobiles avant la tempête.
.Quatre effigies se placent en devant de scène comme quatre guerrières japonaises, plantées, rivées au sol humide, liquide.La musique s'amplifie, elles se roulent dans l'eau, quittent leurs chrysalides pour en faire des dépouilles qui jonchent le sol, baignant dans cette eau noire, souillée.
Danse folle, échevelée, transe en danse pour un final exubérant et très prenant.
Libération, respiration; plus d'atours ni de papier pour les retenir dans leurs divagations, leur fantaisie, leur énergie .
Quel tonus pour ces corps râblés, solides, massifs qui engendrent la vie, la communauté, la solidarité
Un manifeste? Pourquoi pas comme celui de "la femme futuriste"  de Valentine de Saint Point, comme bien d'autres gestes politiques posés, revendiqués par des femmes, danseuses, des femmes qui dansent et personne d'autre.
"Matter" à Pole Sud comme conclusion du festival "Extradanse", c'est aussi un acte politique! Poétique!

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