"Les Rossignols des terres allemandes"
Chansons de Meistersinger au Moyen Âge
"Les Minnesänger et Meistersinger, poètes- compositeurs-interprètes allemands des 13e et 14e siècles, se surnommaient entre eux Nahtigal (Nachtigall : Rossignol). Dans la continuité des troubadours en Occitanie et des trouvères dans le nord de la France, les Minnesänger célèbrent à leur tour l’amour courtois et donnent ses lettres de noblesse à l’allemand médiéval. S’émancipant progressivement de leurs modèles, les Minnesänger, la plupart issus de la noblesse, développent au 13e siècle un art qui leur est propre. Quelques décennies plus tard, les Meistersinger, issus des classes bourgeoises, diversifient leurs thématiques avec des sujets de société plus variés."
Voici en préambule éclairé ce qui nous attend dans l'abbatiale de Surbourg, gainée en son intérieur de beaux éclairages "rose des sables", granit au ton pastel, doux et tendre: un concert "amoureux", désopilant parfois, toujours savant malgré les racines "laborieuses " de ces chants amateurs de confréries, mais si intenses de vérité et de sonorités fortes et cadencées! Ce sont les voix des deux chanteurs de l'Ensemble Céladon qui vont entamer ce festin de saveurs sonores, de gouts fins et variés aux fragrances médiévales délicieusement saupoudrées d'un instrumentarium à l'identique de l'époque et de ce fait, remarquable. Très inspirée, la plainte, prière de la superbe soprano Clara Coutouly éclaire l'espace, fond, se répand souriante, pleine, gracieuse. Rouge vermillon comme la robe qu'elle porte et qui approfondit l'aspect "matrice" de son rôle de femme, tantôt enjôleuse, tantôt naïve et vive comme l'anguille. Le contre-ténor bien connu, à ses côtés, Paulin Bundgen, pour mieux évoquer cette période dans un registre ouvert, accueillant, chaleureux: invitant l'auditoire concentré à une écoute recueillie, respectueuse de tradition et de "modernité" de la musique instrumentale bordant leurs propos vocaux. Dans une chaleureuse adresse au public, toujours.
Comme dans un désert, terres arides, l'atmosphère des morceaux se fabrique peu à peu, délivrant espaces sonores et paysages singuliers, dans une diction parfaite, une noble allure: instruments et chanteurs au diapason pour des litanies récitées palpitantes à retenir son souffle tant la tension de la narration est vive, présente, habitée. Vents d'Est ou du Sud apportent au répertoire varié de ces troubadours de l'âme, des notes de courtoisie, de bienséance et de savoir vivre. Profane ou religieuse, la musique médiévale s'y révèle altière et respectable, gaie, dansante, entrainante, virevoltante, alerte.Un solo de la soprano, pur et plein, sur le thème de la femme et nous voici cheminant en sa compagnie dans les temps jadis, dignement, gracieusement. La courtoisie est de mise, la ruse et l'humour distancé aussi: le jeu d'acteur de Clara Coutouly, expressive et malicieuse, sourire en suspension, ton ferme et affirmé, convaincante et forte. Sa voix pourpre, sanguine et vermeille épouse le propos avec justesse et subtilité.Préciosité de la voix en sus pour ces interprétations méticuleuses et savantes. L'homme, lui, se fait voix hypnotisante, lancinante, enjouée au gré des morceaux de choix ; un duo merveilleux les rassemble, envoutant dans une solide interprétation aguerrie.Les dialogues avec chaque instrument rare et précieux confirment la complicité des interprètes qui se consacrent à leur art avec passion et exquise modération!
photos robert becker
Les dons innés des chanteurs les rendent séduisants, sobres, enjôleurs et tissent une empathie réelle avec leur présence rigoureuse mais jamais distancée! Louange à la femme, doublée par la voix masculine en retrait, harmonie d'un tuilage savant entre tous les interprètes galvanisés par un répertoire inédit, si rarement livré à l'écoute tant la rareté et la virtuosité en sont matière première. Répliques et réparties féroces, effet d'écho entre les deux chanteurs, tout concourt à la félicité des cieux! En bouquet final, une exultation musicale dansante, vive, rutilante clôt le concert sur des notes teintées de joie. Un bis généreux et inattendu nous livre les secrets d’alcôve d'un couple, une rêverie bucolique, aux draps froissés, nostalgiques d'une nuit galante: complainte amoureuse, délicate qui borde nos rêves et l'on quitte l'Ensemble, conquis, charmés, ravis par une poésie sonore exaltante, ravissante, porteuse de joie et de respect de l'autre: le chant, la musique comme vecteur d'humanité sur la voie, les sentiers de l’accomplissement personnel et collégial !
Une fois de plus on remercie le festival de nous faire don de savoir éclairant sur la place de la musique dans notre humble vie !
Ensemble Céladon (France – Lyon)
Depuis sa formation en 1999, l’ensemble Céladon explore avec charme et fantaisie le répertoire de la musique ancienne, cherchant à chacune de ses manifestations à réinventer la forme de ses concerts. Mené depuis son origine par Paulin Bündgen, Céladon se plaît à arpenter le répertoire lié au timbre de contre-ténor, entre musique médiévale, renaissance et baroque. Céladon est régulièrement l’invité de festivals où il est reconnu pour la qualité de son interprétation et ses rapports profondément humains avec le public.
Céladon reçoit le soutien de la DRAC / Auvergne-Rhône- Alpes, de la Région Auvergne-Rhöne – Alpes et de la Ville de Lyon.
Paulin BÜNDGEN direction artistique et contre-ténor
Clara COUTOULY soprano
Nolwenn LE GUERN vièle à archet
Florent MARIE luth médiéval
Gwénaël BIHAN flûtes
Caroline HUYNH VAN XUAN organetto
Eglise Saint Arbogast Surbourg le dimanche 13 Septembre 17H
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