samedi 23 mars 2019

"Sriptease" de Pere Faura : l'Aura de Faura


"Qu’en est-il du corps de l’autre, en général, de la danseuse ou du danseur en particulier, de cet obscur objet du désir ? En se livrant à l’art de l’effeuillage, Pere Faura mène sa performance en showman. Une ironie décapante accompagne la langueur de poses suggestives, tandis que les discours et les gestes décalés de sa théorie traversent les images vidéo. Le jeune artiste catalan partage avec drôlerie ses convictions : le geste théâtral comme art de se dénuder, le désir généré par ces modes d’expression."

C'est donc en frac noir, cravate et chapeau melon, que notre petit homme bien charpenté, aparait dans le studio de Pole Sud; désormais bien connu des spectateurs, ce dernier installe une caméra sur pied et commence à esquisser déhanchements, ralentis chaloupés de gestes suggestifs, se frôle, se caresse, ôte son mini short et tel un crooner sans voix, parade et séduit, oscille et tangue: c'est "extra" !
Sourire narquois en coin, enjôleur, malin, coquin, en attente , en séducteur , courbé, tendu, en extase.Pendant que la bande son déraille, il jette ses habits, sa ceinture se glisse entre ses jambes, ses cuisses frémissent, il se caresse langoureux, se fouette, dans l'attente et l'expectative, excitant: c'est bien là un strip tease masculin , féminin, bref sans genre précis ni caricature transgenre. Pas de surprise dans les suggestions gestuelles: on a ce qu'on attend!
Fin du show, court, bref, satisfaisant. Et alors ? Prise de paroles pour légitimer le striptease dans la danse contemporaine: alibi pour mieux réfléchir entre danse et sexe, lequel regardons nous? Pere Faura interpelle le public, le filme à son insu alors qu'il évolue, seul sur scène. Avec sa caméra, sexe brandi, fétichiste de la cravate, lasso SD, et de sa moustache intrigante...Il explique la genèse de son projet de commande, à l'invitation de Pôle Sud, avoue ses faiblesses d'imagination, puis solutionne ses hésitations en commençant par inventer le titre aguichant:"striptease" !
De quoi attirer du monde, friand de ce qu'il connait, à l'inverse du spectacle vivant où l'on ignore tout de ce que l'on va voir.Pièce courte par essence , ce show est là pour nous faire "apprécier" la danse, plus que le sexe: dans sa "conférence" docte, et éclairée il fait la parodie sociale de ce divertissement acquis dès la première seconde! "Mécanisme de substitution", postmoderne, "anticipation" seront ses maitres mots. Amuse-bouche et "anti pasti" le striptease est noble  de procède de l' "idéal", cette "appréhension incorporative", cette in-clusion qui le rendent fou  Il se reprend, réexplique en bon enseignant de la bonne parole, en mutisme aussi. Rien n'est unique dans cette exposition du corps sexuel.Et nous voici dans "la construction artificielle de l'érotisme" , ces fantasmes qui font d'une danseuse de cabaret, un ange rêvé, distant, inaccessible objet de désir.L'intimité, arme de destruction de l'image se frotte ensuite à une séquence désopilante. Le visionnage des spectateurs filmés durant sa prestation dansée: visages intrigués, expressions diverses de réactions, de mimiques, de tics...Drôle et très significatifs de nos inclinaisons ou inclinations au voyeurisme...De quoi être gêné ou dépourvu, pendant que le danseur donne la réplique aux images, réinterprétant en temps réel sa danse première.Commentaires très éloquents, face à face avec l'icône qui retient l'attention et met en abîme les réactions.Alors intervient le hasard qui ce soir là ne fera pas sortir les dernières images non enregistrées par la caméra. Du beau travail de retournement de situation, de réflexe très professionnel de l'artiste pris en flagrant délit de faute ou d'erreur de tir.
Pas d'image mais un commentaire en direct de ce que nous aurions du voir!
On reste dans la frustration et le fantasme: n'était-ce pas le but du jeu qui se renforce ici et prend tute sa dimension spectaculaire à l'inverse du striptease si attendu?
Pere Faura fait son effet "Aura de Faura" avec brio et malice comme à son habitude.

A Pole Sud jusqu'au 23 Mars

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