Dans la ville noire, un décor mural de coron ou de cité laborieuse, un jeune homme, à table avec un personnage, mannequin incarnant son père, soliloque, raconte leur vie; de fils de père, de leur relation conflictuelle, de la vie d'un homme simple aux prises avec le travail, l'éducation de son fils, la présence à ses côtés d'une femme qui ne cesse sa vie durant de l'attendre...Ce papa qui danse, tout le temps, partout, en homme et qui ne l'avoue pas, tant cela pourrait faire "féminin"! Lui qui pourtant se déguise en majorette avec tous les apanages du genre!
Avec des cartels, des bribes de musique, un tapis orangé, les sequences se succèdent et le nombre de pères augmente sur les côtés de la scène, dans toutes sortes de positions de fatigue, d'épuisement. Stanislas Nordey tient la scène deux heures durant, lui, le fils qui raconte, prend parti contre son père, le fustige, souhaite son absence, sa disparition physique de son espace.
L'attente, l'impuissance de sa condition de travailleur, pourtant en porte à faux avec les préceptes de soumission, le condamnent à subir. Un corps masculin qui résiste à l'autorité pourtant, qui se heurte à l'homosexualité, reproduit la vie de ses parents, les imite et passe le relais à son fils.sans correction ni reconstruction.Changement de décor, toujours gris devant des tentures plastiques: c'est la scène de la vengeance et de l'évocation du frère, ennemi !
Debout, toujours, ce fils conte le politique responsable des déboires physiques faits sur le corps de son père: c'est la faute à Macron, Hollande ou Sarkozy, si son père s'échine le dos, se courbe sous le poids du travail en surplus et si au final il se fracasse le dos. Il neige sur ce paysage mental glacial qui fait froid dans le dos, tétanise par la cruauté des propos, la véracité des circonstances.Sol blanchi par les flocons qui ensevelissent les corps couchés, rompus des mannequins, des pères.Perdants, humiliés, "assistés" cependant comme des faignants, fainéants qui profitent: avec les 100 euros de prime pour partir en famille à la mer au lieu d'acheter les fournitures scolaires nécessaires à l'apprentissage de la soumission et de la docilité. Le politique est bien là, les dominants abusent, nommés par leurs noms de ministre ou de président auxquelles sont rattachées les lois qui détruisent le père, sa santé, son existence.
Alors au final, une révolution serait solution à cette quête d'amour filial, de considération, de respect dont manque cruellement la société tant inégale de ces temps.
Stanislas Nordey en prêcheur unilatéral, boosté par un texte plutôt sobre et sans chichis, manquant parfois de poésie ou de recul, le temps de respirer un autre air: celui de l'espoir et de la dignité!
Au TNS jusqu'au 15 Mai
Édouard Louis est écrivain. Il a publié aux éditions du Seuil En finir avec Eddy Bellegueule en 2014 etHistoire de la violence en 2016 – roman dont des extraits ont été lus au TNS par Stanislas Nordey en février 2016 dans le cadre de L'autre saison. En 2013, il a dirigé l’ouvrage Pierre Bourdieu : l'insoumission en héritage, paru aux Presses universitaires de France – où il crée et dirige la collection "Des Mots". Il a écrit Qui a tué mon père à l’invitation de Stanislas Nordey ; le texte est paru en mai 2018 aux éditions du Seuil.
Texte Édouard Louis
Mise en scène Stanislas Nordey
Collaboratrice artistique Claire ingrid Cottanceau
Avec Stanislas Nordey (distribution en cours)
Lumière Stéphanie Daniel
Scénographie Emmanuel Clolus
Musique Olivier Mellano
Mise en scène Stanislas Nordey
Collaboratrice artistique Claire ingrid Cottanceau
Avec Stanislas Nordey (distribution en cours)
Lumière Stéphanie Daniel
Scénographie Emmanuel Clolus
Musique Olivier Mellano
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