jeudi 2 juin 2011

Garry Stewart : sacré sacre!


LE SACRE DU PRINTEMPS DE GARRY STEWART
L’image-mouvementée
Plutôt qu’une énième lecture, il préfère se poser la question de ce que signifie à présent ce chef-d’œuvre auquel on ne connait ni précédent ni héritage. D’emblée la révolution s’opère au gré de la partition de Stravinski : ce langage faussement rudimentaire donnant à l’auditeur l’impression qu’on veut le conduire dans une sorte de régression, retour vers un art brut, sauvage, prétendument simplifié-au prix de quelques complexités d’écriture !
Un immense écran vidéo reproduit en direct les mouvements des danseurs, tantôt épousant le flot et la fluidité des gestes, tantôt, démultipliant les postures pour en faire des tableaux à la Norman Mac Laren ou Busby Berkeley. L’image prends corps, sur dimensionnée et reflète les tonalités oranges des costumes des danseurs : vêtements sport à cagoule qui dissimule les visages. Hypnotiques, les icônes envahissent l’espace quasiment au détriment de la danse « live ».Et la magie opère durant les quarante minutes de la partition. Sans cesse le mouvement rebondit, s’enchaine, les images vidéo tournées et triturées en direct font kaléidoscope à la Nikolais ou Decouflé. Mélanges, mouvances, osmoses et déformations des corps dansants fusent et l’atmosphère tendue se propage dans l’espace scénique virtuel. Beaucoup d’audace et de risque pris en direct pour cette pièce hors du commun qui épouse à merveille la virtuosité de la musique. Garry Stewart est résolument iconoclaste en diable et conduit sa réflexion chorégraphique avec l’attention et l’adhésion totale du corps de ballet, aguerri et galvanisé par ses propositions décapantes. Les volutes, sinuosités graphiques des corps colorés à l’écran font leur cinéma plastique à merveille et inventent un langage esthétique de tout premier plan. Du « neuf » dans le domaine de la scénographie vidéo, en phase avec la danse !
Et dans cette tempête et tourmente, face à cette tornade jubilatoire, la danse excelle, rayonne en autant de jaillissements étincelants.Quel toupet !
« Trilogie russe » c’est de la déflagration, comme la révolution qui valut au pays à l’époque la venue des Ballets Russes de Serge de Diaghilev qui allait refondre la pensée et l’acte chorégraphique à partir de l’œuvre emblématique de Stravinski : le désormais éternel et fascinant « Sacre du Printemps » !
Geneviève Charras
« Trilogie Russe » à Strasbourg jusqu'au 8 JUIN

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