vendredi 26 octobre 2018

"La fièvre de la danse" : un catalogue "irraisonné" déraisonné ! Et une expostion "timbrée"

"La dansomanie"
En juillet 1518, des dizaines de personnes se mirent à danser dans les rues de Strasbourg. Cette épidémie de danse, qui s’étendit sur plusieurs semaines, ébranla la communauté strasbourgeoise et frappa les esprits au point d’être consignée par de nombreux prédicateurs ou chroniqueurs de l’histoire municipale.
L’ouvrage se propose de revenir sur ce phénomène 500 ans plus tard et d’observer la manière dont l’administration de la ville, le clergé ou le corps médical tenta d’y remédier. Reprenant le déroulement des événements, il s’efforce d’éclairer le contexte de cet épisode historique particulier et de le mettre en relation avec d’autres cas de « manies dansantes » qui ont marqué le Moyen Âge.
Il s’attache à distinguer les faits, tels qu’ils nous sont livrés par les sources originales, des interprétations abusives contribuant à donner du Moyen Âge la vision erronée d’un monde simpliste, traversé par des pulsions irrationnelles et secoué par les crises. Croisant le regard de divers spécialistes, il constitue à la fois une référence sur l’événement, mais aussi l’occasion d’un travail critique sur la méthode de l’historien. En rapprochant l’épidémie de 1518 d’autres phénomènes similaires, en faisant le point sur les interprétations ou réappropriations contemporaines, dont celle de Jean Teulé, il éclaire la fascination qu’exercent sur nous ces moments de « désordre social ».

Transes en danse !
L'exposition, mise en espace par Philippe Poirier est un véritable itinéraire dans l'histoire "folle" de cette "épidémie " de danse à Strasbourg.
On y côtoie histoire, science, médecine et sociologie avec beaucoup d’intérêt et on salue au final le choix du film de Pabst de 1943 "Paracelse" où Harald Kreutzberg joue le personnage d'un possédé dans une taverne, qui entraîne toute une foule à danser avec lui, se mouvoir avec des gestes tétaniques, inspirés, déséquilibrés, "timbrés"!
Tout y serait résumé pour résoudre l'énigme de cette femme qui un jour "pour déplaire" à son mari entama une danse énigmatique, obsessionnelle, cathartique: car "rien de mieux pour faire fuir un homme" que de danser de cette sorte! Cette danse des bas-fonds, anti basse-danse à l'étiquette convenable, sans sauts ni "trop se déhancher, ni "virvoucher", va se développer à travers l'Europe, en phénomènes diversifiés.




Mesdames, à bon entendeur, salut !



La danse, fille de "freud", fille de joie ! Troffea, ivre comme une bacchanale.
Une exposition, "enthousiasmante" où l'on saisit à bras le corps la "choréomanie" des "tarentulés", la "manie dansante" de ces êtres, aujourd'hui si proches d'une esthétique de la danse moderne ou contemporaine: Mary Wigman dans sa "Danse de la Sorcière", le butho de Carlotta Ikeda, les danses grotesques de Valeska Gert aux gestes incontrôlés et introvertis ou la danse de la folie du "Gisèle" de Mats Eck ! Et Joséophine Baker, les yeux écarquillés et roulant comme des billes, en tutu, peau de banane !
La danse "gaga" de Naharin surtout où tout est insensé et désarticulé, une danse de fous, de cinglés, de déséquilibrés....Mais ici, c'est de corps social, "entrelacé" dont il s'agit, celui qui imite, reproduit et va à l'encontre des interdits.
Au Saint Guy, l'an neuf pour cette manifestation maladive, inexpliquéequea
Strasbourg, pionnière en 1518 , à  la pointe de l'innovation chorégraphique, des défilés ou cavalcades carnavalesques folles de Francesca Latuada ou de la chorégraphie de Jean Gaudin inspirée des photos de Depardon des résidents de l'asile psychiatrique de San Clémente ! (L'ascète de San Clémente et la vierge Marie)
Un pas d'avance, comme d'habitude, sans s'en vanter ! Et sans savoir sur quel pied danser, devant le buffet de la disette !

"Danser pendant la guerre froide" par Stéphanie Gonçalves et Pascal Ory

Cet ouvrage explore le ballet comme un outil de diplomatie culturelle internationale et transnationale pendant la Guerre froide. Au-delà d’une image romantique de danseuses en tutus, le ballet est une vitrine essentielle de la diplomatie culturelle, qui conduit au développement d’une « diplomatie dansante ». Fruit d’un long travail de dépouillement de sources, basé sur des archives situés en France, Grande-Bretagne, Etats-Unis et Russie, le livre identifie les acteurs – institutionnels, artistiques et commerciaux – de la machine à tournées. L’histoire des tournées de ballet porte ainsi à questionner l’idée de bipolarité comme séparation étanche entre deux blocs pendant la Guerre froide. Les compagnies de ballet traversent régulièrement les frontières et les danseurs conservent leur rôle traditionnel de passeurs culturels. Le livre se construit autour de tournées représentatives du lien entre danse et politique, des épisodes qui mettent en valeur les points chauds de cette Guerre froide, ayant comme point de départ ou d’arrivée Londres et Paris. Il propose un nouveau regard sur la coopération et les rivalités dans le ballet pendant la Guerre froide, grâce à une plongée dans la fabrique diplomatique des tournées.

"Danser brut" au LAM


Quels sont les liens entre la danse et l’art brut ou contemporain ? à travers une sélection inédite de près de 300 films, dessins, sculptures ou photographies, le LaM place le mouvement au cœur de la création, sous toutes ses formes. De Nijinski à Chaplin, cette exposition originale déniche des gestes au creux d’œuvres aussi diverses que magistrales.
Porter un regard transversal et neuf sur le corps, tel est le point de dé- part de l’exposition. « Celle-ci est une somme d’observations de gestes ou de façons d’être, explique la commis- saire, Savine Faupin. Il s’agit aussi de dévoiler l’invisible, des mouvements auxquels on ne prête pas attention mais se révélant extraordinaires ». Depuis l’Hôpital de la Salpêtrière où le Dr Charcot décrit les attitudes de l’hystérie à la fin du xixe siècle, à l’aide de dessins et photographies, jusqu’aux films burlesques mettant en scène des pantomimes, l’accrochage scrute des corps désarticulés, gesticulant, en proie à des forces irrépressibles. On croise au gré de ce parcours de six sections la cabarettiste allemande Valeska Gert,les tribulations de Charlot ou la grande silhouette dégingandée de Jacques Tati… dans un même élan !

Entrez dans la transe
Plus loin, c’est l’implication de notre enveloppe charnelle tout entière dans la production de l’œuvre qui est explorée. On découvre les dessins de Nijinski qui, ayant cessé de danser et retiré en Suisse dans les années 1920, exécute un grand nombre de compositions abstraites. Le chorégraphe virtuose s’affiche d’ailleurs comme un trait d’union avec l’exposition contiguë, consacrée à Rodin. Le sculpteur, avec sa série des Mouvements de danse, a en effet saisi la fulgurance du geste du précité Nijinski (et d’autres) dans le plâtre et la terre cuite. Mais la danse s’empare aussi des corps, malgré nous, comme en état de transe. En témoignent les “lignes d’erre” tracées par l’éducateur spécialisé Fernand Deligny, rendant compte au fil de cartes crayonnées des trajets d’enfants autistes. Enfin, c’est au tour du visiteur d’aiguiser ses perceptions, en interagissant avec la sculpture de lumière d’Anthony McCall, ou avec la chorégraphie sous hypnose de Catherine Contour. Des rendez-vous musicaux concoctés par le collectif La Belle Brute et Lucile Notin-Bourdeau entrent aussi de plain-pied dans la danse !