mardi 27 octobre 2020

"Concert de Musique mixte" : on dégenre et on mixe corps réel et ingénierie avec bonheur !

 


Cinq soli instrumentaux et vocaux joués dans le cadre du Colloque Journées d'informatique musicale 2020 (JIM 2020) à 18h à l'Auditorium de la Cité de la Musique et de la Danse !
Un régal acoustique et une réelle immersion dans la musique en temps réel : le temps de plonger dans des atmosphères singulières, étranges, de notre temps! Musiques mixtes, autant mathématiciennes, informaticiennes que générées par l' audace et le génie des compositeurs bien entendu !

🎵 Programme 🎵
• Daniel D’ADAMO, "Lips, your lips" pour voix et électronique (2010)
A Françoise Kubler d'inaugurer ce programme alléchant: gainée de cuir noir, cheveux dénoués, sobre silhouette, elle se meut dans cette musique mixte, avec souplesse, délectation et virtuosité de l'écoute: intérieure et remixée en temps réel, donc disturbant  sa propre perception: gageure autant mathématicienne, informaticienne que charnelle et vécue dans son propre corps. Un "avant chant" entre palais et sonorité de la dentition devenue parois résonnante et percutante, avant même le son qui se gliss entre les cordes vocales . Résultat étonnant que l'émission des susurrements, sifflements en écho, plein de surprises, mise en abime du son en ricochet, en éclats. Insectes et cigales surgissent en écho et peuplent l'espace.Galops rattrapés par la réverbération sonore en temps réel. Magie ou "combine", combinaison savante du hasard et de la composition stricte. Puis c'est la voix qui s’immisce, le souffle qui vibre et élargit le registre de la chanteuse magicienne. Des chœurs, une polyphonie nait de cette partition aléatoire: un solo magistral en compagnie de bien des vibrations amples qui se déploient et créent un univers singulier.Éclats et fougue comme partenaires sonores galvanisants. Françoise Kubler, habile, poétique, façonnant par son instrument une ambiance, une incarnation digne d'une "révolution de palais" !
 
• Finbar HOSIE, "Aflight of Touch" - création mondiale pour percussion et électronique (2020)
Seconde pièce, en solo à la percussion Mélaine Gaudin, habile manipulateur d'instruments hétéroclites dignes d'une batterie d'un savant maitre queu au piano!Un solo intimiste, contrasté selon les appuis sur les faces des percussions amplifiées alors en ondes et volumes, timbres et hauteurs différents. Du polystyrène effleuré comme source de sons à regarder absolument pour apprécier les origines sonoes de ce que nous percevons. Sensibilité à "fleur de peau", trajectoires de peau, de métal, de plastique: fuite et intimité du propos servi par un interprète habité, concentré, virtuose.
 
• Tom MAYS, "Le patch bien tempéré II" pour saxophone et électronique (2012)
Philippe Geiss en saxophoniste légendaire se taille la part belle: des sons de corne de brume amplifiés, des descentes en décrescendo habile et virtuose, puis des touches en saccades qui dégringolent. De la haute voltige récurrente qui jamais ne lasse: de joyeuses fantaisies sonores aussi pour égayer le tout, surprendre et séduire l'écoute. Décalages de timbres et autres gymnastiques sonores vertigineuses au programme!Un univers, une ambiance éolienne qui charme et enchante, fait embarquer pour un lointain voyage, loin du port d'attache.
 
• Nicolas Medero-Larrosa, "Smells like electricity" - création mondiale pour percussion et électronique (2020)
Sans doute le "clou" de la soirée tant ce solo de percussions interprété par Marin Lambert est un régal pour les yeux de façon concomitante avec la naissance du son. Des ses gestes amples, gracieux, larges ou précipités en petits battements percussifs fébriles, naissent des sonorités cosmiques, étranges, magnétiques. La réverbération présente le conduit hors de ses gonds: caresses sur le xylophone docile en éclaboussantes sonorités incongrues.Un Nirvana jouissif dans une antre volumineuse, amplifiée, présente, obsédante. Un mystère archéologique se crée, saisissant. Suspension du son linéaire, puis batterie amplifiée, façon morceau de bravoure standard; et toujours de très beaux gestes de peintre sur peau, des agitations fébriles du son sur le métal....Gestes aériens, sensuels, fouettés, battus digne d'un chef cuisinier aguerri ! Le corps comme médium et conducteur de génie, brillant qui donne toute sa richesse aux transformations et métamorphoses engendrées par la technologie.


• Philippe MANOURY, "Ilud Etiam" pour clarinette, voix et électronique (2012)
On retrouve ici le duo-tandem Kubler-Angster avec émotion tant les deux interprètes complices savent se jouer des péripéties vocales et instrumentales à "exécuter". Un chant séducteur, une richesse des sonorités engendrées par les sons et résonances acoustique, engendrent une atmosphère irréelle, volatile, cosmique en diable ! Un ferment prolixe pour la technique qui en temps réel magnifie, métamorphose les sons, les amplifie à l'envi sans les trahir. Le scintillement de l'environnement parcouru de résonance cristallines, clignotantes Des chœurs jaillissent, des carillons issus d'un beffroi imaginaire, des frottements sonores qui crissent: un climat réel s'installe, fugace pourtant, le temps de prendre l'espace: une œuvre de référence où la sorcellerie à une voix de bronze qui ravit et captive, où la clarinette médusée fait office d'instrument de la passion qui provoque effroi et attirance.
 
Un concert de "solo" bien entourés par la transformation, la prolongation poétique d'un instrumentarium technique "invisible",avoisinant une seconde composition en temps réelle qui brouille les pistes et déstabilise l'écoute au profit de la surprise, de l'émotion, du fantastique aussi. Tout un monde sonore, une planète qui se crée, s'invente à chaque instant .
 
Interprètes : Françoise Kubler (soprano) / Armand Angster (clarinette) / Philippe Geiss (saxophone) / Mélaine Gaudin (percussion) / Marin Lambert (percussion)

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