vendredi 1 juin 2012

"Passo" de Ambra Senatore: un quintette ébouriffant!

L'Italie est bien représentée, durant cette édition 2012 de "Nouvelles" danse-performance à Strasbourg!
Par les sœurs Sagna, bien sûr, par Chiara Gallerani et Gianfranco Poddighe avec leur duo nostalgique "Dans l'air du temps" et à présent par Ambra Senatore, chorégraphe venue de Turin à multiples facettes.
Dans le silence, une danseuse apparait, vêtue d'une petite robe moulante verte, cheveux noirs coupés, frange à l'appui.
Elle danse avec de petites touches tétaniques, à la Dominique Hervieux. Bondissante, segmentée, alerte, avec son phrasé  sec ou langoureux selon le rythme engendré par sa petite musique intérieure. Son clone apparait, identique, femme, perruquée donc, comme elle, semblable à l'autre, à l'identique.
Dans le silence toujours, sur le plateau nu, elles évoluent dans une gémellité surprenante, à l'unisson, danse chorale incessante. C'est bluffant!
Elles interchangent les rôles, parviennent à créer un distinguo, une différence malgré ce leurre avoué. Fantaisie, humour, distanciation? On est devant le fait accompli en train de se questionner sur altérité!
Apparait une troisième "larrone", vêtue et perruquée de même. Elles entonnent leurs gestes, les confondent, les emmêlent, les façonnent à l'envi dans une démarche joyeuse et décontractée. Mine de rien, pince sans rire, malines et coquines. A deux, à trois, puis à quatre et comble de mélimélo, les voilà cinq!
Toujours en petites robes vertes mais l'ambiguïté des sexes se fait jour. Deux hommes travestis, trois femmes? Le voile est levé sans beaucoup de surprise en observant les corps charpentés des deux danseurs avançant "masqués".
C'est drôle et intriguant, plein de verve et de franchise, malgré les combines et combinaisons qui cherchent à décaler, éconduire le spectateur, sans cesse bousculé. Ça danse énormément et respire la chorégraphie sans faille, construite et répétée pour un espace vibrant et libre, vaste et foissonant.
Du bel ouvrage de "dame", comme un passage, un col à franchir, un va et vient trouble entre doute, surprise et émerveillement.

jeudi 31 mai 2012

Damien: il en connait "un rayon" en danse et mode à la librairie Kléber!

Dans notre capitale européenne, la librairie qui fait acte d'initiative en matière d'ouvrages sur la danse, c'est bien celle de la place Kléber!
Mais il n'y a pas de miracle!
Qui se cache donc derrière ce rayon très d'actualité, section ARTS au deuxième étage?
Damien Brem, un jeune homme altier, aimable et à l'écoute des moindres caprices de ses clients. (de sa cliente) et toujours prêt à devancer vos vœux, désirs et à anticiper sur les sorties d'ouvrages des éditeurs, petits ou grands. Pour preuve récemment, il déniche "Giselle" de Wilfride Piollet et Jean Guizerix (des habitués de la librairie Kléber pour leur complicité avec René Char), "Résidences" de Quentin Bertoux et Bernard Noel pour des photos de l'Echangeur, "Malandin+ Houeix" éditions maison, et bien d'autres ouvrages philosophiques, même des revues où il déniche des articles sur la danse!Il se "livre" et nous "délivre" ses secrets de libraire!
Ce qui préside à ses choix: l'actualité des parutions, bien sûr puisqu'une librairie, ce n'est pas un centre de documentation ni une bibliothèque.
"Ici, ça tourne, ça circule et mes rayons changent bien sûr selon les arrivages, les éditions, les documents soit qui nous parviennent, soit que je commande dès que j'en ai l'écho"
C'est aussi la mode qui le passionne: sa grand-mère, couturière lui a "passé" ce gout des beaux tissus, des formes et surtout de "la charpente", de l'architecture des vêtements, comme celle des corps!
La danse qui a souvent croisé Yves Saint Laurent, Jean-Paul Gaultier ou Christian Lacroix, le questionne sur le sujet du costume. Balanciaga, Courrèges lui ont enseigné ce don du choix de la beauté, de la rareté. Et surtout d'une allure assurée, très en adéquation avec sa pensée; Il bouge bien aussi notre libraire et ses mouvements , sa façon de s'habiller attestent d'une véritable passion pour le maintien, le "service" et la gentillesse d'un accueil toujours souriant, à l'écoute.
Librairie Kléber
1 rue des francs bourgeois
67000 STRASBOURG
www.librairie-kleber.fr

"Ad Vitam" de Carlotta Sagna: solo pluriel

Carlotta Sagna, en résidence avec Caterina à Pôle Sud à Strasbourg durant la saison 2011/2012 signe ici un solo, parlé, conté, dansé, inspiré quelque part aussi par son travail de terrain avec les participants amateurs aux divers projets de proximité de résidentes!
Elles ne chôment pas les sœurs Sagna et Carlotta s'empare ici d'un texte inspiré des carnets signés de sa mère Anna et en propose une adaptation très personnelle, sobre, maline et profonde.
Seule sur scène, vêtue comme au quotidien elle campe une femme qui questionne la raison, les habitudes et les choses acquises et bien rangées. Comment pense-t-on?
A-t-on besoin de cet harnachement de clichés pour vivre, bouger, parler, communiquer?En bref, danser, semble ce qui lui réussit le plus dans une gestuelle mesurée, précise, vive et argentée.
Elle est gaie, intelligente et mordante, charmeuse, enjôleuse juste ce qu'il faut pour séduire et non manipuler.En un mot, elle danse et en final son manège de déboulés très contemporains, fuguant  dans l'espace comme une musique de parade se révèle l'instant brillant qui atteste d'une présence remarquable."Normale", ou folle, au comportement "pathologique" ou vraiment incarnant la vie qui se fabrique dans l'instant.Pas de tricherie, ni de truc ou effet dans cette prestation, incarnée au plus près de la chair. Décalée, désaxée, sa chorégraphie emplit le plateau au point de l'envahir et d'y laisser la rémanence d'une mouvance gracieuse, rieuse et éclairée.
Quant la raison donne droit au corps, quand le corps résonne de pensée, voilà le bel ouvrage de Carlotta, ad vitam, eternam!