mercredi 7 février 2024

"Great Apes of the West Coast": singeries nettoyées et autres poncifs abattus : Mama Africa, adieu !

 


Princess Isatu Hassan Bangura est une actrice performeuse dont les spectacles font se croiser le conte, le théâtre, la danse, les images. Née en Sierra Leone en 1996, en pleine guerre civile, et arrivée à treize ans aux Pays-Bas, aujourd’hui âgée de 27 ans, elle a vécu presque autant d’années dans sa culture africaine d’origine que dans celle de l’Europe de l’Ouest. Que reste-t-il de la petite fille qu’elle a été ? De quelle philosophie a-t-elle hérité ? Qu’est-ce que l’identité ? Jouant de tous les arts issus de sa double culture, le spectacle est une plongée dans son histoire. C’est un voyage, un retour au pays des « Grands singes de la côte ouest » de l’Afrique, une expérience spirituelle et corporelle pour renouer contact avec la terre et l’âme de ses ancêtres.


Mama Africa

Des souvenirs à la pelle, à l'appel de sa destinée, les voici face à nous, incarnés dans le corps d'une femme noire. Elle  est déjà parmi nous encore feux éclairés dans le public. Son corps oscille, halète, tremble sans cesse: ses longues extensions de chevelure prolongent ses  mouvements de bassin, alors que son buste se contracte, se rebiffe.Toute une imagerie corporelle qui va bientôt s'exprimer par le verbe qui prend le relais. Dans des tonalités étranges et très rythmées, la voici habitée par ses souvenirs, sa pensée, ses références très "européennes" de Descartes ou autre "colon" de la pensée occidentale sur le continent noir. Sarcastique, caustique et pleine de venin sur la défensive, l'actrice, oiseau de mauvaise augure opère une diatribe cinglante contre les envahisseurs et conquérants étrangers à une culture noire. Son identité, son "moi" la taraude et le  poids de son ressentiment pèse lourd sur ses épaules. Sa corpulence épousant ses propos de bon aloi. Monologue ou solo sur l'amour, la perte, l'espace, le temps: son jeu est malin et rusé, échappe à une banalité émergente quand au sujet brulant du racisme, de la différence, de l'étranger. Tout de noir vêtue, près d'une case , verdure tissée de bambous, éclairée par des ombres portées de vert, elle psalmodie, vocifère ou chante les ancêtres qu'elle évoque, les parents, la famille, les racines. La langue est tantôt "krio",ce  créole qui est la langue qu'elle pratique le plus aisément, tantôt l'anglais. Des différences rythmiques s'ensuivent, une musicalité sourd de ses lèvres, de son corps au diapason de cette introspection bien vivante. Tout sonne et résonne comme une partition écrite pour voix seule. La prononciation dévoile et trahit l'envie de communiquer, de se faire entendre et comprendre. La danse au final s'empare de son corps. Tel un oiseau tournoyant, la voilà éprise de joie et de liberté.  Ce "fuck" initial qui démarre la pièce s'est bien calmé et la révolte s'est tue dans ces mouvements de soulèvement bien plus audacieux et loquaces que ses jurons et blasphèmes. Etre noire peut être joyeux et la fierté de Princess Isatu Hassan Bangura fait surface et magnifie sa culture et identité noire. Le "grand singe" n'est pas la figure raciste trop souvent malvenue, banane au poing. Pourquoi être "princess" dans un royaume de haine et de discrimination raciale? Comment réagir hormis la colère et les injures? Danser comme peu savent le faire...Etre animal, oiseau, déesse de mythologie vêtue de paillettes argentées, de longues manches pour battre des ailes, avoir une parure de cornes pour se défendre. Etre guerrière et frondeuse, agile et rampante, au sol, à terre: celle des ancêtres qui ne sauraient renier cet hommage public. De la "performance instinctive"conduite par une syntaxe écrite, des mots à incarner, à faire vivre par le médium du corps, le vecteur du rythme. Un monde à soi, un lieu pour soi que procure la scène pour l'autrice-comédienne-performeuse. Le sable au sol, gris et fragile matière, imprime les empreintes des passages de cette déesse chaotique, trublion de l'ordre et du bien savoir se comporter. La hutte pour refuge, témoin, la lune comme cercle magique dominant les situations. Et la lumière de balayer cette atmosphère entre terre et mer, entre passage de l'enfance à celui d'âge adulte. Le corps catapulté dans un monde hostile.Le noir comme parure contemporaine autant que spirituelle et rituel.


Princess Isatu Hassan Bangura a étudié le théâtre à Rotterdam avant d’entrer à l’Académie de théâtre de Maastricht. En 2021, elle a intégré l’Ensemble de NTGent − la troupe du théâtre municipal de Gand, en Belgique. Elle a joué dans Grief and Beauty, mis en scène par Milo Rau. Sa précédente performance, Mambo
, créée en 2021, avait pour sujet le vaudou. Elle crée ses spectacles en anglais, sa langue maternelle étant à la fois l’anglais (langue officielle en Sierra Leone) et le krio (langue créole).

Au TNS jusqu'au 14 Février

Chamalières: un village suc'hululant..... Et suc'culent !


 Dans une béate attitude en altitude, une chasse au trésor dans un village volcanique qui s'ignore. ...Ça vibre à Chamalières dans une tectonique en plaque volcanique insoupçonnée: la lave en coulée au lavoir, les scories dans la Loire, un in-dyke détective à l'enquête, qui tourne au vinaigre basaltique, une planèze et autre cheminée ou cratère qui a du caractère déstructuré en fumerolles....Et la musique des roches polyphoniques, phonolitiques des basaltes en sus !

"Chez Simone",ça fait l'effet d'une bombe au chocolat, d'un cône ou dôme glacé, dans les marmites du bonheur....sans faille! On y fait éruption pour un en cas au cas où, un p'tit mâchon pour casser la croute, arrosé d'un Mâcon dans ce reste au rang entre mets tissés... Elle a du culot. En face au "Médiéval"et ses mets dié-veaux,c'est Magma et les orgues balsamiques au son du phonolite pour le bal baloche....Au Prieuré c'est la prieurale qui l'emporte pièce! Et au "Cham's", ça deux-bosse dur ....

Le clou du spectacle chez St Gilles...Les echeas en échalas pour monter l'échelle du ciel pour soprano légère...

Un spectacle déambulatoire: Etna, Vésuve ou Stromboli contre Miaune et Gerbizon! On s'en lave les mains a la pierre ponce Pilate! La bonne méthode...sous la cendre, la plage ! Et les plantes succulentes de proliférer à l'envi, cactus oblige.

On lauze !Vous allez en blavez!


Le samedi 17  Aout 2024 à Chamalières sur Loire 15H entrée libre....

déambulation aléatoire dans le village volcanique et gastronomique par Geneviève charras, charivarieuse: rdv au jardin médiéval

suc'cès !!! succulent pour sucs digestifs, plein de sucs !

 




suc'cès !!

chamalières à du suc'cès !!

et qui s'y frotte s'y pique: le cactus est une plante succulente!




mardi 6 février 2024

"Sans tambour", ni tromperies, on s"'arrange" et ça fonctionne. La famille Achache se porte bienet et a du lieder ship.

 


Les spectacles écrits par le metteur en scène Samuel Achache avec son équipe de musicien·nes, chanteur·ses et interprètes partent de la musique pour créer du théâtre. Sans tambour mêle compositions originales et arrangements de Lieder de Schumann. Tout commence dans une cuisine, avec un couple en crise : elle veut le quitter car il ne lui parle pas d’amour. Alors, les murs du quotidien se désagrègent − au sens propre comme au sens figuré − et tout se fragmente en souvenirs, fantasmes, réécritures mythiques, retours à la réalité, échappées poétiques et lyriques. Qu’est -ce que l’amour idéal ? Est-il celui, absolu, de Tristan et Yseult ? Le spectacle suit le chemin de la reconstruction, avec onirisme autant que drôlerie et fantaisie.


"Chewing gum silence" "Concerto pour clavier en ut mineur" "Orfeo/ Je suis mort en Arcadie", on s'en souvient comme d'un élixir de jouvence, de fantaisie et d'audaces scéniques et anachroniques. Bach, Monteverdi et pourquoi pas Schumann? Alors on s'y jettent avec eux, musiciens, comédiens et autres accessoires inutiles en majesté. La cérémonie de la déconstruction, de la destruction d'un être humain se profile d'emblée.


Un tout à Lego en ruines romantiques.

Jean Pierre Raynaud en pâlirait, lui le performeur de destruction de ses maisons de carrelage.


C'est un décor qui va chavirer, exploser comme le triste destin d'un homme qu'une femme va quitter. Et quelle femme: une qui veut un aventurier alors que celui qu'elle a aimé ne se soucie que de robinet, de plomberie et autre siphon dégradé. Tout s'abîme ici, se détériore comme cet homme qui décline devant nous. Une cabine de douche ensorceleuse, cabinet de magicien et prestidigitateur  révèle ses secrets de famille.Le comique et le burlesque vont faire de lui -Lionel Dray-un être qui casse sa baraque où il est juché pour échapper au pire, hors sol. Les autres compères, complices de cette chute viennent ponctuer, border ses pérégrinations de petits entremets, interludes musicaux: instruments à vent, accordéon et violoncelle pour augmenter le son, appuyer ou libérer des émotions musicales. En prologue, ce DJ de la platine irréelle donne le ton, le volume, les rayures du disque craquent, patinent, recommencent comme un comique de répétition: le disque est rayé, notre homme aussi: rayé de la liste des élus du coeur de sa belle. Un raz de marée amoureux malgré tout en dernier recours pour détruire, démonter le homme-sweet home nuptial. Tous s'y mettent et les murs de la désillusion s'écroulent, les gravas et briques à terre comme des tas de souvenirs, de nostalgie. Le verbe est haut et fort, les corps des comédiens-musiciens aguéris au jeu. Les voix sont résonantes, les timbres profonds, les performances vocales appropriées sans excès de zèle. Et chacun prend sa part de vedettariat sous les feux de la rampe d'un escalier qui même à rien. Notre héros a beau s'emparer d'une massue, il n'y a que les murs qui tremblent et s’affaissent. Des sculptures vivantes pour en attester. Comme les "quatre géants", travailleurs, dragueur de gravier du pont Kennedy Strasbourg.




Un petit air d'opéra à la Kurt Weil, une mélodie schumanienne, un essai à la James Brown : les citations sont les bienvenues, clins d'oeil et autres mimiques, attitudes, poses à la Chaplin ou Keaton et le tour est joué. Samuel Achache ravit, enchante et mène le public vers un burlesque acrobatique qui lui sied à merveille.Le rythme soutenu du spectacle nous embarque dans des péripéties comiques, légères ou graves selon les personnages incarnés de façon si évidente, sans caricature ni flagornerie. Dans ce sanatorium sont convoqués Tristan et Isolde deviennent mythe et franchissent les barrières des époques: Wagner, Schubert, même combat pour faire voyager notre imagination et tisser des liens entre les anachronismes.Tous font que le navire vogue à toutes voiles et ce piano à bretelles que porte un de nos deux anti-héros devient robe de Ménines ou crinoline Gaultier à l'envi. Costumes et re-vêtements à danser, bouger sans entrave pour ces clowns de pacotille, membres d'une vaste famille recomposée. En rire ou en pleurer, là est la question devant ce show ludique qui malmène l'humaine condition et nous la porte sur le plateau. La musique comme vecteur d'intrigue, de suspens, de fantaisie comme à l'accoutumé chez la famille Achache. On en reprendrait bien un "petit morceau" de ce Schumann là! Sans fausse route ni note trop salée...On ne fera pas la Sourde oreille ni le tympan vibrant.

Samuel Achache est metteur en scène et acteur. Entre 2013 et 2017, il a co-mis en scène plusieurs spectacles avec Jeanne Candel. Il a co-dirigé, avec l’ensemble La vie brève, le Théâtre de l’Aquarium de 2019 à 2020 et a fondé, en 2021, La Sourde, compagnie de théâtre et de musique. En 2018, il a créé Chewing gum Silence et Songs. En 2020, Original, d’après une copie perdue, et, en 2021, Concerto contre piano et orchestre, présenté au festival Musica 2022.

Au TNS jusqu'au 12 Février