samedi 17 mars 2018

"Loie Fuller research": Marie-Louise Fuller : dressing code !




Ola Maciejewska revisite la Dancing Dress inventée par Loïe Fuller, pionnière de la danse moderne. Ce vêtement propre aux danses serpentines la fascine depuis une dizaine d’années.
Déploiement joyeux de drapés aux contours changeants et hypnotiques, Loïe Fuller: research nourrit une réflexion sur la relation entre la sculpture et le sculpteur. La chorégraphe a confectionné ses propres robes et, avec l’aide de bâtons qui lui donnent l’envergure et l’amplitude nécessaires, elle crée des formes ondulantes. Le mouvement y est modifié par l’objet autant que l’objet est altéré par le mouvement. Avec cette pièce performative, aussi cinétique que chorégraphique, elle a été invitée à la Biennale d’Art contemporain de Lyon en 2017. Née en Pologne, Ola Maciejewska est une chorégraphe et performeuse installée à Paris après avoir étudié à l’École nationale du Ballet en Pologne et à la Rotterdam Dance Academy. Elle a travaillé en tant que danseuse et interprète dans les projets de Bruno Listopad, Nicola Unger, Philippe Quesne et Bojan Djordjev.

Loie Fuller en basket, Tersphichore en fut émue et ravie!
Dans la nef du musée d'art moderne, une jeune femme se glisse parmi les plus de quatre cents spectateurs invités par ces giboulées de la marionnette qui démarre dans une temps de neige annoncée ce samedi !
Figure longiligne, la danseuse s'empare de cette peau noir, chiffonnée au sol, la déplie, la caresse, la chérie: puis se couche au sol, en jean, simple, sobre et discrète. Elle enfile subrepticement sa nouvelle peau et s'y glisse , s'érige en figure de proue, noire.  Elle pénètre dans son habitacle, sa nouvelle enveloppe.A contrario de la Loie, sur l'écran blanc de ses nuits noires.Christique, solennelle, fantomatique ...Cérémoniale. Le tout dans un silence absolu, religieux sous la voûte de la grande nef.Elle défile comme un mannequin, défie ce costume, chrysalide étrange: clin d’œil au fashion week et petit écart à la "grande histoire" de la danse!
C'est juste et malin, jamais blasphématoire! Fluide des volutes, des spirales qu'elle exécute très librement: la statue s'anime, prend corps, dissimule son visage et sa longue chevelure: on y est, la Loie est de retour pour mieux s'évader encore: en combattante, en étendard, en égérie , en pénitente ou pèlerine noire. Puis elle défie l'espace, en écran, avançant de front, menaçante forme pleine de suspens. Les longues tiges lui serviront à se métamorphoser de maintes façons, toujours surprenantes.En vrille, en plis multiples virevoltant, en épouvantail, de longs bras ballants, tenus au corps: c'est beau et émouvant et plein de rebondissements.Elle sautille, et formes des pétales de coquillages, lèvres de poulpes et autres bestioles! Franges et dentelles noires qui vibrent.
Elle se dépouille de sa tenue noire, la projette au sol sauvagement pour s'en détacher puis pour endosser une autre,  pastel jaune: Loie aimait la couleur, jusqu'à coloriser ses films...Touche de poésie trop brève dans ce temple de l'art contemporain qui résonna cet après midi là, du souffle de la performeuse...Loie, ovationnée par un public médusé, nombreux, retenu par une intervention très justement ciblée pour un lieu de culte de la beauté, de l'étrangeté, de la métamorphose des choses de la vie...dans les plis, plis selon plis!
Au MAMCS samedi 17 Mars

Lecture du Pavillon d'Or et regard sur la création musicale contemporaine japonaise n° 1 : "Begaie" !

"Bégaie !!!"
Dans la cadre du festival Arsmondo, dédié au Japon, l'Opéra du Rhin présentait une "lecture du Pavillon d'or et un regard sur la création musicale contemporaine japonaise." (Hosokawa - Mayuzumi – Takemitsu - Yuasa – Zender)
Ce concert-lecture avec des extraits du Pavillon d’or de Mishima lus par Stanislas Nordey (acteur, metteur en scène et directeur du TNS) fut un événement marquant.
L'Ensemble Saito présentait cinq pièces en regard aux cinq choix de lecture, en alternance et en grande "correspondance" baudelairienne.
Au "premier chapitre", commence l'histoire ce ce "bonze bèque, qui se "débat comme un oiseau en proie à la glue et ne peut ouvrir le bec.Sans contact avec le monde extérieur, il souffre de ce handicap et les sons lui échappent. Cette langue très "sonore" du texte enrichit le ton du récit où se plonge le comédien-lecteur.Que disparaissent tout les témoins de cette tare, de la honte qu'il ressent ainsi fait de sa "bouche" d'où rien ne sort !
La pièce musicale de Hans Zender, Lo-Shu VI / 5 Haikus (flûte et violoncelle) fait suite au récit en longues tenues des deux instruments, en ponctuations de rythmes dans une belle osmose.Douceur des vibrations des cordes, piquées, frappées, pincées qui résonnent en écho de la flûte: souffle cinglant, percutant en accents préssés dans l'urgence de de rudes montées en puissance.Touches légères de vent.
Retour au texte, à l'évocation du père puis  revient le temps de  la musique, celle de 
 Toshiro Mayuzumi, Bunraku (violoncelle) : une intrusion en solo pour une oeuvre riche en staccati brefs, bruts, en gammes saccadées. Très oriental et sensuel.L'intervention fougueuse de l'archet en pizzicati et frottés dans les graves suggère une ambiance étrange.
Retour à  l'intervention parlée où le texte prend toute sa dimension sensuelle et érotique: des seins tous blancs, de la neige, des paysages fort bien décrits ou évoqués. Le Pavillon d'Or comme berceau de toutes les intrigues, comme architectures envahissante, omniprésente pour notre héros subjugué.Par le personnage puissant, hiératique, immobile qui prend ainsi corps 

L'oeuvre de Jooji Yuasa, Cosmos Haptic (piano) résonne, percutante en écho au texte. La reprise d'un thème, décliné à l'envi, quelques notes isolées, interrompues, dessinent une ambiance chaotique ou douce, très contrastée. La musique, ferme, volontaire, déterminée, assurée retentit Quelques divagations, courses, et l'on progresse, avance sur un chemin que l'on défriche, glorieux, résonnant.

Stanislas Nordey nous revient, pour "bafouiller" "bouche bée", et nous conte son apprentissage de la flûte, l'art de tenir l'instrument et de faire naître ce son divin, affaire de technique: les "pieds bots" de sa rencontre, les deux handicaps réunis, se parlent, se comprennent. S'annulent avec ses propos sur la musique.
On enchaîne sur le morceau de  Toshio Hosokawa, SEN I (flûte): solo magnétique et virtuose, vent sifflant, ascendant, allègre et vive composition, égrenée de voyelles, agitations et mugissements qui sourdent de l'instrument...Comme autant de respirations, comme dans un combat, une lutte. Quelques caresses du sons du bout des lèvres, puis des rafales de souffle: à vous le couper !
Retour ultime du lecteur-conteur pour clore sur la musicalité de ce Pavillon d'or qui occupe tout le texte par sa présence impérative et obsessionnelle qui revient toujours à la surface Objet de toutes les passions et interrogations du héros : tuer ses pairs pour se libérer et vivre dans la beauté de la muse de la musique: ce pavillon d'Or assurément, temple d'or, fief des orpailleurs en quête de beauté., d'érotismec;
Pour clore la soirée, la pièce de Toru Takemitsu, Orion (piano et violoncelle) fait suite et couronne le tout.Sons langoureux, étirés dans l'espace, petites notes fines du piano, ambiance menaçante, grondements des frappes du piano. Un duo de rêve, très onirique et flamboyant, dans des forte puissants, submergeants. Le temps y est suspendu, étiré, prolongé; de beaux passages nostalgiques et fougueux pour dessiner des paysages subtils. Puis un appel à la mort, dans l'épuisement qui éteint ainsi ce spectacle audacieux: correspondance intime entre texte et musique qui s'appellent et se répondent trois heures durant: une performance singulière, une rencontre fort réussie entre la voix du comédien et tous les passages évoquant l'émission du son, la place de la Musique dans ce pavillon doré de rêve!

A l'Opéra du Rhin le vendredi 23 Mars

vendredi 16 mars 2018

Marius Petipa: pas de côté !


Journal du Maître de ballet des Théâtres impériaux Marius Ivanovich Petipa.
Préface de Tatiana Goriaïeva, directrice des Archives nationales de littérature et d’art de Russie (RGALI). Texte original français, établi et présenté par Pascale Melani. Pessac, éd. de la Maison des sciences de l’homme d’Aquitaine, 2018, 304 p. Illustrations en couleur et noir et blanc. ISBN : 97828589247
Résumé: Né à Marseille en 1818, Marius Petipa a effectué l’essentiel de sa carrière comme danseur, puis maître de ballet à Saint-Pétersbourg. Ces carnets, rédigés au cours des dernières années de sa vie (1903-1907), dévoilent le quotidien de l’illustre chorégraphe, décédé en 1910. Ils nous révèlent les coulisses du Ballet impérial et éclairent la vie d’un Français de Russie au début du XXe siècle. Au fil des pages, nous croisons des noms illustres (Preobrajenska, Pavlova, Fokine, Karsavina…), annonciateurs de la glorieuse épopée parisienne des Ballets russes. Petipa fut également confronté aux événements tragiques de l’année 1905 qui plongèrent la Russie dans une fièvre révolutionnaire affectant jusqu’aux danseurs du Mariinski… Fruit d’un travail scientifique de chercheurs, ce livre offre au public français un témoignage inédit, enrichi de photographies rares de l’auteur de La Belle au bois dormant et de son entourage.
Cette publication est le premier volume des Écrits personnels de Marius Petipa, reconstitués à partir des manuscrits originaux en français conservés dans les archives russes.