mercredi 5 octobre 2016

"Les Métaboles", concert vocal


Au temple Saint Pierre le Jeune, le festival Musica invite Les Métaboles pour un concert de musique sacrée, composée par des musiciens de l'ex bloc soviétique, dont l'illustre Arvo Part, sous la direction de Léo Warynski, à l'orgue Denis Comtet.
La foule se presse devant le Temple, on sent venir un événement avec l’avènement de ce concert sacré qui donne une autre tonalité à la musique contemporaine

Arvot Part avec "De profondis","Magnificat", "Salve Regina" sera au rendez vous de cette soirée unique, originale, au sein d'un édifice réputé pour sa beauté architecturale et acoustique. Les voix d'homme résonnent, opulentes, savoureuses pour cette introduction à la contemplation, à la prière et dévotion
L'entrée des femmes dans le chœur de voix angevines renforce le mystique effet de cette réunion, cérémonie spirituelle et musicale, à cappella de nos rêves d'élévation
Messe, communion, en bonne compagnie, cum panis à partager entre public et chanteurs sous l’œil bienveillant de l'orgue qui va s'éveiller durant la pièce de Petr Eben: majestueux, sombre et oppressant, menaçant de toutes ces vibrations d'enfer annoncé, l'orgue avance et broie la musique, submerge les esprits, terrorises les coupables et sauve ceux qui échapperaient à cette menace affirmée solidement: impressionner pour mieux régner sur les âmes pécheresses!
Les voix s'élèvent, cristallines, posées, célestes, les pièces s’enchaînant naturellement, tant le programme est conduit, construit pour un crescendo vers la félicité
Une soirée divine, planante qui offrait à chacun l'occasion de découvrir ensemble, une formation vocale "Les Métaboles", riche de toutes hybridations et mutations vocales, se métamorphosant à l'envi selon les ambiances, œuvres ou événements à soutenir de leurs souffles puissants, engagés, jouissifs: la vie en quelque sorte, donnée à la musique par l'émission du corps, chair, vecteur de résonances et vibrations naturelles si percutantes: et l'émotion de naître à fleur de peau...
L e M se dessine, comme Monde, Métabole, Musica: on "M " !!!

Les œuvres du jour:

Vytautas Miskinis et son "O salutaris hostia"

Dimitri Techsnokov avec "Three sacred Songs opus 43" et "Ave verum corpus opus 67"

Petr Eben avec "Moto ostinato"

Alfred Schnittke pour "Three Sacred Hymns"

Georgy Sviridov avec "Mystérious Nativity" et "Sviatyi Boje"



"Visual Exformation" Quatuor Diotima: concert-installation visuel sonore: la coupe au carré.


Oeuvre musicale et lumineuse pour quatuor à cordes, musique de Jesper Nordin, scénographie Cyril Teste, designer de la scène, un son et lumière interactif, esthétiquement exigeant et à la pointe de la technologie!
Comme Lucio Balla et son "feu d'artifice" en 1917 en compagnie de Stravinsky, voici un ballet de lumières sans danseurs, un rituel nouveau multimédia, analyse et codages des paramètres musicaux, programmation des combinaisons de couleur: voici la nouvelle palette, les pinceaux et toiles de la création musicale d'aujourd'hui!
Au Théâtre de Hautepierre, le bal peut commencer.Le dispositif est en place, les musiciens viennent s'y installer calmement, dans l'obscurité
Trois structures de formes carrée, rectangulaires s'entrelacent, comme des poupée gigognes, se complètent, imbriquées les une dans les autres. Figures géométriques parfaites, solides, au sol, dessinant des formes simples, sobres, évidentes.Quatre mouvements pour exprimer les incidences d'une extrême complexité entre lumière, musique et instruments, live, en direct et interactivité devant nous: la fabrique de la magie est convaincante, opère au plus précis, à la pointe de chaque angle de ces cubes évidés, magnétiques, peu à peu ourlés de lumière blanche, de lumière noire, puis colorée. Ramy Fischler, designer de la musique en temps réel, accompagné de programmateur lumière, auteur scientifique, réalisateur en informatique, n'est donc pas seul pour créer ce jeu d'artifices visuels, alors qu'un son à la Bill Viola borde le tout et déclenche le processus
Lente métamorphose de la structure, combinaisons subtiles entre son et lumières, tout concourt ici à se laisser aller à la contemplation recueillie de ce petit chef d'oeuvre mutant, chrysalide de nos rêves, papillon de nuit de nos fantasmes.
L'oeil écoute, fasciné cet opus hybride, cette sculpture cinétique à géométrie variable, transformable à souhait
A l'intérieur le quatuor se joue des difficultés, habite son loft ajouré avec habileté et confortablement installé dans ses "murs" transparent, anime cet habitacle révolutionnaire. Soll LeWitt ou Donald Judd eussent été convaincus que lumières néons, calculs savants de formes divagantes dans l'espace sont l'avenir de la sculpture sonore. Fiat Lux et plus encore pour ce délicieux voyage au pays des lucioles fluorescentes émettrices de fantaisie radicale, angulaire, rigide, froide mais pétrie de surprises et d audaces.


mardi 4 octobre 2016

Carte blanche à Exhibitronic" concert acoustique: un topique atypique, stroboscopique!


L' Acousmonium du Studio Musiques et recherches, offre une série de créations en son multicanal, diffusé sur un acousmonium:hommage à la scène électroacoustique de son pays, La Belgique et à la France.Le collectif Exhibitronic, initiateur d'un festival au titre éponyme, dédié aux arts sonores et aux technologies numériques sous la houlette de Yéri- Gaspar propose donc à l'initiative du festival Musica, une soirée dédiée à ses nouvelles écritures musicales
 Soixante dix haut-parleurs devant nous, salle de la Bourse, statues sur piédestalS, enceintes aux mamelons inversés, concaves, "convexes", "synclinaux" ou "anticlinaux" du mobilier acoustique; comme des hommes girafes, perchées sur des tiges, supports de leur faciès sans émotions, sans expression. impressionnant!
C'est à Laurent Delforge d'ouvrir cette soirée atypique avec "Avant les tigres" en création mondiale;
un long son tenu sort des boites noires, balayage en son d'orgue, très spatial, plongeon cinglant dans des eaux brouillées, comme une musique de film déverse ses ambiances cosmiques. Grésillements, crissements, à l'appui: on songe à un plan cinématographique qui glisse  et balaye le paysage, découvrant la puissance du son, des pas de géants résonnants au sol
Travelling pour un plan séquence topographique qui répand un son répétitif qui se déploie dans le cadre acoustique.Monde animal, végétal ou minéral, ambiance caverneuse, chuchotements, tournoiement du son en spirales qui nous enveloppe de toute part: beau travail de cet homme à la table de mixage, rivé à l'exécution en direct de ses élucubrations fertiles, petit chapeau vissé sur la tête, look sympathique et décontracté de celui qui ne se la joue pas!
Annette Vande Gorne, fondatrice de Musique et recherches tente avec "Déluges et autres péripéties" un manifeste contestataire et militant sur la fin du monde.
Des textes sont parlés, ceux de Werner Lambersy par des voix humaines avec moultes références à Pasolini,, Lévy Strauss. Cris effrayés, néant, mort, déluge à l'appui, chœurs et chants d'église, son radiophonique avec chambre d'écho réverbérante: ambiance cauchemardesqyue à souhait, melting pot pour un mauvais rêve dans un style gore de film d'horreur, de nanar vampirique qui vous dévore dans un cataclysme déconcertant.Où va-t-on quand on fait l'effet inverse de ce que l'on veut produire? D'un évangile, manifeste écologique, à un discours totalitaire, enfonçant des portes ouvertes, où des personnages hantent un univers décomposé, il n'y a qu'un pas. Même pas peur pour ce ridicule énoncé qui ne tue pas, hélas!
Avalanches, dégueulis de visions sonores démoniaques, non convaincantes, péremptoire, donneur de leçons indigestes, le texte dessert les bonnes intentions de ce discours écolo d'arrière garde.Discours politique désuet et inefficace, racoleur, enrôleur, démagogique: la musique aussi peut être emprunte de dangers, de tyrannie qui n'impressionne pas heureusement
Comme un film sans image, charriant des clichés et ragots, lourds et pesants, des évidences et idées reçues, bourrage de crâne, éprouvant!
Difficile de prendre le relais de cet opus bavard:"pont de contrôle"C en création mondiale de Yéri-Gaspard Hummel aura cette lourde tache ingrate de nous sortir la tête de cette bouche d'égout, ego disproportionné d'un bourbier d’immondices sonores.
Des klangs en percussions sonores, malicieuses comme leur auteur. Congloméras de sons brillants, scintillants, résonances libératrices, chocs, flux et reflux: tout se catapulte dans ce joyeux cosmos, habité par des comètes, des étoiles filantes rieuses. Ferait-il son "odyssée de l'espace", en tunnel, bruits de scies, velouté, sourdines et autres matières forgent le son, inventent l'espace sonore. Éboulements de pierres,, vent léger ébranlant le métal, mouvements ascensionnels, tintinnabulements, souffle, va et vient pour un voyage cosmique à travers le hublot d'une cabine de navette spatiale Orage, tonnerre ou franchissement du mur du son: c'est une délivrance salvatrice qui opère et percute, dépote et emporte très loin dans des sphères oniriques et visionnaires salvatrices!
"espace-escape" de 1989 de Francis Dhomont pour clore la soirée, oeuvre alerte, évoquant une alarme-alerte récurrente de véhicule, ambulance ou camion poubelle, ambiance clinique: danger, menace, chute d'objets, son de gyrophare: musique concrète pour univers urbain, circulation de ville, chantier en déconstruction!
Warnings au poing, on est attentif et tendu à l'écoute de cet univers sonore inédit, proche et lointain à la fois du quotidien.Inquiétude, intranquillité dans ces cassures et brisures de son.Démolition puis accalmie, chute de pierres, grincement de ce qui tente de se relever, de vivre; oiseaux qui s'en échappent à titre d'ailes, bruits de pelle, attirail multiple de chantier ouvert habité d'engins destructeurs, ravageurs au final. Torrent de sons comme dans des goulets ou tunnels, son radiophonique, sonneries et clochettes, quai de gare, alarme de train, bruit de pas, d'ailes de pigeon décollant, portes blindées: l'atmosphère est riche inventaire à la Prévert des possibilités de cette musique suggestive à l'infini.
Un peu bavarde, cette oeuvre redondante mais fertile en événement et climats variés.
La météo est bonne chez "Exhibitronic", le temps variable et changeant, jamais au beau fixe, ni à la déprime automnale, alors mes enceintes Audioréférence ont encore plus de présence chez moi, une place bien à part et me regardent, me contemplent, complices: ou est-ce moi qui les observe à présent, elles capables de tout et d'émettre bruits et fracas à l'envi!