Avignon, 69 ème édition...........
..Et la danse est bien présente dans la programmation "officielle" signée Olivier Py et ce jusqu'au cœur de la Cour d'Honneur du Palais des Papes avec la création de Angelin Preljocaj "Retour à Berratham".
"BARBARIANS" de Hofesh Shechter : Ode au désastre.
A la Fabrica, c'est la trilogie tectonique de Shechter qui bat son plein à propos du beau, du bon, du mal et c'est au "mal" que revient la part belle.
En prologue, six danseurs très ténus, de blanc vêtus, évoluent fort gracieusement sur une musique baroque: le beau y est souverain, fluide, presque gai. Intime, impénétrable, secret, recueilli.
La "barbarie" fait petit à petit son nid dans le deuxième volet de la pièce,dans un univers tranquille et, gainés de justaucorps très seyants, les interprètes se meuvent , physiquement engagés dans une écriture simple, basique "groove".
On en vient après un entracte au vif du sujet: les préliminaire nous préparent au pire de l'évocation en filigrane de la violence, de la bêtise humaine.Deux personnages, un "tyrolien" et une femme vont incarner toutes sortes de faux héros démoniaques du monde politique. Duo extrêmement sensible, digne de l'écriture d'une Pina Bausch, tant l'émotion sourd des corps enlacés avec une finesse ciselée de gestes fluides, lents, scintillants d'une intelligence rare.
Des donneurs d'ordre, des victimes, des sacrifiés: tout peut y être évoqué, suggéré sans tambour battant.
Un spectacle vif, jamais violent et pourtant qui fait mouche si la barbarie se dissimule insidieusement dans les attitudes, les flexions et les corps des danseurs, galvanisés par ce singulier manifeste sur l'horreur cachée des comportements animaliers de certains des dirigeants de ce monde
La musique se tient au garde à vous, signe politique, éclats de bruits et de sons, mélodies baroques: le pouvoir se niche aussi pour l'homme dont les oreilles n'ont pas de paupières pour échapper à la torture suggérée de nos dictatures. Shechter joue et gagne au jeu de l'évocation et du pouvoir des gestes, de leur sens, de leur étique.
" A mon seul désir" de Gaelle Bourges : Des lapins qui posent !
Au Collège du Lycée St Joseph, l'atmosphère est à la réflexion, à la digression sur les héros de la tapisserie de "La Dame à la Licorne"; un texte et une voix off nous introduisent dans le monde de l'amour courtois, à la manière d'une leçon de choses un peu didactique, simple et pleine d'humour sournois. Évocation d'un monde où les codes et les us et coutumes dissimulaient des pratiques érotiques et sensuelles en catimini. Des nymphes, nues nous révèlent les clefs de ces postures, attitudes, promesses de délices, de dégustation par tous les sens, des plaisirs de l'existence!
Elles sont nues, masquée à peine des effigies de ces lapins prolixes qui se reproduisent sans pause à tire larigot sur les trames et chaines de la célèbre oeuvre déposée au musée de Cluny.
Bestiaire fantastique, danse bachique, célébration de la chair pour ce spectacle hors du commun où se disent tant de choses sur le "con", cette origine du monde qui se glisse sous toutes ses formes, dans tous les inconscients.
Lapins déferlant au final comme une meute en rut pour assiéger le monde: une image très forte, violente, emblématique d'un univers à la Gaelle Bourges qui nous rappelle que nos sens posent toujours question comme le titre de la dernière tapisserie "A. Mon seul désir!"
Désir charnel pas si ambigu, que toutes ces icônes nous révèlent!
"NOTALLWHOWANDERARELOST" de Benjamin Verdonck: théâtre de carton !
A la Chapelle des Pénitents Blancs, c'est à une mise en scène très chorégraphique de petits phénomènes de carton, que Benjamin Verdonck convie au "petit matin" un parterre curieux de spectacle hors norme.
Un castelet de bois, comme une sorte d'échafaudage de poutres enchevêtrées comme lieu d'action: un cadre précis, délimité où un homme manipulateur à vue fait se mouvoir un petit monde magique de triangles de carton
A l'aide de ficelles, il pousse, il tire et fait naviguer autant de petits navires, de formes géométriques sobres, simples
Des rencontres, des heurts, des histoires d'attirance ou d'indifférence, voilà une humanité qui circule au gré de son démiurge manipulateur
Beaucoup de charme et de ravissement dans ce défilé plein d'humour, théâtre d'objets où Kleist et son traité sur la marionnette y retrouverait ses petits
Art plastique aussi, tant la pensée de Calder et ses mobiles, ou Mondrian et ses figures libres géométriques planent dans les esprits
L'épilogue est "renversant" et l'on y goûte l'identité de Verdonck, le Bazelitz du petit cube noir, la tête renversée, les pieds au plafond.
Les ficelles du spectacle, mises à nue, renvoient au chorégraphe qui se préoccupe de ses interprètes: les petits personnages triangulaires seront-ils au rendez-vous de ce suspens de carton?
A la renverse!
mardi 21 juillet 2015
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