samedi 9 novembre 2024

ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE STRASBOURG & PAUL LAY TRIO DIRECTION WAYNE MARSHALL : une musique enthousiasmante

 


Pianiste aussi brillant qu’érudit, Paul Lay a pris l’habitude de faire entendre sa propre voix par le truchement de projets originaux confrontant notre modernité à de grandes figures du passé. A la tête de son trio et accompagné par l’Orchestre philharmonique de Strasbourg dirigé par Wayne Marshall, c’est cette fois au grand compositeur américain George Gershwin que Paul Lay rend hommage en proposant sa propre version de la célèbre pièce concertante Rhapsody in Blue ainsi que de quelques standards orchestrés par ses soins. L’Orchestre philharmonique de Strasbourg mettra ensuite en lumière le caractère visionnaire de deux pièces signées Kurt Weill (Symphonic Nocturne de Lady in the Dark) et Leonard Bernstein (Fancy Free) jetant également à leurs façons quelques passerelles inédites entre l’énergie du jazz et la sophistication de la musique symphonique occidentale.

 

photo Teona Goreci

Programme

• Première partie – Orchestre philharmonique de Strasbourg & Paul Lay trio

George Gershwin
- Rhapsody in Blue, orch. F. Grofé, 1942. Un chef d'oeuvre en matière de musicalité joyeuse, sensuelle, provocante et lumineuse. L'Orchestre semble jubiler, galvanisé par des sons clairs, enjoués. Tout chavire, balance, tangue et se fond dans une atmosphère radieuse. Ces moments de partage avec une salle comble et comblée par tant de talent et d'interprétation habitée, sentie, sont de l'ordre du miracle. Alors Gerschwin , on adore et sans se lasser, on se laisse aller à une écoute ravie et un enthousiasme non dissimulé.
- "Nice Work if You Can Get it et "It Ain't Necessarily So":deux Standards arrangés par Paul Lay laissent à l'interprète de génie une large marge pianistique d'envergure pour donner le frisson, aller au devant de toute attente musicale dans le plus grand respect de la partition d'origine. Et les deux rappels fulgurants nous enchantent par leur inventivité et l'audace du chef d'orchestre de se joindre en duo d'improvisation avec ce pianiste hors pair. Wayne Marshall et Paul Lay au diapason pour une interprétation aux anges, décrochant la lune de l'audace et de l'inventivité. Une façon de se rejoindre en compagnie des membres de l'Orchestre et du contrebassiste Clemens van der FeEn et du batteur Donald Kontomanou.

photo teora goreci


• Deuxième partie – Orchestre philharmonique de Strasbourg 

Kurt Weill
Symphonic Nocturne de Lady in the Dark, arr. R.R. Bennett

Que du bonheur à l’écoute d'un monument solide et vertueux de la musique américaine. Contrasté, entre volumes sonores puissants et discrète intervention de solistes dans les vents, cuivres et bois, cette oeuvre questionne les harmoniques et les divergences musicales au sein d'un tout remarquablement composé, vif, entrainant, burlesque et fantaisiste. Une ambiance et atmosphère de fête s'en dégage, salvatrice et bienfaisante.

Leonard Bernstein
Fancy Free, suite de ballet. Alors ici, on danse, swingue, allègrement au choeur de la musique chaleureuse et enivrante. . En fermant les yeux, c'est à Jerôme Robbins que l'on songe avec ses marins bondissants et sa verve chorégraphique. Un ballet "concertant" c'est original et plein de nostalgie!


Au PMC le 8 NOVEMBRE



En coproduction et coréalisation avec l’Orchestre philharmonique de Strasbourg

Soirée d'ouverture DU FESTIVAL JAZZDOR parrainée par la Ville de Strasbourg
 

FR + GB + NL + US
Orchestre philharmonique de Strasbourg | Wayne Marshall direction | Paul Lay piano | Clemens van der Feen contrebasse | Donald Kontomanou batterie 
 

 

mercredi 6 novembre 2024

"Inconditionnelles" ; s'lamenter en édulchorégraphie.

 


Chess et Serena s’aiment. Malgré les règles et les interdictions de cette prison pour femmes où elles partagent la même cellule, elles se sont trouvées, confiées et ont atténué leurs peines. Mais le jour où Serena apprend qu’elle va être libérée, comment continuer à vivre séparées l’une de l’autre ? Dorothée Munyaneza s’empare de cette pièce bouleversante de Kae Tempest dont elle signe la traduction française. La langue et les chansons originales du poète rencontrent le mouvement et le regard de la chorégraphe pour nous emporter dans une histoire d’amour et d’amitié où pulse la possibilité d’être libre, d’être soi, sans condition.  


Deux femmes, complices, soeurs ou fratrie, amantes, amies...Le cadre est celui d'une cellule plutôt "ouverte", celle d'une prison où elles purgent une peine. Noires de peau, sororité renforcée par la taille, le costume, style de salopette de travail très designée. Le dialogue s’instaure quasi joyeux, plein de verve et de questionnement. Le sort de l'une sera la rédemption par la musique. Elle est "choisie" pour ses potentialités vocales et physiques. Par une pédagogue vivace, sorte de musicothérapeute,un tantinet caricaturale munie de sa valise pédagogique : une boite à rythme de moindre qualité qui déverse des syncopes faciles. C'est cela que lui propose cette femme aux cheveux blancs fabuleux, elle aussi en tenue de labeur. Censée redonner confiance en elle à la belle prisonnière, cette "geôlière" fait office de prêtre salvateur; libérateur. Mais celle ci se cabre, se rebiffe et n'accepte que dans sa clandestinité le deal. Jouer, chanter dans le noir et l'obscurité pour masquer des imperfections liées à son "ignorance" de la grande musique, ou solfège. La pédagogue s'entête à lui faire passer le message de résilience. Sa compagne, amie, amante l'encourage, la stimule et au bout du compte,  quasi deux heures de représentation durant, elle nous délivre un show vocal plus ou moins convaincant. Le slam est un art difficile, rythme et battements du corps, du coeur, des cordes vocales, du palais et cela ne s'invente pas.


Les deux protagonistes bougent, dansent, se meuvent sous la direction avisée de la chorégraphe Dorothée Munyazena qui s'empare également de la traduction des textes de Kae Tempest. Le décor judicieux préfigure le monde carcéral avec de longs pendrillons qui peuvent dissimuler les gardiennes du temple, comme des "jalousies", des stores où le son passe au travers. Au sol, un damier qui se délite, désignant un espace quadrillé, scandé, géométrique oppressant. Une marelle qui ne conduit pas au ciel...Grilles et enfermement dans les pas, transcendée par la danse qui échappe à cet espace restreint.Pas de secret ici, tout est filtré et retenu et la narration entraine dans une temporalité, unité de lieu, de temps qui frôle le drame. Mais la survie est assurée par la musique qui redonne des ailes à l'oiseau prisonnier dans sa cage pas vraiment dorée.Les comédiennes au plateau flattant cette langue édulcorée avec grâce et volonté, détermination et engagement.Au sol puis en bandes suspendues, les textes manuscrits des chansons, comme autant de dazibaos...

Sondos Belhassen, Bwanga Pilipili, Davide-Christelle Sanvee, Grace Seri pour servir une oeuvre généreuse et engagée.

Au TNS jusqu'au 15 Novembre

mardi 5 novembre 2024

"My (petit) Pogo" Fabrice Ramalingom R.A.M. Gare à la récré!

 


Quelques années après My Pogo, Fabrice Ramalingom décide de retraverser les intentions de cette pièce en l’adaptant pour le jeune public. L’ancien interprète de Dominique Bagouet y dévoile, avec humour et légèreté, la boîte à outils de la fabrique de sa danse. Tout débute comme une conférence avant de glisser, l’air de rien, vers le spectacle qui se joue. En passant d’abord par l’explication des rouages créatifs, le chorégraphe et ses trois danseurs font œuvre d’une pédagogie célébrant l’écriture du mouvement dans ses rouages les plus intimes. My (petit) Pogo est traversé par la question de l’être ensemble et la difficulté à trouver sa place dans un groupe. Autant de thématiques vivaces chez des enfants qui découvrent, étonnés, la liberté et la rugosité d’un pogo à un âge où ils interrogent le monde l’esprit ouvert, avant la rébellion de l’adolescence. La graine plantée dans leur esprit pourra ainsi germer et laisser éclore tout leur imaginaire.


Cour de récréation
Un petit bijou précieux pour explorer le processus de création chorégraphique d'une petite compagnie de quatre danseurs qui se présentent comme tels, faisant de nous des témoins bienveillants d'une pièce qui s'invente, se trouve et se construit selon l'inspiration de chacun et l'organisation de toutes des découvertes gestuelles convoquées lors de cette démonstration en temps réeL. C'est gai et ludique, intelligent et rafraîchissant. On sent combien l'inventivité, la responsabilité et l'écoute sont les moteurs d'un travail partagé, vécu comme un vaste terrain de jeu où chacun trouve sa place et considère celle de l'autre. Comme un match performant , singulier, où il n'y a rien à gagner sinon la joie de danser.

A Pole Sud les 5 et 6 Novembre