samedi 24 mars 2018

"Musiques éclatées": un programme éblouissant : L'Accroche note et Hanatsu Miroir s'éclatent !

Le 24 mars 2018, vous pourrez suivre un véritable parcours musical dans le centre ville de Strasbourg. Dans une dizaine de lieux aussi différents que l’Aubette, la Librairie Kleber, l’Eglise Saint-Pierre-le-Vieux ou encore l’AEDAEN Galerie, Elektramusic proposait plus de dix concerts gratuits qui ont  permi de découvrir la richesse, la variété et la vitalité des pratiques musicales strasbourgeoises. Avec à la fois des musiciens confirmés mais aussi de nombreux artistes émergents, il fut dévoilé les nombreuses facettes de ces disciplines dynamiques et le foisonnement musical des ensembles strasbourgeois.Se laisser prendre par sa curiosité et venir découvrir ces musiques classiques, contemporaines et jazz qui ont investi Strasbourg tout au long de ce samedi 24 mars, en toute simplicité.




L'Accroche Note: "En écho" : et Ange et Démon !


Françoise Kubler - chant
Armand Angster - clarinette
Frédéric Apffel - assistant musical

.La confrontation – ou le mariage – de la voix et de la clarinette a été spontanée, dès l’invention de l’instrument au XVIIIe siècle. Que les compositeurs du XXIe siècle écrivent encore pour cette formation prouve qu’une telle union n’était pas seulement anecdotique. De plus, l'outil électronique démultiplie cette fusion. L’actrice et le danseur. Depuis Mozart, il semble que la clarinette entretienne un rapport privilégié, presque amoureux avec les voix ; tantôt elle est leur double, leur écho, tantôt leur miroir. Non seulement elle possède la même souplesse infinie, mais encore ses registres – un grave sombre et profond, un médium éloquent ou intime, un aigu brillant, parfois diaphane – sont, avec extension légèrement supérieure, ceux de la voix humaine et personne ne s’est trompé sur le sens dramatique de la grande phrase lancée par la clarinette dans l’ouverture du Freischütz

Et ange et démon !

Quand Françoise Kubler et Armand Angster se retrouvent , à deux, dans la belle salle blanche de la librairie Kléber, c'est à "un monument" de la musique d'aujourd'hui,érigé de façon bien mobile, à deux solides cariatides que l'on a à faire! Elle est de noir vêtue, rayonnante, lui, en garçon ébouriffé et sympathique. La proximité avec le public opère dans la décontraction .
Ouverture du programme avec une oeuvre écrite pour la chanteuse, dédicace, de  François-Bernard Mâche :" Kengir pour voix et sons fixés". Gravité et recueillement dans une langue peu commune, le sumérien. Tension, surprises, retenues de la voix évoquent toute une gamme de sentiments féminins,de touches matriarcales. La voix est profonde, douce ou forte et se plie au jeu, sobre et émouvant de l'artiste interprète, comédienne inspirée. Intuitive.
Succède, après un clin d’œil sur la rareté et curiosité de la partition colorée et très graphique, le "John Cage" attendu: " Fontana Mix pour soprano, clarinette et sons fixés": une oeuvre surprenante, hallucinante, pleine d’embûches, de curiosités sonores, de bruits et de résonances inédites.Belle surprise que cette ovni où l'on songe au sourire malin de son auteur, de son humour.Les deux interprètes s'en donnent à cœur joie et franchissent les obstacles avec aisance et majesté!
Vint la pièce de  Nicola Resanovic : "Alt.music.balistix pour clarinette et sons fixés", où Armand Angster donne toute sa félicité d'artiste au service de son instrument. Tel un charmeur de serpent, il virevolte dans ce monde bigarré de sons de lointaines contrées orientales et régale l'auditoire de timbres pluriels et colorés.Toujours avec distance et humour, les deux protagonistes présentent l'oeuvre suivante celle de  Philippe Manoury :" Illud Etiam pour soprano, clarinette, et sons fixés". Encore une belle dédicace au couple de la part d'un auteur contemporain, pour leur très riche répertoire! Les voici mi anges, mi démons dans une légende de sorcellerie, des ailes dans le dos, de la rage et de la musicalité dans le souffle, le corps et la voix.Postures et attitudes recherchées pour évoquer les formes sculpturales des sorcières, anges et démons.Le pilier des Anges assailli par des sonorités démoniaques


Un programme bien "relevé" pour une occasion singulière, dans un lieu non "dévolu" à la musique contemporaine: cela aussi se nomme un "savoir faire" inégalé de la part de ce duo-couple complice, animateur et muse de tant de compositeur, détenteurs d'un "patrimoine" musical contemporain hors norme!
Leur talent, c'est aussi le savoir être ensemble avec le public, plein d'humour et de distance, de finesse et avec beaucoup d'enthousiasme Nos deux "Lustigs" (joyeux) sont inclassables !



Hanatsu Miroir
"Création japonaise": à vous clouer le bec !

HANATSU miroir dévoile 3 facettes de la création contemporaine japonaise où l’on cultive les reflets d’un bagage culturel au travers de nouvelles identités, au fil des générations, en de multiples écoles. Trois compositeurs que les parcours contrastés ont amenés vers une recherche du son, de la forme
et de l’énergie, nous emmènent dans leurs univers singuliers. Il y a le compositeur Joji Yuasa, pionnier de l'école expérimentale
dans les années 1950 au sein du Jikken Kobo. D'autre part, deux
représentants de la nouvelle génération témoignent d’esthétiques parallèles : Malika Kishino et Kenji Sakai, tous deux formés dans des lieux phares de la musique contemporaine (CNSMD de Paris et de Lyon, IRCAM, Villa Médicis, casa Velasquez…).
Malika Kishino se positionne dans la continuité des travaux de son maître Yoshihisa Taïra, compositeur naturalisé français, élève de Jolivet, Dutilleux et Messiaen mais dont l'écriture est fortement inspirée des rituels traditionnels japonais.
Helmut Lachenmann reconnaît en Kenji Sakai une parfaite maîtrise compositionnelle et une grande virtuosité dans la gestion du son et du temps. Sa musique, imprégnée de clarté et de luminosité, développe un style hautement personnel qui aborde, sans complexe, une certaine forme de légèreté.
Son dyptique Howling/Whirling, commande d'HANATSU miroir, a été créé par l'ensemble à la dernière Biennale de Venise et s'envolera très prochainement en tournée au Japon.

Au programme dans la salle Ponnelle de l'Opéra du Rhin et en ouverture, "Monochromer garten VII" de Malika Kishino pour flûte et percussions:léger frottement des percussions, mugissement pour annoncer la venue de la flûte, fine et vivace partenaire, de vent et de souffle animée, discrète compagne de jeu dans cet univers de jardin japonais.Comme un filtre de sons aigus, de tamis des émotions musicales, la flûtiste partage des sons ténus, rares, vif argent, puis fait corps avec cette étrange créature sonore, la flûte contrebasse, corps singulier comme un immense bras retourné, une architecture qui l'enveloppe et la protège. Ce tranquille paysage sera troublé par le souffle haché, les accélérations, subites , le vrombissement des percussions. Un gong subtil éclaire le tout de sa présente vibratoire intense ou discrète. Déchirure des sons de la flûte, en un combat avec l'instrument.Le calme feutré réapparaît à l'horizon de ces contrées sonores, qui tintinnabulent, précieuses au final dans des espaces dessinant des visions lointaines .Multiphonies écrites par le pionnier de la musique contemporaine japonaise.

Puis s’enchaîne logiquement, se glissant sans transition,"Clarinet solitude" de Joji Yuasa pour clarinette seule: une oeuvre sobre et envoûtante qui appelle une écoute intense et une communion en empathie profonde avec l'interprète.

Avec "Howling/ Whirling" c'est Kenji Sakai que l'on découvre, oeuvre pour flûtes, clarinettes et percussions. Lourdeur d'une démarche sourde, martiale pour préambule, des sons bizarres, presque chantés; le trio tremble et vibre. Comme un moteur qui démarre, tout va bon train, avance. Suspens d'une narration des sons qui évoquent paysages et dynamiques incongrues, étonnantes. Ça courre, ça galope dans un rythme enjoué, coloré, un tempo ascendant enivrant ! Des sonorités de scie, des bruitages, des envolées sonores étayent le son, déclinent une ambiance sous une lumière rouge, tonique. Matricielle. Le passage à la clarté blanche, plus légère, évoque comme une balade dans une atmosphère sylvestre ou aquatique. Oiseaux dans volière ou oisellerie. Quelques sourdines, des frappes sur les marimbas de bois, le halètement des vents, du souffle de ses singulière formes des clarinette et flûtes contrebasse,des sons d'harmonica et le tour est joué. Les trois instruments discutent, entretiennent des propos joyeux, légers, à vous clouer le bec!
Dans un train d'enfer sans halte sur le quai, les rouages filent en répétitions, avancent de concert, entraînant dans leur sillage reprises et répétitions à l'envi.
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Avec le concours de l'Opéra du Rhin dans le cadre de Arsmondo sur le Japon l 24 Mars 2018

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