samedi 29 janvier 2022

"Arabia Félix: Yémen, un gout d'éternité" de Robert Cahen: Sanaa au plus haut des yeux !

 


ARABIA FELIX - Yémen, un goût d'éternité
Documentaire de Robert Cahen
 
« C’est une ville où le temps s’est arrêté. Elle a quelque chose de biblique… » Figure de l’art vidéo doublée d’un infatigable globe-trotter, Robert Cahen n’est pas du genre impressionnable, mais sa découverte de Sanaa, la capitale du Yémen, en 2005, a été un choc. Ses hautes maisons en briques crues qui s’élèvent sur plusieurs étages défient les siècles avec leurs façades décorées de frises géométriques aux portes et fenêtres surlignées en blanc de chaux.
Après "Sanaa, passages en noir" en 2007  vidéo qui  a été filmée à Sanaa, capitale du Yemen, où des femmes voilées de noir, passent dans une ruelle étroite, Robert Cahen revisite le Yémen. Le côté fugace mais répétitif de l’image retravaillée donnait à la vidéo un caractère hypnotique que renforçait le choix de la musique : un extrait de La Passion selon St Jean de Jean Sébastien Bach. Au-delà du travail sur
la notion de passage, l’artiste mettait déjà en scène un échange inattendu entre deux cultures.
 
Salle comble dans la galerie d'art Apollonia pour une avant première du film documentaire du vidéaste plasticien Robert Cahen, bien connu et plébiscité pour son travail autant musical que visuel du monde par le truchement des espaces visuels vidéographiques.
Ici, oh surprise, un travail sobre et mesuré des espaces pour un voyage dans le Yémen encore "en paix" des années de ses escapades toujours périlleuses dans des contrées "exotiques", étranges, étrangères.Des images d'un pays qu'il va apprivoiser, qui va l'accueillir au regard de la discrétion et de la franchise de son attitude, de sa posture respectueuse vis à vis de ses habitants. Des scènes de vie traditionnelle, de la campagne chatoyante où les personnes sillonnent le territoire pour leur survie ou leur simple déplacements vitaux. Des instants "volés" ou "dérobés" en toute sérénité de scènes de marché, d'artisans au travail, ces "irons man" des petites rues étroites, de ces dealeurs de Qat, les feuilles miraculeuses que l'on mâche sans fin...Des visages surtout ou de beaux arrêts sur images fondus révèlent la confiance et l'abandon que lui confient chacune des rencontres fugaces et volatiles des instants capturés, captivants de ce "documentaire" inédit.Des femmes qui ondulent, toutes en noir dans les ruelles, des enfants traqués par la caméra qui courent dans les ruelles, des hommes immortalisés par l'image animée de toujours très belles et bonnes intentions et attentions de Robert Cahen. Beaucoup de tendresse et de respect, d'empathie avec un peuple bigarré aux visages à la peau lisse et noire, aux regards patients et ouverts à la rencontre avec notre artiste humain, très humain dont la douce voix vient parfois commenter les images. La musique, de Wagner,les bruits et sons du quotidien en direct étoffent le tout avec bienveillance et justesse. Robert Cahen signe ici un document rare et précieux sur les années "ensoleillées" du Yémen où semble déjà planer la menace de guerre.On ne badine pas avec cette réalité là et la poésie et la beauté de ces images brutes, les scènes de vie quotidiennes-ces chevreaux portés par des hommes dont c'est  la tâche journalière-font un témoin incontournable de la vie au regard d'un artiste compatissant et communiant avec une population adoptée par la magie de son comportement aux antipodes d'un reportage à la" ushuaia" se déracinant les ailes !
 
Avant-première en présence de l'artiste le vendredi 28/01 à 19h à l'Espace Apollonia au 23 rue Boecklin 67000 Strasbourg

mardi 25 janvier 2022

"Solo Voice+": un CD de Françoise Kubler: et on démarre par une présentation publique en doubles croches pointées de toute beauté!


 
L’ensemble Accroche Note nous a invites à la sortie officielle de l'album de Françoise Kubler, "Solo Voice +".
Cette nouvelle parution discographique est entièrement consacrée à la voix et à la fondatrice de l’Ensemble Accroche Note. Françoise Kubler y met en lumière le répertoire contemporain et y présente la voix sous différentes approches, techniques et écritures stylistiques. Elle propose un voyage dédié à des compositeurs phare de son répertoire, amis de longues dates ainsi qu’à des jeunes compositeurs.
Oeuvres de : De Pablo, Donatoni, Dusapin, Rhim, Leroux, Mâche, Seo, Bedrossian
Deux extraits seront chantés par Françoise Kubler (soprano) en présence des compositeurs François-Bernard Mâche et Jiwon Seo.
 
C'est dans la salle Blanche de la Librairie Kléber que se retrouvent les protagonistes de ce projet, et avec pour privilège la présence de François Bernard Mâche de surcroit!
Un parcours entre la chanteuse et quelques compositeurs phares, compagnons de sa carrière vouée à la musique contemporaine depuis plus de 40 ans: sans faille ni "décrochage"avec passion, attention et mesure, raison et emportement, enthousiasme et hyper professionnalisme. La part de transmission de son répertoire comme action pédagogique, au coeur de son attitude, de sa posture face à l'histoire qui se tisse entre interprète et créateur-compositeur. C'est avec FB Mâche que l'aventure démarre avec ces difficultés "hors norme" des compositions qu'il va lui dédier d'emblée.Ce soir là, Françoise Kubler nous offrait sur le petit podium, des instants de grâce: ceux de deux des "Chants sacrés à capella de FB Mâche.Quasi liturgique et religieux dans des "langues rares" dites "mortes": hittite, étrusque, gaulois!
Leur organisation rythmique, l'imaginaire qui les animent et inspirent la cantatrice en font des pièces rares et passionnantes."Maponos" est une "musique de sorcières" qui rivalisent dans une situation théâtrale difficile à interpréter mais si fertile en émotions, virtuosité et talent d'artiste lyrique.C'est en compagnie d'un tambourin, sorte de lune, frappée avec singularité que Françoise Kubler touche, émeut et brandit cette lune magique et magnétique à bout de bras: solo chanté et dansé avec une intensité et puissance rare. De noir vêtue, platée sur ses talons hauts, la voilà qui nous embarque dans une "danse de sorcière" à la façon de la danse d'expression de Mary Wigman, à l'époque accompagnée elle aussi de percussions corporelles et sonores.....
 
danse de la sorcière de mary wigman

Tambourin à "intégrer dans le corps", corps-raccord, corps-accord avec l'instrument.
Puis en présence de la compositrice Jiwon Seo qui nous parle de ses créations, entre autre "Eon 3 m, oq", le dialogue s'éclaire: du "fil à retordre" pour les deux complices qui cherchent l’inouï dans la composition et interprétation électroacoustique.Cette appétence pour les sons réverbérés, trafiqués, façonnés qui dialoguent avec la voix, leur est commune et elles avancent de concert dans la recherche de musicalité incongrue, inédite. Chose assumée avec ce solo que Françoise Kubler nous offre en exclusivité de sons écrasés et d'inspires fondent un lexique riche et étendu. Voix et interférences simultanées sont extra-ordinaires et fusionnent dans l'espace sonore et dramaturgique. Ce poème dédié et écrit pour la chanteuse est une perle rare et émouvante où les sons inédits frappent et interrogent notre appréhension des sons encore et toujours en écho et ricochets constants.
 
Puis la discussion reprend animée par le critique musical Hervé Lévy, fin connaisseur et animateur débonnaire.
Encore beaucoup à dire sur toute l'attention et le respect que Françoise Kubler nourrit autour de Donatoni, aujourd'hui compositeur oublié mais dont l'écriture élégante, lyrique et italienne séduit : une écriture vocale au souffle prépondérant, à la métrique redoutable, mécanique à la Bach. Autrefois adulé puis disparu du paysage sonore, ce compositeur retrouve ici une place légitime dans le parcours personnel de la chanteuse qui lui rend ainsi Hommage!"Incontournable" pour le répertoire de la Musique Contemporaine. Justice rendue!
On repart sur des propos de la musique de Pascal Dusapin, complice de l'auteur Olivier Cadiot, autour de l'oeuvre "Il-lL-Ko".Un parlé-chanté qui surfe entre texte et musique, du chant lyrique virtuose , sorte de sprechgesang revisité. 
Et l'on se quitte un double CD en mains, plein de curiosité aiguisée par cette rencontre chaleureuse et édifiante: une artiste hors norme pour un répertoire en conformité avec sa personnalité hors du commun et son immense talent partagé au regard de la musique d'aujourd'hui: dont on n'oublie pas les racines, les rhizomes et autres liens magnétiques 
Un CD qui fera date à coup sûr !
 
le mardi 25 Janvier librairie Kléber
 
Puis la discussion reprend animée par le critique musical Hervé Lévy, fin connaisseur et animateur débonnaire.
 

lundi 24 janvier 2022

"Graces": Sylvia Gribaudi en "pleines formes" !

 



Silvia Gribaudi
Silvia Gribaudi Performing Arts Italie 4 interprètes création 2019

Graces

Elle a la mine espiègle et un corps pulpeux. Elle aime en jouer avec facétie pour défier les tabous, déjouer les codes et les clichés. Cette tournure malicieuse est à l’œuvre dans Graces. Un spectacle allègrement nourri de « positive attitude » signé Silvia Gribaudi.
Dans Graces, Silvia Gribaudi est accompagnée de trois complices masculins. Ensemble, ils déclinent avec humour une autre conception de la beauté à partir des postures corporelles, des danses, actions et situations iconoclastes qu’ils explorent. Leurs sources d’inspiration portent aussi bien sur le ballet que la sculpture antique, le cirque ou la revue : tous arborent un idéal du corps que la performeuse italienne convoque pour mieux s’en affranchir. Son apparente naïveté masque une facétieuse intelligence. Et cette pièce qui incline à la rondeur des formes, célèbre, non sans aplomb, la sensualité de la chair en miroir aux canons de l’époque néoclassique. Comme en témoigne l’une des sculptures d’Antonio Canova, Les trois Grâces (ou Charités) qui ont inspiré le titre du spectacle. Le jeu des références et des décalages se poursuit avec jubilation jusqu’au climax. Au cours d’un élan de générosité sans bornes, le groupe entier termine enfin sa course sur un plateau trempé d’eau, enchaînant glissades, séquences de voguing, Haka, Kung fu ou poses de Power Rangers. Cette réjouissante performance qui marie pertinence et impertinence exulte enfin dans une explosion de bonheur. 

A Pole Sud le  21 er 22 Janvier dans le cadre" l'année commence avec elles"