mercredi 4 mars 2020

"De marche en danse": démarches respectives ! Ca marche ! Par où, la danse?

Ce cycle de conférences "Déroutes ou la marche en danse" a comme objet de déplier les enjeux esthétiques, politiques et historiques à partir d'un geste élémentaire : la marche. Ce thème qui s'inscrit dans l'histoire de la danse contemporaine à travers des forces militantes, politiques mais aussi dans une multitude de gestes créatifs, d'expérimentations et d'explorations artistiques, sera l'occasion de trois rencontres qui mettront en dialogue Mathilde Monnier avec des invités venus d'horizons différents.

Avec Bruno Bouché (chorégraphe et directeur du Ballet de l'Opéra du Rhin) et Gérard Mayen (journaliste et critique), le 3 mars 2020, la rencontre  porte sur les usages et pratiques de la marche dans l'histoire de la danse, la philosophie et, plus largement, les sciences humaines.

Troisième set pour cette série de rencontres autour de la résidence de Mathilde Monnier;
Gérard Mayen, d'emblée, donne le ton: ce sera celui de la sincérité, de l'authenticité de sa position face à la pièce de Mathilde: une démarche réflexive, vivante, animée par une posture critique, une analyse d'écriture chorégraphique, personnelle fondée sur l'observation avertie de cette pièce, vue et revue au filtre de son expérience de spectateur avisé.Ouvert à toute perspective et prospective créatrice, prolongement fertile au regard de l'oeuvre citée: "Déroutes", datant de 2002.
Gérard Mayen invite le spectateur à se positionner non en attente fermée, exclusive, mais dans une posture alerte, passage, émergence, mutation, glissement et métamorphose progressive du plaisir de voir, ressentir, regarder. Intensément dans l'interdisciplinarité du courant de la "non -danse", époque fertile en expérimentations d'écritures chorégraphiques, diverses et variées. Ce "je" délibéré soutenu de ses propos, impliquant consciemment dans le sens de la réception, de la rencontre: Gérard Mayen, impliqué, raconte. Ne se fait pas le porte- parole, le scribe de Mathilde sur ses intentions. Pas de "reportage" ni d'interview au centre de sa "démarche" mais une réelle écoute des bruissements affleurants de la pièce. Sur la "scène profonde" de l’œuvre.
Extension de la marche, comme moteur de ce souffle autant musical que chorégraphique, mené simultanément sur le plateau bordé d'entrées et de sorties multiples, par ERik M. en mixage direct !
Cette danse, prise à bras le corps dans le contexte de la dite et maudite "non-danse" travaille dans la réserve, la raréfaction du mouvement, qui alors interroge la danse. A l'époque les regards critiques réduisent cette audace bouleversante et captivante, décapitant les conventions et autres savoir-faire conditionnés.
Toujours dans "Déroutes", un des treize protagonistes, "marche" dans la constance du motif. "Dehors la danse" prônaient Mathilde Monnier et Jean- Luc Nancy dans ce manifeste graphique et spirituel sur la pratique de l'époque. Plus question d'"expression artistique", mais d'un transport en commun des corps, du poids, des appuis. Évocation judicieuse du "conférencier" des propos de Laurence Louppe sur le danseur qui transporte son propre espace (Laban).
Et belle découverte que celle de Gérard Mayen, que d'associer sa vision des tracés des déplacements des protagonistes sur le plateau, comme des lignes d'erre, cartographie vivante, celle de Deligny, cher à la chorégraphe.
Retours, repères, croisements, entrelacs à lire, enchevêtrements des trajets. "Notamment" à travers ses productions de lignes-parcours qui produisent du sens, et performent en direct dans l'instant. Qui travaillent et nous sollicitent par un message d'évidence qui nous fait "avancer" si l'on veut bien s'y laisser entrainer.
Sempiternel transfert du poids, de l'équilibre, des appuis que cette marche en danse, ce "pourquoi pas" d'une danse à inventer, initier , faire sourdre des pas.
La marche comme "squelette nu de la danse" d'après Mathilde. Ici pas de "quantitatif" mais un questionnement sur "de quel ordre va être la danse".
Références oblige à Deleuze, à cette fluidité, cette prolifération des propositions à l'inverse des catégories standardisées, fixes. Des rhizomes comme métaphore des circulations, divagations et autres va et vient inouïs. Vers une dynamique des phénomènes, des flux, des branchements, viscosité et dilution de mise. Comme des variations atmosphériques, brouillard, nuées de gouttes  d'un paysage à la Lenz de Buchner ! Phénomènes discrets, imperceptibles de cette horizontalité permanente des péripéties des danseurs de "Déroutes".
Reproduite comme une conjonction d'élévations, d'empêchements."Penser avec l'herbe" sur les chemins de Deleuze.

lire :
https://culture.univ-lille1.fr/fileadmin/lna/lna60/lna60p34.pdf

Pas de parallélisme mais des sauts d'une ligne à une autre, entre êtres hétérogènes qui brisent les lignes d'une partition, d'une portée musicale et chorégraphique.
"Penser les choses, parmi les choses", faire la ligne, pas "le point".
Ce pré- mouvement, cette marche dramaturgique d'une composition chorégraphique, dans l'immobilité apparente, animée de projection et d'initiation du mouvement.
Un très bel exposé, trop rapide, dense et riche, d'une personnalité humble et modeste au regard de la "fabrique" de la danse.

Au tour de Bruno Bouché de s'exprimer sur "la marche dans la danse académique". Titillé par Mathilde Monnier au bon endroit, le danseur, chorégraphe et directeur du Ballet du Rhin se livre et débusque la marche dans les œuvres du répertoire: le prince Albrecht dans Giselle, les marches d'approche et de positionnement des ballerines sur scène... Une "qualité de marche" singulière, atypique, comme le "langage" de la danse académique, outil de travail à détourner, au présent pour la faire contemporaine.
Dérrida, Guattari comme fers de lance de la réflexion.
"Déconstruction" oblige pour trouver les failles et impacter les traditions: la "marche" pour se préparer à une variation, entrer en scène, sophistication des pas et démarches.
Son expérience de danseur auprès de Pina Bausch au sein de l'Opéra de Paris, lui enseigne la qualité du geste, essentiel, organique, dans les marches en cercle ou simple déplacement signifiant.
Beau témoignage sensible et vécu d'un professionnel averti et bienveillant.
Les "marches" autant baroques que romantiques en toile de fond.
Et Gérard Mayen de revenir dans le débat avec quelques croustillantes anecdotes sur la "marche" d'un danseur dans "le civil".
On reconnait ou pas "un danseur" à sa démarche! Formatée ou simplement acte de se déplacer un pied devant l'autre sans autre forme de procès esthétique et réflexif?

Quelle belle initiative que de convoquer critique, créateur et acteur du monde de la danse sur cette question prolixe de la technique, de l'écriture et de la réceptivité des propositions multiples des auteurs et chorégraphes d'aujourd'hui...Et d'hier !


Outre des chroniques de presse très régulières, la participation à divers ouvrages collectifs, la conduite de mission d’études, la préparation et la tenue de conférences et séminaires, Gérard Mayen a publié : De marche en danse dans la pièce Déroutes de Mathilde Monnier (L’Harmattan, 2004), Danseurs contemporains du Burkina Faso (L’Harmattan, 2005), Un pas de deux France-Amérique – 30 années d’invention du danseur contemporain au CNDC d’Angers(L’Entretemps, 2014). Le dispositif ARPD (Aide à la Recherche sur le Patrimoine en Danse), piloté par le Centre national de la danse, lui permet de poursuivre une recherche sur Ce que le sida a fait à la danse – Ce que la danse a fait du sida (avec projet de publication). 

"Liberté à Brême": j'écris ton nom ! Fassbinder, insurgé, torture et massacre la phalocratie indigente.

Liberté à Brême



  Texte Rainer Werner Fassbinder
Mise en scène Cédric Gourmelon
Avec Gaël Baron, Guillaume Cantillon, Valérie Dréville, Christian Drillaud, Nathalie Kousnetzoff, Adrien Michaux, François Tizon, Gérard Watkins


Dans l'Allemagne conservatrice du XVIIIe siècle, Geesche, issue de la petite bourgeoisie, n’a aucune liberté. Brutalisée par son mari, sans cesse dévalorisée, sa vie semble toute tracée à la place qui, en tant que femme, lui a été assignée dès sa naissance. Alors, quand la mort frappe étrangement ses oppresseurs, s’agit-il vraiment d’une « malédiction » ? Cédric Gourmelon met en scène cette pièce explosive et irrespectueuse de Fassbinder, qui bouscule les codes de la représentation et interroge les fondements de notre société et de sa morale. Qui est la victime ? Qui est le bourreau ?

Très de circonstance, cette pièce qui traite et maltraite un sujet brulant: la violence faite au corps féminin, la domination, la rébellion, la révolte de ses mêmes femmes incarnées par une figure insolite: le personnage central de Geesche, une Valérie Dréville tantôt soumise et survoltée.Remarquable interprète d'un rôle complexe et ambigu.
Sur une musique de xylophone s'ouvre le bal, décor de fond de grand panneau comme de l'ardoise, griffonnée de graffitis: au centre l’icône du Christ en croix, emblème de la foi, de la souffrance.Figure du repentir aussi, du pardon: mais envers qui et pourquoi?
Pas de bons larrons à ses côtés: on les retrouvera dans la pièce, nombreux, hommes "coupables" de comportements machistes et virulent, insolents et castrateurs, pervers,humiliants et méprisants.Phallocrates en diable.Du "schnaps" et des femmes, des blagues "débiles", sous-traitance de fadeur et d'indigence vertueuse et vertigineuse...Ils sont pathétiques et méprisables et pourtant le pouvoir les habite les rend "puissants et redoutables. Bestial, l'homme eructe, crie, se vautre et fustige la gente féminine.
Quand cet homme attablé réclame en litanie, café et autres "services à domicile", c'est à une femme soumise qui chancelle et chute devant ses désidératas, qu'il a à faire. Mais vite, celle qui d'abord muette, murmure "je veux coucher avec toi", s’avère beaucoup plus émancipée qu'on ne le croit: jusqu'à liquider ses bourreaux, nombreux et hypocrites qui gravitent autour d'elle. De ses chutes, naitra la verticalité retrouve, les pieds rivés au sol, campés dans une assise droite et puissante.Son jeu de femme soumise puis rebelle est "caricatural" au premier degré: on s'en agace, on se soulève à sa place, puis c'est elle qui prendra le relais.Les hommes, le premier Johan, Gael Baron, odieux macho irascible se vautre physiquement dans ses colères épileptiques et savamment ridicules à nos yeux. Travail du corps, de la voix, adaptés à la verve et l'absurdité de comportements extrêmes que seul le désemparement feint de Geesche fait se dévoiler. Possibles élucubrations terrifiantes d'une junte d'hommes, en meute fraternelle, soudée par l'absence de jugement, de valorisation du statu de la femme qui s'avère ici, celui d'une serpillère souillée que l'on foule à l'envi, du pied.Le sol est ici convoqué pour évoquer soumission et esclavagisme sexuel.
C'est pétrifiant de dureté, de réalité soudaine et les affaires ne s'arrangent pas: la mise en scène exacerbée de Gourmelon, hérissant les propos, les attitudes en autant de postures insoutenables, ridicules ou odieuses.Dans un décor banalisé, tables, chaises, Geesche rentre en prière pour chercher pardon et aide, appui et consolation divins. En vain, c'est la révolte qui s'empare d'elle, alors qu'un chœur d'hommes, fantoche, entonne une mélopée salvatrice inefficace.
La pièce va bon train, trahissant la haine de ses personnages périphériques, objets de dégout et de rejet. Alors que l'empathie fonctionne auprès de Geesche, belle proie incendiaire, élue et victime, transformée en figure de proue d'un sacrifice qui n'aura pas lieu
Un Massacre du Printemps, plein de rythmes, de rebondissements, une mère et des enfants qu'on tue, meurtre ou empoisonnement volontaires: l'amie toutes en couleurs et espoirs, se verra aussi "mise à mort" pour ne pas partager, passer et inoculer la soumision à la gente féminine.
On déplore ici le "genrement" caricatural, mais replaçons les choses en leur temps et lieu et Fassbinder décrit la société contemporaine dont il est acteur, passager de la pluie et du mauvais temps, époque où toute "différence" est vécue comme crime et indésirable destinée à détruire coute que coute.
Rébellion, hirsute jeu des uns et des autres, hérissés par la douleur ou le mépris.
Fassbinder en plein dans le mille, gâchette au poing levé, entrainant débat et questionnement virulent sur l'agressivité, la condescendance, l'insupportable haine des uns vis à vis des autre. Un peu de tendresse, bordel...On la cherche en vain dans cette diatribe diabolique, défenestration des corps sacrifiés à des causes multiples illégitimes ou carrément fondatrice: place et rôle de la femme dans la société masculine: autant celle du Christ réduit à l'impuissance, que celle exacerbée d'une lutte réparatrice d'une militante qui s'ignore, mais très efficace figure de vengeance et de révolte.
Soulevez-vous, disait Didi Huberman; mieux que ça, on ne peut !
Le "massacre" n'est pas sado-maso ni destructeur, mais ravage et tourmente au pays des lucioles.

Au TNS jusqu'au 11 MARS





Passionné par l’œuvre de Jean Genet, Cédric Gourmelon a mis en scène plusieurs de ses textes, dont Haute Surveillance à la Comédie-Française en 2017. Directeur de la compagnie Réseau Lilas, il a créé depuis 1999 une vingtaine de spectacles, en France et à l’étranger. Il est également acteur, pédagogue et a initié en Bretagne les « Ateliers démocratiques », gratuits, ouverts à tous.

samedi 29 février 2020

Inverspace et l'Imaginaire : champ-contrechamp, vis à vis, face à face !

Concert & apéro : Inverspace & l'Imaginaire

29 février à Faubourg 12, Strasbourg

Pour son premier concert de 2020, l’Imaginaire invite l’ensemble bâlois Inverspace. Complices de longue date, les deux ensembles sont de la même génération, et partagent une même identité cosmopolite, ainsi que l’envie de réinventer la musique contemporaine en s'aventurant hors des sentiers battus.
Ce programme, où chaque ensemble se dévoile dans ses singularités, propose des œuvres de compositeurs/compositrices avec lesquels s'est nouée une complicité au long cours :

1ére partie:

Sarah Nemtsov : "void imaginings" (2018) interprété par Inverspace
Un ensemble de percussions insolites pour le quatuor suisse: des bols tibétains caressés par des pinceaux pour créer une atmosphère intime et recueillie de temple, de monastère bouddhiste. De petits souffles en cadence, discrets, ténus face au léger bruissement de la caisse claire, régulier. En contrepoint des autres ustensiles et objets manipulés par les interprètes devant leur instrumentum.
 Ambiance secrète assurée par une minuscule cymbale retentissante, comme une miniature, jouet charmant: les sons amplifiés par des micros suspendus au dessus des établis.Grincements, frottements, bruits et résonance de verre, vibrations de xylophone chaleureux. Le volume sonore s'amplifie dans une méditation spatiale dans un univers froid de sons distincts en alternance, comme des cloches résonantes, concaves, plus métalliques, cinglantes. Les gongs s'affirment en rémanence, du papier de bonbon froissé fait un bruit de marée qui se retire. L'univers demeure très minéral, de grès qui s'effrite, de sable secoué en syncope.Tel un joyeux atelier de production de sons, tel une forge résonante, le morceau, marteau et enclume sur l'établi, résonne de cloches d'alpage ou d'église.Se dessine un paysage multicolore, polyphonique où le son se durcit, se renforce, puissant, sombre, chaotique, tectonique, assourdissant, crissant. Ça fuse et ça vrombit de plus belle, dans des réverbérations et échos, en ricochet, en cascade. Du papier aluminium argenté tressé autour des micros, compacté, froissé détermine des bruits de cailloux, d'avalanche. Une œuvre percutante, riche et inventive à l'envi !


Nicolas Mondon : Trio ( 2016), interprété par l'Imaginaire
Une œuvre plus radicale, le piano au départ, frappé, caressé, flûte et saxophone de concert. Les pieds des interprètes frappent le sol en cadence.Vif, plein d'incidents, de ruptures, de surprises, la pièce frappe et intrigue.Des sifflements, des cassures, fractures, brisures de sons s'associent à des essoufflements. Atmosphère étrange de caverne où l'on pénètre peu à peu, lentement, en suspens, attentif, avec retenue, pas à pas, guidé par les sons.Opacité, trouble lancinant, bizarre... On avance prudemment dans l'obscurité, troublé, incertain. Les vents glissent, le piano au diapason gravissant les marches d'une ascension: passage à franchir, étroitesse de l'espace: on s'y fraie un chemin, à l'écoute
Un solo de piano, notes égrenées, fluides, frappées de curieuses harmoniques. Un flux sonore, mouvement de la flûte et du saxophone en symbiose. Osmose très réussie des trois protagonistes à l'unisson de vagues, d'arabesques ondulantes Puis s'opère une rupture scandée, tonique, en alternance, dans la longévité des sons soutenus dans l'espace.Lenteur, langueur de ce huis clos musical des trois complices qui va en se déplaçant peu à peu, s'ouvrant vers l'extérieur, vers d'autres horizons et perspectives. Des mouvements plus alertes, vifs, affirmés, le piano a les vents en poupe, les dirige, les fait se plier à son jeu: au finale, une belle suspension tient en haleine, en apnée, le public réuni, à l'écoute..

Après une pause apéritive, retour au "chez soi" avec la pièce "Heimat" de Wofgang Heiniger:  (2018)
Le pianiste de l'Imaginaire aux consoles à la rescousse du groupe suisse.
Une vraie platine- tourne- disque s'émeut, faisant écho à une grande diversité sonore commune au quatuor-quintet, fragmentée, rehaussée d'une voix sur la bande magnétique. Des vibrations multiples, un son d'orgue, des sirènes, cornes de brume du saxophone, petite flûte discrète: tout se mêle, se mixte à l'envi. Un vrombissement abyssal de surcroit s'empare de l'espace en abîme. Tel une avalanche déferlante. Dans une amplification sonore grandissante.Un chaos, une dégringolade enregistrée; le piano acoustique doublé par le piano synthétiseur pour une polyphonie éclatante, de sonorités empreintes et reproduites, troublantes, déroutantes.
Une pièce déstructurée, émulsion de sons éruptifs, empilement de timbres, fréquences et strates qui s'accumulent. Virtuel, artifice et acoustique se mêlent, s'enchevêtrent, se marient.
Une chute de tension en sus comme un atterrissage manqué d'un avion de guerre sur le tarmac mal balisé. Moteurs et pression allant vers une accalmie, plus pesante, salvatrice, réparatrice, mesurée en décrescendo. Les lumières s'éteignent sur ce champ de bataille, poubelle de guerre où s'écrasent les avions terrorisés!


Damian Gorandi :"FragiIity’s dementia - Who has the power in contemporary music?" (2019)
Le piano se prépare à vue et l'Imaginaire revient au front.Tempête, tornade, sifflements étranges venus du piano...Le pianiste, chercheur de sons, orpailleur, le corps dans l'instrument immergé!
 Chahut et vacarme assuré, plein de ruptures, d'effondrements fructueux: incroyables possibilités sonores issues, sorties du piano, manipulé, trituré dans le moindre détail de sa carcasse. Les touches comme des parties d'exosquelette parmi la fouille de ses entrailles surmenées.
 Musique viscérale, organique, tripes au poing, souffles des vents en osmose pour attiser le tout.
Etre vivant, monstrueux Quasimodo musical, OVNI, la pièce se déchaine, mailles à retordre le son, apocalypse, drame, embardée violente, accidents multiples et bombardements de mise.
Une accalmie souterraine ou planante, reprise et réveil du son terminent la pièce.

Leo Collin: "Corals", création (2020)
Au tour d' Inverspace de prendre la relève aux commandes d'une installation impressionnante: le pianiste de l'Imaginaire toujours à la rescousse du groupe aux consoles.
"Le vivant est extrêmement riche" murmure une voix off. Percussions corporelles désopilantes: toux, halètements, raclement d'objets hétéroclites: tout est à voir en live tant les sons débordent de sources d'imagination! Comme un jeu d'enfant, un bricolage à vue, inventif, créatif, ludique et très visuel.
De toutes parts fusent les sons brouillés: glissades, frôlements, bizarreries inventives inédites: crécelle, machine à écrire le son pianistique, détournement des instruments, inversion des rôles et grand "dégenrement" à la clef.
Un harmonica, une langue de belle mère, mirliton, un jouet hélicoptère en miniature, hélices au vent.
Affolement du saxophone, mugissements et grand charivari pour cette parade carnavalesque très réussie!
Un concert bariolé,varié, hétéroclite qui réunissait deux formations, fratries complices de musiciens en quête d'auteurs-compositeurs, haute couture de la musique d'aujourd'hui : du sur "mesure", haut de gamme !
Du fait maison de haute voltige, pièces uniques, prêtes à être portées par les protagonistes de l'Imaginaire et d'Inverspace de meilleur cru.

Au Faubourg 12 le 29 Février