dimanche 15 septembre 2024

"The Great Learning": paragraphes, phrasés, ponctuation , lignes, pleins et déliés pour une musique collective de toute beauté.

 


Le premier concert de la 42e édition de Musica fait appel à vous, musiciens et musiciennes du dimanche, ou simples curieux et curieuses, pour faire résonner ensemble une œuvre monumentale rarement donnée dans son entièreté : The Great Learning de Cornelius Cardew.

Composée à la fin des années 1960 avec une méthode socialement inclusive faite de partitions graphiques et d’instructions verbales, elle était destinée au Scratch Orchestra que le compositeur anglais fonda à Londres à la même époque. Cet orchestre, voulu comme un espace horizontal de création musicale, ouvert à tout un chacun, est l’utopie que le festival vous propose de réanimer collectivement.



PROGRAMME
Cornelius Cardew, The Great Learning (1971) Paragraphes 1 à 7

Des joujoux extras qui font scratch, boom, hu!

C'est une rencontre insolite au coeur de l'église St Paul qui une fois de plus accueille une expérience atypique de partage et d'écoute musicale.  Répartie en sept "Paragraphes", le concert fleuve de 7 heures
est un monument d'audaces autant que de fragilité. Audace du dispositif qui réunit les musiciens dans un cercle chamanique, fragilité des artistes qui se donnent après un court temps de répétitions et de prise de connaissance du processus de création Un ovale plutôt qui réunit les talents d'une vingtaine d'interprètes qu nous tournent le dos pour se concentrer sur leurs interventions sonores, vocales et musicales.  


Munis chacun d'un instrumentarium singulier et personnel, une petite boutique ou épicerie fantasque dotée d'objets domestiques aux sonorités recherchées. En alternance, en choeur ou en ricochet ils font résonner et raisonner la musique et l'écriture de la partition proposée. En ratures, scratch, en bruits stridents, râpeux, chacun s'ingénie à faire chorus sonore pour créer une atmosphère singulière de volière, de forêt tropicale, d'usine utopique où les bruits seraient sons et frissons. A chacun sa petite cuisine frugale et sobre, toujours à l'écoute des autres, en succession de rythme, de frappements, de battage comme pour une moisson prolixe et fertile. C'est émouvant et touchant, plein d'authenticité et de sincérité. L'exercice parait simple et pourtant toutes les interventions sont conçues et préparées, orchestrées et prémédités! Du sans filet pour ces musiciens professionnels ou en herbe, jeunes pousses qui osent et défendent un propos, une philosophie, une attitude partageuse et participative.


Le public immergé dans cet univers unique semble ravi et captivé. A l'orgue deux musiciens ponctuent et prolongent l'aventure de leur souffle et occupation de l'espace, étrange et mystérieux. Un petit côté cérémonie et rituel tibétain pour colorer la fantaisie de ses "paragraphes" pour l'occasion, le quatrième. Puis après une pause plus longue qui permet d'apprécier le lieu, cet endroit sur le parvis de l'église devenu plaque tournante de belles rencontres, discussions et restauration. Place au paragraphe 6 qui nous propulse autour d'un cercle réunissant les artistes. Chacun son territoire où s'entassent moultes objets sonores de leur choix si résonance juste. Un poulet en plastique, des clochettes, des ustensiles de cuisine et autres pièces détachées insolites. Cet orchestre résonne au diapason et à l'unisson d'une direction collective et grâce à une écoute phénoménale les uns vis à vis des autres: respect, modestie, effacement pour créer un ensemble résonnant unique. La pièce est drôle, pleine d'humour des notes, des tonalités et du rythme. Petit à petit chacun quitte le cercle pour laisser place à la visibilité des objets: un vrai vide grenier ou marché aux puces réjouissant! Place nette pour le dernier paragraphe en conclusion ou épilogue. Place aux corps déambulants et a leur émissions vocales; singulières et personnelles en choeur contemporain aux accents linéaires, aux tenues exemplaire. Parfois un sursaut, un accent de l'un ou l'autre, une accentuation pour ponctuer cette marée sonore qui nous berce et hypnotise. Du bel ouvrage vocal comme une balade vocale collective qui enivre et fait planer et décoller l'auditoire encore nombreux à cette heure tardive. On se quitte enchanté et conquis par ce travail étonnant et très professionnel, fédérant énergie, envie et désir de s'approprier un art fait de notes, de hauteurs, de sons et résonances que l'on est tous en capacité de créer et agencer. Pour une musique de notre temps qui compte et nous est précieux. Et les scratch de grésiller et râper encore à nos oreilles épatées. Que vivent à présent longuement l"Ensemble vocal De-Ci De-Là et toustes les great Scratcheureuses ! Un 7 paragraphes de table bien relevé et gagnant!

 

avec
les musicien·nes amateur·ices de Strasbourg et ses environs
les musicien·nes intervenant·es
Ensemble vocal De-Ci De-Là
Pelicanto - chœur LGBTQ+ d’Alsace

musicien·nes intervenant·es
Didier Aschour, Jeanne Barbieri, Stéphane Clor, Jean-Philippe Gross, Yannick Guédon, Thierry Madiot, Lou Renaud-Bailly et Joris Rühl.

Concert accessible en entrée libre. Eglise St Paul le 15 Septembre


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