"Croiser le hip-hop avec un énième dialecte de mouvement n'a jamais été l'intérêt de Bruno Beltrão. Pour cela, il est trop critique à l'égard d’un hip-hop absorbé par l’industrie culturelle, et s’oppose à l’idée qu’une seule langue puisse permettre de développer des idées complexes. "
©Jose Caldeira / ©Karla Kalife / ©Wonge Bergmann...... |
"Dans ses chorégraphies, Beltrão aborde les contradictions sociales violentes d’une société sous l’emprise de l’extrême-droite. Comment rester en mouvement, alors que la situation politique et sociale dans un pays comme le Brésil semble tout paralyser ? Le fait que nous, les humains, soyons trop enclins à poursuivre nos habitudes et schémas de pensée est l'une des préoccupations du chorégraphe dans sa déconstruction ludique des danses hip-hop, de leur machisme et du culte de la virtuosité. Sans perdre le lien avec l’expérience de la rue qui a marqué ses débuts, il transpose la danse urbaine sur la scène, entrelaçant les styles et les figures du hip-hop avec les principes de la danse contemporaine. Dans cette nouvelle création, tant contemplative que chargée d’une impressionnante énergie des corps sur scène, la compagnie Grupo de Rua interroge les tensions explosives du quotidien, mais aussi les solidarités."
Bruits de rue, bande son à la Cage pour observations des sons d'un quotidien intempestif et des petits personnages qui surgissent, pantins manipulés par leur propre désir et énergie..Doigts, mains agiles, véloces ornent les corps vêtus de longues tuniques quasi religieuses, en noir, blanc ou rouge...Trois couleurs déclinées en nombre de suite de Fibonacci: 1 ...2...3...5... etc...Un lent déplacement d'un petit groupe d'individus, loquaces à souhait dans leur gestuelle chaotique, désordonnée en apparence . C'est tout simplement visuellement magnétique, tectonique, au millimètre près, comme dans une facture de maitre à danser, compas dans l'oeil du chorégraphe minimaliste. Un élément s'échappe de cette petite grappe compacte, ricoche, va et vient, revient, sempiternel aimant absorbé par une attirance démoniaque . Des "tritons" musicaux, diaboliques éléments interdits, prohibés par la gente monastique. Il y a du sacré et du païen dans ces danses captivantes, irrésistibles tentations de corps voués à des directives et consignes d'écriture chorégraphique drastiques. Pas d'abandon ni de laisser aller, excepté un court instant de triolet à la Childs, danse contact éphémère, clin d’œil à une autre discipline: la danse libre, improvisée qui n'est pas de ce monde sur le plateau.Sur des fondus enchainés de lumière, dans des découpes précises des halos sur les corps mouvants, l’inouï, l'imprévisible apparait, disparait. Les trajectoires des danseurs comme des lignes tracées frontales où la vélocité des gestes, des parcours fulgurants, médusent, tétanisent les regards.
C'est hallucinant , jamais vu ni ressenti et très chaotique. Tels des pions sur un échiquier, tous gravitent, se mesurent, se toisent à l'envi dans un joyeux délire digne d'un centre psychiatrique: gestes désordonnés, déséquilibres rapides, reculades vertigineuses dans cette cour des miracles.Corps rétrécis, empêchés, réduits à leur plus simple anatomie, genoux fléchis, niveau de gravitation limité...Ca fourmille intensément sur le plateau nu où l'on courbe l'échine pour être mieux aérodynamique.Ponctuation, courtes pauses et un petit miracle opéré par les projecteurs rasants: comme des figures de petits cygnes repliés qui font office de jouets perdus sur scène. Sur des percussions quelques combats singuliers fulgurants, toujours genoux pliés recroquevillés, encore un "triolet" , des piétinements hyper rapides comme des figurines de jeu vidéo commandées par un esprit étranger à ces corps manipulés.Glissés savants et fugaces, petits nains aux micro-mouvements calculés. C'est de la haute couture, de la haute voltige au ras du sol pour créer un "microcosmos" fabriqué d'insectes pris au piège de la lumière. Petit monde sorcier, énigmatique, diabolique, sonore à l'envi. Bruno Beltrao comme magicien , Merlin l'enchanteur d'un monde en mutation, métamorphose kafkaïenne de l'univers.
musique de Lucas Marcier/ARPX .........
présenté par le Maillon avec POLE-SUD, CDCN au Maillon Wacken jusqu'au 2 Décembre
A la Filature Mulhouse le 14 Décembre
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