vendredi 28 septembre 2018

"Les Métaboles": "Io" resplendissant Nono!




Retour attendu à Musica du chœur Les Métaboles de Léo Warynski, lequel s’empare pour la première fois de la partition du Maître italien Luigi Nono avec la passion qu’on lui connaît.

L'église St Paul, pleine à craquer pour ce rendez-vous céleste , cette oeuvre de Nono, "Io, frammento da Prometeo" de 1981
Un personnage qui va hanter l'oeuvre, errant à l'envi dans cette atmosphère planante et recueillie, servie par des ensembles et solistes remarquables.
La portée des voix du choeur, six hommes, six femmes, très claires, angéliques, en écho vibrant, est sidérante. De longues tenues , de plus en plus ténues, vibrent à l'infini, portées par une acoustique gratifiante de l'église.Une flûte traversière, une clarinette étaye ces chants, souffle et présence discrète, ponctuant les voix angéliques.Les sopranos solos, incroyables performeuses des notes sur aiguës, campent mystère et inquiétude. Incarnent l’irréel, le beau, le son inouï, resplendissant!
Puissants mouvements élévatoires du chœur mixte, incroyable performance dans la durée de ces touches, ses masses sonores qui se complètent, s'unifient, en osmose.
Les timbres se frottent, dissonent, le volume en contraste, enfle ou se perd à l'horizon de l'espace musical.
Hypnotique et subtile écoute de la part du public réuni pour cette cérémonie historique, la reconstitution d'un chef d'oeuvre comme l'expose au final, le chef dans une grande émotion partagée!
Infime insert de la technologie également pour soutenir les soins acoustiques, bien vivants!
Un moment musical unique à saluer!

A l'Eglise St Paul ce jeudi 27 Septembre


"Lonh" RN 7 : es lohnt sich ! A l'aune de la danse....le son, le texte, le corps-texte.


Depuis la civilisation mésopotamienne de Sumer au moins, l’amour a sa poésie. Il est l’un des plus grands pourvoyeurs de lyrisme de l’histoire de la civilisation humaine. Avec le passage de la poésie au chant, la musique prend corps, et il paraît tout naturel que les trois danseuses/chorégraphes et la scénographe de la compagnie RN7 aient souhaité prolonger le corps chantant de Françoise Kubler par des corps chorégraphiés pour investir l’espace scénique.
LONH est une pièce chorégraphique créée en étroite collaboration avec une artiste lyrique et une scénographe.
Elle propose un dialogue entre les matières des corps dansants, du chant et de l'écriture spatiale, à travers les oeuvres musicales contemporaines "Lonh" de Kaija SAARIAHO et "Kengir" de François-Bernard MÂCHE.

Voici pour les "notes d'intention" !
Sur le plateau, la chanteuse, de dos, de noir vêtue, trois femmes l'entourent et sa voix les anime de mouvements très lents, harmonieux: en silhouettes, noires, découpées par la lumière, leurs gestes sont sobres, nuques et corps cambrés, en alternance, les regards vers les cieux.i
Tandis que Françoise Kubler, un pupitre suspendu devant devant elle, incarne le son, la mélopée, les textes chantés, de la musique de François Bernard Mâche et Kaija Saariaho. Diction et jeu engagé, comme l'énergie douce qui sourd des corps des trois danseuses. Des cordes tombent sur la scène, liens et liaisons métaphoriques de la musique-danse, de la danse faite musicienne.
Déroulée comme un serpent ou par la suite, nid enroulé, chargé de loger la verticalité du chant ou la nidification du geste primitif. De beaux profils mesurés, posés, des courses ou des arrêts ponctuant les divagations des personnages, semés sur la scène, chevelure naturelle prolongeant l'énergie sauvage ou tendre de la gestuelle. Un trio à  l’unisson rassemble les corps dispersés dans l'espace, alors que la chanteuse , solitaire et belle, psalmodie de sa voix tonique et assurée, les sons et mots de sa partition, guide, qu'elle quittera pour se livrer seule, nus pieds dans l'espace. Alors plus indécise et chancelante, elle se meut sur le plateau, esquisse quelques gestes qui ne seront jamais de la danse à l'image de ses comparses.Du "poussez-tirez, du relâché dans la danse en font un exercice de style sobre et vécu de l'intérieur.De belles accélération dans les déplacements, à contre courant des accents ou des rythmes dictés par la ligne vocale. Puis plus de chant: souffle et respiration font corps, scansion des pas, audibles dans le silence, comme une prolongation des rythmes.
Directions, arrêts, immobilité....se succèdent. Elles ôtent lentement le haut de leur costume noir, étirent la matière du tissus en autant de sculptures plastiques, étirées, détirées comme un geste d'échauffement, lent. Des sculptures vivantes de Daniel Firman se dessinent en mémoire.


En position de coureur, en arrêt sur image, la danse ponctue la musique sans jamais la questionner ou l'importuner.
Libres, autonomes et pourtant "reliées" par ces cordes, métaphores de leurs liens, de leurs nœuds aussi qui semblent parfois entraver le mouvement, plutôt que de le servir.
Belles images plastiques mouvantes d'où vont surgir des chevelures hirsutes comme des figures africaines de danseurs fous. Le trio s'anime, en transe, les parures virevoltent tourbillonnent au final, alors que la chanteuse en quittant sa balancelle noire comme les cordes, se joint à cette mouvance étrange.En couleurs, rose, bleu, jaune, les figures s’effacent, le chant de la cantatrice, formidable émission de sons en langue étrangère qu'elle susurre ou éructe "par cœur", par "corps" , s'estompent.
Les nids, nœuds de cordes noires, flexibles et enrobantes, demeurent au sol, témoins et reliefs des péripéties dessinées en rémanence dans nos mémoires visuelles.
Il fallait oser creuser ce sujet cher à Françoise Kubler, les liens probables entre chant, voix, émission et gestes chorégraphiques.Sa voix guidant les incarnations futiles et vibratiles du geste dansé, la danse donnant du poids et de la gravité, de la densité au geste vocal: sur la corde enroulée, cordon ombilical entre les deux disciplines, si loin, si proches ! Plus que jamais, les textes chantés, habités magistralement par une artiste faite pour cela, incarnant matière sonore et corporéité avec brio et simplicité.

Au TJP ce jeudi 27 Septembre.

Chorégraphes : Lena ANGSTER, Marine CARO, Jessie-Lou LAMY-CHAPPUIS
Chant : Françoise KUBLER
Scénographie : Mathilde MELERO
Création lumière : Suzon MICHAT
Pièces musicales : "Lonh" de Kaija SAARIAHO
"Kengir" de François-Bernard MÂCHE

jeudi 27 septembre 2018

"Cosmos 1969" :fil d'Ariane, fusée en décollage immédiat !


À quoi pourrait ressembler la bande son de la mission Apollo 11, vers laquelle les yeux de centaines de millions de spectateurs étaient rivés en cet été 1969, et au cours de laquelle ce «petit pas pour l’homme» allait représenter «un grand pas pour l’humanité». Croisant les souvenirs lointains du garçonnet qu’il était alors avec sa sensibilité d’adulte, Thierry Balasse nous en propose une version très personnelle et nous embarque pour un voyage musical en neuf stations, entre musique électroacoustique et rock progressif, avec une escale en terre élisabéthaine.

Un spectacle fusionnel, dit "total" pour ce show évoquant la conquête de l'espace, la quête de l'apesanteur: échappatoire salvateur à l'humaine condition et à la banalité du terre à terre, du commun des mortels.
Thierry Balasse, cravate et costume noir, chemise blanche au commandes du vaisseau spatial pour une odyssée de l'espace incongrue, drôle, saisissante, ravissante!
Ils sont cinq musiciens, en "bleu" de travail, combinaisons bleu ciel oblige, pour évoquer cette épopée mondiale: le premier pas sur la lune, le défi du pouvoir de l'homme sur les planètes!
Rien que ça, pour convoquer Pink Floyd, Beatels et autres "canons" de la musique "nouvelle"planante, King Crimson ou Bowie!
Un fond de scène lumineux qui bouge et oscille à foison et une funambule improbable, Fanny Austry qui à elle seule occupe l'espace, l'air et l'éther couchée sur sa spirale ascendante, agré de fer, planté en milieu de scène.
Elle hypnotise, capter et rapte les esprits, les yeux et les oreilles de sa présence discrète, quasi continue de l'oeuvre spectaculaire en diable!
Emouvant et beau, sur le fil, l'opus va bon train, très "vintage" sur ce fil conducteur, fil à plomb ancrant corps et musique.
 Le vent, le souffle en introduction, prologue à ce voyage au long cour du sol luisant à la stratosphère évanescente.
On rêve, on plane à l'envi.
Lévitation sur tige grimpante en spirale pour boussole, tel un chat perché ou une Fantômette sur les toits, dans l'espace, celle qui veille à l'équilibre et aux dangers de cette aventure, est référente, rassurante malgré sa position périlleuse.
Allongée, incertaine, irréelle vision à bascule, madame rêve et dans les fonds sous-marins de l’amerrissage, on se pose en épilogue, on reprend pied et souffle, on quitte le navire de l'espace et l'on chemine, léger, laissant la Nasa faire le reste...Aux consoles, tout s’éteint, la magie est terminée, le songe fera son chemin.

Au Point d'Eau à Ostwald ce mercredi 26 Septembre