lundi 3 juillet 2023

"Comprovisation": sans compromis...Olivier Duverger Houpert et compagnie pour un "saut dans le vide" impressionnant !

 


"Premier concert-étape de doctorat pour moi ! Je vous invite à découvrir la comprovisation, pièces de musique écrite impliquant de l'improvisation et sujet de mes recherches depuis déjà deux ans.
Pour cette première étape de recherches artistiques, j'ai concocté un programme spécial articulant improvisations et pièces de comprovisation de différentes esthétiques pour vous faire découvrir à la fois mon univers d'improvisation et les univers des compositeurs programmés."
 
"Revolutions" : soulèvements et tornades sonores....Un pavé dans les amarres.

Ceci pour introduction au concert-performance autour du travail du jeune musicien saxophoniste (et photographe) Oinier Duverger Houpert: de la musique vivante, organique au coeur de la salle 30 du Conservatoire de musique et de danse de Strasbourg.
 Violon, guitare électrique, clarinette et saxophone pour démarrer la session : un champ libre s'ouvre aux musiciens sur un temps imparti.Beaucoup de couleurs dans les sons étranges, gloussements du saxophone, crissement de l'archet sur le violon et grincements de guitare au poing.Comme des alarmes, des sirène en folie, le son circule, se déploie, se transforme. Accalmie puis résurgence des sons en forts décibels comme une rivière souterraine qui resurgit au grand air...Vrombissements, cacophonie joyeuse, déversoir d'éboulis de scories de notes en roulements progressifs.Le saxophone s'isole pour une autre pièce qui s'enchaine naturellement, sans pose, dans une continuité logique: multidirectionnel pour des émissions qui seront vite rejointes par un compère de la même famille. S'ensuit un duo remarquable: souffles, cris aigus en réponse et réplique constante, bascule de sons de l'un à l'autre.Dialogue et murmures en osmose, en sympathie. Des sons graves sourdent, denses, profonds, venus des entrailles des instruments gorgés du souffle des interprètes, athlètes en herbe du souffle. En alternance, des sirènes de paquebot, des chants de sirènes s'imposent à l’ouïe en alerte. Une narration s’immisce dans cette joute improbable: claquements des clapets en percussion et sons éclatés, éclaboussants d'une dynamique infernale. Un chemin parallèle ou croisé entre les deux musiciens comme une allée de sonorités qui se frottent. S'apprivoisent au fur et à mesure. Individuelles ou en osmose fondue.Une écoute en tension relie les deux saxophonistes pour des crescendo endiablés, des redescentes en contraste. C'est de la musique acoustique en majesté, organique, sensuelle, vivante Jamais doublée ni soutenue, ni renforcée que par elle-même. Le son en proximité d'écoute et de sensation pour le public rassemblé en couronne autour d'eux Au coeur d'un dispositif scénique qui met à nu le jeu corporel puissant des appuis, des fléchissements des genoux et de l'investissement de tout le corps. Les morceaux s'enchainent sans heurt. Deux saxophones à nouveau en volutes sonores, échos et sursauts, rebonds qui tapissent le son global perçus, ressenti. Ces improvisations sont cavalcades, chevauchées de souffles chuchotés, hennis, la ventilation opérant à vif. Et tel un combat, un affrontement des sons se forge un duel/ duo, une lutte vers un désir de victoire de l'un envers l'autre. Final de compétition ou agonie de l'hostilité? Vers une réconciliation de ces deux corps engagés, galvanisé par le plaisir et la jouissance de l'improvisation ! Tension, séduction, répulsions du jeu pour ce combat de coqs aux stridences  aux abois. Un face à face avec Tristan Michelin sans compromis dans cette comprovisation, sorte de manifeste de liberté du musicien face à la "composition" des opus. Les regards des deux compères comme conduite et repères de "partition", canevas déstructuré comme une bonne cuisine "nouvelle", légère, digeste et enflammée. Sur leur garde, reculer pour mieux rebondir et sauter dans le vide de l'impro, vécue, respirée à fond.Des tonalités curieuses, énigmatiques comme bréviaire, à l'affut, sur la touche...Suspens et surprises au menu. Un coté très animal s'en détache, ludique cache-cache ou colin maillard à vue. Les appuis sonores comme tremplin de jeu corporel. Des accents toniques pour un délire glissant: ça dérape et l'on se réjouit et joue à qui perd, gagne. Féroce ou tendre bataille de sons au diapason. Des galops titanesques, des chevauchées alertes et stridentes comme guide de ce western acoustique remuant. Genoux fléchis accueillant secousses et tremblements, absorbant les obstacles de cette conduite infernale par ces deux cascadeurs du son. Les respirations pulmonaires communes des instruments pour oxygéner l'air du temps imparti qui se délie et déferle à son gré. Et encore un feu d'artifice, fréquences vibratoires intenses du saxo solo comme des séquences, saynètes indociles autour des pupitres aux quatre partitions distribuées en arène. Au final les trois et quatre instruments se retrouvent. Triturés sur leur carcasse ou enveloppes pour générer des acoustiques et sons inédits et singuliers. Une sorte d’archaïsme du futur, d'artisanat indisciplinaire du jeu musical. L'ambiance est minérale, la lenteur des émissions des vents, les cavalcades retrouvées font cause commune. Encore des déraillements offusqués du saxophone d'Oliver Duverger  Houpert en déflagrations, galops, trots, à toute vitesse et précipitation sonore. De l'audace toujours et une dextérité de jeu, une vélocité des doigts, futile manière de se jouer des difficultés et embuches d'une "partition fantôme" virtuose....  Le musicien en transe en oublie la mesure, possédé par un envoutement contagieux. Comme un univers photographique de paysages passagers, de cadres et cadrages impromptus...Sans clichés dans une fluidité vitale proche de l'organique, de respirations vitales.
 
Photo: olivier duverger houpert



Du bel ouvrage pour une prestation très professionnelle et engagée!
 
Au Conservatoire le 2 JUILLET
 
 
Oeuvres de 
Kintsugi - F.Cali
Sour Helix - S.Rubin
Atlas Sonographique - S.Clor
r/evolution - G.Fitzell
 
olivier duverger houpert

Son parcours artistique le faisant côtoyer autant la musique écrite que la musique improvisée, il s’intéresse dans le cadre de sa thèse aux rencontres entre écrit et improvisé sous la perspective de l’interprète-improvisateur-improvisateur. L’acte, éminemment politique, ainsi posé par les performers et compositeurs, soulève des questions quant à la distribution de la créativité, et notamment des questions d’autorité sur le langage musical produit et de normativité de l’œuvre musicale. Son approche auto-ethnographique permettra d’établir un cadre théorique pour la performance de comprovisation.

La création de spectacles où s'entrechoquent la liberté de l’improvisateur avec les contraintes de l’interprétation seront pour lui l’occasion de questionner ce type d’acte performatif, afin de se repousser les limites habituelles du concert. Il développe également dans ce cadre un projet parallèle avec théâtre, où l’improvisation sera contrainte non par le texte musical d’un compositeur, mais par le texte littéraire de l’écrivaine Danielle Collobert.

 

1 commentaires:

Philippe Geiss a dit…

Merci beaucoup pour ce commentaire très intéressant sur les recherches d'Olivier

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