dimanche 12 décembre 2021

Récital Schubert-Chopin avec Alexandre Tharaud : romantique et lumineux, virtuose et généreux!

 


Le premier préfigure le romantisme germanique. Le second incarne le romantisme parisien. L’un et l’autre fréquentent les salons, partagent leur musique loin des grandes salles de concert. Tous deux ont confié au piano leurs états d’âme. 

 Franz Schubert
Impromptus, op. 90 et Rosamunde D.797 (extrait: Andantino)

 Schubert compose une première série de quatre impromptus durant l’été 1827. D’une liberté proche de l’improvisation, ils sont lyriques, fluides, limpides, charmeurs, et laissent parfois transparaitre l’inquiétude d’un homme jeune à qui il reste moins d’un an à vivre. La musique est tranchée, forte et puissante sous les doigts du pianiste virtuose qui passe de l'allégresse  à la tragédie avec une aisance et un ressenti incroyable. Sonorités résonnantes et heureuses, fugaces comme ce sentiment de vie et de mort qui accompagne la ligne éditoriale de ce récital.

Frédéric Chopin
Sonate n°2 « Funèbre »

 Au cours de l’hiver 1839, alors qu’il revient d’un voyage décevant à Majorque avec George Sand, Chopin écrit sa deuxième sonate autour d’un mouvement préexistant, une Marche funèbre. Ce moment terrifiant est le point culminant d’une œuvre grandiose dans laquelle il transcende la nostalgie de l’exil et les inquiétudes dues à une santé fragile. Il dévoile aussi des instants poétiques et lumineux. Écrire de la musique pour évoquer la mort, le rapport à l'au-delà, fut l'intention de Chopin: une mort incarnée par l'âme qui s'élève vers les cieux, plutôt qu'une musique "funèbre", entre un passé enchanté et un présent  sombre, un futur qu'on imagine dramatique.

  Dans une belle et élégante scénographie-lumière à la Hans Hartung ou Raoul, tracés vifs de sillons bruns lumineux Ubac ces deux monuments du répertoire pianistique sont magnifiés par Alexandre Tharaud, en résidence à l’Orchestre Philharmonique de Strasbourg cette saison. Et ce sont trois morceaux que nous offre ce merveilleux pianiste en rappel: "La liste de Schindler" de John Williams, la danse des sauvages des "Indes Galantes" de Rameau" et une "Sarabande en ré mineur" de Robert De Visée.

  Cité de la musique et de la danse - Auditorium dimanche 12 Décembre 17H

jeudi 9 décembre 2021

"Quai Ouest" : Fak'e news ! Hangar de la peur et du rachat des corps étrangers.

 


Koltès situe l’action de la pièce dans une zone portuaire abandonnée. Un administrateur de biens, Koch, conduit en Jaguar par sa secrétaire Monique, choisit cet endroit pour mourir. Il se jette à l’eau, mais le voilà aussitôt repêché par Abad, être silencieux et secret. Dans ce lieu en marge de la société, Koch et Monique se retrouvent exposés à des individus déclassé·e·s, étranges êtres de la pénombre : Charles, sa sœur Claire, leurs parents Rodolphe et Cécile, et un certain Fak. Cette pièce interroge les rapports sociaux, le désir (de reconnaissance) et le devenir - adulte. Ludovic Lagarde, rompu aux écritures contemporaines, propose d’explorer le continent koltésien d’une langue dense et raffinée qui sonne comme une tragédie de la mondialisation et du déracinement.

Le décor est planté, sombre, hostile: deux hangars , murs noirs et lisses justes ajourés de fenêtres aux bords carrés qui laissent filtrer un peu de lumière...Des hommes en seront les habitants, errant au gré de l'onde, de l'ombre, jouant au yoyo, ce jouet qui laisse de l'espace et du temps à celui qui en joue....Jungle où échoue Maurice, Laurent Poitrenaux, méconnaissable instrument déchu d'une société bourgeoise. Voeux d'en finir avec son sort pathétique, longue gabardine pour futur linceul.Monique le rejoint, elle aussi en perdition, victime d'un sentiment de peur extrême...Tailleur seyant moulant son corps, c'est Christèle Tual qui s'y colle et confirme la solitude et le désarroi social. Ici tout s'achète semble croire nos deux anti-héros: le danger à quel prix l'acheter pour en sortir: espèces, carte bleue, montre pour appâter un autre monde qui feinte d'ignorer ou mépriser ces façons de faire "illégales" et trompeuses. Ici toute une population se rejoint pour conjurer le sort d'une vie décousue et morbide, pourtant tissée de liens familiaux ou d'appartenance rassurante à une même classe sociale. L'atmosphère est "glauque" et prenante, tendue, soutenue par une scénographie d'enfermement , jusqu'à ce volet de garage en ferraille qui occulte espace et promesse de fuite, d'ouverture...Seule la mer en images grand écran sera espoir et perspective: mais autant de calme que de menaces. Sirènes de bateau, éclats de salves, tempête et pluie battante pour cette météo du désastre qui prend aux tripes et galvanise ce petit peuple errant, malmené, tanguant au gré des mots, des aveux. Le texte est d'emblée palpitant et édifiant, musical comme structuré d'alexandrins à pieds versatiles et incertains.Prose cependant qui tient et soutient des personnages fragiles mais humains, sordides ou solidaires, odieux, agaçants autant qu'attendrissants...Quai Ouest au départ d'un voyage impossible, escale d'un cabotage qui mène droit dans l'obstacle de l'incommunication...Si boire du café fait grandir et se prendre pour un adulte, alors tout est simple et facile. Et nos héros de méditer à bras le corps,celui de la "marge", des exclus de ce monde naissant de la finance et de ses abus sociaux économiques.Voyou ou trader, ils sont promus , promis à la fatalité d'un monde en marche qui les oublie et les laisse sur le pavé: sordide et implacable portrait d'une société décatie, déchéante. La pièce est forte, sensible, l'empathie avec cette population hybride ne cesse de grandir tout au long de son déroulement, captivant, obscur, saisissant...On s'y jette à l'eau avec ou sans espoir de repêchage !


Révélé par Patrice Chéreau dans les années 1980, mort du sida en 1989, considéré comme un auteur classique, Bernard-Marie Koltès laisse une œuvre publiée aux Éditions de Minuit, traduite et montée dans le monde entier. Ancien directeur de La Comédie de Reims (2009-2018), Ludovic Lagarde dirige aujourd’hui la compagnie Seconde nature. Il a présenté au TNS Providence et Le Colonel des Zouaves, textes d’Olivier Cadiot, incarnés par Laurent Poitrenaux, acteur associé au TNS.

Au TNS jusqu'au 16 Décembre

dimanche 5 décembre 2021

Sol' Air ! Vertige de la lumière en apesanteur: Strasbourg, capitale d'une énergie solaire, plexus offert à la vie !

 


🕯🌟La tradition veut qu'une bougie de l'Avent soit allumée les 4 dimanches précédant Noël. Venez-vous laisser porter par la magie de Noel et profiter de ce moment chaleureux en découvrant chaque samedi un nouveau spectacle qui fera la part belle à la lumière.
 

 
Sol'Air
・Compagnie MOTUS MODULE
・Compagnie LA SALAMANDRE
Animation artistique, lumineuse, incandescente et précieuse!
« Ces artistes du feu et de l’air se donnent rendez-vous entre ciel et terre pour un dialogue de danses rituelles et de ballets en apesanteur. Il est question de femmes et d’hommes, de leurs désirs, de leur contradiction, des détours où les élans se portent, de toutes les facettes de l’amour, de l’attraction à la transcendance ».
Magnifique prestation aérienne, circassienne dans l'éther d'une nuit de décembre peuplée d'étoiles traçant un chemin lumineux le long des berges de l'Ill à Strasbourg.Magie des transports aériens nimbés de reflets dans les eaux du barrage: on frémit, on tremble aussi face à ce risque, ce danger potentiel assumé par les artistes des deux compagnies en suspension, en équilibre-déséquilibre constant au dessus de nous.Une lune grandeur nature, axe de curiosité de deux vélo-cyclistes de la nuit.Un couple suspendu à un fil qui tangue et oscille dans la lumière éclatante.C'est beau et onirique, captivant, tenant en haleine et en apnée un public chaleureux, surpris et enchanté! Instants de rêverie en suspension dans nos imaginaires galvanisés par ce vent de folie et de poésie constantes. Loin du sol mais pas du coeur, au bord des étoiles, caressant l'air, fendant l'atmosphère de leurs gymnopédies gracieuses et instables.
La compagnie Motus-Module initiée par Brigitte Morel développe ici son travail de recherche sur tous les possibles de la danse en apesanteur, d’inventer de grand modules aériens, de créer un langage chorégraphique entre terre et ciel ou tout espace est sujet de dialogue.

La compagnie est composée d’artistes danseurs-chorégraphes ou techniciens rencontrés au fil des années et des aventures professionnelles, les genres artistiques et les modes d’expressions sont mis à profit par cette équipe de créateurs, dont l’adaptabilité aux différents événements, aux différents espaces urbains, aux différents sujets traités est leur atout, leur force.

Au départ au Square Louise Weiss et spectacle sur le barrage Vauban le dimanche 5 Décembre 18H