lundi 7 octobre 2024

"MoE + Ikuro Takahashi | Yeah You | Fearless Alfredo": nocturnes MUSICA METZ douche froide et autres frissons...

 


AFTER

Pour clore (presque) le festival et glisser dans la nuit, Musica s’allie à Fragm/ent, l’association qui fait vibrer la culture alternative messine depuis plus de vingt ans.Du rock avant-gardiste aux vrombissemnts noise de MoE + Ikuro Takahashi, l’électro-noise familiale de Yeah You, et la sélection pleine de virages de Fearless Alfredo… Musica s’est allié à Fragm/ent. pour clore (presque) le festival et glisser dans la nuit messine.


MoE + Ikuro Takahashi

Le rock avant-gardiste de MoE met le feu aux poudres. Le duo expérimental norvégien de la bassiste Guro S. Moe et du guitariste Håvard Skaset se présente en trio avec une figure de la scène souterraine japonaise, le batteur Ikuro Takahashi. 

 


Yeah You

L’électro-noise familiale des gallois de Yeah You, le duo rare d’un père et de sa fille, Gustav Thomas et Elvin Brandhi (déjà présente en ouverture de festival avec Ziúr). Littéralement dé-jan-té.

 


Fearless Alfredo

Fearless Alfredo propose des mixs éclectiques de ses morceaux préférés, pour se défouler comme des pantins espiègles et désarticulés. Au programme : de l'électronique qui combine expérimentations et musiques pop, des boîtes à rythmes énervées ou mignonnes, des synthés tantôt rigolos et tantôt sombres, des percussions dans tous les sens... Une sélection pleine de virages, de dos d’ânes et de nids de poules, inlassablement à la recherche des émotions avec lesquelles on danse !

Il fallait une bonne douche froide, une bonne bière pour s'immerger dans de univers de bruits et de fureur: c'est fait à l'écoute des quatre groupes féroces du rock électronique...

A la Douche froide le 5 Octobre dans le cadre du festival MUSICA METZ

 

Une histoire du piano minimaliste #1 Melaine Dalibert, Stephane Ginsburgh, Nicolas Horvath complices d'un florilège époustouflant.

 

Quatre pianistes, quatre concerts pour quatre visions du piano minimaliste, des années 1920 à nos jours.


Une histoire du piano minimaliste 1

Melaine Dalibert interprète quelques-unes de ses propres compositions, ainsi que des pages rares des compositrices Meredith Monk et Ann Southam.

On démarre avec Meredith Monk, et son Travel song (1981) en corps et mouvement, répétitions obstinées et écoute profonde, très "dansante" pièce.
Ann Southam, Remembering Schubert (1993) fait suite, très inspiré du génial compositeur histoire de remettre les pendules à l'heure et de na pas oublier que l'on ne vient pas de nulle part!
De Mark Hollis, Piano (1998) et de Melaine Daliber lui-même, Litanie (2019), Jeu de vagues (2020) et Fall (2023) font suite avec bonheur.  Des vagues comme improvisées sous les doigts du pianiste sur 13 notes qui tournent et virevoltent à l'envi. De petites frappes méticuleuses, sempiternelles donnent le ton et la rythmique. Quasi mélodiques. En bis "Song", une pièce courte couronne le concert.

piano Mélaine Dalibert

 


Une histoire du piano minimaliste #2 Stephane Ginsburgh

Stephane Ginsburgh était proche du regretté Frederic Rzewski dont il transmet la passion musicale et politique.Deux oeuvres, Stop the war ! (The Road, Part 8) (2003) et  De Profundis (1991) sont proposées à l'écoute.  Doigts et phalanges en percussions sur le rebord de la caisse du piano comme prologue. "Stop the war" en citations et références vocales, pour l'interprète galvanisé par les frappes et percussions pianistiques. De la voix, des sifflements, une mélodie, un râle, des halètements jouent et gagnent pour ce comédien-pianiste hors pair.

piano | Stephane Ginsburgh

 

 


Une histoire du piano minimaliste #3

Nicolas Horvath

Le défricheur insatiable Nicolas Horvath nous offre en création mondiale la dernière œuvre de Terry Riley en hommage à Erik Satie. C'est Terry Riley qu'il choisitavec  Chasing Satie (2024)et c'est une révélation de la prolongation du génial compositeur pour le piano. Un amour immodéré pour cet auteur conduit Nicolas Horvath vers des sommets de jeu, d'empathie, autant avec l'oeuvre qu'avec le public. En complément de programme et pour nous enchanter, il exécute par coeur et par corps "une étude" de Phil Glass, renversante et phénoménale de tonus, énergie et dynamique. Du grand art.

piano | Nicolas Horvath

 


Une histoire du piano minimaliste #4

Wilhem Latchoumia

De Charles Ives à Colon Nancarrow, en passant par Henry Cowell, Wilhem Latchoumia expose les prémices esthétiques du début du XXe siècle.


Avec un programme dense et très varié Latchoumia prpose un panel, un florilège de morceaux rares et interprétés de ses doigts magnétiques, de sa gestuelle féline, pondérée, de tout son grand corps investi dans une communion complice avec les oeuvres citées

.Henry Cowell, First Irish Legend - The Tides of Manaunaun (1912)
George Antheil, Jazz Sonata (1922)
Ruth Crawford, Préludes No. 1-3 (1924-1928)
Colon Nancarrow, Tango ? (1983)
Ruth Crawford, Préludes No. 4-5 (1924-1928)
Charles Ives, Set of five take-offs (1906)
Ruth Crawford, Préludes No. 6-9 (1924-1928)
Ruth Crawford, Piano Study in Mixed Accents (1930)
Terry Riley, Simone’s Lullaby (1994)

piano | Wilhem Latchoumia

A l'Arsenal les 5 et 6 Octobre dans le cadre de la cité musicale de Metz et du festival MUSICA METZ

 

 

 

"Gay Guerilla" de Julius Eastman: une performance hors norme.

 


Redécouvert il y a quelques années seulement, Julius Eastman (1940-1990) avait disparu au début des années 1980, jeté à la rue, son œuvre dispersée ou perdue, avant d’être emporté par le virus du Sida.

Il est l’auteur d’une musique brute et organique, familière du happening et des musiques populaires, dont la scansion répétitive est aussi politique, souvent accompagnée de titres dénonçant le carcan social imposé aux noirs et aux homosexuels aux États-Unis. Militant et témoin historique de l’émergence des mouvements antiracistes et de libération sexuelle des années 1960, il compose Gay Guerilla en 1979, dix ans après les émeutes de Stonewall à New York.


Dans le studio du Centre Pompidou Metz c'est à un ouragan sonore de quatre pianos disposées en trèfle à quatre feuilles que le public, réuni autour, va palpiter.

Grâce à l'oeuvre de Julius Eastman, Evil Nigger (1979) |où la férocité de la musique explose, tonus, énergie et paroles fulgurantes au son des 1/2/3/4 d'un des pianistes qui semble orchestrer cette fulgurance. Gay Guerilla (1979) succède, doux et serin, opus en contrepoint Mais c'est surtout Crazy Nigger (1978)qui va étonner, surprendre, déplacer et décontenancer l'auditoire. Des appuis des doigts sur une seule note, déclinés à l'envi, seuls ou en canon et ricochet, ou à l'unisson des huit mains véloces. Des marches en avant, à reculons, comme une lutte contre la montre, un passage obligé sur un tapis roulant à contresens. Réverbérations, couches sonores, superpositions des sons ou décalage, pianos "ouverts" béants de sonorités percussives obsessionnelles.Musique parfois fluide, évanescente, aérienne en écho. L'ampleur et l'amplitude du volume saturant l'espace ou l'ouvrant vers des contrées inédites d'écoute. La pulpe des doigts des quatre pianistes à rude épreuve! Course folle, enivrante pleine de ressorts, de rebonds, de tectonique d'écriture variable imposée ou imaginée par le compositeur et les interprètes participatifs. Tel un furieux carillon de campanile déchainé, une force tempétueuse s'abat sur l'auditoire médusé, tétanisé ou emporté. Les appuis des doigts sollicités à l'extrême. La perméabilité sonore émeut, bouleverse, dérange, déstabilise pour le meilleur des émotions musicales. Les vibrations dans le corps, les yeux rivés sur le jeu virtuose des pianistes compères, complices, au diapason fraternel. Des frappes régulières viennent calmer le tsunami bordant un grand désordre, chaotique, rageur comme des coups de béliers enfonçant une porte blindée. Des moments inédits d'une grande intensité!

Au studio du Centre Pompidou Metz le 6 Octobre dans le cadre du festival MUSICA METZ

piano | Mélaine Dalibert, Stephane Ginsburgh, Nicolas Horvath, Wilhem Latchoumia