samedi 5 mars 2016

"Je suis Fassbinder": et vous? Quand le corps résiste, il cause et c'est notre seul capital !

Falk Richter et Stanislas Nordey partent de Rainer Werner Fassbinder, un artiste décisif dans le parcours de Richter. Du théâtre alternatif aux films à succès, Fassbinder ne cessa jamais d’être une figure underground, restant fidèle à son thème de prédilection : la transgression – politique, sexuelle. Son œuvre ne s’est donnée aucun interdit, ne s’est jamais autocensurée. Travailler sur cette matière, c’est aussi interroger notre monde: qu’est-ce que faire du théâtre aujourd’hui ?
Tambour battant, atmosphère tendue, rythme fébrile pour le démarrage en trombe de l'action sur scène, filmée en direct et projetée sur écran! Du vrai et du virtuel, nous serons dans deux champs de spatialité et de temps, deux heures durant en compagnie de cinq personnages: trois hommes et deux femmes qui passeront au crible la vie et l'oeuvre de Fassbinder, ce trublion iconoclaste et indisciplinaire, cinéaste de l'Allemagne encore meurtrie et stigmatisée par son passé, son homophobie et bien d'autres tares encore! Les ponts sont lancés entre notre actualité européenne pétrie de barbarie et d'actes suspects de comportements fascistes, de ragots et autres rumeurs dérangeantes....Stan (ou Rainer) prend la parole, s'adresse à la mère de Rainer (comme dans l'Allemagne en Automne) alors que des images circulent sur les trois écrans, celles de scènes où les femmes sont violées, déstabilisées, humiliées...Aujourd'hui encore....Décor des années 1970, tapis de poils, canapés, étagères vintage, tout contribue à nous plonger dans ces années où le terrorisme en Allemagne obsède l'actualité, les médias et les citoyens en proie à la peur, à la débandade, à l'indifférence ou à l'action en opposition à cette société en miettes, en décadence! Cinq comédiens, compagnons et complices de métier s'attellent à la tâche de rebâtir le monde tout en caricaturant les attitudes banales de la société commune. On trahit, on se méprend, on hurle, on vocifère dans l'urgence d'exprimer sa colère, son indignation, sur les migrants qui violent nos femmes, sur tout un genre qui ne devrait pas être et vivre dans la société. Nordey et sa bande réfléchissent, construisent un théâtre de l'urgence, du verbe incarné, de la désobéissance et c'est plutôt joyeux, sérieux et grave aussi quand au final le metteur en scène tient un discours séduisant sur l'attitude à adopter en cas de guerre civile, comme nous le vivons! Vigiles, je vous regarde, je vous traque, je vous hais ou vous aime? Que faire, quelle attitude, quelle posture adopter pour dénoncer et vivre son corps, unique bouclier, instrument d'existence et de révolte!
Judith Henry et ses compagnons de scène y sont remarquables de sincérité, de justesse, de rage et d'humanité. Un chanteur hoirs pair nous émeut, le tour est joué et le public ovationne cet exercice périlleux: rendre au théâtre sa fonction de fracasser le monde pour construire une autre planète nommée désir, amour et fraternité!
Au TNS jusqu'au 19 Mars
Apropos de:
« Les films [de Fassbinder] racontent des histoires dans lesquelles il aborde avec intelligence les tabous et les traumatismes de la société allemande, et montre surtout que le fascisme n’a pas disparu avec la fin de la seconde guerre mondiale, combien il perdure encore dans les années 50, 60 et 70 en Allemagne. C’est un type d’artiste bien particulier, une sorte d’intellectuel émotionnel. » (Falk Richter)
Après Small Town Boy, présenté en janvier au TNS, Falk Richter, auteur associé, revient pour la première création de Stanislas Nordey à Strasbourg. Après avoir découvert, en 2007, l’écriture de Falk Richter, Stanislas Nordey a réuni un groupe de comédiens pour travailler pendant six mois sur l’intégralité de ses textes. De là est né Das System, créé au Festival d'Avignon 2008. Ils ont alors décidé de bâtir ensemble My Secret Garden, dont le matériau de base était le « journal » de l’auteur. À cette occasion, ils ont inventé une manière d’écrire un spectacle « à quatre mains » : Falk Richter écrit et met en scène, Stanislas Nordey met en scène et joue. Bien qu’ayant chacun un rapport différent au plateau, les deux metteurs en scène ont en commun leur goût pour un théâtre « frontal » et une parole en prise directe avec les questionnements de la société 
contemporaine.
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