mercredi 4 janvier 2017

"Dom Juan" :déus ex machina, astres et désastre!


Dom Juan; c'est un mythe, une icône et au Théâtre, de multiples références! Alors on y va les yeux fermés, vierge de tout contrôle et version antérieure pour apprécier à vif une mise en scène et scénographie, décoiffantes .L'espace scénique est déjà occupé par les comédiens et techniciens quand le public pénètre dans la salle du TNS. Théâtre ouvert, théâtre "à vue" qui se fabrique devant nous; c'est bien des hommes et des femmes "au travail" que nous allons regarder plus de deux heures durant, sans faille, sur le plateau.
Sganarelle, figure légendaire de cette pièce, "valet" incontournable des comédies (ballet) de Molière, ici incarné par Vincent Guédon, se révèle un personnage fin, haut en couleurs, franc de collier malgré des passes difficiles et mensongères. Face à son maître, Nicolas Bouchaud, séducteur à la dent longue et au désir impulsif ou compulsif envers tout ce qui bouge de féminin, il est "vivant" et plus que présent, nerf de cette guerre où les sentiments ne sont pas vraiment de mise!
Ce théâtre "qui avance", se déploie avec perte et fracas, convainc, séduit, dépote et invite à la surprise sans détour. Un dispositif scénique, gris, blanc plein de poudre aux yeux, de particules fines pour semer le trouble (brouillard, vapeurs, farine et autres falbalas de comédie satirique) semble à la une. Chacun se débat dans cet espace peuplé d'objets hétéroclites, suspendus aux cintres, intervenant comme de petites bombes à retardement dans ce monde fébrile et pulsatile.



Le metteur en scène bricole un univers qui se déchire, se déconstruit, tectonique des plaques et planches hurlantes; associé à Christian Tirole et Daniel Jeanneteau, le voilà architecte d'un monde qui s’effondre, de valeurs en péril.de fragilité des âmes qui se déchirent. Comme des astres suspendus au dessus de nos t^tes, des sphères menacent, ponctuent l'esthétique branlante de ce qui est lumineux et fragile. L'univers gris-blanc, saupoudré de fines particules semble pollué et porteur de menaces: on y retrouve le commandeur en statue vivante, les tulles et tarlatanes spectraux au rendez-vous de cette symphonie sur le désir et la cupidité. Belle et tonitruante représentation d'un Molière remit à sa bonne place: agitateur professionnel d'une "comédia del arte" en voie de disparition, d'un crêpage de chignons à la mise en scène qui galvanise tout un chacun et fait d'une séquence "disco" le clou de désastre! 
Ca éclabousse, ça remue les esprits et chauffe l'ambiance sur le plateau dévolue à une tornade blanche sémée de poudre: gare aux explosions jubilatoires!


AU TNS jusqu'au 14 Janvier

A propos de:

"Après avoir subi la censure lors de la création de Tartuffe, Molière et sa troupe créent Dom Juan en 1665. Ce personnage mythique, qui passe de femme en femme et ne croit en rien d’autre qu’en « deux et deux font quatre », débarque en Sicile avec son valet Sganarelle, fuyant Elvire qu’il vient d’épouser. Le metteur en scène Jean-François Sivadier met à nouveau face à face les comédiens Nicolas Bouchaud et Vincent Guédon, qui interprétaient Alceste et Philinte dans Le Misanthrope, présenté au TNS en mars 2014. 

Comédien, auteur, metteur en scène de théâtre et d’opéra, Jean-François Sivadier avait, en 1996, repris la mise en scène du diptyque Dom Juan/Chimère et autres bestioles de l’écrivain et metteur en scène Didier-Georges Gabily décédé avant la création. Il a, depuis, mis en scène ses propres pièces ainsi que des œuvres de Beaumarchais, Brecht, Büchner, Shakespeare, Feydeau, Claudel, Molière. Depuis 2000, il est artiste associé au Théâtre National de Bretagne. "




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