vendredi 6 mai 2022

"Heres: nel nome del figlio": danse de baguettes et dessous de table pour un coup d'essai à venir. Légataire, héritier téméraire...


 EXTRADANSE
Ezio Schiavulli

Cie EZ3 France 1 DANSEUR + 2 MUSICIENS CRÉATION 2022

Heres : Nel nome del figlio (au nom du fils)

Sur scène, deux batteries qui se font face. Deux musiciens, un seul danseur. C’est le défi que s’est donné Ezio Schiavulli dans Heres : Nel nome del figlio (au nom du fils). Une façon pour le chorégraphe d’interroger la filiation, ses liens et ses ruptures, le temps d’un fascinant et puissant dialogue avec la musique live.

Sous un praticable, sorte de plateau mobile à roulettes, le danseur frappe dans le noir; le dialogue percussif démarre: concurrence ou osmose, c'est la pièce qui le dira tout au long de son déroulement. Dessous de table et intrigues malines entre les deux musiciens perchés sur leur promontoire et le danseur, libre de ses mouvements  qui rampe devant les projecteurs à terre.Il semble se débattre, essoufflé, puis dans des ralentis gracieux est attiré par l'appel de la batterie: commence un face à face lointain qui se rapproche, une aspiration aimantée les relie, les attire.Le danseur crie en rythme, bat sa mesure, en suspend au sol Des adresses de regards se nouent entre les trois artistes puis un partage de territoire s'impose: il grimpe sur le petit plateau mobile et prend place dans la musique, parmi les instruments.Des onomatopées pour l'encourager, lui, les doigts de pieds accrochés au praticable...Agiles et pertinentes serres d'oiseau perché!La musique caracole, carnavalesque, les places s'échangent lors d'un simulacre d'essai, de répétition de rythmes basiques aux baguettes.Un tour de table, des poursuites baguettes au poing. Ils chuchotent en italien, baguettes magiques en accessoires percussifs Un peu de tai-chi, les bras prolongés par les tiges de bois...Profils et poses guerrières, martiales.Il semble flotter au sol, aérien à peine posé sur le flan.Une lente marche féline le lie d'une corde élastique au dispositif qu'il conduit en maitre.La tribune est ainsi entrainée et reliée à ses mouvements giratoires.Le son se déplace, visuel, en ronde bosse.Les trois compères s'en viennent à accrocher les instruments à des crochets suspendus aux cintres, sorte de mobile inventé en suspension. Le danseur sur le petit plateau se souvient de leur présence et caresse en mémoire de la matière, leurs contours disparus. Pour rendre corps à la mémoire du son.Puis se dénude alors que le plateau s'obscurcit...Curieuse évocation de la filiation que l'on ne sent poindre: le propos diffus, confus ne prend pas, la tension promise dans les intentions du "livret", riche de propos absents, d'originalité et de promesses bafouées, inexistante.... Au nom du père et du saint esprit absents....

Avec un parcours d’interprète et chorégraphe confirmé et plus d’une quinzaine de pièces à son actif, Ezio Schiavulli a développé sa démarche en plaçant le corps, sa physicalité comme ses émotions, au centre de ses préoccupations. Sa double culture, italienne et française, ainsi que ses collaborations artistiques, notamment avec des compositeurs et musiciens, ont en partie façonné son approche de la danse. En témoigne Heres : Nel nome del figlio (au nom du fils), avec ses étonnantes joutes rythmiques impulsées tour à tour par chaque artiste de cet inédit trio. Ainsi la pièce évolue au fil de différents tableaux et des formes de compositions imaginées tantôt par Anne Paceo, batteuse de jazz et multi-instrumentiste, Dario Di Filippo, percussionniste et le chorégraphe. Agir ou réagir, s’opposer ou échanger : musique et mouvement alternent entre écriture et improvisation. Tout au long de ce parcours inédit aux univers changeants, Ezio Schiavulli explore les relations père-fils entre absence et conflits. Le fil conducteur de ce récit intime et abstrait s’inspire des figures mythologiques d’Œdipe et Télémaque et questionne l’héritage entre refus et acceptation. A l’image d’un double jeu, le chorégraphe fait de cette oscillation un surprenant mouvement de ressac. A travers leurs propres corps et gestes, musiciens et danseur interrogent les origines et le déracinement, la construction intime et collective de nos identités.

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