samedi 27 septembre 2014

"Mitsou": Balthus, Rilke et MUSICA...Un opéra-film de Fitoussi et Sinnhuber!

Quarante illustrations de Balthus en herbe et orthographié Balthusz (il a 12 ans quand il publie ce carnet, en 1920) mais avec une préface de Rilke et plein de lettres en bonus. Dans la préface, adressée au jeune peintre : «Ce chat, convenez-en, n'entre pas tout à fait dans votre vie, comme ferait, par exemple, un jouet quelconque ; tout en vous appartenant maintenant, il reste un peu en dehors, et cela fait toujours : la vie + un chat, ce qui donne, je vous assure, une somme énorme.»

Et chaque année ensuite, jusqu'en 1926, Rilke écrit à l'adolescent pour son non-anniversaire : il est en effet né un 29 février ! Dans l'avant-dernière, il le charge de lui acheter les Notes au Narcisse de Paul Valéry chez Adrienne Monnier, et pas ailleurs.
Le cinéaste Jean-Charles Fitoussi et la compositrice franco-suisse (née à Strasbourg) Claire-Mélanie Sinnhuber inventent un nouveau genre : un opéra-film tout public inspiré de Balthus et Rilke.
 
L’histoire d’abord : un enfant (Balthus) muni d’une bougie part à la recherche de son chat Mitsou. Sous le lit, dans la cave, par les rues. En vain. Rentré à la maison, il est d’autant plus triste qu’il se trouve, cette année encore, privé d’anniversaire : le soleil s’est couché le 28 février et se lèvera le 1er mars sans donner jour au 29. Mais il trouve une lettre d’un ami (Rilke) qui lui fait part d’une secrète trouvaille : une brèche dans le temps.
Le spectacle ensuite : librement inspiré des quarante dessins que Balthus publia à douze ans dans un recueil titré Mitsou (le nom d’un chat qu’il avait trouvé puis perdu) et préfacé des lettres que Rilke lui envoya alors (Lettres à un jeune peintre), l’opéra cinématographique éponyme n’y trouve pourtant pas sa source graphique. Le film original réalisé pour cet opéra-film par Jean-Charles Fitoussi, tourné en Suisse et en France cet hiver, oublie les dessins mais reprend un certain nombre d’événements et de situations confiées à des acteurs.
La musique et le chant sur scène se trouvent ainsi intimement et inextricablement liés au cinéma. Les chanteurs commencent sur le plateau, puis se dédoublent : ils « entrent » dans l’écran – cette « brèche » dans le temps dont parle Rilke à l’enfant – tout en rejoignant la fosse pour donner voix à leurs doubles filmés. Mitsou, histoire d’un chat « retrouve » donc quelque chose que le cinéma muet n’avait jamais pu faire quand il rêvait d’opéra : donner voix aux acteurs par des chanteurs qui se synchronisent sur l’image. Mais l’analogie avec le cinéma muet s’arrête là, le film ne convoquant ni nostalgie ni noir et blanc, la projection prenant toute la place d’une véritable mise en scène.
Projet ambitieux et singulièrement original, Mitsou sera donné pour la première fois à Musica et convie un large public – enfants comme adultes – séduit par le fantastique de cette histoire autant que par la double expérience lyrique et cinéphilique.
 

"Maestros", Musica! Le son spacialisé! A fond, la "forme"!

Musica en grande forme orchestrale
Géographie des sons, frissons, poly sons!

Soirée "officielle" d'ouverture du festival Musica le 26 Septembre au PMC à Strasbourg: un programme de choc.
 "Kraft" de Magnus Lindberg, une oeuvre de 1983;
Avec pour orchestre le fameux SWR Sinfonieorchester Baden Baden / Freiburg et l'Ensemble Modern sous la baguette du jeune chef Pablo Rus Broseta!
Large dispositif orchestral d'où le premier son émane du chef lui-même: un coup de sifflet!
Le ton est donné car il s'agira 28 minutes durant d' une course folle, marathon musical et très physique pour les interprètes investis "de force" dans la mise en scène: la percussionniste arrive "en retard", les instruments à vent, plus tard se faufilent dans les rangées de l'orchestre, puis s'évadent parmi le public!
Et ceci dans une atmosphère survoltée, vibrante, agitée...Folie, stress,urgence?
Peu importe, l'allégresse de la partition, la virtuosité de Nina Jansen-Deinzer, clarinettiste au dos dévoilé par un costume noir très seyant, participe de cette fébrilité, fait mouche, focalise l'attention sur ses va et vient précipités, d'un instrument à l'autre: les vents puis l'énorme gong qu'elle va embrasser de tout son corps, faire résonner comme un titan, la masse sonore sous le coup fatal du marteau!
C'est humoristique, drôle et décapant! On en attendait pas plus de ce "Kraft" du génial finlandais Magnus Lindberg, toujours jeune et friand de surprises
La pièce est pour clarinette, deux percussions, piano, violoncelle solistes et orchestre. C'est l'une des premières œuvres du compositeur, d'une violence caractéristique du style des débuts de Magnus Lindberg1.

.Spatialisation du son, réorganisation de l'orchestre: il en est de même pour la création de Philippe Manoury "In situ" de 2013, une sorte de géographie musicale, plis de sons, surfaces tremblées, échos et effondrements, déflagrations tectoniques à l'appui!
L'orchestre se plie aux extravagances de la partition, une partie sur des échafaudages, en off de l'orchestre sur le plateau.
Vertige de la musique, dissémination, éparpillement des sons, géométrie des ensembles pour une spatialisation singulière et réfléchie des groupes d'instruments
A voir, à entendre comme des masses de couleurs sur une toile, des poids et appuis de tension pour créer un univers plein, fort et en abondance de volumes sonores puissants.

Dans In situ, Philippe Manoury choisit simultanément ces deux options principales et en fait même l’argument initial de sa proposition. Sur scène, un ensemble de solistes groupés en familles homogènes (bois, cuivres et cordes) fait face à un orchestre à cordes, puis tout autour du public le grand orchestre se répartit en petits groupes individuels, figurant dans certains cas une géométrie particulière (les percussions forment un carré, les cuivres un triangle…)
In situ est en définitive une magistrale combinaison de « géographies musicales ». Manoury dit se souvenir, sans y recourir systématiquement, des « moment form » chères à Karlheinz Stockhausen, qui génèrent des centres de gravité très caractérisés (pluies de sons, surfaces tremblées, échos, effondrements ou encore déflagrations) reliés entre eux par des transitions plus hétérogènes « floutées » en degrés successifs.
Créée en 2013 à Donaueschingen, In situ s’est d’emblée imposée comme une des grandes partitions du compositeur et une réflexion sur la grande forme.
 
La musique pour orchestre en "grande forme"

Claudia Rogge: corpus dei!

Claudia Rogge installée à Düsseldorf signe depuis plusieurs années des mises en scènes opulentes où posent aussi bien ses amis que des figurants volontaires !
On dirait su Sacha Waltz!
Galerie des photos de Claudia Rogge
Ever After:Paradise IV

Récemment, la photographe allemande Claudia Rogge a puisé son inspiration dans la Divine comédie de Dante. A chaque session photo en studio, elle réalise plusieurs milliers de clichés montrant des personnages tantôt nus, tantôt vêtus d’un simple linge qui ont l’air de flotter ou qui forment encore des couples enlacés.

Claudia Rogge sait toujours parfaitement quel rôle endossera tel ou tel figurant dans ses grands tableaux légendaires. Ensuite, elle examine les clichés un par un, les recadre et les assemble. Les fruits de ses montages sont des photos de groupe qui rappellent les fresques du baroque italien. Metropolis l’accompagne à une séance photo pour sa nouvelle série « Lost in Paradise ».
lire "a retrospective" et "ever after" chez hatje cantz